4 minutes chrono (pour faire sa déclaration d`amour)

Transcription

4 minutes chrono (pour faire sa déclaration d`amour)
4 minutes chrono (pour faire sa déclaration d’amour)
Un scénario de Lucas Fillon, 23 ans, Epinay-sur-Seine-France
Note : Ce court-métrage est divisé en quatre parties, chacune d’une durée d’une minute. À l’écran, il
sera indiqué le temps : « 4 minutes », « 3 minutes », « 2 minutes », puis, pour la dernière minute, le
spectateur verra les secondes défiler à l’écran, jusqu’à ce qu’apparaisse « 0 secondes ».
SEQUENCE 1- INTERIEUR-JOUR-SUR UN QUAI DE GARE
ANTONIN, 24 ans, de taille moyenne, brun, les cheveux courts, plutôt mince, tient un sac de voyage
dans une main, et un sandwich dans l’autre. Il est accompagné d’EMMA, 23 ans, de taille moyenne,
les cheveux longs, très séduisante. Ils marchent tous les deux côte à côte. Emma cherche la voiture du
train où elle doit s’installer pour voyager. Antonin, dans ses pensées, la suit. Par l’intermédiaire d’une
voix-off, on entend les pensées d’Antonin.
ANTONIN
(voix-off) Faut que je lui dise que je l’aime. Faut que je lui dise que je veux
pas qu’elle parte… C’est maintenant ou jamais… (Antonin jette un regard à
la pendule de la gare) 15h34… Son train part à 15h38… Allez Antonin, sois
courageux un peu dans ta vie, dis-lui que tu l’aimes… T’as quatre minutes…
Antonin est interrompu dans ses pensées par Emma. Apparaît à l’écran le carton : « 4 minutes »
EMMA
Voiture 8, c’est ici… Tu peux me donner mon sac ? (Antonin lui donne son
sac) Merci… (Un temps, ils se regardent) Bon, ben, merci pour tout… J’ai
passé un séjour très sympa avec toi… C’était cool…
ANTONIN
(En rangeant son sandwich dans sa poche) Tu reviens quand ?
EMMA
Je reviens pas, Antonin, tu le sais très bien… On en a assez parlé, non ?
ANTONIN
Oui… Mais, je… (Un léger temps) Ecoute, Emma, je…
EMMA
(Pleine d’espoir) Oui ?
Antonin est interrompu par une vieille dame. Cette dernière s’adresse à Emma, en parlant très fort.
LA VIEILLE DAME
(À Emma) EXCUSEZ-MOI, JE CHERCHE LA VOITURE 8… J’AI
PERDU MES LUNETTES, ET…
EMMA
(En montrant la voiture 8) C’est là…
LA VIEILLE DAME
QUOI ? VOUS POUVEZ ARTICULER ?! JE COMPRENDS RIEN !
ANTONIN
(Interrompant Emma, qui s’apprêtait à répéter. Il a un ton agressif) ON
VOUS A DIT QUE C’ETAIT LÀ! ALLEZ, DÉGAGEZ !
Antonin force la vieille dame à entrer dans la voiture et lui balance ses bagages. Cette dernière
rouspète, tandis qu’Emma observe Dimitri avec surprise.
EMMA
Eh ben dis donc !
ANTONIN
Désolé, mais c’est très important ce que j’ai à te dire, et j’ai pas beaucoup de
temps… Voilà, en fait, je…
Soudain, Antonin pousse un cri de douleur.
EMMA
Qu’est-ce qu’il y a ?
On découvre alors qu’un chien, un yorkshire, est en train de mordre le pied d’Antonin. De plus, une
femme d’une soixantaine d’années, les cheveux bleus, très exubérante, à qui visiblement appartient le
chien, appelle Antonin, et court vers lui. Elle a un sac à la main. Antonin se retourne et découvre,
désespéré, qui est cette femme. Le chien a cessé de mordre Antonin.
ANTONIN
Maman…
Apparaît à l’écran le carton : « 3 minutes »
La mère d’Antonin, BERNADETTE, a rejoint Antonin et Emma.
BERNADETTE
(Au chien) Raymond ! Raymond ! Lâche Antonin immédiatement ! (À
Emma, en lui faisant la bise) Emma, ravie de te voir, c’est si dommage que
tu partes…
EMMA
Eh oui, mais personne ne me retient…
ANTONIN
(Antonin regarde Emma. Léger temps. Puis il s’adresse à sa mère, énervé)
Maman, je peux savoir ce que tu fais là ?!
BERNADETTE
(En sortant le sandwich) T’avais oublié ton deuxième sandwich !
ANTONIN
(Agressif) Mais, Maman, tu crois vraiment que c’était urgent ?! En plus, je
t’avais dit que c’était pas la peine de faire quinze mille sandwichs ! T’es
vraiment soûlante !
BERNADETTE
(À Emma) Non mais t’as vu comment il parle à sa mère ? Tu parles comme
ça à ta mère, toi ? (Au bord des larmes) De toute façon, moi, y a que
Raymond qui me respecte !
Alors que Bernadette se lance dans une tirade sur la grande bonté des chiens, le spectateur entend à
nouveau les pensées d’Antonin.
ANTONIN
(En voix-off) Bon, il me reste 2 minutes et 18 secondes pour dire à Emma
que je l’aime… Il faut absolument que j’éloigne ma mère… (Antonin jette
un coup d’œil au chien Raymond ; fin voix-off) Raymond, viens ici !
Le chien se dirige vers Antonin, qui lui montre alors un morceau de son sandwich, et qu’il lui balance
très loin. Le chien va chercher le morceau de pain et se perd dans la foule. Antonin interrompt alors sa
mère, toujours en train de déclamer sa tirade, et qui ne s’est aperçu de rien.
ANTONIN
Maman, Raymond a disparu !
BERNADETTE
Comment ça ? Mais il est où ?! Raymond ! Raymond !
La mère, paniquée, s’éloigne. Antonin et Emma se retrouvent enfin tous les deux.
ANTONIN
J’ai plus beaucoup de temps pour te dire ce que j’ai à te dire… Emma, je…
Je t’ai…
Soudain, un homme baraqué, d’une quarantaine d’années, tape sur l’épaule d’Antonin. Antonin se
retourne, et reçoit un coup de poing dans la figure de la part de cet homme. Apparaît à l’écran le
carton : « 2 minutes »
L’HOMME BARAQUÉ
Ça, c’est pour avoir parlé à ma mère comme tu lui as parlé ! Et la prochaine
fois, n’oublie pas de respecter les vieilles dames !
Antonin est à terre. L’homme baraqué s’en va tranquillement et rejoint sa mère, qui n’est autre que la
vieille dame du début, à laquelle Antonin avait mal parlé. De loin, Antonin aperçoit la vieille dame qui
se moque de lui. Face à la carrure imposante de l’homme baraqué, personne n’a osé réagir. Une fois
que ce dernier est parti, Emma se précipite vers Antonin, et d’autres voyageurs se rassemblent autour
d’eux.
EMMA
Antonin, ça va ? Ça va ? Parle-moi !
Antonin tombe dans les pommes. Bernadette, son yorkshire sous le bras, est de retour, et pousse le
groupe de personnes qui entoure Antonin et Emma.
BERNADETTE
Poussez-vous ! Poussez-vous ! C’est mon fils ! Poussez-vous, je vous dis !
(En se précipitant sur Antonin) Antonin, ça va ? Ça va ?
UN AGENT SNCF
(Qui arrive en courant) Qu’est-ce qu’il se passe ici ? Bon, s’il vous plaît,
Messieurs, dames, regagnez le train ! Le départ est imminent ! Vous
inquiétez pas, on va s’occuper du monsieur…
Les voyageurs regagnent le train.
EMMA
(À la mère d’Antonin) Faut que j’y aille, Bernadette, sinon je vais rater le
train…
BERNADETTE
Oui, oui, vas-y, Emma, je comprends…
EMMA
(Elle se dirige vers sa voiture, puis se retourne vers Bernadette) Vous
m’appellerez pour me dire comment il va ! Et puis, quand il se réveillera,
dites-lui que… (Un léger temps) Oh, et puis non, dites-lui rien… Laissez
tomber… Au revoir !
Emma monte dans la voiture de son train. Apparaît à l’écran le carton : « 1 minute ». Dans cette
dernière partie, nous verrons défiler les secondes à l’écran.
BERNADETTE
(Elle donne des claques à Antonin pour qu’il se réveille) Antonin ! Antonin !
Réveille-toi !
Antonin se réveille en sursaut, en poussant un cri de douleur. On découvre alors que c’est le yorkshire
qui l’a réveillé en le mordant. Antonin jette un coup d’œil à la pendule de la gare : dans quinze
secondes, le train d’Emma part. Antonin se lève précipitamment et décide alors de monter dans la
voiture du train d’Emma. Mais il est trop tard : le signal de fermeture des portes retentit. Les portes se
ferment.
ANTONIN
(En hurlant, et en tapant sur les portes fermées) Non, Emma, ne pars pas ! Je
t’aime !
Le train part. Le carton « 0 secondes » apparaît à l’écran. Antonin est dépité. Sa mère et son yorkshire
le rejoignent. Antonin s’effondre dans les bras de sa mère. Puis, silencieux, ils s’éloignent tous les
deux du quai pour regagner la sortie de la gare. Quand, soudain, on entend un signal d’alarme, suivi
d’un bruit de freinage. Antonin et sa mère se retournent. Le train n’est pas parti. Il s’est arrêté.
Apparaît à l’écran le carton : « Temps additionnel : 3 minutes »
Les portes d’une des voitures du train s’ouvrent. Sortent de cette voiture l’homme baraqué qui avait
précédemment donné un coup de poing à Antonin, et un autre homme d’une quarantaine d’années, LE
VOYAGEUR 1. Ils ont tous les deux le visage en sang. Ils se sont visiblement battus, et continuent de
se battre sur le quai.
L’HOMME BARAQUÉ
Non mais tu parles pas comme ça à ma mère !
LE VOYAGEUR 1
Je lui parle comme je veux à ta mère !
On aperçoit la mère de l’homme baraqué, toujours la vieille dame du début, dans le train, riant de la
situation. Tous les voyageurs sont collés aux vitres pour regarder les deux hommes se battre. Certains
sont descendus sur le quai pour essayer de les séparer, d’autres manifestent leur mécontentement.
UN VOYAGEUR
Non mais il fallait pas tirer le signal d’alarme pour ces deux abrutis qui se
battent ! On va être en retard !
Antonin, lui, a son visage qui s’éclaire.
BERNADETTE
(À Antonin) Mon chéri, si tu tiens à ta Emma, c’est maintenant ou jamais !
Antonin se met alors à courir vers la voiture 8. Il essaye d’ouvrir les portes, mais n’y arrive pas. Elles
bloquent.
ANTONIN
(En essayant de forcer sur les portes) Mais allez, ouvrez-vous ! Allez ! (En
hurlant) Emma ! Emma ! Je t’aime !
Emma, qui écoute de la musique avec son casque sur les oreilles, n’entend pas Antonin.
BERNADETTE
(Avec son yorkshire sous le bras) Antonin ! (Antonin se retourne) T’as pas
remarqué qu’Emma a une place contre la vitre, et donc qu’il suffit juste que
TU TAPES À SA VITRE ! LÀ !
Antonin se rend effectivement compte qu’Emma a une place contre la vitre. Il se précipite pour taper à
la vitre. Emma retire son casque des oreilles. Elle comprend qu’Antonin lui dit qu’il l’aime, qu’il ne
veut pas qu’elle parte. Son visage s’illumine. Elle se précipite pour descendre du train. À ce momentlà, le chauffeur annonce que le train va repartir.
LE CHAUFFEUR
Mesdames et messieurs, j’ai le plaisir de vous annoncer que les deux abrutis
qui se sont battus ont été sortis du train. Nous allons donc pouvoir repartir.
Attention à la fermeture des portes. (Une pause, puis il reprend la parole) Et
pas la peine de dire que la SNCF est toujours en retard, là c’est pas de notre
faute, hein !
Le signal d’alarme retentit. Antonin espère qu’Emma va descendre à temps du train… Finalement,
Emma parvient à descendre. Le train s’en va.
EMMA
Je crois que tu voulais me dire quelque chose, non ?
ANTONIN
Je t’aime !
Emma et Antonin s’embrassent fougueusement. Alors que la caméra s’éloigne, on entend Antonin en
voix-off.
ANTONIN
(voix-off) Depuis ce jour, j’ai compris qu’il ne fallait jamais attendre pour
dire aux gens qu’on aime qu’on les aime… Car dans la vie, on ne bénéficie
pas toujours de temps additionnel…
FIN