Genre et militantisme Document 1 : « Trois processus sociaux

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Genre et militantisme Document 1 : « Trois processus sociaux
Genre et militantisme
Document 1 :
« Trois processus sociaux tendent à produire et à légitimer la marginalisation des femmes
dans les structures syndicales aux différents niveaux hiérarchiques […] Le modèle informel
de la carrière syndicale qui suppose une importante disponibilité temporelle et une implication
de soi toujours plus forte se révèle des plus masculins. En effet, même si les hommes sont
nombreux à ne pas envisager ce sacerdoce, les femmes, même après des années de
syndicalisme local, le rejettent soit en refusant d’entrer dans ce syndicalisme – élections
notamment –, soit en limitant dans le temps leurs responsabilités syndicales. Le processus
interne de promotion syndicale rejoint ici un rôle socialement construit comme masculin :
l’implication totale de soi dans une activité extérieure et la délégation du poids des tâches
domestiques sur la conjointe, ce qui rend l’accès et le maintien des femmes dans les positions
de direction peu envisageables […] Une deuxième raison à la moindre présence des femmes
dans l’activité syndicale tient à ce que la militance est souvent vécue [et présentée] par les
hommes syndicalistes comme un investissement professionnel, voire une promotion sociale
intéressante, leur permettant de compléter ou de s’éloigner d’un emploi peu valorisé et
donnant ainsi du sens à leur vie professionnelle. En revanche, l’essentiel des femmes
rencontrées privilégie des formes de retrait de l’activité professionnelle, classiques dans cette
catégorie de sexe – la maternité, les parents âgés, le travail domestique, l’investissement dans
des associations locales […] Femmes dans un monde masculin, les syndicalistes tendent à
devoir se comporter ‘’comme des hommes’’, afin d’être reconnues et respectées. Le
fonctionnement même de l’activité syndicale semble encore très marqué par des conventions
masculines qui façonnent les relations entre les syndicalistes de même niveau et de niveau
supérieur, les salarié-e-s et les dirigeant-e-s. […] [Les moments de sociabilité syndicale] sont
marqués par une certaine masculinité, déjà dans les sujets de conversation : les militants
relativement âgés du syndicat ‘’traditionnel’’ parlent football, vélo ou chasse, et ceux plus
jeunes et ‘’modernes’’ de l’organisation Y parlent photographie, dernières nouvelles
politiques et cinéma […] Par ailleurs, les modes d’échange plutôt blagueurs et piquants – ici
encore dans des styles différents selon le syndicat – sont plutôt dominés par les hommes,
même si certaines femmes présentes se révèlent très à l’aise dans ces échanges, font preuve de
répartie et adoptent un style très affirmé, généralement associé au masculin ».
Marie Buscatto, « Syndicaliste en entreprise », in Olivier Fillieule et Patricia Roux (dir.), Le
sexe du militantisme, Paris, Presses de Science Po, 2009, pp. 75-91.
Document 2 :
« La position symbolique et matérielle des femmes au sein de la famille joue un rôle
important dans leurs itinéraires militants. À commencer par l’image de la bonne mère, à
laquelle elles se doivent de répondre pour que leur engagement soit légitime. La crédibilité
des militantes, quelle que soit leur mouvance, tient notamment à la réussite scolaire de leurs
enfants. Sinon, elles sont perçues comme de mauvaises épouses et mères […] Symboles du
virilisme du mouvement ouvrier, des leaders misogynes sont parfois mentionnés dans les
entretiens et les débats [par les militantes interviewées]. Tout en redoutant les femmes
briseuses de grève qui pourraient freiner l’investissement du conjoint, le mouvement ouvrier
ne valorise pas suffisamment celles qui luttent, les laissant en marge de la mémoire militante
collective […] Plusieurs interviewées déplorent que rien ne soit fait pour faciliter leur
implication militante, les mettre à l’aise, choisir des horaires de réunion adaptés, éviter un
rythme militant incompatible avec un non-partage du travail domestique ou organiser des
gardes collectives d’enfants ».
Geneviève Dermenjian et Dominique Loiseau, « Itinéraires de femmes communistes », in
Olivier Fillieule et Patricia Roux (dir.), Le sexe du militantisme, Paris, Presses de Science Po,
2009, pp. 93-113.
Document 3 :
Taux d’adhésion selon l’âge et le sexe pour certains types d’associations en 2008 (en %).
Document 4 :
Responsabilités prises dans la vie associative en 2006 (en %)
Lecture : en 2006, 19% des femmes ont une responsabilité dans la vie associative.
Champ : France métropolitaine, individus de 16 ans ou plus et adhérant à au moins une
association.
Source : Insee, statistiques sur les ressources et les conditions de vie (SRCV), 2006.