Plantu: «Le dessin délie les langues»

Transcription

Plantu: «Le dessin délie les langues»
Genève 23
Tribune de Genève | Lundi 28 novembre 2016
Interview
Plantu: «Le dessin délie les langues»
partie de Cartooning for peace.
Car, quelles que soient nos opinions, on est une famille. Il y a une
chose qui nous réunit, c’est qu’on
a envie de s’enrichir des propositions, des idées et des cultures des
autres.
Parrain du Salon
des métiers de
l’humanitaire qui
s’est tenu samedi à
Annemasse, Plantu
défend la liberté
d’expression
En quoi cet échange est-il
particulièrement important
pour de simples dessins?
Nos dessins sont compris en trois
secondes. Et parfois mal compris
ou mal interprétés. Le but est de
comprendre pourquoi, en raison
des différentes cultures, un dessin
fait à Genève, à Annemasse ou à
Paris peut être mal compris à
1000 km, à 10 000 km ou à 50 m.
On essaie de comprendre les tabous dans telle ou telle société. Je
ne dis pas qu’il faut respecter ces
tabous, je dis qu’il faut les entendre.
Marie Prieur
C’est un homme accessible, tout
sourire, qui se balade dans les
allées du Salon des métiers de
l’humanitaire du Grand Genève,
à Annemasse. En ce samedi ensoleillé, Plantu, parrain de cette
édition, enchaîne les interviews,
les discussions à bâtons rompus
à chaque stand et les selfies avec
les quidams et les politiques.
Crayon en main et regard ouvert
sur le monde, le président de
Cartooning for peace s’est glissé
dans l’humanitaire, telle la souris de ses dessins, il y a dix ans
déjà.
Avec Cartooning for peace, vous
défendez le dessin de presse, la
liberté d’expression, n’y a-t-il
pas des combats humanitaires
plus importants?
Oui, mais… comme le dit la Bible,
au début était le verbe. La parole
est obligatoire pour commencer à
échanger. Nous avons créé Car-
Pour le dessinateur, «nous vivons une époque où on laisse peu les gens s’exprimer». LUCIEN FORTUNATI
tooning for peace avec Kofi Annan
dans le but de libérer cette parole.
Nous vivons une époque où on
laisse peu les gens s’exprimer, on
n’écoute pas assez ceux qui se
sentent humiliés, oubliés. Il faut
entendre leur voix. Les politiques
mais aussi nous, médias, devons
faire ce travail d’écoute.
Quel peut être le rôle du dessin?
Nous, dessinateurs, sommes aux
avant-postes pour savoir comment on peut dire des choses
quand d’autres croient qu’il est
interdit d’exprimer telle ou telle
opinion. Le dessin délie les langues. Comme le suggère la magnifique affiche du salon avec cette
main qui se change en colombe.
A quoi sert l’association?
A nous réunir, échanger, créer
des ponts entre les cultures, entre
les dessinateurs qui ont beaucoup
de choses à se dire. Même si on
n’est pas toujours d’accord. Parmi
nos membres, il y a par exemple
un dessinateur russe qui a participé à une rencontre sur les migrants. Il nous a surpris car dans
ses dessins, il dit: «Vous êtes fous
d’accueillir des migrants, ils seront les fossoyeurs de l’Europe.»
Je ne suis pas d’accord avec lui
mais on discute beaucoup. Il fait
Vous défendez uniquement les
dessinateurs?
Il n’est pas question de corporatisme. En réalité les dessinateurs
sont les vrais baromètres de la
liberté de penser. Si vous plongez un dessinateur en Allemagne, en Suisse, en Afghanistan,
au Pakistan, en Russie, vous vous
rendrez compte de ce qu’il peut
dessiner ou pas. Cela vous donnera la température. A partir de
là, il y a un échange. Le dessin est
un bon moyen. La musique ou
encore la danse font aussi ce
même travail.
Un an et demi après les attentats
contre «Charlie Hebdo», que
gardez-vous en tête?
Qu’il ne faut rien lâcher sur l’essentiel de nos combats. Le principal étant contre l’ignorance. On
fait un gros travail dans les écoles.
Là, on a entendu des enfants nous
dire: «Vos copains ont été tués à
Charlie Hebdo, c’est bien fait.» Il
faut comprendre comment on en
est arrivé là.
Et où en est-on aujourd’hui?
Pas plus tard que cette nuit, via le
site de Cartooning for peace, nous
nous sommes mobilisés, notamment avec Chappatte, pour Zunar.
Quelques heures auparavant, ce
dessinateur malaisien a été empêché d’exposer ses dessins à Kuala
Lumpur. Nous sommes d’autant
plus sensibles à son sort que nous
lui avons remis un prix avec la ville
de Genève au mois de mai. Il faut
être vigilant. Partout. Autre exemple: un dessinateur turc est en prison depuis un mois. Les libertés
d’expression sont de plus en plus
menacées, les intolérances sont en
train de s’installer. Les dessinateurs ne sont que des petits baromètres. N’oublions pas que ce qui
touche les dessinateurs touche les
journalistes. Et ce qui touche les
journalistes touchera les citoyens.
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