L`essaim sismique de 1756
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L`essaim sismique de 1756
L’essaim sismique de 1756 dans l’Oise Le 1er novembre 1755, la capitale du Portugal, Lisbonne, était affectée par un violent séisme puis par un incendie qui détruisit une partie de la ville. La nouvelle de cette catastrophe, qui anima les réflexions philosophiques des grands esprits de l’époque tels Rousseau, Voltaire ou Kant, eut un impact psychologique fort auprès de la population voyant dans cette tragédie les prémices d’une fin du monde. Quelques mois plus tard, l’actuel département de l’Oise trembla des secousses d’un essaim sismique centré sur la Picardie. Impuissante face à la succession des séismes, la population trouva des réponses dans la prière tandis que les scientifiques étudiaient le phénomène naturel. Document 1. « L’ensemble de ces données montre que le tremblement de terre de 1756 dans l’Oise réunit plusieurs vagues de secousses en avril-mai 1756, ce que l’on appelle un essaim, c’està-dire des secousses d’importance équivalentes affectant une région. Les premières secousses se manifestèrent en févier et prolongèrent jusqu’à la fin mai, avec un maximum le 30avril. L’essaim de secousses proprement dit commença le 26 avril et toucha les actuels départements de l’Osie et de la Somme à plusieurs reprises dans la journée, avec une intensité modérée, ne dépassant pas V sur l’échelle MSK : pas de dégâts matériels à signaler, mais des cloches sonnant toutes seules à Gannes, des phénomènes de frayeur. Une accalmie suivit, du 26 au 30 avril. La secousse majeure eut lieu le 30 avril, se distinguant par l’intensité plus élevée de ses effets comme par la large extension de son macrosismique, bien au-delà de l’Oise et de la Somme, atteignant l’Aisne, la Mare, la Seine-et-Marne, la région parisienne, voire même le Pas-de-Calais. A l’épicentre, estimé entre Breteuil et Saint-Just-en-Chaussée, l’intensité aurait atteint le degré VI. Pour Breteuil les sources divergent, car certaines indiquent des chutes nombreuses de cheminées, des maisons écroulées, mais la plus fiable indique qu’il n’y eut pas « d’ébranlements sensibles ». En revanche, les châteaux de Wavignies, de BoisRenault et du Plessier-Saint-Just furent « ébranlés et lézardés » (…) L’activité sismique s’est poursuivie entre le 30 avril et le 15 mai dans la région de Breteuil. On note une reprise e 15 mai avec des répliques (secousses plus faibles succédant à un séisme dit principal en un même lieu) dans l’Oise et la Somme. L’intensité macrosismique est estimée à IV, sans dégâts matériels, avec des réactions de frayeur. Enfin, des secousses de faible intensité furent signalées autour de Breteuil jusqu’en septembre. » Extrait de l’article Un tremblement de terre au tournant du XVIIIe siècle : l’essaim sismique de l’Oise de mars-avril 1756, par Grégory Quenet in Annales historiques Compiègnoises n°75-76, pp.26-35, printemps 1999. Document 2. « On éprouva dans le courant d’un mois plusieurs secousses très sensibles à Breteuil et à Ebeillaux. On se sentait un peu bercé, on entendait le cliquetis de vaisselles sur les potières, mais du reste aucun événement n’est arrivé… L’épouvante des habitants de Breteuil a été si grande qu’une partie couchait dans les champs et jardin ; on faisait journellement des processions ». Extrait de l’hHstoire de Breteuil, par M. Mouret, 1821. Document 3. « Le 26 avril 1756, a commencé sur les neuf heures du matin un tremblement de terre qui a duré jusqu’au 30 du mois de mai : il s’est fait sentir à quatre ou cinq lieues aux environs dans certains endroits ; dans certains plus fort, dans certains moins fort. Le 30 avril, sur les neuf heures du soir, il vint une secousse si violente, le temps étant bien calme, que tout le monde crut prérir sans ressource ; j’étais alors à Grandvilliers, par delà Crèvecœur, mon pays natal, où l’on de ressentit rien. Chacun se sauva des maisons qui étaient agitées d’une manière épouvantable ; on aurait dit qu’elles allaient être renversées ; la terres faisait des bondissements sous les pieds conne si elle eût été prête à s’entre’ouvrir. On entendait chacun pousser dans les rues des cris et des hurlements affreux dans l’appréhension de la mort. Il ne se passa pas de jour qu’on entendît des secousses, tantôt plus fréquentes, tantôt moins fréquentes, tantôt plus violentes, tantôt moins violentes. Le 15 de mai, sur les deux heures du matin, le tremblement recommença avec une violence terrible. L’alarme redoubla indéfiniment ; il fit cinq ou six secousses affreuses, sans compter d’autres moins fortes ; heureusement, il n’a péri personne. On eut recours aux prières, processions, saluts, jeûnes, aumônes pour apaiser la colère du Seigneur. Il ne se peut rien voir de si effrayant. Dieu veuille préserver ceux qui viendront dans la suite, de pareilles calamités. » Extrait du journal paroissial de Bonvillers, par le curé Delarche. Document 4. « Le 6 avril 1756, sur les neuf heures du matin, on a senti un grand tremblement de terre, et les cloches ont sonné par plusieurs secousses, pendant deux heures entières. Le monde fort épouvanté s’est transporté à la chapelle de N.-D. de Bon Secours de Gannes, et à l’église du lieu, où l’on a chanté le salut pour demander à Dieu des grâces et des bénédictions. Cela à resté tranquille jusqu’au vendredi 30 avril, à neuf heures un quart du soir, que le tremblement a redoublé d’une force épouvantable. On a chanté le salut, et tout le monde a été en prières toute la nuit. Le lendemain, un grand nombre de peuples sont venus à pieds nus en pèlerinage à la chapelle. Les paroisses de Quincampoix, de Chepoix, de Welles, de la Hérelle, de Catillon, de Plainval et de Tartigny sont venus à pieds nus, en procession à la chapelle, pour supplier la Sainte-Vierge de vouloir bien prier son cher Fils Jésus-Christ d’apaiser sa colère et de nous préserver tous. » Extrait de la notice historique sur Sains-Morainvillers Par le chanoine Martinval. Document 5. « On courut aussitôt à l’Eglise se jeter aux pieds du père des miséricordes, peu restaient chez eux, l’office quoique long, était toujours trop court dans ces moments de dévotion. On n’entendait, le long des chemins qui conduisent à l’Eglise, autre chose que des lamentations, on ne se lassait pas d’entendre la parole de Dieu, les événements l’ont rendu efficace pour peu de temps, mais comme elle était tombée sur la peau elle sécha bientôt (…) Les saluts sur le soir ont duré environ un mois, avec les saluts a disparu la dévotion. Et on est pour le moins aussi méchant aujourd’hui qu’auparavant» Extrait du registre paroissial d’Hédencourt par le curé Pierre Mesnard. Document 6. « On conserve le souvenir du tremblement de terre dont toute la Picardie ressentit le 30 avril 1756 la secousse. Le vieux château de Mesnil-saint-Firmin en fut ébranlé au point d’en rendre la reconstruction indispensable ». Extrait du Précis statistique sur le canton de Breteuil, par Louis Graves, 1843.