Je l`aimais à la folie

Transcription

Je l`aimais à la folie
Voici mon témoignage question de casser la glace sur mon parcours de vie et mon
diagnostic schizo-affectif. Dans cet extrait de vie, je décrirai mes délires sur un ton
poétique, selon ma couleur. Sur ce, je vous souhaite une bonne lecture.
Je l’aimais
à la folie
Par Geneviève Dufour
« I think that the worst part of it all
wasn't losing him. It was losing me. Je
pense que la pire partie de toute cette
histoire ce n’est pas de l’avoir perdu, mais
c’est de m’avoir perdue, moi. » Taylor
Swift.
Quoi de plus fou que de tomber
amoureuse... et pourtant, ma folie
d’amour s’exprime encore aujourd’hui.
Cependant, il y a eu un temps, en 2009,
où ma perception sur l’amour était
biaisée par une véritable perte de la
réalité. Mon délire amoureux n’était pas
bénin, mais il est venu à moi comme un
venin qui empoisonna ma vie.
Heureusement, dans mon cas, un
antipsychotique a pu contrer l’effet
toxique d’une illusion amoureuse, plutôt
aventureuse, qui m’avait menée
jusqu’en Italie, là où des voix se firent
entendent. Dans mon aventure
épisodique, je me prétendais être une
princesse et bien sûr j’étais latente de
voir subvenir la réplique de mon prince,
qui ne s’est d’ailleurs jamais présenté.
Je tiens quand même à dire qu’au lieu
de cela, trois ans plus tard, un petit mais
brave intellectuel pourtant social a pris
ma main pour marcher avec lui sur un
chemin beaucoup moins dangereux que
celui qui arpente les routes créées par
mon imagination. La tête dans les
nuages je suis descendue dans les bras
de la réalité pour assumer un rôle dont
j’ignorai encore l’utilité : c'est-à-dire le
jeu d’être le personnage que je me dois
d’être : moi, Geneviève.
Et même si je joue sur des cordes
sensibles c’est cordes elles sont
miennes. Ma mélodie, bien qu’elle soit
empreinte d’une faible estime de soi, est
parfois fragile, souriante, courageuse,
mais surtout enjouée de voir la vie
comme une grâce d’être vécue.
Je n’attends pas d’assister à mon
dernier couché de soleil, mais j’avance
pas à pas vers ma réalisation. J’ai été
fortement échaudée suite à la violence
de mes hallucinations. J’ai été serrée la
main de prêtres, j’ai eu les sacrements
des malades, j’ai reçue des prières de
protection pour exorciser l’être invisible
qui me voulait du mal. Il est certain que
je me suis battue avec le vide, là où il
n’y a que le vent de la folie qui m’a
aspiré dans sa tornade de pensées
rapide comme l’éclair. J’ai vécu des
tempêtes déchirant le voile du bon sens.
J’ai commencé à croire que j’avais été
l’instrument de ma perte (j’ai une
tendance à noircir au crayon gras mon
vécu). À ce jour, je préfère manier l’art
des lettres et du crayon couleur (c’est
plus concret) pour y dessiner une
nouvelle image de moi. Le tout sur une
page que je tourne à chaque fois que je
finis par fermer les yeux pour la nuit. J’ai
feuilleté des livres sur l’autoguérison.
Après quoi, je me percevais encore plus
négativement, car on m’y accusait d’être
responsable des échecs qui hantent
mon passé. Se ressaisir d’une telle
chute prend beaucoup de courage.
Arrêter le marteau qui me frappe sur la
tête par ses critiques en permanence
est un défi persistant. Mes seules
victoires étaient de niveaux artistiques,
et encore, elles faisaient partie du temps
passé. Je trouvais mon identité que
lorsqu’on me félicitait. Mes défauts
aujourd’hui sont surtout le fruit de ma
paralysie dûe à la peur. Alors, je veux
sans honte, lever les bras vers le
nouveau soleil du jour et rendre grâce à
mes petits pas qui m’ont menée jusqu’à
lui.
Je ne prétends pas avoir une vie plus
riche ou plus belle que la moyenne. Je
dis seulement que j’apprends à jongler
avec ma maladie mentale. Cela fait
peut-être une belle scène de cirque,
mais l’important dans tout cet écrit, c’est
de retenir que l’art de manier les mots et
notre perception du réel crée, en
quelque sorte, notre quotidien. On vit
tous des problèmes, mais la réaction qui
s’enchaîne n’est pas la même d’une
personne à l’autre. Il n’y a pas de
meilleur temps pour agir, c’est juste tout
le temps le bon moment. À chaque pas
que gravit l’Homme, il se doit de relever
l’autre pied. Et ainsi de suite, il
recommence inlassablement. On ne
s’en sort pas : la qualité des choix de
nos actions versus la quantité domine.
Si je marche en tous sens dans la
montagne, je peux me perdre. Si je
choisis de suivre un objectif à la fois,
alors je prendrais le chemin balisé pour
me rendre jusqu’au sommet de mes
talents. Je pourrais alors y voir une belle
vue d’ensemble sur qui je suis. Et je
pourrais dire enfin que je détiens la clé
des cieux, car j’aurai aimé sur la route
en pensant :
« Que je m’aime à la folie! »

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