DYSFONCTIONS SEXUELLES FEMININES :
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DYSFONCTIONS SEXUELLES FEMININES :
DYSFONCTIONS SEXUELLES FEMININES : Une terminologie et des possibilités d’évaluation au cabinet enfin disponibles ? Dr Michèle Herbaut-Buvat Des progrès considérables ont précédé la commercialisation du VIAGRA (ou autres IPDE5; ou alprostadil) : études pharmacologiques; méthodologie rigoureuse des études cliniques contrôlées; affinement des questionnaires pour l’évaluation et le suivi psychologique du patient + le suivi du couple. Ces progrès ont permis une meilleure compréhension de la physiologie sexuelle masculine et la mise au point de traitements permettant de restaurer les capacités érectiles des hommes dysfonctionnels. Il devenait passionnant de savoir si les dysfonctions sexuelles (DS) féminines pouvaient être conceptualisées de la même façon que chez les hommes. Ce d’autant plus que les femmes manquaient cruellement de possibilités thérapeutiques pendant 20 ou 30 ans. Les laboratoires pharmaceutiques étaient particulièrement concernés, espérant trouver là un marché potentiellement important. Ancienne classification des dysfonctions sexuelles (DS) féminines. A partir de Masters & Johnson en 1966, la prise en charge des femmes dépendait le + souvent d’une sexothérapie classique et la définition des DS féminines était classée dans le manuel des troubles « psychiatriques », dont le dernier était le DSM IV ( Diagnostic Statistic Manual of Mental Disorders), 2000. La définition était focalisée sur les composantes psychologiques et le parcours relationnel de la femme dans son couple. Ancienne classification des DS féminines Les DS féminines étaient réparties en problèmes d’excitation, de lubrification et d’orgasme. Cependant, ces définitions manquaient de précision. Par ailleurs, les antécédents obstétricaux, chirurgicaux ou une prise d’un médicament pouvant interférer/fonction sexuelle non pris en compte. De même, la tranche d’âge d’apparition de la DS non envisagée (alors que très importante). Progrès récents dans classification des DS R Basson et coll : révision en 2000 de la classification du DSM IV et formulation de recommandations pour une meilleure appréciation des DS. Différents experts (psychologues-gynécologues-urologuesphysiologistes…) ont travaillé sur ce problème de définitions, dont les groupes de Bancroft, Segraves…permettant un consensus à Paris en Juin 2004 (« 2d International Consultation on Sexual Medicine »). Ces définitions ensuite diffusées lors du congrès de l’ISSWSH, à Atlanta( octobre 2004) et dans revue « Sexual Medicine » en 2004. Questionnaires utilisés désormais (traduits de l’anglais). Le questionnaire de satisfaction/vie (Life Satisfaction Checklist) : 9 questions x 6 réponses possibles (dont vie familiale-amis-loisirsfinances-élan vital…). Réponse chiffrée 1 = très insatisfaite à 6 = très satisfaite. Le questionnaire / historique médicale (Medical Historic Questionnaire, MHQ) : 7 questions x 4 à 7 réponses possibles (dont fréquence RS & tranche d’âge apparition DS). Fréquence rare RS fera éliminer patiente dans études cliniques. Les questions complémentaires/santé sexuelle : 4 questions sur fréquence RS & orgasmes. Echelle sécheresse vaginale incluse ( 0 à 7) Questionnaires utilisés désormais (traduits de l’anglais) Le questionnaire / sexualité féminine (Sexual Function Questionnaire, SFQ) : scores des 4 domaines bien compartimentés décrivant la sexualité féminine : le désir, l’excitation, l’orgasme (30 questions x 5 réponses possibles). L’élément douloureux est évalué (scores douleur). NB : on appelle « activité sexuelle » toute activité aboutissant à une stimulation ou un plaisir ( présence partenaire non nécessaire). On appelle « vie sexuelle » les activités sexuelles physiques & sentimentales les accompagnant avec le partenaire. Questionnaires utilisés désormais (traduits de l’anglais) Le score de détresse sexuelle chez la femme (Female Sexual Distress Scale, FSDS) : seules les femmes avec scores > ou = 15 et 3 items > 3 sont retenues pour les études cliniques. = logique car on n’a pas à traiter femme ne souffrant pas de ce problème; ou si traitement proposé, observance ne sera pas correcte. Le questionnaire de la qualité de vie sexuelle (Sexual Quality of Life Questionnaire-Female) (SQOL-F). DS féminines désormais réparties en : Désir sexuel hypo-actif (DSH) : questions / fantasmes ou idées / activité sexuelle (score donné par le SFQ). Troubles de l’excitation sexuelle : items étudiant part sexualité menant à pénétration, dont lubrification (score donné par le SFQ). Troubles de l’orgasme (= stade final excitation) (score donné par le SFQ). Troubles avec composante douloureuse. Autres progrès récents En + de ces progrès réalisés dans la classification des DS féminines, il y a aussi la possibilité d’utiliser des questionnaires de dépression (traduits de l’anglais et validés en français). En effet, une baisse du désir est un des premiers symptômes d’un état dépressif. (ce type de femme sera exclu des études cliniques car nécessitant une prise en charge spécifique). Heiman de l’équipe de Segraves : standards de recherche bien codifiés pour les études cliniques à venir (2004). Si questionnaire utilisé dans le cadre d’une étude clinique Il doit être rempli en présence de l’expérimentateur, ou de l’attaché (e) de recherche clinique. On demande à la patiente de répondre soigneusement aux questions, mais on considérera que la 1° réponse est probablement la + objective. Réserves / «Progrès » prétendus S Althof : congrès de l’ISSWSH – Las Vegas, 2005 : vives réserves / fiabilité dans réponses /questionnaires. Non exclu de revenir ultérieurement à auto-questionnaires quotidiens moins fastidieux. En pratique gynécologique ou sexologique courante, sans prétendre à la finesse des réponses / questionnaires : évident qu’il était possible en quelques questions de répertorier les femmes en troubles du désir; symptomatologies douloureuses; antécédents médico-chirurgicaux; âge (+++), les vaginismes étant mis à part. Réserves / « progrès » prétendus Consommation de temps +++(voire d’argent) sauf si le remplissage des questionnaires entre dans le cadre d’une étude clinique. A qui profite cet affinement de la terminologie ? Certainement à améliorer les études cliniques, et à ce que l’industrie pharmaceutique dispose de groupes comparables pour la sélection et l’affectation à une classe spécifique de DS féminines, ceci alors que la sexualité de la femme semble plus subtile que la sexualité masculine, par ses intrications psycho-affectives ou sa fragilité / conflits. Obligation d’outils d’évaluation = paradoxe Avoir autant de questionnaires et si peu de médications à proposer aux femmes dysfonctionnelles. Cependant ces nouveaux outils d’évaluation ont été un apport important pour les études cliniques. Les IPDE5 ne se sont montrés efficaces que dans des populations de femmes hyper-sélectionnées. Certains SERM pourraient être efficaces, voire dans certaines populations un apport androgénique. Conclusion Maintenant que l’on dispose d’outils d’évaluation améliorés, on doit espérer disposer pour les femmes dysfonctionnelles de médications enfin efficaces. Il faut souligner que, comme chez l’homme, les études en cours ou à venir, permettront une meilleure compréhension des inter-actions psychologiques, anatomiques et physiologiques.