Quelques pistes pour aller plus loin
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Quelques pistes pour aller plus loin
Quelques pistes pour aller plus loin par Jean-Marc Génuite « Notre besoin de consolation est impossible à rassasier » Stig Dagerman À travers la quête d’une jeune femme belge d’origine marocaine prise dans un « entre-deux je » (Souâd Belhaddad) identitaire, le film de Kadija Leclere aborde le récit © D.R. d’une improbable rencontre entre une fille (Sarah) et une mère qui appartiennent à des espaces culturels pensés comme totalement discriminés et inconciliables. Sarah FICTION - BELGIQUE – 2007 – 14’ Réalisation Kadija Leclere Production Artemis Productions Scénario Kadija Leclere, Carole Matuszec Image Federico D’Ambroso Montage Ludo Troch Son Julien Mizac Musique Christophe Vervoort Interprétation Khadija Bendriouch, Abdeslam Haddad Sarah, trente ans, part au Maroc rencontrer sa mère. Pour la première et la dernière fois. 2008 2007 42 Miami « Festival du court-métrage » : Prix du meilleur réalisateur Créteil : Prix Beaumarchais - Meilleur film francophone Prime à la qualité de la communauté française de Belgique Milan « Festival du film international » : Grand prix - Meilleur film africain Montréal « Festival «Vues d’Afrique « » : Prix de la meilleure réalisation Dubaï « Festival International du film » : Grand prix Namur « Festival Média 10/10 » : Prix de la meilleur bande sonore Tout au long du film, la cinéaste ne cesse de livrer les signes d’une irréductible démarcation entre la protagoniste de son intrigue et le territoire de ses origines (le Maroc). En quête d’une reconnaissance filiale, Sarah est venue au Maroc pour faire la connaissance de ce corps des origines qu’elle na jamais vu et qui lui a si cruellement manqué. C’est l’oncle de Sarah qui a arrangé une entrevue entre les deux femmes tout en imposant à sa nièce les conditions d’une rencontre sans lendemain dans une lettre qu’il lui a adressée en Belgique : « tu viens voir ta mère et tu repars pour toujours. Ne lui gâche pas sa vie, personne ne sait que tu existes et surtout pas son mari ». Placé sous des augures aussi peu encourageants, le voyage identitaire de Sarah semble voué à l’échec avant même de s’être engagé et le Maroc, en faisant de la jeune femme une présence taboue, une descendance maintenue au secret, apparaît comme un territoire sans espoir de reconnaissance. Au moment du débarquement sur le sol marocain le caractère allogène de l’identité de Sarah ne cesse d’être explicité comme lors de l’échange avec un douanier qui, pensant qu’elle possède la nationalité Marocaine lui demande de présenter sa carte d’identité nationale avant qu’elle ne précise qu’elle est Belge. Le Maroc est représenté comme un territoire identitaire auquel Sarah ne peut s’accorder, qu’elle ne peut reconnaître comme sien, à l’image du regard fugitif et « lointain » qu’elle jette sur le « Bienvenue dans votre pays » qui s’affiche sur un grand panneau posé sur le quai de la gare maritime et qu’un plan met ostensiblement en évidence. Le sort que le film réserve au personnage de la mère de Sarah est emblématique de la logique de séparation à l’œuvre dans le récit. Il ne lui accorde aucune existence propre et le représente bien moins comme un individu à part entière qu’il n’en fait la métaphore d’une origine qui se refuse, se dérobe. La figure maternelle devient alors le symbole d’un pays à jamais inaccessible et qui restera profondément étranger à Sarah. Initié par la jeune femme, ce voyage au cœur des origines débouche sur une impossible rencontre, sur une rupture radicale et définitive avec une mère dont le visage en s’absentant sous le voile lui interdit toute proximité. Certes, le film à travers l’expérience vécue par Sarah semble suggérer que l’identité n’est pas un donné et qu’elle demeure le lieu d’une construction, d’un devenir à travers lequel le sujet s’inscrit dans le monde. Pourtant, un certain malaise nous gagne face à la démonstration sans appel et sans nuance développée par la cinéaste. Films passerelles Dimanche soir ; Nue ; Cheveu 43