MissionPhotoPresse- Prop UPP

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MissionPhotoPresse- Prop UPP
MISSION SUR LES PHOTOGRAPHIES DE PRESSE
Propositions de l'Union des Photographes Professionnels
Dans l'ordre des sujets énoncés dans la lettre de mission adressé par la Ministre de la culture et de la
communication à Monsieur Francis Brun-Buisson en date du 21 juin 2013 :
I. « Les conditions d'établissement de barèmes raisonnables de rémunération pour les
photographies que les éditeurs achètent aux agences ou à des photographes, en tenant
compte, le cas échéant, des modalités de cession de droits »
1. Carte de presse
Aujourd'hui une grande majorité des photojournalistes travaillant pour la presse et les sites
d'information en ligne sont indépendants. Les photojournalistes salariés permanents sont de plus en
plus rares. Pourtant, beaucoup d'agences de presse et d'illustration, comme les magazines et
quotidiens, continuent à travailler avec ces collaborateurs extérieurs en les rémunérant sous forme de
cession de droits d'auteur.
Le renouvellement annuel de la carte de presse est de plus en plus difficile pour beaucoup de
photographes journalistes dont les revenus oscillent entre la presse qui baisse le niveau de
rémunération des piges et les autres secteurs de l'édition qui exploitent les photographies d’actualités,
de grands reportages non rémunérés sous forme de salaires et, donc, ne sont pas reconnus par la
CCIJP. A ce problème s’ajoutent les nouveaux médias sur internet et les nouveaux formats sur ce
support : web documentaire, web reportage, POMs… qui sont rarement rémunérés sous forme de
salaires.
Malheureusement, la possession de la carte de presse est souvent la condition du paiement de la pige
en salaire. Or, l'article L7111-3 du code du travail définit ainsi le journaliste professionnel : « Est
journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée,
l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes
et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources.
Le correspondant, qu'il travaille sur le territoire français ou à l'étranger, est un journaliste professionnel
s'il perçoit des rémunérations fixes et remplit les conditions prévues au premier alinéa ».
L'article L7111-4 précise que : « Sont assimilés aux journalistes professionnels les collaborateurs
directs de la rédaction, rédacteurs-traducteurs, sténographes-rédacteurs, rédacteurs-réviseurs,
reporters-dessinateurs, reporters-photographes, à l'exclusion des agents de publicité et de tous ceux
qui n'apportent, à un titre quelconque, qu'une collaboration occasionnelle ».
La carte de presse n'est pas nécessaire pour être reconnu comme journaliste mais, très souvent, les
éditeurs de presse en font un préalable pour payer les photographes de presse sous forme de salaire
alors que c'est justement en étant payés comme tels qu'ils peuvent prétendre obtenir leur carte de
presse. Ce problème touche particulièrement les jeunes débutants dans le métier.
Proposition : La carte de presse dite « stagiaire » c'est à dire attribuée aux photographes journalistes
durant leurs 2 premières années d'activités devrait être attribuée sans conditions de ressources en
salaires aux jeunes diplômés sortant des écoles de journalisme et de photographie se destinant au
métier de pigiste ou n'étant pas en mesure d'être embauchés au sein d'une rédaction. Ce n'est qu'au
moment de la première demande de carte de Titulaire ( au bout de deux ans ) que le montant de leurs
ressources payées en salaires devrait être examiné, ceci pour favoriser leur insertion dans le monde
professionnel.
2. Le paiement des commandes en salaires
La loi n°74-630 du 4 juillet 1974, dite Loi Cressard, tout en rappelant la définition du journaliste
professionnel, a assimilé le journaliste pigiste professionnel à un journaliste salarié.
Proposition : Les commandes des éditeurs de presse doivent être payées systématiquement en
salaires.
3. Rémunération des piges
La loi « Création et Internet » du 12 juin 2009 (dite HADOPI) prévoit la négociation entre les partenaires
sociaux d’un barème minimum de piges. Cet accord devait intervenir dans un délai de deux ans à
compter de l’adoption de la loi. L’UPP a travaillé de concert avec les principaux syndicats de
journalistes et la SAIF sur l’élaboration de ces barèmes. Toutefois, en l’absence de l’entrée en vigueur
d’un accord de branche déterminant un barème minimum de pige pour l’image fixe, le dispositif prévu
par la loi n’est pas applicable (articles L. 132-41 et L. 132-45 du CPI). Dans cette circonstance, un
décret devait intervenir pour fixer les conditions de détermination de ce salaire minimum. Toutefois,
celui-ci n'a pas encore vu le jour.
Proposition : L'UPP soutient toute initiative visant à l’engagement des négociations entre partenaires
sociaux aux fins de conclusion d’un tel accord de branche.
3. Rémunération des archives
La Loi « Hadopi » a également modifié les relations entre les éditeurs de presse et les reporters
photographes. Elle met en place un dispositif basé sur des « cercles » qui correspondent d’une part à
des durées d’exploitations mais aussi à des types d’exploitations (voir ci-dessous).
! Cercle 1 :
◦ présomption de cession définie à l'article L. 132-36 du CPI
◦ rémunération en salaire
! Cercle 2 :
◦ dépassement de la période référence (la période de référence dépend de la périodicité du
titre et de la nature de son contenu)
◦ rémunération sous forme de droits d'auteur ou de salaire (accord d'entreprise ou accord
collectif)
! « Cercle 2 bis » : la famille cohérente de presse (notion apparue dans le Livre vert)
◦ notion non définie
◦ accord d'entreprise obligatoire
◦ nature et montant de la rémunération à déterminer par accord collectif
! Cercle 3 : publication aux tiers
◦ accord exprès et préalable de l'auteur (à titre individuel ou par voie d'accord collectif)
◦ rémunération en droits d'auteur
Toutefois, la loi n'a pas déterminé le période de référence à partir de laquelle les photographies
deviennent archives et laisse le soin à la négociation collective le soin de déterminer celle-ci.
Par ailleurs, de nombreux photographes-auteurs qui s'auto-produisent sans lien de subordination
envers les éditeurs de presse se voient payés sous forme de cession de droits d'auteurs non reconnue
par l'Agessa.
Proposition : Une large concertation doit être mise en place sous l'égide du Ministère avec la
participation des éditeurs de presse, des fournisseurs de contenus ( Agences de Presse, Agences
d'Illustration ), des producteurs de contenus ( Photo-reporters, Photographes-auteurs ) et de leurs
organisations professionnelles ( y compris l'Agessa et les sociétés d'Auteurs ) pour déterminer
clairement grâce à un Accord inter-professionnel les conditions de rétribution des parutions de
photographies dans la Presse en prenant comme base de discussion la Loi.
II. « La stabilisation des relations commerciales entre éditeurs, agences de presse, et
photographes, en particulier en ce qui concerne les commandes et les délais de paiement »
1. Les délais de paiement
Il est d'usage de payer le pigiste au moment de la publication, or si le pigiste est publié dans un
mensuel le paiement pourra s'effectuer jusqu'à 3 mois après la remise du travail. Cette situation n'est
pas tolérable, a fortiori quand le photographe a avancé les frais de production. Le pigiste est un salarié,
et à ce titre, il devrait être payé à la fin du mois travaillé. Aucun texte n'autorise la dérogation à cette
obligation de tous les employeurs.
Les articles L 3242-1 et suivants du code du travail distingue 3 hypothèses pour le versement du
salaire. Le paiement du salaire se fait :
! une fois par mois pour les bénéficiaires de la mensualisation
! deux fois par mois pur ceux qui ne bénéficient pas de la mensualisation (salariés travaillant à
domicile, salariés saisonniers, salariés intermittents et salariés temporaires).
! tous les trois mois pour les VRP (voyageurs et représentants de commerce).
Proposition : Les dispositions du code du travail doivent s'appliquer s'agissant du délai de paiement.
III. « L'encadrement de l'usage de la mention « droits réservés » (DR), grâce notamment à une
meilleure définition de l’origine et de la signature des photographies lors de leur publication ou
de leur mise en ligne »
1. Proposition de loi sur les œuvres orphelines : PPL 441
Depuis de nombreuses années, s’est développé un usage de publication d’œuvres avec la mention
« Droits réservés » ou « DR ». Cette pratique n’a aucune base légale mais elle est le fruit d'un accord
entre photographes et éditeurs élaboré il y a quelques années qui s'apparentait déjà à un code de
bonnes pratiques pour mettre fin à l'usage de signature : "Photo X." et qui ne permettait pas à l'auteur
identifié à postériori de faire valoir ses droits. Elle aurait du être strictement réservée aux œuvres pour
les quelles il s’est avéré impossible d’identifier ou de retrouver l’auteur.
Malheureusement, elle s’est banalisée et connaît d’importantes dérives au préjudice des auteurs et
particulièrement des photographes. Ce type de publication est très fréquent dans le secteur de la
presse principalement, mais aussi dans les secteurs de l’édition, la TV et l’Internet.
Cette pratique s’est généralisée. Elle est devenue une facilité de gestion éditoriale pour les diffuseurs
qui préfèrent attendre que l’auteur se manifeste plutôt que d’engager des recherches, d’autant plus que
cela constitue du contenu éditorial gratuit.
Cette pratique viole :
! Le droit moral de l’auteur : les publications se font sans le nom de l’auteur y compris lorsqu’il
s’agit d’un photographe connu
! Également ses droits patrimoniaux : puisque l’autorisation exprès de reproduire ou de
communiquer au public n’a pas été requise.
Les conséquences sont graves pour les photographes :
! Cela les prive de la rémunération qui leur est due pour l’exploitation de leurs images. De
surcroît, l’absence de l’indication du nom les empêche de faire respecter leurs droits
patrimoniaux pour les ré-exploitations, notamment dans les médias en ligne.
! Cela institue une concurrence déloyale à l’égard des auteurs identifiables.
L’UPP a proposé un nouveau régime de gestion collective obligatoire pour les œuvres dites
« orphelines ». Une société de gestion collective, agréée et légalement habilitée, exercerait les droits
afférents aux œuvres orphelines et collecterait les rémunérations correspondant aux exploitations
effectuées. Les sommes ainsi perçues par cette société obéiraient aux règles de prescription applicable
aux SPRD. Si l'auteur ou ses ayants droit ne se manifestaient pas à l’issue du délai de prescription de
10 ans imposé par le CPI, elles seraient affectées à des actions d’aide à la création participant au
financement et au renouvellement de la création dans les secteurs artistiques concernés.
Ce régime permettrait de mettre fin à la gratuité de nombreuses publications d’œuvres et de sécuriser
la situation juridique des utilisateurs tout en favorisant une plus grande efficacité dans la recherche de
leurs auteurs ou ayants droit.
Proposition : L’UPP encourage la poursuite du processus législatif initié par le Sénat sur les œuvres
orphelines (PPL 441). Le dispositif, dans son esprit d’origine, permettra de contrôler l’usage des
publications créditées « DR », en complétant le nouvel article L.113.10 du Code de la propriété
intellectuelle.
2. Le conditionnement des aides à la presse
La PPL 441 est plus adaptée au problème du « DR » qu'un code de bonne conduite car elle investit
une SPRD d'un pouvoir de contrôle des exploitations. En outre, la mention « Droits Résevés » était à
l'origine "un code de bonne conduite" qui n'a déjà pas été respecté.
Le rapport « Lescure » propose le conditionnement des aides à la presse à un usage « raisonné » de la
mention « DR ».
Proposition : Toutefois l'UPP soutient le conditionnement des aides à la presse au respect du droit de
paternité de l'auteur sur son œuvre inscrit dans la loi sous réserve que la notion " usage raisonné" soit
clairement défini et délimité.
3. Allocation d'aides aux photographes
IV. « Les mesures techniques de protection envisageables permettant, lors de la mise en ligne
de photographies achetées par les éditeurs, d'éviter leur réutilisation sans autorisation ni
limite ».
1. Proposition n°64 du rapport « Lescure » : Créer, pour chaque type d’œuvres, une base
d’empreintes, couplée à un dispositif de reconnaissance automatique.
2. Respect des métadonnées
Les métadonnées sont reconnues comme un moyen majeur de prévenir l'orphelinat en permettant de
déterminer ou retrouver plus facilement les ayants droit d'une oeuvre. Les métadonnées ont beaucoup
d'autres utilités, comme la préservation du droit moral (paternité ou intégrité de l'oeuvre), le calcul de la
répartition des droits dans certains modèles de diffusion, l'aide à la gestion du patrimoine ou
l'information sur le contexte éditorial.
Malheureusement, certains diffuseurs, tel que Facebook, effacent ou modifient les métadonnées des
images .
Rappelons que le déploiement de systèmes de métadonnées est recommandé par la directive
européenne 2001/29/CE (note 5), dans son considérant 55, et que ces métadonnées sont légalement
protégées par l'article 7 de la directive.
Les métadonnées doivent être considérées faisant partie intégrante de l'oeuvre. Dès lors, toute
modification qui leur est apporté porte atteinte au droit moral de l'auteur, notamment à l'intégrité de
l'oeuvre.
Proposition : La France doit légiférer sur le respect des métadonnées comme attribut naturel du droit
moral de l'auteur et soutient toute initiative des pouvoirs publics qui favoriserait le développement de
dispositifs de traçage et de reconnaissance automatique des oeuvres.