N du rôle général

Transcription

N du rôle général
N M90855 du rôle général
N 7370 du rôle particulier
COMMISSION POUR L'AIDE FINANCIÈRE AUX VICTIMES D'ACTES
INTENTIONNELS DE VIOLENCE ET AUX SAUVETEURS OCCASIONNELS
-------------------------------------------------------Décision du 4 septembre 2012
2ème chambre, siégeant en langue française,
composée
Monsieur S. CHARLIER, vice-président.
Maître R. DEWULF, membre suppléant.
Monsieur J. BUTS, membre suppléant.
et assistée de Monsieur P. ROBERT, secrétaire.
En cause de : Mademoiselle Farah X., née le ../../2005 à …,
Pour laquelle Maître Christophe S. agit en qualité de tuteur des biens et
de la personne de Mademoiselle Farah X..
Sans profession,
Saisine de la Commission
Par requête adressée par pli ordinaire et parvenue au Secrétariat de la Commission en
date du 9 septembre 2009, Maître Gabie-Ange M. expose que la dénommée Kristel Y.,
mère de Mademoiselle Farah X., a été victime d’un acte intentionnel de violence (des
suites duquel elle est décédée) et, en tant que proche d’une personne ou personne qui
vivait dans un rapport familial durable avec une personne dont le décès est la suite
directe d’un acte intentionnel de violence, Maître Christophe S., en qualité de tuteur des
biens et de la personne de Mademoiselle Farah X., postule l’octroi d’une aide principale
de 62.000 €.
Exposé des faits
Le dénommé Abderrahim X. et Kristel Y. se sont rencontrés en 2003 et se sont mariés
le 12 janvier 2005. Ils avaient chacun un lourd passé de toxicomanie, alcoolique et
d'assuétude aux drogues dures. Abderrahim X. a affirmé, de manière constante, que,
dès le samedi matin et jusque dans la nuit du drame, son épouse et lui-même avaient bu
de grandes quantités d'alcool et pris de la cocaïne.
Selon lui, dans la nuit du samedi 17 au dimanche 18 septembre 2005, dans
l'appartement du couple, avenue C…, à …, une nouvelle dispute aurait éclaté dans la
nuit ; Kristel Y. se serait montrée particulièrement agressive à son égard et se serait
mise à hurler. Il a déclaré lui avoir mis la main sur la bouche pour qu'elle cesse de
crier, mais en vain. Il dit avoir "pété les plombs" et avoir commencé à lui prendre la
gorge avec les mains, avant de prendre le drap de lit et de l'étrangler jusqu'à ce qu'elle
perde connaissance. Dès sa première audition devant la police, Abderrahim X. a passé
des aveux complets
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Séquelles médicales.
Les médecins légistes ont confirmé que des manœuvres de strangulation étaient à
l'origine du décès. L'analyse de l'urine de l'accusé a été positive pour la cocaïne et le
cannabis. La prise de sang a révélé un taux de 0,24 gramme d'alcool par litre de sang.
Le rapport d'autopsie de la victime a indiqué la présence de cocaïne et de Bromazépam,
un puissant anxiolytique, mais n'a pas décelé de consommation de boissons alcoolisées.
Suites judiciaires.
Par arrêt rendu le 28 septembre 2007, passé en force de chose jugée, la Cour d’Assises
de l’arrondissement administratif de … condamne le dénommé Abderrahim X. à 15 ans
de réclusion.
Par arrêt rendu le même jour, la Cour d’Assises de l’arrondissement administratif de …
condamne le dénommé Abderrahim X. à payer à la partie civile, Maître Christophe S.,
en qualité de tuteur des biens et de la personne de Mademoiselle Farah X., la somme de
50.000 €.
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Vu le dossier de la procédure,
Vu le rapport établi le 7 novembre 2011,
Vu l’avis du Délégué du Ministre déposé en date du 2 décembre 2011 et la réponse
écrite déposée par le conseil du requérant de la requérante en date 28 décembre 2011,
Vu les notifications aux parties des divers actes ;
Vu la feuille d’audience du 1er août 2012,
Entendus à cette audience :
Monsieur S. CHARLIER, vice-président, en son rapport,
La requérante n’a pas comparu à l’audience. Elle était représentée par Maître Christophe
S. agissant en qualité de tuteur ad hoc et son conseil, Maître Gisèle S. loco Maître GabieAnge M. .
Le délégué du Ministre de la Justice était absent.
OBJET DE LA DEMANDE
Lors de l’audience, la requérante le requérant s’en remet à la jurisprudence de la
commission quant au montant à allouer.
Le requérant, par la voix de son conseil, Maître Henri D. qui, par courrier du 19
septembre 2011, précise qu’il ne sera pas présent, demande à la Commission de
statuer sur pièces.
Recevabilité de la demande
Il résulte des éléments du dossier que la demande d’aide principale a été introduite dans
les formes et délais de la loi.
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Fondement de la décision
Tenant compte d’une part,
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que l’article 31, 2° de la loi du 1er août 1985 stipule que “la Commission peut
octroyer une aide financière aux successibles au sens de l'article 731 du Code civil,
jusqu'au deuxième degré inclus, d'une personne dont le décès est la suite directe
d'un acte intentionnel de violence, ou aux personnes qui vivaient dans un rapport
familial durable avec elle »;
que l’article 32 §2 1°dispose que pour l'octroi d'une aide aux personnes visées à
l'article 31, 2°, la commission se fonde entre autres sur le dommage moral ;
que la requérante a subi un préjudice moral suite à la perte de sa maman ;
que le préjudice moral subi du fait du décès d’un proche et la nature du rapport
familial durable avec une personne dont le décès est la suite directe d’un acte
intentionnel de violence se déterminent, entre autres, en fonction du degré de
parenté, des liens d’affection, de la circonstance que la partie requérante cohabitait
ou non avec la victime et de la durée de la cohabitation ;
d’autre part
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que Farah X. ne cohabitait pas avec la victime au moment des faits puisqu’elle avait
été hébergée en pouponnière 6 semaines après sa naissance ;
que, en terme de liens d’affection, il y a lieu de tenir compte du comportement de la
mère de la requérante et dudit hébergement ;
qu’elle bénéficie de l’encadrement d’une famille d’accueil, sans aucun doute, plus
positif que celui qui a déterminé le tribunal de la Jeunesse à l’éloigner de la
victime ;
que l’évaluation d’une perte d’aliments et d’une contribution économique se fait sur
base des revenus nets de la victime ;
que la victime bénéficiait des allocations de chômage, dépensant celles-ci à sa
consommation personnelle ;
que l'enfant qui a perdu ses deux parents ou qui n'a plus de contact avec le parent
survivant, bénéficie d'office du supplément d'allocations familiales pour orphelins,
accordé à partir du mois qui suit la date du décès,
que la requérante bénéficie désormais des allocations familiales au taux majoré qui
compenseront l’éventuelle perte de contribution de la victime ;
que le montant de l’aide est fixé en équité et ne correspond pas nécessairement à la
réparation intégrale du préjudice subi ;
que la commission n’est pas tenue par l’autorité de la chose jugée d’une décision
judiciaire ayant statué précédemment sur les intérêts civils de la partie requérante.
la Commission statuant ex aequo et bono, estime devoir accorder au requérant à la
requérante une aide principale de une somme de 7.500 € qui sera bloquée sur un compte
ou un livret d’épargne ouvert au nom de l’enfant et frappée d’indisponibilité jusqu’à sa
majorité ou émancipation, sauf autorisation à donner par le magistrat compétent dont
aucune part n’est attribuée au titre de remplacement de revenu.
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PAR CES MOTIFS :
Vu les articles 30 à 41 de la loi du 1er août 1985 portant des mesures fiscales et autres
modifiée par les lois des 26 mars, 22 avril 2003 et 27 décembre 2004, les articles 28 à 32
de l'arrêté royal du 18 décembre 1986 relatif à la Commission pour l'aide aux victimes
d'actes intentionnels de violence, les articles 39 à 42 des lois coordonnées du 18 juillet
1966 sur l'emploi des langues en matière administrative,
La Commission, statuant contradictoirement à l’égard de la requérante et par défaut
à l’égard du délégué du Ministre, en audience publique,
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déclare la demande recevable et partiellement fondée ;
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alloue au requérant à la requérante une aide principale de une somme de 7.500
€ qui sera bloquée sur un compte ou un livret d’épargne ouvert au nom de
l’enfant et frappée d’indisponibilité jusqu’à sa majorité ou émancipation, sauf
autorisation à donner par le magistrat compétent
Ainsi fait, en langue française, le 4 septembre 2012.
Le secrétaire,
Le vice-président,
P. ROBERT
S. CHARLIER,