Le karst de la région de Grandpré

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Le karst de la région de Grandpré
Année 2007-2008
Rapport de stage Master E.A
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ère
Spécialité G.E.S.M.A.R.E – 1 année
Le karst de la région de Grandpré (Ardennes)
Etude des phénomènes karstiques développés au contact
Jurassique-Crétacé
Guy Charlotte
14 avril 2008 – 11 juin 2008
Soutenance le lundi 16 juin 2008 à 12h00
M. Benoît Losson, Tuteur pédagogique
M. Emmanuel Gille, Maître de stage
M. Dominique Harmand, Membre du Jury
M. Alain Izart, Responsable de Filière
Sommaire
Avant-propos………………………………………………………………………..………. 3
Cadre de la recherche……………………………………………………………..………… 4
Introduction………………………………………………………………………..…………5
I. Présentation du site d’étude …………………………………………..…………………...6
1. Une succession de plateaux…………………………………………..…………7
2. Une alternance couche dure - couche tendre ………………………………….7
a. Une série stratigraphique interrompue……………………….…………7
b. Des formations géologiques variées …………………………..………10
3. Une couverture crétacée soumise à l’érosion...………………………….…….11
a. La genèse de la cuesta de l’Albien….……………………………..……11
b. La surface infra-crétacée………………………………………………..…11
c. La capture de l’Aire par l’Aisne……………………………………..…….12
4. Un climat propice à la karstification…………….……………….…………..…12
II. Un karst de contact lithostratigraphique………………………………………………13
1. Qu’est ce que le karst ? ......................................................................................13
a. Définition du karst……………………………………………………......13
b. Les conditions de formation du karst……………………………………....13
2. Les spécificités du karst de couverture……………………………………….. . 14
a. Les dynamiques d’infiltration……………………………………….......14
b. L’épaisseur de la couverture, un facteur déterminant………………….15
3. L’exokarst………………………………………………………………………...16
a. Les dépressions fermées, première expression du karst de surfac…..…16
Les dolines…………………………………………………………...16
Typologie des dolines recensées dans le karst de Grandpré………...17
Les mardelles……………………………………………………….....19
b. Les émérgences et les pertes ………………………………………. …..19
c. Les gouffres………………………………………………………….....19
4. Méthode et moyens mis en oeuvre pour la cartographie de l’exokarst………..20
III. Spatialisation des phénomènes karstiques………………………………………….....21
1. Sommerance : un alignement de formes dans le vallon ……………………...21
2. Le secteur de la rive concave du méandre……………..………………….……...23
3. Le vallon de Talma……………………………………………………………....23
4. Le Bois de « Queue de Loup » : deux vallons aveugles……………….……... 24
5. Le secteur du karst d’interfluve entre Champigneulle et Imécourt…………...34
IV. Un fonctionnement karstique de contact lithostratigraphique ……………………….37
1. Le liseré karstique de l’interfluve………………………………………….…..37
2. Le recul des pertes dans le bois de « Queue de Loup » ………………………40
Conclusion……………………………………………………………………………………42
Bibliographie …………………………………………………………………………….......43
Liste des figures Liste des photographies…………………………………………………… 44
Annexes………………………………………………………………………………………45
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Je tiens, en premier lieu, à remercier vivement Monsieur Benoît LOSSON, Maître de
Conférence à l’université Paul Verlaine de Metz, pour m’avoir toujours soutenu et fait
confiance lors de ce travail de recherche. Mais je souhaite surtout le remercier du temps qu’il
m’a accordé pour m’accompagner sur le terrain ; il m’a fait partager cette fascinante émotion
qui nous atteint lorsque l’on découvre un phénomène karstique.
Je remercie Monsieur Emmanuel GILLE, Maître de Conférence à l’université Paul
Verlaine de Metz, pour sa présence lors de ma soutenance. Merci pour son investissement et
sa détermination pour la survie des T.E.R., sans quoi je n’aurais pas pu mener à bien ce
travail.
Je remercie Monsieur Dominique HARMAND, Professeur à l’université Nancy II, non
seulement pour avoir accepter d’être jury à ma soutenance, mais aussi pour son enseignement
qui m’a donné envie d’effectuer cette recherche.
Je remercie Monsieur Luc WILLEMS, Enseignant et Karstologue belge, de l’intérêt
qu’il a porté à mes travaux, merci pour ses précieux conseils et sa gentillesse.
Je remercie Monsieur Didier FRANCOIS, Ingénieur en Techniques d’Etude des
Milieux Naturels, pour m’avoir fournis avec obligeance des données climatiques.
Merci au Centre d’Etudes Géographiques de l’Université de Metz pour son accueil.
Je remercie enfin toutes les personnes qui m’ont aidés à réaliser le travail de terrain,
Mathieu D’HAENE, Vincent FISTER, Carole PELLIS, et ma mère, Marie GUY, qui est
toujours prête à me suivre.
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Cadre de la recherche
Le Centre d’Etudes Géographiques de l’Université de Metz m’a (C.E.G.U.M.)
accueillie du 15 avril au 11 juin 2008 afin que je puisse effectuer dans les meilleures
conditions ce travail de recherche. A noter que le sujet de ce dernier a été proposé par
Monsieur Benoît Losson, nous l’avons choisit en accord.
Le C.E.G.U.M. a mis à ma disposition un bureau et m’a permis de consulter nombre
de documents. Je l’en remercie encore vivement.
Le C.E.G.U.M. est une équipe d’accueil qui rassemble professeurs des universités,
maîtres de conférence, ingénieurs d’étude et doctorants dans un but commun ; celui de mener
des recherches dans le domaine de la Géographie. Les travaux d’études réalisés dans le cadre
de cette structure sont particulièrement axés sur les enjeux d’aménagement des territoires.
Le C.E.G.U.M. est divisé en trois axes :
L’axe Géopolitique urbaine, régionale et frontalière (GEOPOL) : C’est un groupe
d’étude qui analyse les constructions géopolitiques en abordant les thématiques de la
défense, des risques, des frontières…
L’axe Limites, analyse spatiale et aménagement (LASA) : Il concerne des études ayant
trait à l’analyse spatiale des territoires de contact, de marges.
L’axe Eaux et Milieux : Les travaux menés dans ce cadre, tel ce mémoire, relèvent de
l’hydrologie, de l’hydrogéomorphologie et de la modélisation. L’eau est étudiée en
tant que ressource (développement de modèles conceptuels, traitement statistique,
spatialisation et cartographie des variables hydroclimatiques…)
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Introduction
Le secteur de Grandpré, offre un karst de contact lithostratigraphique se développant à
l’interface Crétacé-Jurassique. Ce karst présente ainsi des caractéristiques communes au type
de karsts couverts. Ces derniers, comme en témoigne Nicod (1994) dans son article intitulé
« Les Plateaux karstiques sous couvertures en France », sont les plus répandus à l’échelle du
territoire français comme à celle de la Lorraine.
Cependant, leurs morphologies souvent modestes et leur étude complexe, ont poussés
les géomorphologues à s’intéresser davantage aux karsts nus.
Ces vingt dernières années, notamment suite aux travaux de Gamez (1992) sur le
Bassin du Loison en Woëvre septentrionale, les karsts couverts se sont progressivement
imposés dans la littérature, objets de nombreuses thèses, telle celle de Pellegrin (1997).
Stéphane Jaillet, quant à lui, a réalisé en 2000 un remarquable mémoire sur le karst couvert du
Barrois, une référence désormais incontournable sur le sujet.
L’étude du karst du secteur de Grandpré fait donc état d’une thématique déjà bien
connue en s’inscrivant dans le prolongement de ces récents travaux, néanmoins l’originalité
de son site au pied de la Côte d’Argonne lui donne un attrait tout particulier. Airy Durup de
Baleine (1989) l’avait déjà compris en réalisant son mémoire « Le karst de la forêt de Hesse,
étude géomorphologique d’un karst vert en Lorraine occidentale ».
Ainsi, le karst de Grandpré se localise au sein du relief de cuesta de l’est du bassin de
Paris, entre Champagne crayeuse et plateau du Barrois. Il s’étend à la base de l’imposant
massif de gaize et d’argile supporté par les assises calcaires du Kimméridgien. Dans un
secteur marqué par les réorganisations hydrographiques, ce karst se développe sur le site de la
capture de l’Aire par l’Aisne, au niveau de la percée cataclinale.
Sans établir de relation entre la capture et les systèmes karstiques en présence, nous
nous attacherons dans ce mémoire à étudier les phénomènes karstiques de surface, autrement
dit les modelés karstiques de l’exokarst, à proximité de Grandpré.
Ces travaux consistent alors en une première approche du site d’étude basée
exclusivement sur des démarches associant observations et relevés de terrain, cartographie et
bibliographie. La cartographie est ici primordiale : l’étude de la localisation des formes, en
corrélation avec celle de la géologie et de la lithologie locale, nous permettra de déterminer
les facteurs intervenant dans le fonctionnement du système karstique.
Après avoir pris connaissance du contexte géographique et géologique de la région de
Grandpré, et évoqué les spécificités du karst de contact lithostratigraphique, il sera légitime de
définir nos méthodes d’actions afin de cerner au mieux nos résultats, notamment nos
cartographies, dans le but de répondre à notre problématique.
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I.
Présentation du site d’étude
La région de Grandpré est située dans le quart nord-est de la France, en marge du
département des Ardennes, à proximité de la Meuse (figure 1). Partie intégrante du bassin de
Paris, cette région au sud du Massif ardennais, est rythmée par une alternance de dépressions
et de plateaux propre au relief de côte, décrivant de vastes arcs de cercles sédimentaires. Le
secteur de Grandpré se localise au sein de la côte d’Argonne.
Le massif d’Argonne est globalement peu karstifié. A proximité de Grandpré, seules
deux zones distinctes sont touchées par le karst.
La première, la boutonnière de Quatre-Champs au nord-ouest (figure 1) a fait l’objet
de plusieurs prospections spéléologiques. L’inventaire spéléologique du département des
Ardennes (Tisserand 1977) recense de nombreuses pertes pérennes et temporaires ainsi que
des émergences. Les spéléologues ont également découvert un ruisseau souterrain, le
Ruisseau de la Noue le Meunier, une étroite galerie de 250 mètres de long.
La seconde est celle sur laquelle porte notre étude. Il s’agit des systèmes karstiques de
Grandpré. Ces systèmes sont identiques à ceux de Quatre-Champs mais sans réseau hypogé
connu à ce jour. Le secteur sur lequel va porter nos recherches est représenté par le cadre de la
figure 1. Cette zone a été délimitée arbitrairement en fonction de la position des différents
environnements karstiques autour de Grandpré. Il ne faut donc pas cherché ici de limites
géographiques encadrant notre site d’étude d’une superficie d’une trentaine de km².
Figure 1 : Carte de localisation de Grandpré
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1. Une succession de plateaux
Le secteur de Grandpré est caractérisé par une succession de deux plateaux. Le
premier, le plus à l’est matérialise un relief collinaire correspondant à un plateau d’orientation
Nord Ouest - Sud Est très disséqué avec un réseau hydrographique dense. Cette unité, d’une
altitude moyenne de 200 mètres, est désignée sous le nom de Collines d’Argonne. Ces
collines sont des espaces dédiés aux pâtures ou consacrés à la culture du colza par exemple.
Plus à l’ouest, se dresse le second plateau, plus sec, d’altitude équivalente. Sa surface
tabulaire présente l’inclinaison générale des plateaux du bassin de Paris, soit une pente
modérée vers l’ouest. Il s’agit ici du plateau de l’Argonne reconnaissable à sa couverture
boisée épaisse, quelquefois mitées par les défrichements agricoles qui accueillent fermes et
petits villages.
Une étroite dépression s’étendant selon une direction Nord Sud et d’altitude moyenne
de 160 mètres, sépare ces deux unités géographiques. Cette petite dépression présente tout de
même des méandres de vallée de large amplitude. Son tracé semblant aujourd’hui délaissé
par les écoulements, correspond à l'ancien cours de l’Aire.
Le talus qui surplombe cette zone basse, d’un commandement compris entre 40 et 60
mètres, exposé vers l’est, dessine de nombreux festons mettant en évidence de beaux
promontoires. Les profils des versants de ce talus sont majoritairement convexo-concaves.
L’Aire s’écoule actuellement selon une direction est-ouest à proximité de Grandpré.
Elle incise le plateau occidental. L’Aisne, à l’ouest de celui-ci, décrit de nombreux méandres
divagants au sein d’une étroite vallée rectiligne de direction Sud Sud Est – Nord Nord Ouest,
à 100 mètres d’altitude.
2. Une alternance couche dure - couche tendre
a. Une série stratigraphique interrompue
La carte géologique met en évidence différents types de dépôts dans notre secteur
d’étude. Les dépôts d’origine sédimentaires sont majoritaires. On les distingue des dépôts
d’origine fluviatile, à savoir les alluvions modernes et anciennes du Quaternaire. Des limons
loessiques recouvrent les deux plateaux.
Dans notre secteur d’étude, la série stratigraphique s’étend du Séquanien (J7) au
Cénomanien (C2). Ces formations sédimentaires affleurantes appartiennent donc à l’ère
Secondaire. Elles couvrent plus particulièrement une période s’étalant du Jurassique supérieur
au Crétacé supérieur (160 Ma à 65 Ma).
On distingue une importante lacune stratigraphique associée à la discordance de
l’Albien. Les Sables verts reposent, dans le secteur de Grandpré, en discordance angulaire sur
les calcaires du Jurassique. Le revers de plateau, formé par les calcaires Kimméridgien, où se
matérialise la discordance correspond à la surface d’érosion infra-crétacé.
La coupe géologique A-B (figure 2) met en évidence le binôme gaize/argiles et sables
au sein d’une structure monoclinale sans discordance formant ainsi la cuesta d’Argonne.
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Figure 2 : Coupe géologique A-B (se référer à la carte morpho-structurale pour identifier son tracé)
La carte morpho-structurale, à la page suivante, nous permet de mieux apprécier la
localisation de cette côte ainsi que la lithologie du secteur de Grandpré (figure 3).
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Figure 3 : carte morpho-structurale du secteur de Grandpré
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Du point de vue de la tectonique, les couches sont affectées d’un pendage monoclinal
qui oscille entre 1° et 1,5° (Durup de Baleine, 1989), orienté vers le centre du bassin de Paris.
A grande échelle, la carte géologique ne fait pas apparaître de failles cependant des accidents
tectoniques mineurs affectent la région et participent à la karstification.
b. Des formations géologiques variées
Toutes les informations ici retranscrites proviennent de la notice de la carte géologique
de Monthois (1998) et de Mégnien (1980). Les formations carbonatées jurassiques du secteur
de Grandpré sont les suivantes :
Les calcaires du Kimméridgien terminal (J8) sont soumis à la karstification. Ils
reposent sur les calcaires en plaque du Séquanien, sous-faciès de l’Oxfordien. Leur épaisseur
avoisine les 40 mètres.
Dans ces calcaires, deux faciès principaux peuvent être distingués : l’un est formé de
calcaires lithographiques beiges à gris clair, séparés par des bancs marneux de 20 à 80
centimètres. L’autre est constitué de calcaires lithographique couleur crème à taches ocres. La
partie terminale peut prendre un aspect crayeux. Les bancs terminaux correspondent à une
paléotopographie perforée par des lithophages et présentent des taches ferrugineuses.
Le « log » stratigraphique (figure 4) représente les différentes formations crétacées.
Figure 4 : Coupe synthétique de la Gaize d’Argonne (Fauvel 1985)
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Les Sables verts de l’Albien (C1a) ont une épaisseur extrêmement variable, comprise
entre 6 et 20 mètres. Cette formation est constituée de sables glauconnieux et argileux vertfoncé. A la base de ces sables, il est possible d’observer la présence de galets de quartz très
usés translucides connus sous le nom de « dragées de l’albien ». Les sables contiennent des
« coquins » qui sont des nodules de sable glauconieux cimentés par du phosphate de calcium.
Ces nodules sont organisés en lits qui sont disséminés dans la formation.
Les Argiles du Gault (C1b) sont datées en Argonne de l’Albien. La formation d’argiles
compactes, noirâtres, épaisse de 25 à 30 mètres, contient quelques fossiles nacrés.
Sa base est parfois sableuse par remaniement des Sables verts sous-jacent.
La gaize d’Argonne (C2) repose sur les Argiles du Gault par l’intermédiaire d’une
dizaine de mètres de gaize argileuse relativement imperméable. La formation de gaize a une
épaisseur qui peut aller jusqu’à 110 mètres, elle diminue du sud-est au nord-ouest.
C’est une roche siliceuse poreuse, légère à l’état sec, perméable et gélive. Sa couleur
dominante est gris beige très clair. Elle renferme également des quartz et de la glauconie.
3. Une couverture crétacée soumise à l’érosion
a. La genèse de la cuesta de l’Albien
Le bassin sédimentaire de Paris correspond effectivement à une portion de l’écorce
terrestre qui s’est progressivement affaissée puis s’est comblée de sédiments d’origine marine
lors des phases de transgressions des mers, et d’origine continentale (A. Lexa- Chomard et C.
Pautrot, 2006). Les sédiments se sont lentement tassés dans un mouvement de subsidence
affectant ainsi les couches d’un pendage monoclinal.
Au Tertiaire, les cours d’eau, comme l’Aire-Bar ou l’Aisne dans notre secteur d’étude,
ont « exhumés le squelette du bassin de Paris » ; l’érosion différentielle dégageant les
matériaux les plus tendres et mettant en relief les formations plus dures créant ainsi le
diptyque topographique évoqué en première partie. Ainsi s’est formé la cuesta de l’Albien,
c’est-à-dire, la côte d’Argonne.
b. La surface infra-crétacée
Grandpré se localise en bordure orientale de cette côte d’Argonne. Dans ce secteur,
cette puissante barrière rectiligne qui s’étend de Vouziers au sud de Clermont en Argonne,
s’assoit sur les calcaires du Kimméridgien, puis du Séquanien.
Ces calcaires se sont déposés suite aux transgressions marines du Jurassique pendant
l’ère secondaire. A la fin du Jurassique, les rebords du bassin de Paris se surélèvent devenant
ainsi exposés à une intense érosion. La période d’émersion de la couverture sédimentaire
s’étend sur près de 15 millions d’années (D. Harmand et J. Le Roux, 2006).
A la fin du Crétacé Inférieur, la transgression reprend. La mer revient progressivement
pour déposer à l’Albien les sables verts puis les Argiles du Gault. Ces deux formations
viennent alors reposer en discordance sur la surface infra-crétacée. Actuellement les cours
d’eau, notamment par l’intermédiaire du karst, incisent cette couverture crétacée et dévoilent
alors cette surface érodée.
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c. La capture de l’Aire par l’Aisne
A la fin du Tertiaire, la plupart des cours d’eau ont un tracé linéaire et s’écoulent dans
de larges vallées très peu creusées. Puis le réseau hydrographique évolue en fonction des
nombreuses variations climatiques qui se produisent au Quaternaire. Les cours d’eau
s’écoulant sur des formations calcaires s’encaissent, leur développement latéral limité par la
présence des versants. Tandis que les cours d’eau des dépressions argileuses, ont plus de
facilité à divaguer et connaissent des modifications dans leur réseau.
Certaines rivières sont alors déviées de leur cours en rejoignant un autre réseau proche,
à plus basse altitude. C’est ainsi qu’a lieue la capture de l’Aire (Harmand et Leroux, 2008).
L’Aire s’écoulait avant sa capture au sein d’une dépression argileuse orthoclinale selon un
tracé quasiment nord-sud. Elle rejoignait la Bar. Désormais, l’Aire est un cours d’eau
cataclinal qui s’écoule d’est en ouest, à travers la côte d’Argonne, pour entrer en confluence
avec l’Aisne. Son bassin hydrographique n’est plus rattaché à la mer du Nord mais à l’océan
Atlantique.
Nous pouvons également noter que l’Aisne et l’Aire sont des cours d’eau surimposés.
Les conditions structurales de la couverture se sont substituées à celles des calcaires sousjacents. Les cours d’eau se sont peu à peu incisés dans ces inégalités sous-jacentes pour finir
par ne plus respecter la structure, c’est-à-dire le pendage des formations jurassiques.
4. Un climat propice à la karstification
Le diagramme ombrothermique (figure 5), nous permet de constater une abondance
des précipitations qui s’étalent tout au long de l’année. L’hiver est la période de l’année qui
connaît les maximums pluviométriques (jusqu’à 120 mm pour le mois de décembre). L’été
affiche des totaux mensuels rarement inférieurs à 60 mm. Les mois secs s’échelonnent de mai
à septembre. Pour ce qui est des températures, l’été est chaud, l’hiver plutôt froid.
L’amplitude thermique est de l’ordre de 15°C.
Figure 5 : Diagramme ombrothermique de Charleville-Mezière, au nord-est de Grandpré.
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La région de Grandpré est caractérisée par un climat océanique dégradé. Il s’agit d’un climat
de transition : l’amplitude thermique et l’abondance des précipitations en été, traduit
l’influence de la continentalité. La Côte d’Argonne et la Côte des Barres apparaissent comme
les premiers obstacles orographiques au flux d’ouest, ce qui explique l’importance des
précipitations. L’abondance de ces dernières rend possible un renouvellement du flux
hydrique essentiel à la karstification.
Après étude des contextes topographiques, géologiques et climatiques du secteur de
Grandpré, il semble que toutes les conditions nécessaires à la karstification soient réunies.
Nous sommes en présence de calcaires fracturés masqués par une couverture qui laisse
présager une dynamique d’infiltration particulière. Le climat, qui définit pour une grande part
les volumes d’eau disponibles pour la karstogenèse, semble favorable à cette karstification
aux vues de l’abondance des précipitations. Enfin les reliefs sous couverts forestiers
contribuent à l’enrichissement de l’eau en CO2 et donc son pouvoir de dissolution.
II. Un karst de contact lithostratigraphique
1. Qu’est ce que le karst ?
a. Définition du karst
Le Karst est une région de la Slovénie où la karstification a été étudiée par les
Autrichiens au XIXe siècle.
Le Karst, par dérivation, est devenu le terme scientifique pour définir « un système
hydrogéologique affectant principalement les pays calcaires par la dissolution de leurs roches
par les eaux météoriques chargées en CO2 » (Gilli, 1999)
Ainsi, une région est dite karstifiée « lorsqu’elle présente une morphologie et une
hydrologie particulières dues à la dissolution hétérogène d’une roche modérément soluble »
(Quinif 1998).
La dissolution correspond à la mise en solution d’une roche soluble par un agent
agressif. Le carbonate de calcium est légèrement soluble dans l’eau pure. Mais la solubilité est
bien plus grande quand l’eau contient du dioxyde de carbone. Rappelons que cette dissolution,
pour les carbonates de Calcium, s’exerce selon la formule chimique suivante : H2CO3 +
CACO3 = Ca(HCO3)2.
L’activité karstique concerne toutes les roches solubles ; les calcaires (CaCO3) en
priorité, mais aussi les dolomies (mgCO3), le gypse ou encore le sel (NaCl).
b. Les conditions de formation du karst
Il paraît en premier lieu utile de rappeler les principes généraux de la karstification. Le
karst apparaît comme un véritable système en constante interaction avec son environnement.
Il est le fruit de multiples échanges d’énergie entre divers éléments internes et externes. Yves
Quinif, (1998) définis ce système comme une « machine thermodynamique ».
Trois conditions fondamentales sont nécessaires à l’existence d’un système karstique ;
en reprenant les termes de Quinif, nous pouvons les citer comme suit :
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Une lithologie, c’est-à-dire une roche soluble pour qu’un « transfert de matière d’une
phase solide à une phase liquide » puisse se former, ainsi qu’une cohérence mécanique
afin que les formes souterraines se conservent.
Une énergie mécanique : L’eau pour circuler utilise des voies constituées par une série
de discontinuités : les fractures en détente (diaclases, failles et joints de stratification)
induites par la tectonique, permettent la pénétration de l’eau grâce à des vides
interconnectés.
Quand l’eau utilise les diaclases pour circuler, on parle de perméabilité en grand
(Salomon 2000). La fissuration par détente, par son ouverture, facilite le transit des
flux qui se déplacent rapidement alors qu’ils ne sont pas encore saturés carbonates.
La porosité, constituée par l’existence au sein de la roche d’un certain nombre de vides
ou pores interconnectés, permet également la pénétration de l’eau. Il s’agit alors d’une
perméabilité inter-granulaire, autrement dit « une perméabilité en petit ».
Une énergie hydrodynamique enfin, laquelle correspond d’une part à la quantité d’eau
disponible pour la karstification, car, sans eau, la karstification ne peut s’opérer.
D’autre part, c’est l’énergie induite par le gradient hydraulique, soit « la différence
d’altitude entre la zone d’alimentation et la zone de sortie. »). Ainsi, pour opérer, la
karstification exige une force à la fois motrice (pesanteur et dénivelé) et hydrologique
(débit de l’écoulement)
Le point bas vers lequel convergent les eaux est appelé niveau de base. S’il correspond
au niveau de la plaine ou d’une large vallée de faible pente, on le dit « régional ». Si la
source pérenne la plus basse domine légèrement le niveau régional, c’est un niveau
« local » ou « karstique ». (Salomon 2000).
Ces trois conditions représentent le « potentiel de karstification ».
2. Les spécificités du karst de couverture
La plupart des karsts en France sont des karsts couverts. La présence d’une couverture
de matériaux détritiques, donc non carbonatés, sur une masse calcaire conditionne directement
la dynamique d’infiltration, et celle de la karstification (Jaillet, 2000). En effet, un karst dit de
contact lithostratigraphique se développe à l’interface entre la roche soluble et la roche
insoluble.
La région karstifiée de Grandpré constitue un exemple pertinent de karst
lithostratigraphique : la couverture argilo-sableuse du Crétacé qui recouvre les calcaires du
Kimméridgien induit un fonctionnement complexe du système karstique.
a. Les dynamiques d’infiltration
L’existence de cette couverture argilo-sableuse sur le calcaire est un facteur
fondamental de la karstification. Effectivement, la couverture conditionne la dynamique
d’infiltration dont est tributaire la karstification.
La présence de cette couverture est à l’origine de deux dynamiques d’infiltrations
(figure 6), l’une lente et diffuse, l’autre rapide et concentrée.
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Figure 6 : Dualité de l’infiltration dans un karst couvert (d’après Jaillet, 2000)
Mangin, en 1982, puis Delannoy en 1997, définissent ces deux dynamiques par le
concept de karst unaire et de karst binaire. D’après la classification de Delannoy, le karst
unaire désigne un massif calcaire, sous couverture ou non, dont le « mode d’introduction de
l’eau » est unique. A l’inverse, dans un système binaire, il y a deux modes d’introduction de
l’eau dans le karst, correspondant à deux entités du système karstique. Jaillet (2000), crée sa
propre classification d’après celle de Delannoy. Sa typologie est basée sur les caractéristiques
de la couverture qui peut être : totalement imperméable ou semi-perméable, homogène,
percée ou discontinue. En fonction des différents critères énumérés auparavant, l’alimentation
du karst peut s’effectuer :
- par ruissellement sur couverture et perte au contact des calcaires
- par drainance lente à travers la couverture semi-perméable
- par infiltration directe dans les calcaires lorsque la couverture est
discontinue.
Dans notre secteur d’étude, la dynamique d’infiltrations semble effectivement de deux
types. D’un coté, lors d’épisodes pluvieux, les Argiles du Gault offrent une surface
globalement imperméable qui génère un ruissellement concentré. Les écoulements de surface
se rassemblent et s’organisent en réseau. Au contact des calcaires sous-jacents, l’eau
s’engouffre rapidement au droit des pertes dans des conduits sous terrain. Cette infiltration
concentrée est la plus importante en terme de quantité d’eau pénétrant dans le massif calcaire.
D’un autre côté une partie des précipitations transite lentement à travers la couverture
et s’infiltre dans les horizons sableux de l’Albien qui constituent alors un aquifère perché audessus du karst. Cette véritable « compresse humide » (Gamez, 1992) entretient la
karstification.
La couverture semi-perméable joue donc un rôle fondamental dans l’alimentation en
concentrant des écoulements au niveau de points d’absorption préférentiels. Ces écoulements
entretiennent une dissolution rapide dans la zone de transfert vertical à l’origine de conduits
importants pouvant drainer l’eau de percolation de l’épikarst et l’excès pluviométrique (Gilli,
2000). Cette recharge de type allogène, qui est le fait des cours d’eau qui pénètrent en pertes
karstiques dans les calcaires, est d’autant plus agressive que son flux est renouvelé souvent.
b. L’épaisseur de la couverture, un facteur déterminant
Les études menées par Jaillet dans le karst du Barrois (Lorraine) en 1995, démontrent
que le développement du karst est non seulement lié aux trois conditions essentielles
précédemment évoquées mais également à l’épaisseur de la couverture. En l’absence de
couverture, « l’infiltration des eaux généralisée ne permet pas l’organisation d’un karst
15
actif ». De même, lorsque la couverture est trop épaisse, aucune karstification n’est possible
dans la mesure où l’infiltration est beaucoup trop limitée.
Comme en atteste la figure 7 réalisée par Jaillet (2000), une épaisseur de 1 à 2 mètres
au minimum et de 20 à 30 mètres au maximum est garante d’une karstification active.
Figure 7 : Limite du karst et de la karstification par deux seuils
d’épaisseur de la couverture. (D’après Jaillet 2000)
3. L’exokarst,
L’exokarst qualifie la zone décomprimée soumise à l’érosion où l’ensemble des
formes de surfaces en terrain karstifié se manifestent. Les phénomènes karstiques les plus
rencontrés dans les karsts couverts de Lorraine sont les dolines, les mardelles, les pertes, les
émergences et les gouffres. C’est également le cas aux environs de Grandpré, avec toutefois
une sous représentation des gouffres.
a. Les dépressions fermées, première expression du karst de surface
Les dolines
Le terme doline, d’origine slave, désigne à l’origine une vallée. De nos jours, il s’agit
d’une dépression karstique fermée, de forme généralement ronde ou ovale, et de taille
décamétrique à hectométrique (Salomon 2000). Ces dépressions peuvent être isolées ou en
groupe pour former un train de dolines. Les dolines sont un élément fondamental du karst de
Grandpré, c’est pourquoi nous leur accorderons un développement particulier.
Elles se développent au sein des matériaux carbonatés. Leur origine complexe est
souvent controversée, car plusieurs processus interagissent dans leur formation sans que l’on
puisse hiérarchiser de façon précise l’importance respective des facteurs.
Pellegrin et Salomon en 2001 nous éclairent sur ces « processus qui ne sont pas
toujours bien expliqués ». Il parait intéressant d’ouvrir ici une petite parenthèse afin de
rappeler ces processus qui interviennent dans la formation des dépressions fermées. Ils sont au
nombre de cinq :
- L’hydrocompaction : l’eau, sous l’action de la pesanteur, entraîne les particules les
plus fines en profondeur, lesquelles vont venir colmater les pores interstitiels. Les
terrains affectés sont sablo-argileux, limoneux ou loessiques.
- La dissolution est « un phénomène physico-chimique permettant la transformation
d’un minéral solide par les eaux sous forme d’une solution. Cela se traduit par un
prélèvement de matière par les eaux sur la surface topographique. »
- La suffosion : le ruissellement de surface s’infiltre dans des fentes de dessiccation
en érodant ses parois. Les éléments fins solides sont évacués en profondeur et
exportés du profil par les eaux d’infiltration.
16
-
-
Le soutirage : est l’aspiration d’éléments non carbonatés par des vides sousjacents. L’entraînement des particules conduit à la digestion complète de la
couverture sans horizon d’accumulation (Jaillet 2000).
L’effondrement : stade ultime du soutirage ou de la dissolution, les éléments
grossiers sont entraînés par gravité après rupture de la voûte d’un conduit
karstique.
Les dolines semblent donc le fait principalement de la dissolution et du soutirage. Les
matériaux de la couverture sont « aspirés » par le karst sous-jacent. Certaines dolines sont par
ailleurs liées à un effondrement. Elles présentent des formes alors totalement différentes.
C’est pourquoi nous allons aborder la question de la typologie des dolines.
Typologie des dolines recensées dans le karst de Grandpré
La diversité des formes des dolines est très grande. Plusieurs typologies ont été
définies par les auteurs comme Salomon et Jaillet. Nous nous nous sommes inspirés de ces
travaux pour établir notre propre typologie adaptée aux morphologies recensées dans le karst
de Grandpré.
Les dolines évasées (figure 8) : les plus fréquentes, elles sont en formes de « cuvette ».
Leur profondeur est faible par rapport à leur largeur. Leur pente est assez faible, leur centre
peut former un léger replat. Le fond est souvent remblayé de formations résiduelles avec un
sol argileux. Ces dolines abritent ainsi parfois une petite étendue d’eau. Ces dépressions
fermées peuvent être de taille importante et atteindre ainsi une cinquantaine de mètres de
diamètre pour une profondeur de 5 mètres.
Figure 8 : morphologie (sans échelle) d’une doline de évasée
Les dolines de soutirage en entonnoir (figure 9) : ces dolines sont caractérisées par des
versants pentus. Ces versants sont souvent rocheux ou développés dans les formations
superficielles. Il est difficile de distinguer la roche en place des colluvions dans le cas des
argiles ou des Sables Albiens. Le fond, quant à lui, est toujours très profond, étroit et
généralement absorbant. Certaines dolines d’effondrement peuvent présenter une forme en
entonnoir. A Grandpré, on observe ce cas.
17
Figure 9 : morphologie (sans échelle) d’une doline de évasée
Les dolines d’effondrement en baquet (figure 10) : Ces dolines ont un diamètre
généralement inférieur à leur profondeur. Leurs versants sont abrupts voire verticaux et
donnent directement sur le fond de la doline souvent jonché de blocs.
Figure 10 : morphologie (sans échelle) d’une d’effondrement
Les dolines asymétriques (figure 11) : elles se développent au pied des versants
topographiques. Elles offrent un coté plus pentu et plus élevé que l’autre.
Figure 11 : morphologie (sans échelle) d’une doline asymétrique
18
Les dolines-pertes : les dolines peuvent, au même titre que les pertes, engouffrer de
l’eau.
Les mardelles
Delafosse, Guyot et Bellard, en 1932 (in Gamez, 1992) attribuent au terme de
mardelle la définition suivante : « excavations en forme d’entonnoir, le plus souvent
circulaires, quelquefois ovales, aux dimensions très variables, entre 1,50 mètres et 60 mètres
de diamètre. »
Gamez, préfère définir les mardelles comme : « des dépressions naturelles
caractéristiques d’un substratum lithologique à dominante non carbonatée » (figure 12). La
formation des mardelles serait alors la principale résultante du processus de suffosion. Jaillet,
dans son ouvrage sur le karst couvert du Barrois, reprend cette signification qui nous semble
pertinente. Grâce à cette étude, nous souhaitons approfondir nos connaissances sur ces formes
dont l’origine est encore discutée.
Figure 12 : morphologie (sans échelle) d’une mardelle
b. Les pertes et émergences
Les cours d’eau arrivant sur une zone calcaire peuvent disparaître totalement ou
partiellement sous terre formant une perte appelée aussi embut ou ponor. Cette perte évolue
en fonction des caractéristiques de la couverture et du karst sous-jacent qui commandent les
processus de soutirage et de dissolution. L’eau qui s’engouffre au droit de ces cavités circule
dans des conduits verticaux puis horizontaux avant de resurgir à l’air libre. Ces émergences ne
sont pas toujours visibles. Lorsque le débit est faible et que le massif calcaire est bordé par
des terrains à forte perméabilité, l’eau peut se dissiper dans ces terrains et y suralimenter une
nappe déjà présente (Gilli, 1999).
c. Les gouffres
Les gouffres forment des cavités de surface imposantes qui débouchent sur les
conduits karstiques sous-terrains.
19
4. Méthode et moyens mis en oeuvre pour la cartographie de l’exokarst
Afin de mener à bien notre étude et de recenser les phénomènes précédemment
évoqués, nous nous sommes rendu à six reprises sur le terrain, entre le 21 mars et le 20 mai
2008. Deux journées ont été consacrées à la prospection, les quatre autres aux relevés
géographiques.
Notre secteur d’étude situé loin de Metz et la courte durée de temps impartie à notre
recherche ont malheureusement limité le nombre de visites de terrain.
Nous n’avons donc pas eu la possibilité de prospecter et cartographier avec précision
l’ensemble des phénomènes présents dans le secteur de Grandpré.
Malgré tout, comme nous le verrons par la suite, nous avons pu saisir l’évolution que
connaît l’exokarst au printemps. En ce sens, nous avons assisté au fonctionnement des
systèmes karstiques en période de hautes eaux mais également en période moins arrosée, ce
qui s’est traduit par un assèchement des formes et de l’alimentation en eau.
Afin de réaliser nos cartes représentant les différentes formes karstiques, deux
méthodes de relevés ont été mises en œuvre. Dans un premier temps nous avons utilisé un
laser-mètre et un compas afin d’obtenir un tracé. Nous avons effectués des boucles pour
limiter et estimer la marge d’erreur. Grâce au logiciel DPTopo, longueurs et visées ont pu être
traitées pour former un plan en deux dimensions. Cette méthode de relevée est tout de même
limitée, c’est pourquoi les cartes réalisées manquent parfois de précision.
Dans un second temps, nous avons utilisé un GPS de géomètre pour relever les
coordonnées de chaque modelé karstique. Les données présentées sous forme d’un tableur ont
été traitées dans le Logiciel d’Information Géographique Mapinfo de manière à obtenir là
encore un plan en deux dimensions.
La mise en œuvre de deux méthodes de relevés peut elle aussi avoir des conséquences
néfastes sur la cartographie dans la mesure où deux logiciels différents ont été utilisés pour
traiter les données et en particulier pour retranscrire les coordonnées géographiques.
Nous avons ensuite utilisé le logiciel Adobe Illustrator cs, pour représenter au mieux,
formes et types de phénomènes rencontrés. Nous avons choisis d’attribuer à chaque forme de
surface un numéro auquel il convient de se rapporter dans les tableaux situés en annexes si
l’on souhaite connaître la particularité de la forme en question.
Nous avons relevé visuellement pour chaque phénomène, son diamètre, sa profondeur
ainsi que quelques observations pouvant permettre de le repérer facilement. Nous n’avons pas
recherché la précision d’une mesure, l’intérêt étant avant tout, à notre sens, de pouvoir se faire
une idée globale de l’ampleur et de l’échelle des phénomènes en présence.
En ce qui concerne la géologie, notre secteur d’étude ne présentant que peu
d’affleurements, nous nous sommes servis des chablis et de la carte géologique de Vouziers à
1/50 000, du Bureau des Recherche Géologiques et Minières (B.R.G.M.) (1958), pour
déterminer les faciès géologiques dans lesquels apparaissent dolines, mardelles et autres
formes karstiques. Cette carte assez ancienne nous a posé des difficultés. Pour palier à ce
problème, nous avons consulté la notice de la carte géologique de Monthois du B.R.G.M.
(1998).
Parallèlement, un travail de bibliographie nous a permis de comparer notre secteur
d’étude à d’autres semblables pour répondre à notre problématique.
20
III. Spatialisation des phénomènes karstiques
Les formes les plus communément rencontrées sont, rappelons le, les dolines, les
mardelles et les pertes. Ces morphologies se localisent dans des secteurs précis et s’organisent
de façon relativement régulière.
Nous avons défini, d’après les données de la carte et les données relevées sur le
terrain, cinq secteurs où se développent des phénomènes karstiques. Par manque de temps,
nous avons choisi d’accorder plus d’importance à deux secteurs particuliers plus riches en
phénomènes. Ils nous apparaissaient plus intéressants et donc plus utiles dans l’interprétation
du fonctionnement du karst du secteur de Grandpré.
Malgré tout, nous avons souhaité cartographier le peu de connaissances acquises sur
les trois autres zones. Ainsi deux cartographies sont incomplètes. La figure 3 permet
d’identifier la zone que recoupe chaque carte. A chaque cadre numéroté correspond une carte
et donc, une figure.
On distingue parmi les trois cartes inachevées : le karst du secteur de Sommerance
(cadre 1, figure12), le karst de rive concave du méandre décrit par l’Aire à l’amont de
Grandpré (cadre 2, figure 13) le karst du vallon de Talma (cadre 2, figure13). Le karst de
« Queue de Loup » au nord-ouest de Grandpré correspond au cadre 3 (figure 14) et le karst de
l’interfluve entre Champigneulle et Imécourt au cadre 4 (figure 15).
Après avoir décrit brièvement les quelques phénomènes rencontrés dans les trois
secteurs précédemment cités, nous évoquerons plus longuement les cas des deux autres sites.
La discussion en partie 5 portera donc exclusivement sur ces deux derniers sites.
1. Sommerance : un alignement de formes dans le vallon
Les phénomènes karstiques de Sommerance se développent dans les colluvions et les
formations non carbonatées que sont les argiles et les sables, au pied de buttes témoins
gaizeuse oblongues. Ils sont localisés plus précisément en amont de petits vallons secs dirigés
vers la vallée de l’Aire et de l’Agron. Le substrat soumis à la karstification correspond à la
dalle calcaire du Kimméridgien qui affleure un peu plus à l’aval. Les trois quarts des
phénomènes se déploient dans des champs ou des prés (figure 12).
Nous avons pu observer sur ce site un vallon soumis à un écoulement temporaire. Lors
de notre visite, le 19 avril, un petit ruisselet s’écoulait. Son cours s’enfonce sous terre au
niveau d’une doline-perte en forme d’entonnoir (photo 1). Cette doline-perte de 20 mètres de
diamètre présente des versants actifs soumis au soutirage et à la solifluxion. De véritables
lambeaux de terre se détachent et sont évacués. Le ruisseau à tendance à s’inciser dans le
colluvium comme en atteste la présence d’affleurements frais du sol et du placage argilosableux.
Une doline d’effondrement en baquet d’environ un mètre de diamètre, se situe dans le
vallon à 50 mètres en contrebas de la perte nous informe. On peut y voir des formations
superficielles formées majoritairement de gélifracts de gaize remaniés avec sables et argiles
mais aussi quelques blocs calcaires.
Plus à l’aval, on décèle dans le vallon sec, un champ de dolines évasées (photo 2). Plus
au nord, deux bosquets matérialisent deux dolines isolées.
21
Photo 1 : Une doline-perte aux versants soliflués (Cliché C. Guy)
Doline-perte
Photo 2 : Alignement de doline évasée dans le talweg sec (Cliché C.Guy)
22
Figure 12 : Carte de localisation des phénomènes karstiques dans les secteurs de Sommerance, aperçu des
phénomènes du secteur de l’interfluve entre Champigneulles et Imécourt.
2. Le secteur de la rive concave du méandre
Les phénomènes karstiques se développent sur le versant de la rive droite de l’Aire, à
l’entrée de l’entonnoir de percée cataclinale (figure 13, page suivante). Sans doute la
karstogenèse et la localisation des formes dans ce secteur sont à mettre en relation avec les
événements propres au réseau hydrographique. Nous sommes à proximité du site de la
capture. Le creusement par l’Aire de la percée et l’abaissement du niveau de base, en plus de
l’influence du pendage, sont des éléments primordiales à prendre en compte pour expliquer le
développement de ces phénomènes.
3. Le vallon de Talma :
Le ruisseau de Talma s’écoule au sein d’une étroite vallée aux versants pentus. Deux
bassins versants se rejoignent à l’amont du village de Talma. Leur vallon présente un
écoulement lié à de nombreuses sources qui alimentent le ruisseau (figure 13).
23
D’un point de vue géologique, les argiles et les sables dominent au niveau du versant.
Le calcaire du Kimméridgien affleure, lui, dans le talweg et est pour sa majeure partie,
recouvert d’alluvions modernes.
Le lieu-dit « les gouffres » situé en amont nous indique, même si la carte géologique
ne mentionne pas la présence d’une karstification, la possibilité qu’il puisse exister des cavités
qui engouffreraient les écoulements de surface alimentés par la gaize.
Les phénomènes karstiques, se localisent sur tout le pourtour du vallon oriental.
D’après les photos aériennes et ce que l’on a pu observer depuis la route longeant le ruisseau,
les formes karstiques se développant dans les prés, sur les versants, correspondent toutes à des
dolines éparses de tailles différentes. Certaines sont comblées par les agriculteurs. Ces dolines
côtoient bon nombre de sources qui se reconnaissent par une végétation typique des zones
humides. Un doline-perte où se perd un petit ruisseau se localise au confluent des deux
vallons.
Nous n’avons pas plus d’informations sur ce secteur. Si ce n’est qu’à certains endroits,
le bois du vallon oriental présente une topographie heurtée qui semble être l’œuvre d’une
intervention anthropique.
Figure 13 : carte des phenomènes karstiques de la rive concave de méandre.
4. Le Bois de « Queue de Loup » : deux vallons aveugles
Comme nous pouvons le constater sur la figure 14, le secteur du bois de « Queue de
Loup » offre une densité de phénomènes karstiques plus élevée que les secteurs
précédemment cités.
24
Figure 14 : localisation des morphologies de surface à « Queue de Loup »
25
Ces phénomènes se développent dans les Sables verts. La coupe géologique BC
permet de se faire une idée de la géologie et de la topographie du secteur (figure 15).
26
Figure 15 : coupe géologique BC au niveau de Bois de Loup
Deux pertes majeures, alimentées par deux ruisseaux temporaires, se situent en tête de
réseau hydrographique. Ces dolines-pertes engouffrent un écoulement temporaire par le biais
de petites cavités développées au niveau des calcaires sublithographiques. A l’aval de ces
deux pertes, un vallon aveugle marqué une contre pente. Les dolines, formes les plus
rencontrées sont alignées le long des talwegs (photo 3). Certaines dolines présentent des
dimensions importantes et notamment les dolines-pertes (19, 20, 21).
Photo 3 : Alignement des trois grosses dolines 11 , 12, 13 (Cliché L. Willems)
Des dolines d’effondrement profondes permettent d’obtenir quelques renseignements
lithologiques. La doline 44, située sur un chemin forestier, (photo 4) en forme d’entonnoir,
fait apparaître clairement la formation des sables verts. Par contre, il est difficile de savoir si
les calcaires qui affleurent au fond constituent la roche en place où s’ils appartiennent aux
formations superficielles.
27
Photo 4 : la doline en entonnoir 44 permet l’observation de la lithologie (Cliché C.Guy)
Les dolines-pertes nous permettent d’approfondir nos connaissances à propos de la
lithologie. La doline-perte 37 située à l’est est la plus intéressante. Son diamètre est d’environ
10 mètres. La cavité, quant à elle, mesure une cinquantaine de centimètres.
Les argiles colluvionnés, qui présentent des suintements d’eau, glissent sous l’effet de
la gravité et du soutirage. La perte ne semble pas se combler mais au contraire, elle paraît
capable d’ingérer ces matériaux en grande quantité. Le ruisseau qui alimente la perte suit un
tracé méandreux en s’encaissant dans les argiles et les sables. En aval de cette perte, il
n’existe pas de perte secondaire mais deux dolines d’effondrement en baquet d’une
profondeur atteignant près d’un mètre.
Nous nous sommes rendu à cette doline-perte par trois fois : le 21 mars, le 24 avril et
le 12 mai. L’étalement de nos visites nous a permis de nous faire une idée des modalités
d’écoulement du ruisseau ainsi que de la capacité d’absorption de la perte.
Nous pouvons ainsi, de manière qualitative, mettre en relation les données climatiques
locales (figure 16) avec les observations de terrain :
28
Lame d'eau journalière (mm) mesurée à la
station de Montcheutin, à 6 km au sud ouest de
Grandpré
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20
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14
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6
4
2
0
Figure 16 : Lame d’eau journalière précipitée (mm) mesurée à la station de Montcheutin,
à 6 km au sud ouest de Grandpré (Source : Météo France)
La journée du 21 mars, s’inscrit dans une période pluvieuse. Le ruisseau connaît un
débit important. Très chargé en sédiments, il s’écoule vers la perte qui absorbe toute l’eau
malgré l’engorgement (photo 5 et 6).
Photo 5 et 6 : La capacité d’absorption de la doline-perte orientale (37) (Clichés B. Losson)
29
Le 24 avril, la perte est visible et dégagée de toute embâcle (photo 7). Le sol argileux
est en cours de ressuyage, le ruisseau s’écoule paisiblement (photo 8 et 9). Dans sa partie
amont, un drain hypodermique d’un faible débit apporte un faible écoulement.
Photo 7 : La doline-perte 37 hors eau permet d’apercevoir les calcaires
Le 12 mai, l’absence de précipitations depuis une dizaine de jours se fait
ressentir, l’écoulement est nettement réduit. Le drain hypodermique ne contribue plus au
débit du ruisseau.
Photo 8 et 9 : Le ruisseau qui alimente la doline perte 37 présente
un débit modeste en période de ressuyage. (Cliché C. Guy)
30
Cette doline perte fait apparaître le sommet de la dalle calcaire. Il s’agit d’un calcaire
sublithographique jaune blanchâtre dont la surface oxydée est tarrodée (photo 10). Nous
sommes visiblement en présence du sommet de la dalle calcaire du Kimméridgien.
La couche sus-jacente correspond aux Sables verts de l’Albien (photo 11), dont
l’épaisseur ne peut être déterminée. A l’interface calcaire-sable, un lit de 5 à 10 centimètres
d’épaisseur est formé par des nodules phosphatés pris dans la matrice sableuse. Certains de
ces nodules ont été remaniés par le ruisseau.
Photo 10 et 11 : Affleurement des calcaires du Kimméridgien (à gauche) et des Sables verts (à droite)
(Cliché C .Guy)
La seconde perte active, c’est-à-dire la perte 65 (photo 12), à l’ouest, est un peu plus
petite. Elle présente une morphologie nettement moins développée. Une cavité s’ouvre
modestement dans des calcaires. Un niveau supérieur plus détritique recouvre les calcaires
sublithographiques observés à la doline-perte 37.
Une contre pente forme un petit seuil entre cette perte principale et une perte
secondaire plus à l’aval. Bien qu’elle ne fut pas en activité lors de notre première visite, en
période de hautes eaux, cette dernière semble encore fonctionnelle si l’on en juge par les
argiles au sol.
31
Photo 12 : L’eau s’engouffre au niveau de la perte 65 développée au contact sables/calcaires (Cliché C.Guy)
Deux ruisseaux confluents à une dizaine de mètres en amont de la perte sont fortement
méandreux et encaissés dans les argiles.
Ces deux ruisseaux des vallons est et ouest, qui se perdent sous terre auraient fait
l’objet de traçages. Selon deux agriculteurs locaux, leur résurgence se situe à deux kilomètres,
dans les alluvions de l’Aire (figure 3). La source forme un bouillon à proximité d’un remblai
le long de la route vers Termes.
Enfin, le secteur situé au sud ouest de ces deux réseaux est caractérisé par un nombre
important de dolines-pertes. L’intensité des phénomènes est par exemple soulignée par la
doline d’effondrement en baquet 72 (Photo 13).
32
Photo 13 : Doline d’effondrement en baquet 72 (Cliché C.Guy)
Lors de la visite du 21 mars, un écoulement se perdait dans la doline-perte 70. Cette
doline permet d’observer les colluvions argilo-limoneuses stratifiées (photo 14)
.
Photo 14 : Colluvions argilo-limoneuses stratifiées sur les parois
de la doline d’effondrement 70 (Cliché C.Guy)
Enfin, il est à noter qu’une doline-perte, non représentée sur la carte, se situe plus au
sud. D’un diamètre décamétrique permet, on la repère facilement dans le champs à partir du
chemin. Enfin, un agriculteur nous a informé de l’existence d’un gouffre de 5 mètres de
33
profondeur à proximité de cette doline. Selon ses dires, le conduit horizontal possède une
orientation nord-sud. Le conduit vertical de 5 mètres de hauteur recoupe les calcaires à un
mètre sous la surface.
5. Le secteur du karst d’interfluve entre Champigneulle et Imécourt
L’interfluve entre Champigneulle et Imécourt est l’objet d’une karstification différente
de la précédente, l’ographie étant moins favorable aux vallons aveugles.
Comme en atteste la figure 17 (carte hors-texte, légende commune avec la figure 16),
la densité des phénomènes est importante sur une zone de quelques kilomètres carré. Les
dolines côtoient les mardelles.
Avant d’évoquer les morphologies de surface rencontrées, attardons-nous un instant
sur la géologie. L’interfluve dans notre secteur est, selon la carte géologique réalisée (figure
18), chapeautée de gaize. D’un point de vue structural et d’après la coupe AB (figure 2), la
présence d’une couche de gaize résiduelle à cet endroit est quelque peu troublante. Nous
n’avons pas trouver d’indices attestant de la présence ou non de cette formation. Cependant,
nous avons effectivement observé des morceaux de gaize colluvionnés à proximité des pertes
69 et 184.
Cette couche géologique est supportée par les Argiles du Gault que nous n’avons pas
pu localiser. Nous avons en revanche repéré les faciès sableux par la présence des galets de
quartz des Sables verts. Ces galets sont nombreux au nord de la perte 69, mais il s’agit
probablement de colluvions.
La limite d’affleurement des calcaires du Kimméridgien est plus facilement détectable.
En effet, les pertes (numéros 69, 184, 214) se développent toutes au contact du calcaire.
Globalement, le calcaire affleure sur le pourtour de la forêt. Les champs alentours permettent
d’observer les gélifracts calcaires.
34
Figure 18 : carte géologique du secteur du karst d’interfluve
entre Champigneulle et Imécourt
Les dolines sont localisées pour la plupart sur les marges du bois, en contrebas des
pertes et des zones à mardelles. De taille parfois imposante, elles affectent les prés et les
champs. Les dolines de ce secteur sont surtout évasées. Nous n’avons recensé qu’une seule
doline d’effondrement en baquet. L’agriculteur auquel appartient le champ où se développe
cette doline nous a dit la reboucher tous les ans.
Morphologiquement, les dolines-pertes ne sont pas très amples Parmi les deux
recensées à l’est du bois, l’une est fonctionnelle (81), l’autre non (69) (photo 15).
35
Photo 15 : La doline-perte 69 (Cliché C.Guy)
Celles situées à l’ouest du bois semblent présenter une plus intense activité. Le vallon
de la perte 124 (photo 16) est nettement incisé, la perte, elle, est comblée d’alluvions. Cette
perte paraît plus active que la perte 214. Le vallon à l’amont de celle-ci, où s’écoule un
ruisseau temporaire est bien marqué. La contrepente en aval de la perte atteint 1 mètre de
hauteur.
36
Photo 16 : La perte 124 est comblée d’alluvions (Cliché C.Guy)
D’après la figure 17 toujours, les mardelles sont groupées dans des secteurs bien
spécifiques. Elles se développent apparemment dans les sables. En forme de vasque,
temporairement en eau, leur fond et versant sont tapissées d’argiles (photo 17). Leur diamètre
varie de 50 centimètres à 5 mètres.
Photo 17 : une mardelle en eau (Cliché C.Guy)
Ces mardelles sont le plus souvent groupées, elles peuvent parfois être alignées pour
former des trains de mardelles. Les mardelles 62 et 63 alimentent un léger ruissellement de
37
surface (non observable lors des visites) qui se prolonge dans un vallon pour aboutir à la perte
69 (photo 18).
Photo 18 : Groupement de mardelles qui alimentent la perte 69 (Cliché C.Guy)
Certains secteurs, à proximité des mardelles 14 à 19, ont une topographie bouleversée
laissant à penser que des interventions humaines ont eu lieu. Il en est de même à proximité
des dolines 178 et 179. Un vallon sec débouche sur une zone présentant de nombreux trous
d’origine inconnue (49, 50). Un petit vallon montre tout de même la présence d’une activité
de ruissellement à cet endroit.
Finalement, la région de Grandpré offre différentes morphologies karstiques
intéressantes tant par leur forme que par leur localisation. La lithologie semble jouer un rôle
fondamental dans le développement et le fonctionnement de ce karst.
V. Un fonctionnement karstique de contact lithostratigraphique
Nos observations sur le terrain de Grandpré, nous ont permis de déterminer deux
grands aspects du fonctionnement du karst de couverture que nous allons maintenant définir.
1. Le liseré karstique de l’interfluve
D’après la carte du karst de Champigneulle (figure 16), les mardelles se manifestent
de façon groupée sur une topographie globalement plane. Comme pour celles de l’interfluve
Loison-Othain (Gamez, 1992), elles « dominent le réseau hydrographique de quelques mètres,
ce qui suffit à générer un gradient hydraulique indispensable à la circulation de l’eau
souterraine ».
D’après la carte géologique, les mardelles se développent sur le pourtour de la masse
gaizeuse, dans les formations tendres argileuses. Mais nos observations démontrent qu’elles
se présentent dans les Sables verts.
Il semble que les mardelles se répartissent dans ces sables, en fonction de microfissures affectant le calcaire sous-jacent. Cette explication rend compte de leur genèse
présumée par suffosion : l’eau s’infiltre dans ces micro-fissures, entraînant avec elle les
dépôts de la couverture. Durup de Baleine (1989) attribue leur localisation au contact
sables/argiles. Nos conclusions sont différentes de cette affirmation.
38
D’après nos observations, dans le secteur de Grandpré, il semble que les argiles,
généralement considérées comme imperméables, peuvent tout de même présenter une légère
circulation hydrologique qui se matérialise par un suintement.
Cette drainance, associée aux précipitations efficaces et au ruissellement de l’eau issu
de sourcins de l’aquifère gaizeux perché, offrent à la mardelle un plan d’eau qui peut s’avérer
quasi permanent. Ce ruissellement sur les argiles ou les colluvions argilo-sableux peut être à
l’origine d’incisions qui se créent en sortie de la mardelle, mais il peut aussi lui configurer une
forme allongée dans le sens de l’écoulement (cas des mardelles 62 et 63).
Nous pouvons également rappeler que ces argiles sont soumises à d’importants
mouvements de masse. La solifluxion peut donc affecter les la genèse des mardelles où leur
forme. Mais dans notre secteur d’étude, cela ne semble pas être le cas, la pente des versants ne
semble pas suffisante pour accueillir des phénomènes de solifluxions sans compter que les
Sables verts limite également ce type de processus propre aux argiles.
Enfin, Gamez (1992) ajoute une deuxième caractéristique de la localisation des
mardelles : « elles sont une forme essentiellement liée à la présence de la forêt qui fournit le
CO2 biologique et les acides humiques favorisant la corrosion des minces intercalations
carbonatées. » Sans vérifier si cette affirmation s’applique à notre secteur, nous pouvons tout
de même confirmer que les mardelles du karst de Grandpré se développent toutes sous
couvert forestier. Toutefois, ce secteur ne présente pas d’intercalations calcaires connues. Il
convient cependant d’émettre là encore des réserves, car les mardelles sont des formes
« fragiles qui exposées à un rapide effacement par les travaux forestiers ».
Les dolines dans le secteur de Champigneulle apparaissent comme des formes
typiques du karst de contact lithostratigraphique. A une exception près, ce sont toutes des
dolines évasées qui se sont formées par soutirage et dissolution. Les plus grandes dolines, où
l’épaisseur de matériau carbonaté soutirée est importante, se situent sur le pourtour de la
butte, en contrebas des mardelles. Il est possible d’en distinguer une dizaine de taille
décamétrique autour du sommet de l’interfluve. Ces dolines sont effectivement plus ou moins
alignées tout autour de la butte. Elles paraissent se développer au contact sable/calcaire, voire
même au sein des calcaires. D’ailleurs, on les rencontre également au niveau des pertes qui se
développent à l’interface sable/calcaire.
Cet alignement des dolines formant une ellipse autour des formations crétacées
coïncide donc approximativement avec le contact lithostratigraphique de la discordance infracrétacée. On a affaire à un « liseré karstique » (figure 19) tel que l’a défini Gamez (1992) dans
ses travaux en Woëvre septentrionale.
39
Figure 19 : Liseré karstique situé à l’interfluve entre Champigneulles et Imécourt
Au niveau de Talma, ce liseré karstique apparaît, mais à une échelle différente. Il
ceinture toute la côte où les formations sont plus épaisses.
Ainsi, pour résumer, les mardelles se forment le plus à l’amont. Elles peuvent alimenté
un petit ruisselet qui s’écoule dans un vallon qui mène aux pertes. Ces dernières, avec les
dolines, se développent au contact sables/calcaire. La figure 20 illustre bien ces propos.
40
Figure 20 : localisation des mardelles, pertes et dolines
2. Le recul des pertes dans le bois de « Queue de Loup » :
Les vallées fluviatiles sont souvent désorganisées par la karstification. Le karst de
Queue de Loup fournit un bel exemple de cette considération.
Les deux ruisseaux sont absorbés au droit des pertes qui évoluent « sous la commande
de la couverture » (Jaillet, 2000) tandis que le talweg s’assèche en présentant une contre pente
pour former un vallon aveugle. Ce dernier est ponctué par nombre de dolines qui se
substituent à l’écoulement. Car l’écoulement souterrain suit l’ancien écoulement de surface
dans l’alignement du talweg.
Les pertes et paléo-pertes s’organisent dans l’axe de ce vallon. Elles se forment
lorsque l’eau qui s’écoule à la surface entre en contact avec la dalle calcaire sous-jacente. Ces
pertes ont tendance à migrer de l’aval vers l’amont. Ce phénomène est celui du recul des
pertes, dont l’évolution est la suivante.
La perte, autrement dit le point d’absorption contrôle un bassin versant. Elle joue le
rôle de niveau de base local pour tous les écoulements de surface. Le cours d’eau, surtout en
période de crue, à tendance à inciser les argiles qui sont évacuées par les pertes. Ainsi, le
ruisseau s’encaisse peu à peu alors que la couverture s’amenuise. Ensuite, comme l’écrit
Jaillet (2000), lorsque « la table calcaire est atteinte un peu plus à l’amont », la dissolution et
l’élargissement des discontinuités du calcaire conduisent à la formation d’une nouvelle perte
où l’eau va venir s’infiltrer (figure 21) . Ce qui explique que contrairement à l’érosion fluviale
qui œuvre de l’aval vers l’amont, le travail de l’érosion karstique se fait dans le sens inverse.
Le travail de l’érosion régressive vient amplifier ce phénomène.
41
Figure 21 : Recul de perte et de la couverture (D’après Jaillet, 2000)
Le recul des pertes est particulièrement bien illustré par le karst du bois de « Queue de
Loup », les phénomènes observés traduisant un processus évolué. Les deux vallons sont
jalonnés de pertes héritées, c’est-à-dire totalement inactives et comblées par des colluvions.
Certaines dolines toutefois continuer à absorber les écoulements. Elles jouent le rôle de pertes
lorsqu’elles sont alimentées par des ruissellements latéraux (dolines 19 et 20) souvent générés
par la compaction du sol par les engins forestiers.
Les pertes secondaires sont ici limitées. Seul le cous d’eau occidental, présente une
perte dite également relictuelle située quelques mètres en aval de la perte principale. Cette
deuxième perte doit a priori fonctionner en période de crue lorsque la perte principale ne peut
absorber la totalité du flux.
Les morphologies du vallon de Sommerance sont encore peu évoluées. Mais déjà la
présence de la perte, l’alignement des dolines dans le vallon, laisse présager une évolution
semblable à celle rencontrée à « Queue de Loup ». L’apparition de la doline d’effondrement
constitue un des premières manifestations d’une dynamique bien présente.
42
Conclusion
Il convient désormais de dégager les principales caractéristiques des morphologies et
du fonctionnement de l’exokarst dans le secteur de Grandpré. Les dolines, pertes et mardelles
s’organisent sous le joug de la couverture argilo-sableuse.
La présence de la couverture apparaît comme la condition sine qua non la
karstification ne peut s’opérer. Si son épaisseur définit la karstogenèse, il semble que sa
capacité à conditionner les dynamiques hydrologiques soit sa principale aptitude à entretenir
le karst.
Les écoulements de surface qui dégagent cette couverture, sont à l’origine des pertes
formées par dissolution au contact des calcaires. La drainance des argiles puis des sables
donne à la couverture son aspect de « compresse humide » favorisant là encore la dissolution.
C’est pourquoi la disparition complète de cette couverture qui recule pourrait aboutir à
celle de la karstification
43
Bibliographie
Documents iconographiques
Carte topographique de Vouziers et de Grandpré à1/25 000, I.G.N. série bleue, 1992
Carte géologique de Vouziers à 1/50 000, B.R.G.M., 1958
Carte et notice de Monthois à 1/50 000, B.R.G.M., 1998
Ouvrages
E. Denys, Le karst de contact lithostratigraphique du plateau du Haut Pays, exemple de la
forêt de Trampot (vosges), 2005, 154 pages
A. Durup de Baleine, Le karst de la Forêt de Hesse, mémoire de maîtrise, 1989, 383 pages
Articles
P.Gamez, Hydrologie et karstologie du bassin du Loison (Woëvre septentrionale,
Lorraine), Thèse univ. Metz, Mosella, t. XXI, 1992, 453 pages.
E. Gilli, Eaux et rivières souterraines, Que sais-je ? PUF 1999, 127 pages .
S. Jaillet, Un karst couvert de bas plateau : le Barrois, structure, fonctionnement,
évolution, 2000, thèse univ bordeaux 3, 2t. 710 pages, cartes H.T.
J. Hilly, B. Haguenauer, Guides Géologiques Régionaux, Lorraine-Champagne, Masson,
1979, 215 pages.
A. Lexa- Chomard, C. Pautrot, Géologie et Géographie de la Lorraine, éditions
Serpenoise, 2006, 286 pages.
C. Mégnien, Synthèse géologique du Bassin de Paris, Mémoire du BRGM n°103, 1980,
468 pages.
G. Mottet, Géographie physique de la France, PUE, 1999, 768 pages.
J.N. Salomon, Précis de Karstologie, PUB, 2000, 290 pages.
Articles
S. Jaillet, P. Gamez, Observations morphologiques sur le géosystème karstique du Rupt
du Puits (Meuse, Lorraine), 1995 Karstologia, n° 26, pages 27 à 38.
J.C. Pellegrin et J.N. Salomon, Hydrocompaction, dissolution, suffosion et soutirage.
Contribution à la formation des dépressions fermées, 2001, Karstologia n°37 p 54-56.
Y. Quinif, Dissipation d’énergie et adaptabilité dans les systèmes karstiques, 1998,
Karstologia n° 31, 11 pages
Autre
D. Harmand, J. Leroux, La capture de la Haute Moselle, bilan des connaissance, fascicule
donné dans le cadre d’une excursion 2008, 26 pages
44
Liste des figures
Figure 1 : Carte de localisation de Grandpré.............................................................................. 6
Figure 2 : Coupe géologique A-B (se référer à la carte morpho-structurale pour identifier son
tracé) ........................................................................................................................................... 8
Figure 4 : Coupe synthétique de la Gaize d’Argonne (Fauvel 1985)....................................... 10
Figure 5 : Diagramme ombrothermique de Charleville-Mezière, au nord-est de Grandpré. ... 12
Figure 6 : Dualité de l’infiltration dans un karst couvert (d’après Jaillet, 2000) ..................... 15
Figure 7 : Limite du karst et de la karstification par deux seuils ............................................. 16
d’épaisseur de la couverture. (D’après Jaillet 2000) ................................................................ 16
Figure 8 : morphologie (sans échelle) d’une doline de évasée................................................. 17
Figure 9 : morphologie (sans échelle) d’une doline de évasée................................................. 18
Figure 10 : morphologie (sans échelle) d’une d’effondrement ................................................ 18
Figure 11 : morphologie (sans échelle) d’une doline asymétrique .......................................... 18
Figure 12 : morphologie (sans échelle) d’une mardelle ........................................................... 19
Figure 12 : Carte de localisation des phénomènes karstiques dans les secteurs de
Sommerance, aperçu des phénomènes du secteur de l’interfluve entre Champigneulles et
Imécourt. .................................................................................................................................. 23
Figure 13 : carte des phenomènes karstiques de la rive concave de méandre. ........................ 24
Figure 14 : localisation des morphologies de surface à « Queue de Loup » ............................ 25
Figure 15 : coupe géologique BC au niveau de Bois de Loup ................................................. 27
Figure 16 : Lame d’eau journalière précipitée (mm) mesurée à la station de Montcheutin,.... 29
à 6 km au sud ouest de Grandpré (Source : Météo France) ..................................................... 29
Figure 18 : carte géologique du secteur du karst d’interfluve .................................................. 35
entre Champigneulle et Imécourt ............................................................................................. 35
Figure 19 : Liseré karstique situé à l’interfluve entre Champigneulles et Imécourt ................ 40
Figure 20 : localisation des mardelles, pertes et dolines .......................................................... 41
Figure 21 : Recul de perte et de la couverture (D’après Jaillet, 2000) ..................................... 42
Liste des photographies
Photo 1 : Une doline-perte aux versants soliflués (Cliché C. Guy) ......................................... 22
Photo 2 : Alignement de doline évasée dans le talweg sec (Cliché C.Guy) ............................ 22
Photo 3 : Alignement des trois grosses dolines 11 , 12, 13 (Cliché L. Willems) ..................... 27
Photo 4 : la doline en entonnoir 44 permet l’observation de la lithologie (Cliché C.Guy) ...... 28
Photo 5 et 6 : La capacité d’absorption de la doline-perte orientale (37) (Clichés B. Losson) 29
Photo 7 : La doline-perte 37 hors eau permet d’apercevoir les calcaires ................................. 30
Photo 8 et 9 : Le ruisseau qui alimente la doline perte 37 présente ......................................... 30
un débit modeste en période de ressuyage. (Cliché C. Guy) .................................................... 30
Photo 10 et 11 : Affleurement des calcaires du Kimméridgien (à gauche) et des Sables verts (à
droite) (Cliché C .Guy)............................................................................................................. 31
Photo 12 : L’eau s’engouffre au niveau de la perte 65 développée au contact sables/calcaires
(Cliché C.Guy) ......................................................................................................................... 32
Photo 13 : Doline d’effondrement en baquet 72 (Cliché C.Guy)............................................. 33
Photo 14 : Colluvions argilo-limoneuses stratifiées sur les parois........................................... 33
de la doline d’effondrement 70 (Cliché C.Guy) ....................................................................... 33
Photo 15 : La doline-perte 69 (Cliché C.Guy) ......................................................................... 36
Photo 16 : La perte 124 est comblée d’alluvions (Cliché C.Guy)............................................ 37
Photo 17 : une mardelle en eau (Cliché C.Guy) ....................................................................... 37
Photo 18 : Groupement de mardelles qui alimentent la perte 69 (Cliché C.Guy) .................... 38
45
Annexes
Diamètre et Profondeur des morphologies : Secteur de Grandpré
numéro
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
diamètre
2m
1,5m
2m
2m
2m
3m
7m
2,5m
2,5m
2,5m
6m
6,9m
11,4m
3,7m
profondeur
70cm
50cm
50cm
50cm
70cm
1m
1,5m
60cm
80cm
80cm
1,5m
2,00m
2,00m
2,00m
1,20m
3,00m
1,5m
8,2m
7,9m
9,7m
1,00m
1,00m
90cm
50cm
1m
24
25 1,50m
26 1,50m
27 1,00m
28
29
30
31
3,00m
50cm
2m
90cm
numéro
32
33
34
35
36
37
38
39
40
41
42
43
44
45
46
47
48
49
50
51
52
53
54
1,00m
1,00m
indéfinissable
car dans le
talus
1,00m
1,20m
40cm
indéfinissable
car dans le
talus
20cm
80cm
50cm
55
56
57
58
diamètre
1,5m
50cm
1m
1m
1,50m
profondeur
1m
30cm
1m
1m
1m
1m
1m
50cm
50cm
1,5m
2,50m
1,2m
2,80m
1m
5m
1m
2m
9,9m
1m
1,5m
8m
4m
2m
1,5m
80cm
1,5m
2,50m
80cm
indéfinissable
90cm
1m
6m
80cm
80cm
1,5m
1,30m
50cm
1m
6,7m
1,7m
8,6m
20cm
1,2m
2m
2m
59 50cm
60 4m
46
3m
Diamètre et Profondeur des morphologies : Secteur de Champigneulles
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
29
30
31
type
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
32
33
34
35
36
37
38
39
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
40
41
42
43
44
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
diamètre
approximatif profondeur
(m)
approximative (m)
2 ?
0,5
1,3
0,8
3
2,5
1
3
observations
recouverte par des branches
0,1
1
0,5
0,5
0,5
0,2
0,8
en formation, forme très petite
0,5
0,2
0,5
0,5
0,2
0,8
1
1
1
0,5
0,8
0,8
1
1
0,8
0,8
1
0,5
0,2
1,5
0,6 évasée
0,8
2
1
4
3
3
0,8
2
1
1
1
3
3
2
2
1,5
2
3
1,5
0,8
3
1,5
1,5
4,5 de long,
1,5 de large
3
4,3
1
2,5
3
4,5
2
5,4 de long,
1,2 de large
5,1
5
3
2 ? en eau
1,5 deux mardelles coalescentes
1,2
1,5
0,3
1,2
0,5
0,8
0,8
0,5 allongée
0,5 en forme de cotelette
0,5
1
47
45 mardelle
46 mardelle
47 mardelle
4
4
4
48 mardelle
49 doline perte
3
4
50
51
52
53
54
55
56
57
58
59
60
61
62
63
64
65
66
67
68
depression
doline
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
69 doline perte
70 grosse doline
71 grosse doline
3
4 ? En eau
3 ? En eau
0,5
0,5
1
8,55
10
9,1
73
74
75
76
77
78
10
4
1
10
1
4
80 dépression
81 doline perte
82 mardelle
0,2
0,2
0,5
mardelle de forme allongée qui alimente un
ruissellement de surface créant un petit
vallon
2 ? en eau
1
3 ? En eau
3 ? En eau
2
2
50
doline
79 d'effondrement
se trouve à la lisière entre taillis et la forêt
1,5 clairesemée
4 comblée, mousses très présentes
présence d'un petit chenal encaissé qui
débouche sur une depression avec 6 trous
(pertes accentuées par travail des animaux
4 (terriers)
1 comblée
0,5
0,5
0,5
forme très petite, en formation
forme très petite, en formation
0,5
3 arbres autour, grosse mardelle
8,7
6
2
1
2
doline
72 attenuée
doline
doline
doline
doline
doline
doline
1,5
1,5
1,5
0,7
10m de
long, 3 m
de large
25
0,8
1
1
perte au niveau du sommet de la formation
7 calcaire
0,8
1 arbre
difficile à determiner,
d'autant plus qu'elle a
peut-être été
ramblayée
difficile à determiner,
d'autant plus qu'elle a
peut-être été
ramblayée
arbre et gravats visibles, forme en entonnoir
0,3
0,2
0,8
0,2
0,2
diamètre et profondeur visibles le 3-05-08,
forme en baquet, active, ramblayée environ
0,5 tous les ans
petite cuvette de 50 cm de profondeur,
humide, origine inconnue, activité des bovins
4 écoulement temporaire, doline dépotoire
forme très petite
48
83 doline
84 doline
85 doline
86
87
88
89
90
91
92
93
94
95
96
97
98
99
100
101
102
103
104
105
106
107
108
109
110
111
112
113
114
115
116
117
118
119
120
121
122
123
124
125
126
127
128
129
130
131
132
133
doline
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
dolines
coalescentes
doline
doline
doline
doline
6
5
50
4 ? Branches
1
1
1
1
1
1
3
3
0,8
1
1
1
2
2
2
2
2
1,5
2
4
1,5
4
60
2
2
2
2
1,8
1,8
1
0,5
1
4
1
1
1,5
1
1,8
1,8
1,8
1,8
2
0,8
0,8
3 au centre de la parcelle déboisée
au nord est à l'intérieur de la doline
précédente
0,2
0,2
0,2
0,2
0,2
0,2
1
1,1
0,2
1
1
1
0,8
1
1
1
1
0,5
0,8
1
0,8
1,2
1 allongé, angle du champs, sol en culture
0,8
1
1
1
0,8
0,8
0,8
0,5
0,8
1
0,9
0,9
0,5
0,8
0,3
0,5
0,5
0,5
0,9
1
1
0,8
0,8
0,8
1
0,5
0,2
1
0,5
49
134
135
136
137
138
139
140
141
142
143
144
145
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149
150
151
152
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154
155
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158
159
160
161
162
163
164
165
166
167
168
169
170
171
172
173
174
175
176
177
178
179
180
181
182
183
doline
doline
doline
doline
doline
mardelle
mardelle
mardelle
deux dolines
coalescentes
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
mardelle
deux
mardelles
coalescentes
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
grosse doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
doline
micro-doline
0,8
8,3
2
6
1
2,2
1
1,2
5m de long,
1m de large
3
1
1
2
2
1
1,5
1,5
3
3
0,5
2
1,5
2 forme en entonnoir
0,8
0,3
0,2
0,8
0,8
0,9
0,5
0,5
0,9
0,8
0,5
0,9
1
1
1
1,5
1
1
2
0,5
1
1
1
1
1
1
1
0,9
1
7,35
0,8
0,8
0,8
1
1
0,8
1
1
2
2
2
2
3
3
4
0,5
0,2
0,5
0,5
0,5
0,5
0,5
0,5
0,5
0,8
0,8
1
0,5
0,8
0,8
1,5
0,8
0,8
0,8
0,8
0,8
0,8
0,9
0,5
1
0,8
0,8
0,8
1
1
1
0,5
50
6970
184
185
186
187
188
189
190
191
192
193
194
195
196
197
198
199
200
201
202
203
204
205
206
207
208
perte
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
deux
mardelles
coalescentes
doline
mardelle
mardelle
mardelle
doline
doline
doline
doline
doline
mardelle
209
210
211
212
213
214
215
216
217
218
219
220
221
222
223
224
225
226
227
228
doline
doline
doline
doline
doline
perte
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
micro-mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
mardelle
micro-mardelle
mardelle
mardelle
3m de long, ? Comblée par des
1m de large colluvions
affleurement du calcaire
1,5
0,8
2
1
2
0,5
2
0,5
2
0,5
3
1
2
0,8
4,2
0,7
3
0,9
3
0,9
2
1,5
2
0,9
4
1
6m de long
2
2
3
2
1
1
10
0,8
10
1
20m de
long
1
1
2
2
0,8
1 en entonnoir
0,8
1 très évasée
0,4
0,8 pietinée par les vaches, déformée
0,8
1,5
0,8
1
0,1
1 doline oblongue
0,8
0,2
1,5
1,5
dans les calcaires
0,8
0,1
0,8
0,9
0,7
0,8
0,1
0,8
0,8
0,5
0,5
0,5
0,8
0,8
2
1
4
4
1,5
2,5
0,4
1,5
1,5
1
1
0,5
2
2
Résumé
51
Mots clés : cuesta de l’Albien, couverture crétacée, exokarst, liseré karstique, Argonne,
Grandpré.
Les systèmes karstiques de Grandpré se développent entre Lorraine et Champagne, au
pied de la côte de gaize de l’Argonne et à proximité du site de capture de l’Aire par l’Aisne.
Ces systèmes offrent une forte densité de morphologies de surface qui témoignent d’une
activité importante.
Ces phénomènes karstiques présentent une répartition spatiale sous la commande de la
géologie locale. La couverture argilo-sableuse du Crétacé qui recouvre en discordance les
entablements calcaires du Kimméridgien, joue un véritable rôle de compresse humide
favorisant la karstification.
Lorsque cette couverture est relativement peu épaisse, les reliefs résiduels faits
d’Argiles du Gault et de Sables verts, sont soumis à des processus de suffosion à l’origine des
mardelles. En périphérie, dans les faciès carbonatés, des dolines de soutirage s’organisent
selon un liseré karstique soulignant le contact lithostratigraphique. Sur les versants, les
écoulements concentrés s’engouffrent au droit de pertes. La circulation souterraine suit celle
des vallons qui se criblent de dolines.
Abstract
Key words : Albien cuesta, crétacée covering, exokarst, karstic ring, Argonne, Grandpré.
The karst systems of Grandpré are situated between Lorraine and Champagne, below
to the Argonne hill made by sandy stone, near the site of the capture of the Aire River by the
Aisne. Those systems present a lot of exokarstic phenomenon which show the importance of
the activity.
The local geology conditions their localisation. Sandy crétacé deposits on the surface
which cover the carbonate substrate of Kimmeridgien, work like a humid sponge that lay to
karstification.
When this non carbonate covering is thin, the residual relief made of Clay from Gault
and green Sand, are subjected to piping process with the appearance of closed hollows
named mardelles. In periphery, in carbonate stones, some dolines of soutirage take place
creating a karstic ring highlighting the litostratigraphic contact. On the hillside,
concentrating flows rush into sinks. The underground runoff follows the valley where appear
dolines.
52

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