Le changement de nom des communes françaises aspects

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d’Économie
Régionale &
Urbaine
2007/2 (juillet)
166 pages
Editeur
Armand Colin
Site Web
I.S.B.N.
9782200923242
DOI
10.3917/reru.072.0269
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2006, version
révisée
décembre...
suite
REVUE
MAGAZINES
NUMÉRO
ARTICLE
Page 269-291
Le changement de nom des communes
françaises aspects économiques,
marketing et stratégiques [*]
Eric DELATTRE
du même auteur
Maître de Conférences Université Lille 3 UFR MSES
Domaine Universitaire « Pont de Bois » BP 149
59653 Villeneuve d’Ascq cedex
[email protected]
INTRODUCTION
L
L'ÉTAT DU MONDE
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a commune est l’espace d’organisation administrative le plus proche des
citoyens. C’est aussi et surtout un espace de développement
économique, social et culturel, un espace de liberté, de participation à la vie
de la communauté. Depuis plus ou moins longtemps, les élus locaux
s’efforcent de donner une image valorisante de leur commune, à travers des
outils variés tels que les journaux municipaux, les logotypes et autres
emblèmes, les sites Internet, les manifestations culturelles... L’efficacité de la
communication suppose néanmoins une concordance, ou du moins un
rapprochement, entre l’image transmise et l’identité réelle. Elle suppose
également une cohérence de l’ensemble des messages. Au-delà de la
communication, l’enjeu est de considérer et promouvoir la commune comme
une véritable marque s’adressant à une multitude de parties prenantes
(résidents, touristes, employés municipaux, politiciens, commerçants,
artisans, dirigeants d’entreprise, investisseurs potentiels...). Dans cette
optique, la réflexion sur le nom prend toute sa place. Le nom est en effet,
selon l’expression de MARION (1987), un « hypersigne de communication »
qui représente l’organisation dans sa globalité et permet de la reconnaître
dans tous ses discours ainsi que dans tous les messages la concernant. Le
nom de la commune constitue à la fois un composant de son identité de par
ses origines et son histoire et le principal véhicule de cette identité. C’est
l’élément générique d’identification de la commune qui la « résume » à lui
seul.
Changer le nom d’une ville représente donc une décision d’importance,
qui devrait s’insérer dans une réelle stratégie de marque. Cette pratique n’est
pas exceptionnelle, puisque le fichier historique des communes de l’Institut
National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) recense, par
exemple, 180 changements de nom de communes françaises entre 1990 et
2
2006. Cet article vise à mieux comprendre les raisons des changements de
nom, à en proposer une typologie opérationnelle et à souligner leur rôle dans
la communication des communes et la perception de leur image. Il s’inscrit
dans un courant de recherche émergeant à la frontière du marketing, de
l’économie régionale et spatiale et de la géographie et qui porte sur les
[1] - La création
en 2004 de la
revue de
recherche Place
Branding,...
suite
stratégies de marques appliquées au développement local, régional et national
[1] . Si les travaux consacrés à l’image pays, à l’origine nationale perçue des
produits, au marketing du tourisme et à la « marque pays » se sont
développés rapidement (KOTLER et GERTNER, 2002), la gestion des
marques appliquée aux villes représente un champ de recherche encore peu
exploité (MERUNKA et OUATTARA, 2006).
L’absence de travaux antérieurs portant spécifiquement sur le
3
changement de nom des communes confère à cet article un caractère
exploratoire. La problématique du nom a été soulevée par quelques auteurs à
l’occasion de la création ou la restructuration de certaines collectivités mais
[2] - Il est à noter
que nombre de
Conseils
Généraux et...
suite
n’a pas fait l’objet d’études systématiques [2] . Qu’ils soient anciens ou
nouveaux, les exemples de changements de nom sont relativement nombreux.
Cela nous conduira, dans un premier temps, à quantifier cette pratique.
L’analyse des fonctions du nom permettra, ensuite, de proposer une typologie
des changements de nom des communes. Nous nous intéresserons également
à la communication de ces changements, en la comparant à celle des
changements de nom des entreprises. Les principales problématiques
touchent au choix des supports de communication, à l’annonce et au
vocabulaire du changement qui oscille entre continuité et rupture. Nous
proposerons, enfin, une approche originale du changement de nom en tant
que signal permettant à toutes les parties prenantes de mieux appréhender
l’identité de la commune.
- 1 - VERS UNE TYPOLOGIE DES
CHANGEMENTS DE NOM
Plus petite subdivision administrative française, la commune peut
4
connaître des modifications importantes au cours de son histoire :
changement de département ou d’arrondissement, modification des limites
territoriales, suppression ou fusion avec une commune voisine... Le
changement de nom fait partie des décisions qui ont des conséquences
directes pour les résidents de la commune et au-delà pour toutes les parties
prenantes. L’évaluation du nombre de ces changements révèle que cette
pratique n’est pas nouvelle et qu’elle est loin d’être négligeable.
1.1. Quantification des changements
Aucun travail de recherche, à notre connaissance, n’a quantifié, de façon
exhaustive, les changements de nom des communes. Le Code Officiel
Géographique (COG) tenu par l’INSEE représente la source d’information la
plus fiable. Un arrêté de 2003 confirme que le COG constitue la nomenclature
officielle des collectivités territoriales et circonscriptions administratives.
Adossé au COG, le fichier historique recense, depuis 1943, tous les
changements de nom ainsi que les créations, rétablissements, disparitions et
toutes les autres modifications communales. Après retraitement de cette base
de données, il a été comptabilisé 1863 changements de nom de communes
[3] - Le fichier
françaises métropolitaines entre 1943 et 2006 [3] . Cela représente environ 5
5
historique
comporte un
changement de
nom intervenu...
suite
[4] - Il n’est
cependant pas
possible de
conclure que 5
%...
suite
% des communes [4] . Le nombre maximum de changements est observé
durant les années 1970 (voir tableau 1). Un pic est atteint en 1973 avec 226
changements de nom. Ce nombre élevé s’explique par un mouvement
important de fusions de communes effectives au 1er janvier 1973. Depuis les
années 1980, le nombre de changements s’est stabilisé autour d’une dizaine
par an.
Tableau 1 - Nombre de changements de nom de communes
françaises métropolitaines
Il n’existe en revanche aucun recensement systématique des
6
changements de nom intervenus avant 1943. Durant la première moitié du
XXe siècle, on note plusieurs décrets (notamment ceux du 30 novembre 1918,
5 août 1919 et 21 février 1933) qui ont officialisé un nombre important de
changements. D’après les travaux de généalogistes concernant certains
départements, le nombre de changements semble moins important au cours
du XIXe siècle. Pour le département du Cantal, on relève ainsi 7 changements
de nom entre 1800 et 1899, à comparer aux 26 changements recensés durant
le XXe siècle. La proportion est la même pour les communes d’Illeet- Vilaine avec 40 changements au cours du XXe siècle contre 11 au cours
du XIXe.
Les changements plus anciens sont difficiles à répertorier, dans la mesure
7
où il n’existe pas d’état exact des communes avant 1804, date à laquelle une
circulaire ministérielle invite les préfets à dresser la liste des communes de
leur département. À cette époque, les modifications de nom interviennent
surtout à l’occasion de l’évolution des limites communales ou à l’occasion
d’événements particuliers. Ainsi, la Révolution française a entraîné un
bouleversement sans précédent dans le nom des communes. Ces
changements permettent d’exprimer les idées et valeurs des révolutionnaires
et d’éliminer les références à l’Église ou à des aristocrates
(Versailles/Berceau-de-la-Liberté ; Saint-Uniac/Uniac-la-Fontaine ; SaintAubin-d’Aubigné/Aubin-Philomone ; Lyon/Commune-Affranchie...). Il s’agit,
selon un décret du 16 octobre 1793, de changer « les noms qui peuvent
rappeler les souvenirs de la royauté, de la féodalité ou de la superstition ». La
plupart de ces communes ont repris leur nom par la suite. Une ordonnance
du 8 juillet 1814 enjoint aux communes qui ne l’ont pas encore fait de
reprendre leur ancienne dénomination, sous le motif que « leur nouvelle
dénomination, inconnue même dans les départements dont ces communes
font partie, est nuisible aux relations de commerce ». L’occupation allemande
de 1870-1918 en Alsace-Lorraine a également entraîné le changement du nom
de nombreuses communes. Il s’agissait avant tout de transposer les noms en
langue allemande. À l’inverse, les noms ont été francisés en 1918 (Ancy-adMosel/Ancy-sur-Moselle ; Saarburg/Sarrebourg...).
Les changements de nom ont toujours existé, et ce avant même les lois
fondamentales sur l’organisation des communes (décret du 14 décembre
1789, lois de 1867, 1871-1884...). Les guerres et invasions, les regroupements,
fusions et scissions, l’évolution de la langue, autant de raisons aux
8
modifications du nom des bourgs, villages, villes, communes et paroisses. Si
les fusions de communes restent un des principaux motifs des changements
actuels de nom, les problématiques d’image et de communication semblent
avoir pris une importance toute particulière. Ceci amène à analyser les
différentes fonctions du nom.
1.2. Les fonctions du nom
Depuis longtemps, les travaux des linguistes et des ethnologues
9
confirment que le nom est bien plus qu’un identifiant. LÉVI-STRAUSS (1962)
a ainsi souligné que le nom propre possédait trois fonctions plus ou moins
fortes selon les communautés ou les cultures : la fonction distinctive, la
fonction d’appartenance à certains ensembles sociaux et la fonction de
signification. De la même façon, les gestionnaires considèrent le nom de
l’entreprise davantage comme un actif immatériel que comme le moyen légal
de l’identifier. À partir des travaux sur le capital-marque (AAKER, 1991 et
1996), sur le statut du nom de marque (CEGARRA, 1991) et sur l’importance
du nom d’entreprise (KAPFERER, 1985), cinq fonctions peuvent être définies
pour le nom d’une entreprise : les fonctions d’identification, d’image,
linguistiques, financières et stratégiques (DELATTRE, 2001). L’importance
du nom a aussi été relevée en géographie et en économie régionale et spatiale.
LYNCH (1960) distingue trois processus de construction de l’image vis-à-vis
d’un lieu ou d’un espace public : l’identification, la structuration ou mise en
relation avec l’environnement et la signification. Ainsi, un lieu est d’abord
identifié, puis mis en perspective par rapport aux autres lieux ou objets
urbains pour devenir finalement porteur de sens. Le nom tient une place
particulière dans ce processus car c’est l’élément clé d’identification. Il
contribue à positionner le lieu, à l’intégrer dans son environnement et donc à
structurer l’espace. Il devient aussi un véhicule des valeurs qui y sont
associées. Le nom possède également un aspect symbolique. Plusieurs études
ont montré la façon dont les changements de nom des rues, des places, des
monuments ou des villes pouvaient être utilisés pour légitimer une idéologie,
pour institutionnaliser un régime ou faire table rase d’un système politique
(LEWIS, 1982 ; AZARYAHU, 1997 ; LIGHT, NICOLAE et SUDITU, 2002).
Changer de nom devient alors un double message : une célébration du
changement et une démonstration d’autorité grâce au pouvoir de nomination.
Celui qui nomme obtient de fait un certain pouvoir sur la chose nommée
selon ARMENGAUD (1997).
La commune peut être considérée comme un système organisé et
10
territorialisé (schéma 1), dont l’identité – c’est-à-dire ce qui constitue son
unicité, sa différence et sa cohérence – se construit au fil de son histoire par
l’intervention de nombreux acteurs. L’identité donne aux individus de
l’organisation le sentiment de partager et de participer à une histoire
commune (KAPFERER, 1988). L’image de la commune est l’ensemble des
représentations collectives et individuelles de cette identité par des parties
prenantes aux attentes et intérêts divergents.
La commune : approche systémique
La commune :
approche
systémique
Le nom est le seul élément commun à tout le système. C’est le signe
universel utilisé par tous les acteurs pour désigner une entité précise, ancrée
dans un territoire et porteur d’une identité propre. Dans cette optique,
11
plusieurs fonctions peuvent être discernées pour le nom d’une commune, et
plus généralement d’une collectivité. Les fonctions d’identification et de
différenciation sont étroitement liées. Le rôle premier du nom est de conférer
une existence. « Ce qui n’a pas de nom, c’est ce qui ne compte pas, la quantité
négligeable de ce qui, en deçà de l’attention, de l’intérêt, demeure du même
coup en deçà du mot » (ARMENGAUD, 1997). Le nom permet de reconnaître
tous les discours, messages et communications d’une commune et de les
distinguer de ceux des autres collectivités et organisations. Cela est
particulièrement important lorsque l’on sait que de nombreuses communes
ont le même nom. On dénombrait, par exemple, 13 communes portant le nom
d’Asnières au début du siècle. L’identification de la collectivité inclue sa
fonction de localisation. Le nom des grandes villes porte en lui-même sa
localisation, indépendamment même de toute indication géographique. Ce
n’est évidemment pas le cas des petites communes. Afin de faciliter la
localisation, il est alors possible de se référer à une ville proche, au
département ou encore d’utiliser les sonorités ou terminaisons typiques d’une
région.
Le nom a une fonction d’image. Il véhicule la personnalité et l’identité de
12
la collectivité. La signification initiale du nom influence également l’image
perçue. SIBLOT (1999) parle ainsi de la potentialité de signifiance du nom.
Nomen Omen : le nom est présage, selon la célèbre formule de Cicéron. Sans
même connaître les communes, les noms de Saint-André-de-la-Roche ou de
Saint-Léger-des-Prés en donnent une certaine perception. La fonction
linguistique du nom se manifeste par son orthographe, sa prononciation, ses
attributs sémantiques et le symbolisme des sons. Enfin, il est possible de
distinguer une fonction politique ou stratégique. Le nom peut être utilisé pour
structurer la collectivité, pour élaborer un projet commun, pour asseoir un
pouvoir ou pour légitimer un système ou une idéologie.
1.3. Typologie des changements
À partir de ces différentes fonctions du nom, il est possible d’établir une
typologie des changements de nom des communes (voir tableau 2). Changer
de nom, c’est reconnaître qu’une des fonctions du nom actuel est déficiente.
Tableau 2 - Typologie des changements de nom de communes
13
Les changements d’identification et de différenciation représentent une
14
des formes de changements les plus fréquentes. Ils consistent à ajouter un
qualificatif permettant de différencier la commune et de mieux la situer
géographiquement. Le changement s’effectue par l’ajout d’une référence
géographique régionale, départementale ou locale (Landes devenu Landessur-Ajon en 1950 ; Allemagne devenu Allemagne-en-Provence en 1953 ;
Lainville devenu Lainville-en-Vexin en 1997 ; Saint-Dié devenu Saint-Diédes-Vosges en 1999 ; Saint-Julien devenu Saint-Julien-sur-Garonne en
2005...) ou d’un terme générique, tel que « bois », « forêt » ou « grand »
(Barneville devenu Barneville-sur-Mer en 1962 ; Saint-Méloir devenu SaintMéloir-des-Bois en 1997...). L’allongement du nom permet d’éviter les
confusions entre les communes homonymes. Les confusions dans la
distribution du courrier sont parfois directement évoquées parmi les motifs
du changement. L’avis du Sous-secrétaire d’État des Postes et Télégraphes
apparaît d’ailleurs sur certains décrets. Les pouvoirs publics ont largement
encouragé ce type de modification. Deux circulaires du Ministre de
l’Intérieur, en date du 27 avril 1918 et du 20 janvier 1932, demandent ainsi
aux préfets d’inviter les municipalités dont les communes portent une
dénomination identique à ajouter un complément à leur nom « de façon à
rendre toute confusion impossible ». Ces circulaires ont été suivies d’effets,
puisqu’on relève, par exemple, pour le seul département du Loiret 11
changements en 1918, 20 en 1919 et 16 en 1933 qui s’inscrivent tous dans
cette tendance à l’allongement du nom.
Si tous ces changements permettent de mieux identifier la commune, ils
conduisent souvent à adopter des dénominations longues qui ne facilitent pas
leur mémorisation. D’une façon plus générale, il apparaît qu’un nom très
long, difficile à prononcer ou comportant des connotations négatives peut
[6] - La
transformation
des Côtes-duNord en Côtes
d’Armor,...
suite
constituer un obstacle au développement économique ou touristique [6] . Les
impératifs liés à la communication et à l’image ont donc amené certaines
collectivités à modifier leur nom. Il s’agit alors de simplifier une
dénomination à rallonge, d’éliminer certains termes jugés péjoratifs ou tout
simplement de choisir un nom plus valorisant. Il en est ainsi de Rémeringlès-Hargarten, Barret-le-Bas, Ruines ou Châlons-sur-Marne devenus
respectivement Rémering, Barret-sur-Méouge, Ruynes-en-Margeride et
15
Châlons-en-Champagne. L’influence des termes négatifs ou dévalorisants
n’est cependant pas à surestimer. Il semble exister, en effet, un phénomène de
« dé-sémantisation », selon l’expression de WATIN-AUGOUARD (1997),
permettant d’oublier la signification initiale d’un nom commun utilisé en tant
que marque ou nom de collectivité.
Nombre de changements se limitent à des modifications mineures
16
d’orthographe ou de typographie. Ainsi en 1998, Le Haucourt,
Châteaurenard, Couffi, Beaubigny sont devenus respectivement Lehaucourt,
Château-Renard, Couffy et Baubigny. De même, Grenand-lès-Sombernon,
Sainte-Croix-de-Verdon et Saint-Yvy ont pris le nom, en 2005, de Grenantlès-Sombernon, Sainte-Croix-du-Verdon et Saint-Yvi. Ces changements
linguistiques ont pour objectif de simplifier l’orthographe, de mettre le nom
en accord avec sa prononciation, de retrouver un nom dont la graphie a été
altérée par l’usage.
Les changements stratégiques et politiques constituent une autre grande
17
catégorie de changements de nom. Le grand nombre de petites communes
rurales en France conduit inévitablement à des regroupements, qui sont
d’ailleurs encouragés par les pouvoirs publics. Lors d’une fusion, le nouveau
nom choisi est souvent une juxtaposition des deux anciens noms. La fusion de
Chauvac et de Laux-Montaux en 2002 donna ainsi naissance à ChauvacLaux-Montaux. Cette pratique n’est cependant pas nouvelle comme en
témoigne la commune d’Andouillé-Neuville formée des deux localités
d’Andouillé et de Neuville, le 28 brumaire de l’an VI. Cette solution présente
l’avantage d’afficher une certaine égalité entre les deux parties, quitte à
revenir ensuite à un nom plus simple (Amareins-Francheleins-Cesseins
[7] - Cette
pratique est très
fréquente pour
les fusions...
suite
devenu Francheleins en 1998) [7] . Il est également possible, et souvent
souhaitable, de contracter les deux noms pour construire un nom plus court.
Athis-Mons est ainsi issu de la fusion d’Athis-sur-Orge et Mons-sur-Orge. Il y
a très peu d’exemples de communes ayant profité de la fusion pour choisir un
nom complètement nouveau, à l’instar de Villiers-Bonneux devenu
Perceneige après sa fusion avec Courceaux, Grange-le-Bocage, Plessis-duMée, Sognes et Vertilly. Quoique plus rares, les scissions se traduisent par des
problématiques similaires. Les deux communes reprennent généralement
leur ancien nom ou choisissent un toponyme notoire. Les changements visant
à asseoir un pouvoir, à marquer une rupture ou à légitimer un système
politique sont par nature exceptionnels. Rentrent, par exemple, dans cette
catégorie les changements intervenus au moment de la Révolution Française
ou ceux concernant les villes de l’ex-bloc de l’Est débaptisées par les autorités
communistes.
Ces principales catégories de changement ne sont pas exclusives les unes
des autres. Ainsi, la différenciation passe souvent par un changement
d’image. La transformation de Veules en Veules-les-Roses en 1897 permettait
avant tout de différencier Veules et Veulettes, mais valorisait également un
joli bourg fleuri de roses. De même, une fusion est souvent l’occasion d’avoir
une réflexion sur le nom et donc de tenir compte des impératifs d’image.
Après avoir proposé une typologie des changements de nom de communes, il
convient d’aborder les aspects managériaux. Une des problématiques
managériales importantes concerne la gestion de la communication.
- 2 - LA COMMUNICATION DU CHANGEMENT
DE NOM
18
[8] - Il existe un
cas très
particulier où le
changement...
suite
La communication est un facteur clé de réussite de tout changement [8] .
19
Aussi pertinent soit-il, le changement doit faire l’objet d’une communication
adaptée pour être jugé légitime. La communication du changement de nom
des communes se heurte en fait à deux difficultés : d’une part, la rareté de
cette pratique qui explique l’absence de procédures, de stratégies et de plans
de communication pré-existants et, d’autre part, la nécessaire prise en
compte des spécificités des communes. Parmi les points clés de la
communication du changement de nom, il est possible de souligner le choix
de la cible et des supports à modifier, la question du moment de l’annonce et
de la rapidité du changement et enfin la création proprement dite, souvent
partagée entre continuité et rupture.
2.1. Le choix de la cible et des supports
À propos du choix de la cible, la priorité est d’adopter une approche
20
suffisamment large. Si les administrés représentent bien évidemment le cœur
de cible, les administrations et autres institutions avec lesquelles la ville est
en relation, ainsi que les organisations résidentes et les partenaires
commerciaux et financiers (fournisseurs, banques...) ne doivent pas être
oubliés. Un des enjeux concerne la mise en évidence des différentes attentes
de ces parties prenantes, afin de pouvoir adapter la communication. Les
moyens d’annonce sont nombreux. Cependant, en pratique, les communes se
limitent généralement à l’envoi d’une lettre d’information, suivie ou précédée
du journal de la commune qui se fait largement l’écho du changement de
nom. Les changements de nom d’entreprise fournissent des exemples de
médias plus originaux, encore très peu utilisés par les collectivités : faire-part
de naissance, gadget et cadeau publicitaire, grande soirée de gala, CD ou
vidéo à visée à la fois historique et prospective, conférence de presse...
Le nom des communes fait parti de l’environnement quotidien des
individus. Les supports véhiculant le nom sont nombreux dans les paysages et
espaces notamment urbains. Tous ces supports se doivent d’être changés
(voir tableau 3). Les supports « papier » et les supports électroniques,
aisément modifiables, s’opposent aux supports liés à l’affichage urbain et de
transport, dont le changement est plus long et coûteux. Compte tenu de la
multitude des supports, la représentation visuelle du nom, le logotype, prend
une importance toute particulière. Le changement de nom entraîne
nécessairement une réflexion sur le logotype. S’il est possible de garder le
même design pour marquer une certaine continuité, la transformation
radicale du logo peut souligner une volonté forte de dynamisme ou de
modernisation. Ainsi, lorsque le changement de nom est mineur, la
modification du logo passe parfois au premier plan. Que la modification soit
profonde ou non, l’important est qu’elle s’inscrive dans une identité visuelle
unique et cohérente.
Tableau 3 - Supports à modifier
21
2.2. L’annonce et la rapidité du changement
Manager le changement nécessite aussi de s’intéresser à la phase de
22
transition et à la problématique de la vitesse de ce changement. Lors d’une
modification du nom d’un produit, les spécialistes conseillent une transition
en douceur (KAPFERER, 1996). L’ancien et le nouveau nom coexistent sur les
conditionnements souvent pendant plusieurs mois, voire plusieurs années.
Raider/Twix, Pal/Pedigree, Galaxy/ Paic System sont autant d’exemples de
transitions en douceur où l’importance de l’ancien nom sur le packaging est
progressivement réduite, jusqu’à complètement disparaître. À l’inverse, selon
KAPFERER, les changements de nom d’entreprises doivent se faire très
rapidement. Il s’agit en effet de prouver la volonté du management. Certaines
entreprises réussissent ainsi en une nuit à effacer toute trace de leur ancien
nom. La lenteur du changement témoignerait des hésitations des décideurs.
Le changement de nom des communes se rapproche de ces changements
corporate. Une transition rapide est donc conseillée. Les supports « légers »
et les supports « stratégiques », les panneaux en entrée et sortie de commune,
par exemple, seront modifiés simultanément. Bien évidemment, il convient
de tenir compte des délais engendrés par la procédure du changement de
nom, qui est encadrée par l’article L2111-1 du Code général des Collectivités
territoriales. Le changement de nom ne peut se faire que par « décret en
Conseil d’État, sur demande du Conseil Municipal et après consultation du
[9] - Deux types
de changements
échappent à
cette
procédure :...
suite
Conseil Général » [9] . La commission de révision du nom des communes,
instituée par l’arrêté du 15 août 1948, peut également être consultée. Cette
procédure présente l’avantage d’éviter les changements trop rapides –par
exemple celui initié par une nouvelle majorité municipale trop enthousiaste
qui voudrait changer un nom à forte histoire– et les erreurs dans le choix du
nouveau nom. La procédure juridique dans son ensemble, à partir de la
délibération du Conseil Municipal dure en moyenne moins d’un an. Compte
tenu du rejet de certains changements, il peut être souhaitable d’attendre la
publication du décret avant d’annoncer le changement. En effet, même s’ils
sont difficilement quantifiables, les refus existent bel et bien. Ainsi, certains
décrets récents précisent les changements non entérinés : 3 pour le décret n°
2006-808 du 7 juillet 2006, 1 pour le décret n° 2005-1155 du 12 septembre
2005 et 12 pour le décret n° 97-1172 du 22 décembre 1997. Si le moment de
l’annonce semble peu problématique, les pratiques de communication
divergent quant à « l’intensité » de l’annonce. Faut-il ou non créer un effet
23
d’annonce, voire théâtraliser le changement ? La réponse à cette question
dépend notamment de la taille de la commune et du degré de nouveauté du
nom.
2.3. Le vocabulaire du changement : entre continuité et rupture
Concernant la création proprement dite, les campagnes de
24
communication sur le changement de nom sont avant tout informatives. La
difficulté réside surtout dans le choix du vocabulaire. WATZLAWICK et al
(1975) ont montré que la notion de changement était une combinaison, voire
un affrontement entre des valeurs de permanence, de continuité et des
valeurs de création, de rupture. Suite à ces travaux, QUINTON (1997)
distingue trois degrés dans tout changement : permanence (ou tradition),
combinatoire (ou évolution) et création (ou innovation). Le schéma 2
distingue ainsi trois degrés dans le changement de nom d’une commune.
Le degré de
nouveauté du
nom*
Le degré de nouveauté du nom*
Une étude menée sur 899 changements de nom d’entreprises
25
(DELATTRE, 2001) montre que les changements de création (37 %) sont les
plus fréquents, devant les combinaisons de nom (23,7 %), les simplifications
de nom (14,8 %), les allongements de nom (12,7 %) et les changements de
« permanence » (11,8 %). L’observation des 1863 changements de nom de
communes entre 1943 et 2006 révèle beaucoup moins de diversité (voir
schéma 2). Plus de 70 % des changements concernent des allongements de
noms. Si on ajoute les changements mineurs d’orthographe ou de typographie
et les simplifications de nom, il apparaît que la quasi-totalité des
changements contemporains s’inscrit dans la continuité, et non dans la
rupture. Les changements de création sont marginaux (3,7 %). Même lorsque
le nouveau nom est totalement différent de l’ancien, il fait référence à
l’histoire –récente ou ancienne– de la commune. Ainsi, Doulevant-le-Château
qui avait pris le nom de Blaiserives après sa fusion avec Villiers-aux-Chênes
en 1972, a repris son nom vingt ans plus tard, en 1992.
Au-delà de ce constat général sur la période 1943-2006, il est intéressant
d’étudier les changements les plus récents. Le tableau 4 met en évidence des
différences de répartition significatives selon la période (chi2=239,03 ; p <
[10] - Les
résultats sont
tout aussi
significatifs
lorsque...
suite
0,001) [10] . Si l’allongement du nom représente toujours la forme de
changement la plus fréquente, son poids relatif apparaît moins important
depuis 1980. Les changements de création et les simplifications de nom ont
tendance à se raréfier. La particularité principale des changements récents
réside dans la forte croissance des changements d’orthographe ou de
typographie : modification d’une lettre, ajout ou suppression d’un tiret,
adoption, retrait ou modification d’un accent. Ils représentent ainsi presque
28 % du total des changements depuis 1980 et 32 % depuis l’an 2000. Ces
changements sont mineurs mais ils témoignent de l’importance accordée au
nom et d’une volonté de faciliter la communication. Ils peuvent permettre de
renforcer l’implantation régionale d’une commune, de retrouver une
orthographe ou une prononciation originelle ou encore de faciliter la
prononciation. C’est le cas, par exemple, de Plouézoch, Laneuvilleroy, Bryas,
Longvillers, Widensohlen devenus respectivement Plouezoc’h, La NeuvilleRoy, Brias, Longvilliers, Widensolen.
26
Tableau 4 - Répartition des changements de nom par période
QUINTON (1997) a souligné la spécificité du vocabulaire du changement
27
(voir tableau 5). Selon cette approche, le choix du vocabulaire serait lié à
l’intensité du changement. Le principal écueil à éviter est celui du décalage
entre le discours et le changement réel d’identité. Ces changements, pour
ceux relevant du registre du « faire savoir » plutôt que du « faire »,
apparaissent vides de sens et donc plus difficiles à légitimer.
En conclusion, les communes qui changent de nom ne peuvent faire
28
l’économie d’une campagne de communication. Il apparaît capital de
préparer le changement, d’envisager une évolution du logotype, de définir un
planning avec les supports à modifier en priorité, de choisir un vocabulaire
adapté... Au-delà de la pertinence même du changement, la vitesse
d’appropriation du nouveau nom par les résidents dépend, en effet,
prioritairement de la qualité du travail de préparation du changement.
Tableau 5 - Sémiologie du changement (occurrences lexicales)
- 3 - LE CHANGEMENT DE NOM : UN SIGNAL
LIÉ À L’IDENTITÉ
Changer de nom n’est jamais une décision neutre. Le changement
comporte certains risques. Les coûts sont parfois importants... d’autant que
les retombées demeurent difficilement évaluables. D’un point de vue
économique mais aussi marketing, le changement de nom d’une commune
peut être considéré comme le signal d’une évolution de son identité ou
comme un signal de sa localisation géographique. Selon AVRAHAM (2004),
le changement de nom est l’une des dix stratégies permettant d’améliorer
l’image négative d’une ville. Le changement peut être l’occasion de faire de la
commune une marque. En dépit des coûts directs et indirects du changement,
celui-ci est donc susceptible de créer de la valeur. Le manque de données et
l’absence de travaux préexistants confèrent, cependant, à cette analyse un
caractère exploratoire.
29
3.1. Le signal de la réalité identitaire de la commune
Selon la théorie des signaux, un signal est l’annonce d’une action
30
potentielle ou en cours diffusée intentionnellement par un agent économique
afin de permettre à d’autres agents économiques moins bien informés d’en
déduire sa situation réelle actuelle ou future. Le signal engendre
généralement certains coûts directs ou indirects qui contribuent à sa
crédibilité, mais il se présente sous la forme d’une information facile à
obtenir, à un coût nul ou faible, pour ses divers destinataires. Il peut être
utilisé de façon isolée ou accompagné d’autres signaux. La théorie des signaux
ou des messages est issue de l’économie (SPENCE, 1973 ; RILEY, 1975).
L’origine de cette théorie est à rechercher dans les travaux sur l’économie de
l’information, et notamment sur les marchés en situation d’information
[11] - L’influence
des recherches
axées sur les
marchés...
suite
asymétrique [11] . AKERLOF (1970) a souligné le premier le risque existant
sur les marchés se caractérisant par une information imparfaite et
asymétrique entre acheteurs et vendeurs. Cette asymétrie d’informations
caractérise de nombreux marchés. La situation la plus fréquente est celle où
des dirigeants bien informés sur les caractéristiques réelles de leur entreprise
font face à des acteurs – actionnaires, créanciers, fournisseurs, clients... –
moins bien informés. Il paraît dès lors capital pour les dirigeants de signaler
certaines caractéristiques favorables susceptibles de leur procurer un
avantage financier ou concurrentiel.
D’une manière générale, l’apport de la théorie des signaux est de montrer
31
comment les agents économiques peuvent utiliser certains signaux, afin de
contrer les effets du phénomène de sélection adverse mis en évidence par
AKERLOF. Les agents économiques bien informés vont chercher à convaincre
leurs partenaires mal ou peu informés de leur valeur ou de leur qualité (ou de
celle de leurs produits). Selon LÖFGREN, PERSSON et WEIBULL (2002), la
contribution principale de SPENCE (1973) est d’avoir formalisé, développé et
démontré les implications de cette idée de base. Depuis l’article fondateur de
SPENCE, les applications de la théorie des signaux se sont multipliées. Les
modèles de signalisation concluent généralement qu’en situation d’équilibre,
les agents économiques appartenant à une catégorie de performance élevée
envoient un signal coûteux afin de se différencier des agents économiques
appartenant à une catégorie de performance basse. Le coût du signal assure –
théoriquement– les récepteurs de la véracité de l’information transmise en
dissuadant les « faux » signaux.
Au regard de cette approche théorique, le changement de nom d’une
commune peut être considéré comme un signal permettant à tous les agents
économiques d’en déduire sa situation, son identité. Ce signal répond à une
situation d’asymétrie informationnelle. Le changement de nom permet aux
élus locaux d’informer leurs administrés sur la modernisation de la
commune, d’informer les investisseurs potentiels et les touristes sur sa
localisation exacte ou encore d’informer leurs partenaires institutionnels et
commerciaux sur une fusion avec une commune voisine... Si chaque
changement de nom est un cas particulier, la dimension d’information est
toujours présente. Il s’agit d’être globalement mieux identifié par les parties
prenantes, individus et organisations, résidents et non résidents. Le nom en
lui-même véhicule une information sur la commune. Le nom est d’ailleurs le
principal signe d’identification de la commune, comme de toute organisation.
À travers ses composantes verbales et visuelles, le nom permet de reconnaître
32
toutes les communications de la collectivité. Le nom est une métonymie dans
la mesure où le signe est utilisé pour résumer l’entité dans sa globalité.
Indépendamment de toute précision, le nom véhicule certaines valeurs. Pour
une petite commune, généralement peu connue, le fait de choisir un nom qui
la rattache à une région permet d’emblée de lui offrir une certaine
représentation dans l’esprit des personnes extérieures à la commune. D’une
façon générale, le nom joue un rôle considérable dans la construction et la
perception de l’identité. Dès 1960, LYNCH soulignait que la dénomination
pouvait renforcer l’identité d’un espace urbain.
3.2. La perception de l’identité de la commune
L’objectif sous-jacent ou non des changements de nom est que l’identité
33
de la commune soit perçue de la meilleure façon possible. Le changement
sera donc efficace s’il entraîne une évolution d’image positive. À partir des
travaux de KELLER (1993) sur l’image de marque et ceux d’ANHOLT (2006)
et de LAAKSONEN et al (2006) sur l’image des villes, l’image d’une commune
peut être définie comme une perception synthétique de son identité. Compte
tenu de la multitude et de la diversité des publics concernés (MERUNKA et
OUATTARA, 2006), la mesure de cette image et de son évolution apparaît
complexe.
La procédure de l’élicitation libre et la construction d’une échelle
34
constituent les deux principales méthodes pour mesurer l’image d’une
commune. L’échelle du capital-citoyen d’une ville établie par CHAMARD
(2004) distingue trois facteurs : le dynamisme perçu de la ville mesuré par
des items liés à sa personnalité, l’agrément basé sur des éléments exogènes et
l’opinion vis-à-vis de la gestion municipale. Basée sur le seul exemple de la
ville de Pau, cette échelle nécessite plusieurs réplications. Le baromètre de
l’image des villes d’ANHOLT (2006) est limité aux très grandes villes
puisqu’il mesure la perception des habitants de 18 pays concernant 30
métropoles. Six éléments d’image sont retenus sans aucune précision sur la
méthodologie : la présence ou statut de la ville, le lieu (caractéristiques
physiques), le potentiel en matière d’économie et d’éducation, le style de vie,
les habitants et les aménagements et équipements. La méthode de l’élicitation
libre est utilisée par COLLANGE, CHANDON et ROUX (2004) pour mesurer
l’impact d’un changement de nom de marque sur son image. Les auteurs
concluent que le nombre global d’associations, le nombre d’associations
favorables et le nombre d’associations uniques influencent favorablement
l’évaluation du changement. MERUNKA et OUATTARA (2006) montrent que
les associations générées par les communes peuvent être très variables. Seule
une minorité de communes possède une image forte, différenciée et positive.
Certaines communes ont des associations très spécifiques et favorables, mais
qui dépendent quasi-exclusivement d’un produit (Camembert), d’un
événement (Marciac) ou d’une personnalité (Domrémy). D’autres souffrent
d’associations négatives pour des raisons historiques (Vichy), des faits divers
tragiques (Outreau)...
L’approche de MICHEL (2000) est basée sur la théorie du noyau central,
selon laquelle la marque est constituée d’un noyau central et d’un système
périphérique (voir schéma 3). Le noyau central assure deux fonctions : une
fonction génératrice de signification et une fonction d’organisation des
éléments d’identité les plus stables. Le système périphérique intègre les
35
éléments d’identité moins pérennes et moins fortement associés à la marque.
Les associations périphériques sont les premières à être modifiées en cas
d’évolution de l’environnement ou en cas d’action marketing nouvelle.
MICHEL (2000) a montré qu’une extension de marque entraînait une
évolution des associations périphériques, une modification de l’évaluation de
la marque ainsi qu’une modification de la force des associations centrales et
périphériques. De même, l’alliance entre deux marques peut avoir un impact
sur les associations centrales et périphériques de ces marques (CEGARRA et
MICHEL, 2003). Cette approche semble intéressante pour formaliser
l’évolution de l’image de la commune suite au changement de nom.
L’adoption d’une nouvelle dénomination peut engendrer de nouvelles
associations périphériques et/ou en supprimer d’autres (voir schéma 4). Dans
certains cas extrêmes, lorsque le nom choisi est complètement nouveau par
exemple, il peut y avoir modification des associations centrales. Le risque
paraît alors plus élevé. MICHEL (2000) a montré que les extensions de
marques incohérentes avec les associations centrales diminuaient l’évaluation
globale de la marque.
Une des particularités de l’image des communes concerne l’influence de
36
leur environnement. L’image d’une ville voisine, du département, de la région
voire du pays peut ainsi inférer, de manière positive ou négative, sur l’image
de la commune. Cela est particulièrement le cas des communes pour
lesquelles les associations sont peu nombreuses, faibles ou floues. Le
changement de nom de Beaumont en Beaumont-du-Périgord en 2001 permet
ainsi à cette commune rurale de bénéficier des associations de tranquillité,
d’authenticité, de nature ou de gastronomie du Périgord. À l’inverse, certaines
villes ont un statut tel que leur image est relativement indépendante de leur
environnement. La ville peut même devenir le symbole du pays (MERUNKA
et OUATTARA, 2006).
L’ajout d’une référence locale ou d’un nom commun peut générer des
associations positives supplémentaires. Il semble ainsi que les associations
spontanées envers les communes de Gimel-les-Cascades, Sixt-Fer-à-Cheval
ou Sainte-Colombe-des-Bois soient plus nombreuses et plus positives
qu’envers Gimel, Sixt ou Sainte-Colombe. L’objectif peut être également de
supprimer des associations négatives et les remplacer par d’autres plus
favorables (Nanteuil-la-Fosse/Nanteuil-la-Forêt, Cognac-le-Froid/Cognac-laForêt...). Dans certains cas, le changement conduit à faire référence à une
grande ville (Aulnoy/Aulnoy-lez-Valenciennes, Vallières/ Vallières-lèsMetz...). L’image de la commune est alors essentiellement liée aux
associations portant sur la ville voisine. Cela peut être une étape facilitant le
processus de fusion, comme dans l’exemple de Vallières-lès-Metz. Une
commune souhaitant développer une personnalité propre cherchera à
l’inverse à dissocier son nom de celui d’une autre commune, à l’instar de
Lande-de-Libourne devenu Lalande-de-Pomerol. La fusion de deux
communes ne conduit pas à une simple addition de l’image de chacune d’elle.
Il est illusoire de juxtaposer les deux noms pour bénéficier des associations
des deux communes. Au contraire, cela peut conduire à rendre l’image plus
floue notamment lorsque les associations centrales sont très différentes. Sans
compter qu’un nom très long est généralement plus compliqué à mémoriser.
Pour faire évoluer les traits d’image de façon favorable et équilibrée lors d’une
fusion, il peut être souhaitable de maintenir le nom de la commune à plus
37
forte image ou bien encore de combiner les deux noms.
Représentation de l’image d’une marque
Représentation
Évolution de l’image suite à un changement de nom
de l’image
d’une marque
3.3. La création de valeur du changement
Le changement de nom constitue donc un signal susceptible d’amener les
38
parties prenantes à modifier leur perception de l’identité de la commune, qui
Évolution de
l’image suite à
un
changement
de nom
[12] - Ainsi,
lorsque les
intermédiaires
financiers sont
mieux...
suite
peut être mesurée par une évolution des associations périphériques, et plus
rarement centrales. Plus généralement, la valeur créée par le changement de
nom peut être de trois natures différentes : la valeur intrinsèque de tout
signal, la valeur liée au contenu du signal et la valeur liée à sa communication.
Indépendamment même de son contenu, l’information possède en elle-
39
même une certaine valeur. Le fait d’être mieux informé sur une organisation
contribue à une évaluation plus favorable de celle-ci [12] . L’information attire
l’attention sur l’émetteur et elle fidélise. Selon la théorie des signaux, le
changement de nom s’inscrit parfaitement dans ce cadre, puisqu’il améliore
l’information sur la commune en donnant d’elle une image plus conforme à
son identité. Evidemment, le contenu du signal est l’élément clé de la création
éventuelle de valeur. Comme cela a été souligné précédemment, les situations
sont extrêmement diverses mais l’idée générale est que le changement permet
à la collectivité d’être mieux identifiée par son environnement au sens large.
Dans une optique marketing, il apparaît que le changement peut être utilisé
pour donner une meilleure visibilité à la commune et lui donner une image
plus claire, plus forte, plus distinctive, plus positive et plus cohérente : plus
claire par rapport à sa localisation, plus forte, distinctive et positive par
rapport aux valeurs portées par le nom, le logotype et tous les autres
supports, et plus cohérente par rapport à son identité réelle. Cette meilleure
adéquation entre l’identité et l’image rend la communication plus efficace.
Mieux identifiée dans tous ses discours, la collectivité peut ambitionner, à
terme, une plus grande notoriété et une meilleure image. La communication
du signal est source de valeur. En plus de la publicité média et hors média
prévue par la commune, les changements bénéficient généralement d’autres
relais d’informations. La communication permet à tous de s’approprier plus
rapidement le nouveau nom. Elle pourrait aussi contribuer, indirectement, à
attirer de nouveaux habitants ou de nouvelles entreprises. Il existe cependant
encore peu d’études sur l’efficacité de la communication des collectivités.
3.4. Coûts et risques du changement de nom
Même s’il est difficile d’obtenir des informations chiffrées, il est
indéniable que le changement de nom est un signal coûteux. Le coût du
changement peut atteindre 1 million d’euros pour les communes d’une
certaine taille. Le changement de nom des grandes entreprises apparaît
encore plus coûteux. Il s’est ainsi élevé à 15,2 millions d’euros pour Thales (ex
Thomson-CSF) soit la moitié de son budget annuel de communication
mondiale de l’époque. Le coût a été estimé à 61 millions d’euros pour Vivendi
(ex Compagnie Générale des Eaux) et 178 millions de dollars pour Accenture
(ex Andersen Consulting). Ce coût élevé dissuade les « faux signaux », c’est-àdire le changement de nom censé refléter un changement d’identité en fait
40
non réel. Le changement de nom est tellement coûteux qu’il paraît peu
efficace de l’utiliser comme signal pour masquer un vide, un nonchangement. Le coût du changement contribue à sa crédibilité.
L’évaluation est en fait difficile selon que l’on inclue ou non les dépenses
41
indirectes nécessaires pour faire connaître le nouveau nom. De même, les
dépenses s’étalent parfois sur plusieurs années, mais se substituent aussi en
partie aux dépenses de communication habituelles. Avant l’annonce, les
principaux postes de dépenses concernent les recherches sur le nom, la
création d’une identité visuelle et toutes les études préliminaires au
changement. S’ajoutent, ensuite, à ces dépenses, la communication interne et
externe, ainsi que la modification de tous les supports administratifs,
électroniques, urbains... du nom. Enfin, l’abandon d’un nom ayant acquis une
certaine notoriété et une certaine image représente une perte de valeur, une
perte de capital. Ce risque lié à la notoriété apparaît bien réel. Le risque de
rejet du changement par la population peut être limité, à partir du moment
où le changement est préparé et expliqué. Le nom se construit principalement
par l’usage. C’est l’utilisation du nom qui lui donnera donc sa légitimité. Le
nom se charge de connotations, grâce à la communication et grâce à l’histoire
de la commune. En revanche, le nom peut anticiper et annoncer les qualités et
les valeurs associées à la commune. Selon BOURDIEU (1982), le mot est un
« programme de perceptions ». C’est à la communication de confirmer,
ensuite, ces perceptions et ces valeurs.
Le point de départ du changement repose sur la volonté du Conseil
42
Municipal. La consultation de la population n’est pas obligatoire. Quelques
communes ont néanmoins organisé des référendums locaux pour connaître
l’avis des habitants, soit sur les différents noms envisagés, soit même sur la
pertinence du changement. Il ne faut cependant pas sous-estimer la
résistance au changement. Ainsi, en 2002, les élus de Deuil-la-Barre (95) ont
organisé un référendum pour le changement éventuel du nom de la
commune. 71 % des votants ont souhaité garder le nom actuel. Compte tenu
de la résistance au changement, certains experts en création de nom pensent
que le changement doit s’incarner à travers une volonté forte et qu’il doit
donc, dans une certaine mesure, être imposé. Notons, enfin, que la
multiplication des changements de nom pour une même commune contribue
à fragiliser son identité. Le nom est, en effet, l’élément le plus stable de
l’identité. En changer doit rester une décision exceptionnelle prise dans une
perspective de long terme. Malgré les risques et l’importance des dépenses, le
changement de nom n’est pas pour autant une décision effectuée en pure
perte. Une des hypothèses mises en évidence dans la théorie des signaux est
que l’organisation n’a intérêt à envoyer un signal que si le bénéfice attendu de
cette activité de signalisation est supérieur à son coût. Dans le cas des
communes, le bénéfice attendu, bien que difficilement chiffrable, semble bien
réel.
CONCLUSION
En guise de conclusion, il est possible de résumer les deux principaux
apports de cette étude et de proposer quelques pistes de recherche. La
première contribution est liée à la quantification et à la catégorisation des
changements de nom de communes. Cette pratique est loin d’être marginale,
puisqu’il a été comptabilité 1863 changements de nom de communes
43
françaises métropolitaines entre 1943 et 2006. Après un pic observé dans les
années 1970, le nombre de changements s’est stabilisé autour d’une dizaine
par an. À partir de l’étude des fonctions du nom, la typologie proposée
distingue les changements d’identification/différenciation, les changements
linguistiques, les changements d’image et les changements stratégiques,
notamment dans le cadre des fusions de communes. Le choix du nom
présente une faible diversité, puisque plus de 70 % des changements
consistent simplement à allonger le nom actuel. La grande majorité des
changements s’inscrit dans la continuité. Les changements de rupture restent
très rares. Le second apport de l’étude réside dans le fait d’aborder le
changement de nom sous l’angle de la théorie des signaux. Le changement
peut, en effet, être considéré comme un signal émis par les autorités
communales afin de permettre aux parties prenantes – administrés,
entrepreneurs, touristes... – de mieux appréhender l’identité de la commune.
Il s’agit d’insérer le changement dans une stratégie visant à faire de la
commune une véritable marque. L’enjeu est de donner une visibilité plus
grande à la commune et une image plus spécifique, plus forte et plus positive.
En se basant sur les travaux de MICHEL (2000), l’efficacité du changement
peut ainsi être mesurée par l’évolution des associations centrales et
périphériques concernant la commune.
L’application de cette approche à un cas réel de changement de nom
représente la perspective de recherche la plus immédiate. Des éléments de
réponse pourraient ainsi être apportés à des problématiques managériales.
Quelles sont les formes de changement qui génèrent le plus d’associations
nouvelles, positives et uniques ? Les changements remettant en cause les
associations centrales sont-ils évalués moins favorablement ? Quelles sont les
associations partagées et les associations spécifiques aux différents publics
auxquels la commune s’adresse ? La façon dont les associations se
construisent mérite également une attention particulière. Sachant que l’image
des villes est avant tout fondée sur l’expérience personnelle des individus
(CHAMARD, 2004), l’application des outils et cadre d’analyse du marketing
relationnel et du marketing expérientiel pourrait s’avérer intéressante. D’une
façon plus générale, cette étude s’intègre dans le champ de recherche des
stratégies de marques appliquées au développement local. À côté des
changements de nom, les partenariats (co-branding) avec des marques
commerciales ou des associations, le lancement de produits dérivés
(licensing) ou l’association du nom de la commune à un produit, à une
personnalité ou à un événement constituent des pratiques encore peu
étudiées malgré leurs retombées potentiellement importantes.
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NOTES
[ *]
Première version mars 2006, version révisée décembre 2006
[ 1]
- La création en 2004 de la revue de recherche Place Branding, le numéro
spécial consacré au « nation branding » par le Journal of Brand
Management ou la création en 2005, suite aux travaux d’ANHOLT, d’un
baromètre des marques nationales (http://www. nationbrandindex.com)
constituent quelques uns des éléments fondateurs de ce courant de
recherche.
[ 2]
- Il est à noter que nombre de Conseils Généraux et Régionaux ont aussi
mené des réflexions autour du nom de leur collectivité. Il a été choisi, dans
le cadre de cette étude, de se focaliser sur le nom des communes. L’intérêt
est de pouvoir analyser un nombre important de changements et d’observer
ainsi une plus grande diversité des pratiques. De plus, les données
quantitatives apparaissent davantage exploitables. Si les problématiques du
changement de nom des communes et des départements semblent proches,
il conviendrait de mener une étude complémentaire avant d’étendre les
conclusions de cette recherche au niveau du département, voire de la
région.
[ 3]
- Le fichier historique comporte un changement de nom intervenu en 1930.
Le retraitement a consisté essentiellement à retirer de la base de données
les fusions sans modification de nom.
[ 4]
- Il n’est cependant pas possible de conclure que 5 % des communes
françaises ont changé de nom depuis l’après-guerre, dans la mesure où un
nombre non négligeable de communes a changé plusieurs fois de nom.
[ 5]
- Il s’agit de l’évolution des références géographiques du nom généralement
constatée suite au changement. D’autres situations existent. Dans certains
cas, le changement suite à une fusion s’accompagne, par exemple, d’une
simplification du nom avec la suppression d’une référence géographique
locale ou à l’inverse de l’ajout du nom d’un fleuve ou d’un département.
[ 6]
- La transformation des Côtes-du-Nord en Côtes d’Armor, largement
approuvée par les communes du département, était ainsi avant tout un
moyen de faciliter le développement touristique.
[ 7]
- Cette pratique est très fréquente pour les fusions d’entreprises :
l’entreprise issue de la fusion entre AXA et l’UAP s’est d’abord appelée
AXA-UAP avant de prendre le nom d’AXA. Idem pour Suez-Lyonnaise des
Eaux devenu Suez.
[ 8]
- Il existe un cas très particulier où le changement de nom constitue en luimême un moyen de communication. C’est le cas lorsque la commune prend
le nom d’une marque commerciale. Ainsi, aux Etats-Unis, la ville de Clark
est devenue Dish, du nom de l’entreprise Dish Network, en contrepartie de
la gratuité de son réseau de télévision par satellite pendant une période de
10 ans (MERUNKA et OUATTARA, 2006). Cette pratique se rapproche des
concessions de noms de stades accordées par certains clubs sportifs à des
entreprises.
[ 9]
- Deux types de changements échappent à cette procédure : ceux liés à une
fusion ou une scission et ceux liés à une erreur administrative. « Les
changements de nom qui sont la conséquence d’une modification des
limites territoriales des communes sont prononcés par les autorités
compétentes pour prendre les décisions de modification » (Code général
des Collectivités territoriales). « La rectification d’une erreur matérielle
administrative, évidente et relativement récente, peut être librement
apportée au nom d’une commune par l’administration » (avis du Conseil
d’État du 27 novembre 1951).
[ 10]
- Les résultats sont tout aussi significatifs lorsque d’autres découpages
temporels sont utilisés.
[ 11]
- L’influence des recherches axées sur les marchés en situation
d’information asymétrique sur la science économique en général a été
reconnue à deux reprises par le prix de la Banque de Suède en sciences
économiques. Le prix Nobel d’économie en 1996 a été ainsi accordé à
William VICKREY et James MIRRLEES pour leurs travaux sur les mécanismes
d’incitation en situation d’information asymétrique. Le prix Nobel
d’économie en 2001 a été accordé conjointement à George AKERLOF,
Michael SPENCE et Joseph STIGLITZ pour leurs travaux sur l’équilibre des
marchés en situation d’information asymétrique.
[ 12]
- Ainsi, lorsque les intermédiaires financiers sont mieux informés sur une
société, leur évaluation de celle-ci est plus favorable (USEEM, 1996 et
1997).
RÉSUMÉ
Le changement de nom des communes est une pratique ancienne qui
conserve toute sa modernité, en raison notamment des impératifs d’image et
de communication auxquels sont confrontées les collectivités. De plus en plus
de changements s’inscrivent d’ailleurs dans une volonté de faire du nom de
la commune une marque à part entière.
Dans cette optique, les objectifs de l’article sont les suivants :
- quantifier les changements de nom des communes françaises,
- présenter une typologie basée sur les fonctions du nom et permettant de
mettre en évidence les raisons des changements de nom,
- souligner les principaux enjeux liés à la communication de ces
changements,
- proposer une approche originale du changement de nom en tant que signal
permettant à certaines cibles de mieux appréhender l’identité de la
commune.
Mots clés
commune, changement de nom, typologie, signal, identité
Renaming the French « communes » economic, marketing and
strategic aspects
The French town (city) name changes are an old but yet modern practice,
namely because of the importance of local authorities, image and
communication. The increasing changes observed over the last decades were
meant turning the town (city) names into a significant brand name.
The objectives of this article are :
- to assess the number of changes in French town (city) names,
- to suggest a classification based upon name functions, emphasizing the
reasons of town (city) name changes,
- to highlight the main challenges underlying the communication of these
changes,
- to propose a new approach to the name changes as a signal meant to
facilitate a better evaluation of the identity of the town (city).
Keywords
French town (city), name change, typology, signal, identity
PLAN DE L'ARTICLE
Introduction
- 1 - Vers une typologie des changements de nom
1.1. Quantification des changements
1.2. Les fonctions du nom
1.3. Typologie des changements
- 2 - La communication du changement de nom
2.1. Le choix de la cible et des supports
2.2. L’annonce et la rapidité du changement
2.3. Le vocabulaire du changement : entre continuité et
rupture
- 3 - Le changement de nom : un signal lié à l’identité
3.1. Le signal de la réalité identitaire de la commune
3.2. La perception de l’identité de la commune
3.3. La création de valeur du changement
3.4. Coûts et risques du changement de nom
Conclusion
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POUR CITER CET ARTICLE
Eric Delattre « Le changement de nom des communes françaises aspects
économiques, marketing et stratégiques », Revue d’Économie Régionale &
Urbaine 2/2007 (juillet), p. 269-291.
URL : www.cairn.info/revue-d-economie-regionale-et-urbaine-2007-2-page269.htm.
DOI : 10.3917/reru.072.0269.
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