Le tour du monde d`Astérix

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Le tour du monde d`Astérix
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Le Tour du monde d’Astérix
Actes du colloque tenu à la Sorbonne les 30 et 31
octobre 2009
Sous la direction de Bertrand Richet
Paris : Presses Sorbonne Nouvelle, 2011
Broché. 317 pages. ISBN 978-2-87854-514-2. 23€
Recension de Fabrice Antoine
Université Charles-de-Gaulle, Lille 3
Ce livre, assemblé par Bertrand Richet (Paris III), est
un respectable volume de 317 pages d’actes du
colloque organisé à la Sorbonne Nouvelle en
partenariat avec Nancy Université pour célébrer en
octobre 2009 le cinquantenaire de la naissance de
celui qu’il est convenu d’appeler « le petit Gaulois »,
Astérix. Il réunit 21 articles tirés de communications
présentées dans le cadre de ce colloque
international, organisés autour des thèmes de la
diffusion (3 articles), des lectures (5 articles), des
traductions (8) et des adaptations (5)—on pourrait
discuter, comme souvent, le classement des articles
dans un thème donné, même si l’on comprend la
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volonté de ne pas déséquilibrer les quatre parties
ainsi définies ; il eût tout de même été plus juste de
faire figurer les deux premiers textes de la quatrième
partie dans la troisième, puisqu’ils portent sur la
traduction et non pas sur l’adaptation, même s’ils
traitent aussi de l’image, mais l’article de José Yuste
Frías (« Traduire l’image dans les albums d’Astérix—
à la recherche du pouce perdu en Hispanie » [255271]), qui est sans doute le plus stimulant et le plus
enlevé, en même temps qu’érudit sans être pédant ni
ennuyeux, insiste justement sur l’idée que le
traducteur travaille sur le couple texte-image et non
sur l’un des éléments pris isolément. On reviendra à
ce texte.
Les articles oscillent en longueur de sept à vingt
pages, avec une moyenne autour de quatorze pages
environ. Le recueil comprend l’avant-propos et
l’introduction de rigueur et chaque article est
naturellement précédé d’un résumé en français et en
anglais, et le plus souvent accompagnéd’une
bibliographie plus ou moins fournie—mais pourquoi
diable les auteurs des ouvrages mentionnés là n’ontils droit qu’à l’initiale de leur prénom ? S’agit-il d’une
norme particulière ? D’une économie ? Mystère, car
ce n’est pas celle appliquée dans Palimpsestes, des
mêmes presses universitaires, ni dans l’ouvrage sur
Astérix du même Bertrand Richet, co-auteur avec
Catherine Delesse, paru en… 2009 (Le Coq gaulois
à l’heure anglaise—Analyse de la traduction anglaise
d’Astérix, Arras : Artois Presses Université).
Ce recueil est doté d’une couverture noire, qui se
veut sans doute sobre, et qui, surtout, arbore le
dessin en bleu et blanc d’un casque que l’on
suppose gaulois, mais qui est surtout le logo… des
GAULOISES CAPORAL (version de Jacno) ! On
s’explique mal (en l’absence de crédits graphiques)
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l’utilisation de ce dessin identifiable au premier coup
d’œil et donc cette référence au tabac—pourquoi un
dessin du casque d’Astérix n’a-t-il pas été utilisé ?
S’agit-il d’une question de droits à acquitter ? Il serait
intéressant de savoir si les Éditions Albert René ont
été sollicitées ou si le choix de cette illustration s’est
fait indépendamment de l’éditeur scientifique—elle
est quoi qu’il en soit d’un fort mauvais effet (y
compris d’ailleurs sur tous les documents de
promotion du livre qui ont été assez largement
diffusés) ! Bref, voilà pour les « vital statistics » !
L’un des auteurs (Francesca Vitale, « Astérix chez
les Italiens : l’ironie linguistique du doublage »)
rappelle que les pères d’Astérix cherchaient « à se
marrer et faire marrer les gens » [275]. Pour atteindre
ce but, le scénariste et le dessinateur ont eu recours
à un certain nombre de procédés, de ficelles, de
ressorts, du comique, qui ont, me semble-t-il, été
déjà amplement catalogués, étiquetés, analysés, par
exemple, pour synthèse, dans le livre de Richet et
Delesse évoqué ci-dessus. Tous ces ressorts font
qu’Astérix est Astérix et n’est pas, par exemple,
Tintin, c’est-à-dire qu’ils font que cette BD est si
typiquement française, et donc difficilement
comprise—lire aussi difficile à traduire ou à
transposer—dans une autre langue-culture ; d’où
l’échec d’Astérix au Japon, à propos duquel Misako
Nemoto, dans un article clair et éclairant pour
d’autres langues que le japonais, d’ailleurs, (« Astérix
au Japon » [235-244]), dit qu’il était inévitable, à
cause de trois facteurs au moins : la traduction a été
entreprise par des grands noms de la culture savante
au Japon, les valeurs représentées par
personnages
(les
Gaulois
indisciplinés
les
et
individualistes entre autres) sont aux antipodes de
celles qui règnent dans la société japonaise, et
surtout, ce que ne souligne peut-être pas assez
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fortement l’auteur, la BD française souffre d’un
décalage trop marqué par rapport à l’univers mental
du lecteur japonais moyen [243], avec en particulier
ses jeux intellectuels inhabituels dans le domaine
des mangas—ce jeu, ce décalage, est le leitmotiv,
évidemment, qui résonne à travers tous les articles
de ce recueil. Comme un auteur après l’autre le
souligne, chacun à sa façon, traduire Astérix
condense toute les pires difficultés auxquelles un
traducteur peut être confronté.
Le non-sens des premières traductions en langue
arabe, en Égypte, provient du même énorme écueil,
qui affleure aussi dans la graphie et les couleurs. Le
bref article d’Aïda Hosny (« Une sémiotique de
l’absence ? Le code des couleurs dans Astérix, entre
l’original français et l’édition arabe de la maison Darel-Maaref » [247-253]) souligne combien le format
égyptien de la BD de l’époque au moins, où deux
pages sur quatre sont en noir et blanc, vouait
irrémédiablement la traduction à l’échec. Jean-Paul
Gabilliet, lui, analyse les raisons de l’échec d’Astérix
aux États-Unis (« Astérix en Amérique : la réception
d’Astérix sur le marché nord-américain » [59-70]) et,
sans étudier la traduction elle-même, montre bien
comment Astérix a été pour les Américains un Objet
Éditorial Non Identifié, est resté un produit culturel
européen, non consommable (i.e. « comestible et
goûteux » [68]) aux États-Unis—ce que Anthea Bell,
traductrice d’Astérix en Grande-Bretagne, dit aussi
[152], en ajoutant que les Européens ont « une
histoire plus longue que celle des États-Unis »… et
surtout que les Anglais comme les Français « aiment
l’humour de l’anachronisme » [152], et de faire
référence au livre de Sellars et Yeatman, 1066 and
All That ; elle aurait pu tout aussi bien parler des
Monty Python et de leur goût pour l’irréaliste,
l’anachronisme et le jeu de mots qui fait flèche de
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tout bois : cette façon de ne pas prendre l’histoire
(trop) au sérieux est un point commun aux Français
et aux Britanniques ; il y aurait sans doute matière à
comparaison entre nations ici, ce qu’aucun des
articles ne fait puisque chacun se concentre sur un
pays donné.
Bref, si Astérix n’a pu être traduit, c’est-à-dire adapté
dans certaines cultures d’accueil, il l’a été dans un
nombre impressionnant d’autres (voir l’article de
Bernard Cros, « Du village d’Astérix au village
global : historique de cinquante années de succès »
[19-38]—on est étonné de l’expression « village
global » : « planétaire » eût sans doute été plus juste
—, qui fournit quantité de données et d’observations
sur la fortune d’Astérix de par le monde, ainsi que
[36-37] des statistiques intéressantes et sans doute à
affiner et analyser avec plus de précision, sur
l’acclimatation dans d’autres langues d’expressions
typiques d’Astérix, traduites, qui montre la place prise
par l’univers créé par cette BD dans des languescultures autres que française)… et Astérix a pu être
aussi récupéré, détourné, pour lui faire servir un
projet autre que le sien, politique, voire idéologique,
comme lors des premières traductions en allemand :
Klaus Kaindl (« Astérix le Germanique : les
premières traductions d’Astérix en Allemagne » [207218]), après un préambule sur la traductologie et la
traduction de BD, montre comment la manipulation
idéologique a pu s’exercer aux dépens d’Astérix, qui
s’est trouvé transposé dans le contexte allemand de
l’époque (affrontement entre Ouest et Est, guerre
froide, « occupation » américaine), manipulé,
dénaturé, y compris sur le plan de l’onomastique
avec
l’introduction
de
références
politiques
allemandes et avec des relents d’anti-communisme
et d’antisémitisme. K. Kaindl aurait pu sans doute
ouvrir son propos en soulignant que ce n’est pas la
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BD qui autorise le détournement : toute littérature,
tout texte, peut se voir affecter une mission
idéologique à la traduction, selon les visées de
l’éditeur ou du traducteur—l’histoire de la traduction
offre d’autres exemples : ce qui est peut-être
paradoxal ici, c’est que l’on soit parvenu à détourner
ainsi ce qui ailleurs a paru trop « gaulois » pour être
acclimaté à une autre culture !
Mais une traduction est-elle innocente, en réalité ?
Astérix a encore été adapté, de façon encore plus
obligatoire ou inévitable lorsque les auteurs font
voyager leurs personnages hors des frontières de la
Gaule. La traduction d’Astérix en Hispanie en
espagnol ou d’Astérix chez les Bretons en anglais
pose des problèmes particuliers. Jean-Paul Meyer
(« Formes et enjeux de la traduction interculturelle :
l’appropriation
des
stéréotypes
nationaux
dans
quatre traductions des Aventures d’Astérix » [169180]) cherche à analyser dans la traduction de ces
deux albums le degré d’appropriation du stéréotype,
que le traducteur peut, dit-il, simplement détourner,
récupérer ou encore familiariser ou exotiser. Outre
que les deux dernières opérations ne sont pas assez
clairement définies et illustrées et qu’elles ne sont
pas assez développées, je crois que la réflexion de
ce texte pose les questions sur le rôle du traducteur
qui sont la base même de son métier et des
différentes stratégies qu’il met en œuvre selon les
possibilités offertes par la langue vers laquelle il
traduit. Anthea Bell, quant à elle, (« Astérix chez les
anglophones » [151-158]) évoque simplement les
stratégies auxquelles elle a eu recours dans son
travail de traductrice, en particulier pour traduire les
jeux
de
mots,
les
calembours,
les
allusions
culturelles et les accents, dont l’accent anglais, dans
Astérix chez les Bretons—des observations et des
solutions classiques ici encore une fois. Plus
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intéressant, mais peut-être plus touffu, voire aride, le
texte de Thomas Faye (« De l’étrangeté en
traduction : stratégies onomastiques et traitement du
stéréotype dans la traduction espagnole d’Astérix en
Hispanie
»
[193-206])
examine
comment
le
traducteur procède à la recréation onomastique
d’une part, à la transposition des stéréotypes d’autre
part, pour fournir au lecteur espagnol d’Astérix en
Hispanie une vision décalée de lui-même apte à
garantir la permanence du comique original [195],
c’est-à-dire, à produire le même effet que dans la
langue originale, dirons-nous. L’analyse de la
traduction de l’album est détaillée et la façon dont les
mécanismes sont démontés pour pouvoir être
remontés en LA est clairement mise en lumière : on
parlerait peut-être ailleurs de « tradaptation » pour
décrire pleinement l’activité du traducteur ici.
La traduction en italien, évidemment, est particulière
puisque les adversaires des Gaulois sont les
Romains et que l’histoire du lecteur italien est donc
mise en jeu ; toute l’histoire ? Non, et l’adaptation et
l’acclimatation à la culture italienne contemporaine
ont la part belle dans le doublage d’Astérix le Gaulois
et Astérix et Cléopâtre, selon Francesca Vitale (déjà
citée, [273-283]), qui montre comment les choix
traductifs entraînent des différences linguistiques et
donc interprétatives [275] et donnent finalement des
versions d’Astérix où, si l’aspect humoristique et
léger de l’original est souligné, un « regard ironique
et sournois sur la société italienne » [281] transparaît
par tous les renforts d’allusions à la culture italienne
et la modification des personnages par le langage (ils
sont désancrés par rapport à la culture française et
fermement rattachés à des stéréotypes italiens).
L’auteur retraduit en français les citations italiennes
qu’elle utilise pour sa démonstration, ce qui rend son
texte
accessible
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;
cependant,
le
concept
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« xénophilie qui va jusqu’au dénigrement de soi »
[273 & 282] n’est pas clairement rattaché au propos
ni développé.
Tout ce qui vient d’être évoqué se rattache au fait
culturel, au lexiculturel comme aux jeux de mots et
calembours, solidement ancrés dans la langue
originale, devant lesquels les traducteurs doivent
faire preuve d’énormément d’ingéniosité. C’est le cas
aussi dans les traductions en grec, objets de l’article
de Simos Grammenidis (« L’aventure de l’élément
culturel dans les traductions d’Astérix en grec » [219233]), qui fait un inventaire très classique des
problèmes posés par le transfert des « désignateurs
culturels » et des motifs qui ont guidé les traducteurs
dans leur travail [220]—plus exactement, me semblet-il,de ce que l’on suppose qui les a motivés à opérer
leurs choix. Cet article ne retraduit pas en français
les citations grecques, ce qui en rend la lecture
malaisée et peu probante. On souligne que l’un des
faits culturels saillants de la série, les calembours,
est ce qui est condamné par Maurice Horn, dont
Jean-Paul Gabilliet dit qu’il fut « un des principaux
promoteurs de la patrimonialisation de la bande
dessinée de part et d’autre de l’Atlantique » [60] et
qui écrit à propos d’Astérix : « l’intrigue de base est
fastidieuse et les mauvais jeux de mots et les apartés
chauvins que Goscinny produit à jet continu en font
une bande dessinée tout à fait déplaisante » (World
Encyclopedia of Comics, 1976, cité et traduit par J.P. Gabilliet [60].
Il faut mentionner une dernière traduction, en latin ,
celle-là, (Annie Collognat, « Jeux et enjeux dans la
traduction en latin du dernier Astérix » [159-167]), qui
pose d’autres défis, par exemple d’ordre lexical, et
qui a aussi (et surtout ?) une visée pédagogique,
mais qui, « transposition/adaptation, voire parfois
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réécriture sur quelques points précis » [164], illustre
une nouvelle fois l’adaptation à la langue d’arrivée,
avec l’injection de citations latines et de références
culturelles supplémentaires, puisque « le texte s’y
prête » [163]—bref des stratégies similaires à celles
des autres langues évoquées, en fonction de la
langue de traduction—et peut-être de la hardiesse,
de l’humour et de l’humilité du traducteur vis-à-vis
d’un texte riche et difficile à traduire.
Et puis… Astérix a cinquante ans, ce qui signifie qu’il
a évolué avec la société dont il est fatalement le
produit, peu ou prou—et toute la question est là,
posée par exemple par Nicolas Rouvière, auteur de
deux ouvrages sur Astérix (en 2006 et 2008), dont
l’article s’interroge clairement : « Astérix, œuvre
gaullienne
?
»
[73-88].
L’auteur,
malgré
les
dénégations des pères d’Astérix, naturellement, tente
de démêler les éventuels éléments idéologiques qui
traverseraient voire charpenteraient Astérix. Il est
évident que la BD est en phase avec son époque,
mais le diagnostic porté est qu’il y existe un « grand
brouillage des implications idéologiques » [84], et
que, tout au plus, on peut déceler dans Astérix les
valeurs radicales de la troisième république, mais
surtout quelques grands thèmes politiques évidents
dans la figure du petit qui résiste au grand (peuple,
région, pays…).
La vision que présente la série Astérix de la société
française a évolué ces cinquante années : de même
que les premiers albums ne contiennent pas les
mêmes caricatures de personnalités connues des
médias, de la politique, etc., que les plus récents,
leur attitude (et je me garde bien de dire « leur
message » !) est différente :
- le rôle des femmes évolue quelque peu—ainsi que
le détaille Marie-Christine Lipani-Vaissade (« Les
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femmes
dans
Astérix
:
uniquement
des
emmerdeuses ? » [131-148]), qui, après avoir fait
l’inventaire des stéréotypes de la femme
véhiculés et utilisés par Astérix, analysé le rôle et
la part des personnages féminins dans la série et
fait un détour par le personnage de Calamity Jane
(du même Goscinny), conclut, de façon pas
nécessairement logique à mon sens, qu’il règne
dans Astérix un « sympathique parfum de
misogynie » [144] et qu’ Astérix est bien une série
misogyne mais où les femmes sont traitées de la
même façon (c’est moi qui souligne) que les
hommes, c’est-à-dire taquinées et ridiculisées
comme eux [147] – tout cela, semble-t-il, n’est
pas bien méchant, puisque la « volonté des
auteurs est […] de s’amuser » [147]. Où l’on
constate qu’il est difficile de ne pas revenir au but
proclamé des auteurs, rappelé en début de ce
compte rendu, pour quoi l’on pardonne bien des
choses…,
- la part du latin diminue—comme le montre Julie
Gallego dans une analyse méticuleuse de la
place de la citation latine dans Astérix (« Les
citations latines dans Astérix » [111-129]), d’où il
ressort que celle-ci s’amenuise au fil des albums,
à mesure, somme toute, que le latin est moins
enseigné en collège et lycée, donc moins
instantanément
reconnu
par
le
lecteur—un
ressort potentiel des années 1960-70 a donc été
de moins en moins utilisé pour des raisons de
manque croissant d’efficacité, cela me semble
incontestable,
- les valeurs politiques du monde, les modes
sociétales sont différentes, et la série s’adapte,
intègre les nouveautés et les variations, module
ses procédés, pour proposer au lecteur des
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repères de son propre univers, anachroniques
bien sûr, au sein de celui créé autour d’Astérix.
Restent des invariants, que l’on peut repérer, avec
Alain Corbellari (« Astérix chez Dumézil : une
interprétation
trifonctionnelle
de
l’univers
goscinnyen » [87-98])—cet article livre une lecture
originale
et
convaincante
qui
distribue
les
personnages selon les trois castes décrites par
Georges Dumézil et enracinerait Astérix dans le
modèle
indo-européen
trifonctionnel
archaïque.
Restent encore des éléments que l’on peut analyser
comme l’illustration de certaines théories, dont celle
de
l’incommunication
(Pascal
Robert,
« L’incommunication au miroir d’ Astérix, ou la
théorie assistée par la bande dessinée » [99-109],
qui utilise La Zizanie pour mieux définir le concept
d’incommunication : la BD assiste, illustre, rend plus
concrète en effet la théorie). Restent enfin des
adaptations, en dessins animés, au cinéma, en jeux
vidéo sur lesquelles l’on s’appuie pour illustrer la
théorie de la transmodalité (Corinne Giordano,
« Astérix
de
la
BD
à
l’écran,
une
écriture
transmodale » [285-298], dans un texte me semble-til un peu aride et auto-réflexif qui n’éclaire pas
véritablement le concept de transmodalité pour le
lecteur non averti que je suis) ou analyser la
production d’un jeu vidéo (Gianna Tarquini, « Astérix
à la conquête du monde virtuel » [301-313]).
Restent, finalement, du texte (dont K. Kaindl rappelle
les différentes variétés en jeu dans la BD [208-209]),
de l’image (du dessin et des couleurs, dont A. Hosny
rappelle la codification [249]), les codes du genre qui
font que la lecture est contrainte, mais cela va de soi
pour le lecteur de BD dans sa langue (et Sylvain
Lesage, « Astérix, phénomène éditorial. Du succès
de librairie à la modernisation du marché de la bande
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dessinée en France » [39-57] rappelle aussi le rôle et
la place d’Astérix dans l’histoire de l’industrie de la
BD). Bref, restent des contraintes qui pèsent sur le
traducteur : Nathalie Sinagra (« Traduire Astérix :
atouts et contraintes » [181-191]) rappelle assez
simplement que l’image et le texte sont un tout, dont
chaque face génère des contraintes, mais aussi des
atouts, pour le traducteur, mais c’est José Yuste
Frías, évoqué au début de ce compte rendu, qui
démontre fort bien que « le couple texte-image est
une harmonisation des contraires » [258] que le
traducteur doit « lire, interpréter et traduire » [262].
Et au-delà de cette analyse de la traduction de la BD,
des lectures diverses d’Astérix, des textes réunis ici,
d’inégales profondeur, densité et aptitude à retenir le
lecteur, se dessinent bien l’activité du lecteur
multiforme, et celle du traducteur qui lui apporte dans
sa langue des richesses d’autres langues. Et s’il
n’était qu’une phrase à retenir de ce volume, à mettre
en exergue, à méditer, en particulier dans le cadre de
la formation des traducteurs, où se place l’auteur,
c’est cette définition du traducteur sous la plume de
J.Y. Frías, à l’article de qui je renvoie une nouvelle
fois : « Le traducteur ne traduit jamais des langues ni
des mots mais toujours les imaginaires véhiculés non
seulement par les images mentales implicites dans le
texte, mais aussi par les images matérialisées dans
le péritexte iconique, qu’il soit fixe ou animé » [255256].
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