Les psychothérapies approche plurielle

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Les psychothérapies approche plurielle
Les psychothérapies : approche plurielle
Coordonnée par :
Alain DENEUX – François-Xavier POUDAT – Thierry SERVILLAT – Jean-Luc VENISSE – Ed. MASSON (Juin 2009)
Cet ouvrage réunit les contributions de nombreux praticiens majoritairement psychiatres mais aussi psychologues et d’un philosophe Gestaltthérapeute, qui ont œuvré à la mise en place d’un D.U. de psychothérapie à l’Université de Nantes.
Sur les 400 formes de psychologues recensés, les auteurs illustrent trois courants principaux : psychanalytique, cognitivo-comportementaliste et
systémique stratégique.
Elles ont en commun, malgré leurs divergences, de proposer un « traitement moral » comme l’avait déjà élaboré Philippe Pinet en 1791 au lieu
du recours contemporain à la chimiothérapie ou à des dérives ésotériques et sectaires qui se parent des plumes du paon psychothérapique pour
séduire des adeptes en souffrances psychique.
Mais quel que soit le modèle proposé, tout en nous souvenant de l’avertissement de René Zazzo « Je me méfie des modèles car ils ont trop
tendance à se prendre pour des modèles », ils mettent tous en évidence avec plus ou moins de pertinence la nécessité de se servir de
l’alliance thérapeutique. Comme l’a écrit Jean-Jacques Kriess en 1986 : « qu’est-ce qui compte le plus, le modèle ou le thérapeute ? » (1)
La première partie de l’ouvrage est consacrée à la théorie et à la praxis analytiques.Qu’on le veuille ou non, Freud fait bien partie,
comme il l’a dit de lui-même, « de ceux qui ont troublé le sommeil du monde », comme Darwin et avant eux Galilée et Copernic.
La clinique psychanalytique est une clinique du sens et non une sémiologie ; elle s’appuie sur un cadre qui est fait selon
l’expression de Racamier pour « l’hébergement psychique » (2) et non comme un carcan rigide et mutilant. La psychothérapie
analytique se doit d’être, comme le disait Epicure de la philosophie, « ena techné ton viou », c’est-à-dire une technique qui aide à
vivre et non une fin en soi. Mais quel que soit le médium utilisé, divan, fauteuil, psychodrame ou thérapie familiale, l’analyste se doit
d’être inspiré par le Daimon socratique et savoir saisir le « Kairos », le moment propice, selon les grecs, qui permettra l’efficacité de
son intervention et/ou de l’interprétation.
A l’inverse, la seconde partie du livre s’inspire de l’aphorisme de Watson (1913) : study behavior, not mind ». La thérapie
comportementale fondée sur la théorie de l’apprentissage et les réflexes conditionnés, sous-tendu selon moi par le présupposé de
« l’animal machine » de Descartes, et par celui de la machine-outil va être remodelée dans les années 1960 par le cognitivisme
d’Ellis, Bandura et Beck, pour ne citer qu’eux. La métaphore qui anime ce courant s’inspire du traitement de l’information telle que
l’informatique l’a mise en évidence aujourd’hui. La nouvelle vague des T.C.C. se nourrit en partie des techniques de méditation
bouddhiste et semble renouer en quelque sorte avec la tradition du stoïcisme.
Il y a des choses qui dépendent de nous et d’autres qui n’en dépendent pas, il faut donc « accepter les évènements psychologiques
désagréables et les sensations douloureuses particulières.
N’est-il pas remarquable qu’au XXIe siècle, les paradigmes cognitivo-comportementaux qui se présentent comme les plus
scientifiques illustrent à merveille les idées des philosophes, Démocrite et Epicure en particulier, et se réfèrent en permanence aux
préceptes oubliés des sages pour nous aider à mieux vivre. D’où mon hypothèse : le cognitivo-comportementalisme est-il un avatar
contemporain de la philosophie antique en réactualisant entre autres la maïeutique socratique ? Tout au plus, je lui reprocherai de
souffrir d’une phobie de tout ce qui ne serait pas « scientifique », que les T.C.C. entretiennent au lieu de la guérir, en n’intégrant pas
que l’inconscient reste toujours inconnaissable. Mais il ne faut jamais oublier, comme l’écrivit Pierre Fédida, « qu’une
psychothérapie analytique, est une psychanalyse en plus compliquée ».
(1) J.J. Kriess : « Les rapports subjectifs du psychiatre avec ses théories » in Psychiatrie Française n° Spécial (1986, pp 35- 48)
(2) P.C. Racamier : « L’esprit des soins – Le cadre » Ed. du Collège (Paris, 2001)
La dernière partie, qui n’est pas la moins intéressante, est consacrée à l’approche « systémique » qui est la plus récente en
particulier avec les travaux de l’Ecole de Palo Alto en Californie. Le M.R.I. (Mental Research Institute) qui est en fait une initiative
privée, hors de l’Université de Stanford, dont la qualité de ses chercheurs, de Gregory Bateson à Paul Watzlewick a fait sa
réputation mondiale.
Comment se passer de concepts comme la causalité circulaire et d’outils thérapeutiques comme le recadrage, le jeu avec les
paradoxes et les tâches de résolution de problèmes ?
Mais en ce qui me concerne, je reste convaincu qu’avec les familles fusionnelles, la thérapie systémique s’impose pour permettre à ses
membres de se séparer, avec les familles en conflit aigu, seule une approche thérapeutique distincte pour l’enfant et les parents peut
leur permettre de se retrouver ultérieurement.
Le grand mérite de cet ouvrage, véritable somme éclectique qu’il faut lire absolument, est de démontrer que le sectarisme et l’esprit de
chapelle sont aux antipodes de ceux qui veulent « guérir par l’esprit » sans oublier l’humour qui reste l’arme absolue de tous ceux qui
visent l’avènement du sujet.
Jean-Pierre CHARTIER
Septembre 2009

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