café philo du 4 juin 14 la vie est

Transcription

café philo du 4 juin 14 la vie est
La vie est-elle une suite
de hasards ?
Quelques réflexions issues de nos échanges lors de notre dernier café philo (4 juin 2014) :
1) Poser la question, c’est poser la question de notre responsabilité et de notre liberté (voire de
notre culpabilité) dans la conduite de notre vie. En effet, si l’on pense que la vie n’est qu’une
suite de hasards, nous ne sommes en fin de compte responsables de rien (« ce n’est pas de
ma faute, je n’ai pas eu de chance »), mais c’est la même chose si le hasard n’existe pas et si
tout est programmé d’avance (« je n’y peux rien, c’était mon destin »).
2) Quand on parle de hasard, on pense à quelque chose d’imprévu, à quelque chose que l’on ne
peut pas prévoir à coup sûr (comme gagner au loto) ou à quelque chose d’inattendu, de non
voulu (comme la rencontre inopinée d’un vieil ami ou de l’âme-sœur). Notons que le hasard
peut être heureux ou malheureux
3) Certains penseurs affirment qu’il n’y a pas de hasard. Ce que l’on prend pour du hasard n’est
que le reflet de notre ignorance, parce que l’on a une vision partielle et partiale des choses.
L’on ne se rend pas compte que tout ce qui nous arrive (par exemple des coïncidences
apparemment inexplicables) et tout ce que l’on décide est en réalité strictement conditionné
par les lois de la nature, de la psychologie ou de la sociologie (par exemple, on ne tombe pas
amoureux de n’importe qui, n’importe quand, n’importe comment), ou même, dans une
perspective religieuse, par une puissance supérieure.
4) La science classique part du même principe : tout ce qui arrive a une cause (principe du
déterminisme). Pourtant, les progrès des sciences (en biologie, en mécanique quantique)
amènent à reconnaitre qu’il y a des phénomènes imprévisibles qu’on ne peut que constater
sans pouvoir les prévoir à coup sûr (mutations génétiques, comportement des particules
élémentaires).
5) Nous avons également dit que la vie d’un être humain dépend fondamentalement du hasard
de sa naissance. Le fait que chacun de nous existe est miraculeux : il s’en est fallu d’un
cheveu que nous n’existions pas.
6) Il n’est donc pas possible d’éliminer le hasard (dans le fonctionnement du monde comme
dans notre propre existence). Mais alors comment réagir face à cette constatation ? Plusieurs
attitudes sont possibles : réduire au maximum la part de hasard en adoptant une attitude
méthodique et rationnelle (comme le voyageur perdu dans la forêt qui choisit une direction
et qui s’y tient) ; accepter positivement ce qui nous arrive : souvent, nous n’avons pas voulu
ce qui nous arrive, mais nous avons toujours le choix de vivre notre situation de telle ou telle
manière (je suis victime d’un accident dû à un malheureux concours de circonstances, je
peux alors tout faire pour récupérer mes capacités, me laisser complètement aller ou encore
réorganiser ma vie). Le hasard nous donne des opportunités et nous sommes maîtres de
l’usage que nous en faisons.
7)
Il n’est pas non plus souhaitable de vouloir éliminer le hasard de notre vie. Cette tentative
relève d’un désir d’être rassuré (en se disant qu’on peut tout contrôler, qu’on peut toujours
réussir grâce à son travail, à sa persévérance). Il ne faut pas céder à l’illusion que le monde va
se plier à nos désirs, à l’illusion que le monde a un sens par lui-même, alors que c’est à nous
de lui donner un sens, de donner un sens à ce que nous vivons (en reliant , en intégrant ce
qui nous arrive à ce que nous avons vécu et à ce que nous vivrons). L’expérience inévitable
du hasard nous oblige donc à penser notre vie (quel sens, quelle valeur lui donner ?) au lieu
d’en subir passivement les aléas.