Diabète et Aptitude au poste de travail

Transcription

Diabète et Aptitude au poste de travail
Diabète et Aptitude au poste
de travail
Dr Pauline SCHINDLER-SABOT
Médecin du travail
CH Valenciennes et Cs Patho Pro CHRU Lille
Postes de sécurité contre indiqués en cas de
malaises hypoglycémiques:
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Travail en hauteur
Contact avec courants haute tension
Manipulation d’outils dangereux
Conduite de véhicules: VL, chariot élévateur…
Chauffeur poids lourds
Chauffeur transport en commun
Aiguilleur
Poste de travail isolé
Les risques:
• Les malaises hypoglycémiques
• Les complications secondaires:
– la rétinopathie diabétique avec la baisse de
l’acuité visuelle.
– La neuropathie périphérique et la perte de
sensibilité tactile et profonde
– Artériosclérose périphérique, insuffisance
coronarienne
• Le risque infectieux
Rôle de l’activité professionnelle sur l’équilibre
du diabète
• Certains éléments peuvent jouer un rôle
défavorable sur l’équilibre du diabète:
– Travail posté, travail de nuit
– Efforts physiques intenses (manutentionnaires)
– Risques infectieux (alimentation, éboueurs) ou
traumatiques
– Stress, attention soutenue
– Possibilité de repas à horaires réguliers
– Possibilité ou non d’effectuer des auto-contrôles de la
glycémie
Les éléments à prendre en compte pour la
décision d’aptitude:
• 1/ données sur le diabète:
– Type 1 ou 2, ancien ou récent
– Traitement (insuline: dose, nb d’inj/j, type: rapide,
lente, mixte)
– Équilibre du diabète (HbA1c ++) existence ou non
d’hypoG (carnet de surveillance)
– Existence de complications dégénératives et du suivi:
• ophtalmologiques: AV , CV, FO
• CV
– TA, poids
– BU (glycosurie, cétonurie) +/- glycémie capillaire
Quelques critères de contrôle:
• Glycémie à jeun:
– Normale < 1,10 g/l
– Objectif: 0,80 – 1,20 g/l
• Hémoglobine glycosylée HbA1c:
– Bon contrôle < 6,5%
– Contrôle acceptable: 6,6% - 8%
– Mauvais contrôle > 8%
• Remarque: il peut y avoir discordance entre résultats bio (BU et
glycémie) et HbA1c, seule cette dernière permet de juger de
l’équilibre du diabète (corrélée aux pics hyperglycémiques des 3
derniers mois)
• 2/ données sur le poste:
– Poste à risque
– La charge physique
– Les horaires de travail et le rythme de travail
(cadence)
– Vigilance (conduite), précision gestuelle
– Travaux exposant aux toxiques, aux traumatismes
répétés
– Les possibilités de restauration et de conservation
des traitements (glucagon, insuline)
– Port de chaussures de sécurité obligatoire: examen
des pieds du salarié diabétique ++
• 3/ Avis différent selon l’âge:
– Sujet jeune: orientation professionnelle
– Aménagement de poste voire reclassement
(RQTH en dernier recours quand le maintien dans
l’emploi devient difficile à l’inverse du principe de
l’ETP)
Retentissements sur la vie courante et
principes d’éducation thérapeutique:
• Injections d’insuline et repas et collations à horaires
réguliers → hygiène de vie ++
• Lieux et bonnes conditions pour réaliser les injections
• Conservation de l’insuline au frais en cas de longs trajets
• CAT en cas d’accidents hypoglycémiques (<0,60 g/l)
et/ou malaise clinique authentifié par un tiers:
– La personne diabétique doit tjs avoir des morceaux de sucre sur
elle et de les prendre dès l’apparition des prodromes évocateurs
– Éducation de l’entourage pour dépister rapidement un malaise
hypoglycémique
– Disposer du GLUCAGEN dans les différents lieux de vie dont le
travail, si possible (conservation au frais)
• Arrêté du 31 août 2010 modifiant
l'arrêté du 21 décembre 2005 fixant la
liste des affections médicales
incompatibles avec l'obtention ou le
maintien du permis de conduire ou
pouvant donner lieu à la délivrance de
permis de conduire de durée de validité
limitée
Chapitre 6: Pathologie métabolique
et transplantation
• 6.2: Diabète : Distinction entre:
– Les cas « d’hypoG sévères » nécessitant
l’assistance d’une tierce personne
– Le cas « d’hypoG récurrente » lorsqu’une
2de hypoG sévère survient sur une période
de 12 mois.
Groupe Léger:
• 6.2.1:Traitement par médicaments pour le
diabète:
– Avis spécialisé et ex médical régulier, adapté à
chaque cas, dont l’intervalle de doit pas excéder 5
ans (délai fixe réglementaire)
– Le médecin sera particulièrement vigilant dans
l’évaluation du risque hypoglycémique.
• 6.2.2:
– Le PC n’est ni délivré ni renouvelé lorsque la
personne souffre d’hypoG sévère récurrente et/ou
d’une conscience altérée de l’hypoG.
– Le conducteur doit prouver qu’il maîtrise la maladie
de manière adéquate.
Groupe Lourd (délivrance PC
groupe 2):
• 6.2: traité par insuline ou médicaments
pouvant provoquer des hypoG:
– Dans certains cas particuliers, une
compatibilité temporaire pourra être
envisagée après avis spécialisé.
Groupe Lourd (suite)
– Il convient d’appliquer les critères suivants:
• Aucune crise d’hypoG sévère ne s’est produite au cours des
12 derniers mois.
• Le conducteur identifie correctement les symptômes liés à
l’hypoG
• Le conducteur doit faire preuve d’une maîtrise adéquate de
la maladie en contrôlant régulièrement sa glycémie, au moins
2x/j et lorsqu’il envisage de conduire.
• Le médecin s’assure que le conducteur diabétique comprend
le risque hypoglycémique et qu’il maîtrise la maladie de
manière adéquate.
• Il n’y a plus d’autre complication liée au diabète qui puisse
interdire la conduite.
• Suivi par des examens médicaux réguliers, réalisés à des
intervalles n’excédant pas 3 ans.
• A noter:
S’assurer que le conducteur a bien pris
connaissance de l’obligation de déclarer
sa pathologie à la commission des PC
(protection / assurances)
Cas n°1: Mr P. adressé en février 2013, par son
médecin du travail, pour avis d’aptitude au poste de
chauffeur PL avec horaires irréguliers.
• Sur le plan médical:
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46 ans
Diabète insulino dépendant de type 1 découvert en déc. 2012.
Pas d’autre ATCD
TTT: LANTUS 32UI à 20h, NOVORAPID 3x/j avant les repas
selon le dextro.
Bon suivi avec endocrinologue
Bonne éducation thérapeutique avec prise en compte du travail
à horaires irréguliers.
Bon suivi diététique avec conseils adaptés aux horaires
irréguliers
HbA1c = 7,4% datant d’une semaine (la dernière de janvier 2013
était à 10,6%). La glycémie à jeun est normale.
Dernier bilan ophtalmo est normal
• Sur le plan professionnel:
– Chauffeur PL, en CDI depuis 6 ans.
– Transport de denrées alimentaires et produits
industriels (transport très exceptionnel de produits à
risque)
– Horaires irréguliers et travail de nuit (transport
nord/sud) Transport à la semaine jour/nuit et horaires
de conduite et de repos imposés.
– Actuellement en arrêt maladie depuis ≈ 1 mois
(lorsque HbA1c à 10,6%)
• En conclusion:
– Bon suivi et bonne observance
– Bien encadré (endocrino, med ttt, diététicienne, médecin du
travail) bonne hygiène alimentaire
– Pas de complication
– Carnet de surveillance: pas d’hypoglycémie depuis la prise en
charge
– Dit sentir venir les hypoglycémies (à partir de 0,8 g/l)
– Mais en arrêt depuis 1 mois et donc une bonne hygiène de
sommeil, temporaire.
– Apte à la reprise (horaires difficiles à aménagés dans un 1er
temps) mais conseils d’hygiène de sommeil (pauses et micro
siestes) et diététiques (repas à horaires réguliers + collations)
– Suivi en médecine du travail
– Réserve sur le transport de produits dangereux qui sont
exceptionnels
Cas n°2: Mr K. adressé en mars 2013 par le médecin
du travail pour avis d’aptitude (visite d’embauche) sur un
poste de chauffeur PL:
• Sur le plan médical:
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35 ans
Diabète de type 2 découvert en 2003 (ATCD familial paternel).
TTT: VELMETIA® 2/j; DIAMICRON® LM 60 mg 1-1/2x/j
Notion de complications:
• néphropathie incipiens (microalbU: 29 mg/l; créat: 7 mg/l)
• rétinopathie diabétique débutante
• hypoG nocturnes
– Mauvaise observance au ttt, dernier courrier de suivi date
d’octobre 2011.
– Pas d’autosurveillance glycémique
– HbA1c: 14.9% (août 2010) 7.4% (avril 2011) 9.4% (oct 2011)
• Sur le plan professionnel:
– Vu en médecine du travail dans le cadre d’une visite
d’embauche pour un poste de chauffeur PL, 1 an
après sa prise de poste.
– Transport régional (Paris-Reims-Nord)
– Horaires alternés
• Conclusion:
– Mauvaise observance au ttt, arrêt du suivi,pas
d’autosurveillance glycémique → déni de sa
pathologie
– Complications débutantes (néphro + ophtalmo)
– Inapte temporaire au poste dans ce contexte médical
actuel, à revoir après reprise d’un suivi endocrino
correct.
Conclusion
• Travailler quand on est diabétique est
largement possible
• Nécessité d’un suivi régulier par le
médecin du travail
• Travail en lien avec médecin traitant et
endocrinologue, avec accord du salarié.
• Informer l’entourage professionnel de la
CAT en cas de malaise hypoglycémique