Les officiers supérieurs de l`arme blindée française dans la Seconde
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Les officiers supérieurs de l`arme blindée française dans la Seconde
Les officiers supérieurs de l’arme blindée française dans la Seconde Guerre Mondiale 2e partie : les combats du renouveau (1942) Le renouveau de la doctrine Fin 1941 - début 1942, l’état-major est moins accaparé par les opérations en cours et peut tirer le bilan de 18 mois de combats depuis la perte de la Métropole. Les réflexions sur le tableau d’organisation et d’équipement des grandes unités de chars connaissent alors un nouveau pas décisif, avec la disparition de l’appellation « division cuirassée » au profit de celle de « division blindée » (DB). L’organisation de ces DB confirme la structure interarmes en deux brigades blindées (chacune comprenant principalement deux bataillons de chars, deux bataillons d’infanterie mécanisée, un groupe d’artillerie et un groupe de reconnaissance) complétées par un régiment d’artillerie, un régiment antiaérien, un régiment de reconnaissance et divers services. Les grandes unités changent de nom mais gardent les mêmes chefs : on retrouve donc la 1ère DB (général Sudre) avec les brigades I/1 (Malaguti) et II/1 (de Brauer), la 2e DB (Bougrain) avec les brigades I/2 (Hautecloque) et II/2 (Maître), la 3e DB (Perré) avec les brigades I/3 (Touzet du Vigier) et II/3 (Rabanit), la 5e DB (de La Font) avec les brigades I/5 (Roche) et II/5 (Vernejoul). Malgré l’arrivée de plus en plus rapide et abondante de matériel américain, chaque grande unité exigeant toujours davantage de spécialistes et de matériel, il est désormais clair que même les seules quatre divisions prévues par le plan de réarmement n°2 de 1941 ne seront pas prêtes aussi vite que prévu : trois d’entre elles (1ère, 2e et 3e) devraient être pleinement opérationnelles au nouveau format avant l’été 1942, la dernière (5e DB) ne le sera qu’à la fin de l’année 1942. Après l’abandon du projet de 6e Division Cuirassée en 1941, l’état-major entérine officiellement début 1942 l’abandon du projet de 4e DB. Au même moment, les différentes composantes de chaque GRCA sont regroupées administrativement dans un unique régiment, appelé régiment de découverte : celles du 1er GRCA dans le 2e Régiment de Spahis Algériens, celles du 2e GRCA dans le 4e Régiment de Spahis Tunisiens et celles du 6e GRCA dans le 1er Régiment de Chasseurs d’Afrique. Le commandement d’un régiment étant un poste destiné à un colonel plutôt qu’à un général, Beauchesne, Leyer et Clouet des Perruches sont mutés à d’autres fonctions. Les chefs de ces trois régiments sont désormais respectivement les colonels Grévy, Morio et Langlade. Le colonel Grévy (2e RSA) commence la guerre comme chef du 4e Régiment d’Automitrailleuses au sein de la 4e DLC, engagé en mai 1940 dans les Ardennes en éclairage de la 9e Armée. En juin 1940, il commande la 14e BLM au sein de la 7e DLM et s’illustre dans les combats en retraite de la campagne de France. Evacué en AFN, il occupe diverses fonctions d’état-major fin 1940 et en 1941 avant de prendre le commandement du 2e Régiment de Spahis Algériens en janvier 1942. Le colonel Morio commande en mai 1940 le 8e Régiment de Cuirassiers (régiment de découverte de la 2e DLM), où il est cité à l’ordre de l’armée pour sa conduite à Hannut. Arrivé en AFN, il travaille avec Delestraint à la mise en place de l’Arme Blindée, s’occupant personnellement de l’identification et de l’affectation (dans des régiments de cavalerie mécanisée de l’armée d’Afrique) de tous les spécialistes des automitrailleuses évacués de Métropole. En janvier 1942, il remplace le général Leyer à la tête du 2e GRCA lorsque celui-ci devient le 4e Régiment de Spahis Tunisiens. Le colonel Paul Girot de Langlade, ancien de la Première Guerre (au cours de laquelle il a successivement servi dans la cavalerie, l’infanterie et l’aviation !), a participé à la pacification du Maroc. Il commence la guerre au sein du 1er RCA, en Tunisie, avec lequel il prend part à la conquête de la Libye (opération Scipion), avant de commander le 4e BCC au sein de la 1ère DC. Il s’illustre avec cette division en Grèce en 1941 et prend ensuite le commandement du 503e RCC (toujours au sein de la IIe Brigade blindée de la 1ère DC). En janvier 1942, il est donc nommé à la tête du 1er Régiment de Chasseurs d’Afrique. Tout ces changements sont la conséquence des travaux réalisés par l’état-major et l’Inspection générale de l’Arme Blindée-Cavalerie pour faire évoluer la doctrine, disposer du matériel adéquat, organiser les unités conformément au plan de réarmement n°2 et au tableau d’organisation et d’équipement type 1942… Plusieurs hommes jouent un rôle clé dans ces travaux : outre le général Langlois (aide-inspecteur général de l’Arme Blindée-Cavalerie) et le général Keller (commandant la commission Prêt-Bail française aux Etats-Unis), le rôle du général Leyer est moins connu. Le général de division Roger Leyer, aide-major général chargé des matériels, veille à la formalisation des besoins en équipement des armées françaises et à leur bon approvisionnement. Officier de cavalerie, colonel commandant le 12e régiment de Cuirassiers de la 3e Division Légère Mécanique, il combat en Belgique en mai 1940 avant de prendre le commandement la 4e Division Légère Mécanique en juin 1940 dans ses combats en retraite entre Seine et Loire puis sur la Vienne. Il dirige ensuite un groupement interarmes mécanisé au sein du corps de cavalerie, dans les combats de couverture de la retraite générale en juillet-août 1940. Une fois évacué en AFN, nommé général de brigade à l’automne 1940, il prend la tête du 2e GRCA qu’il met sur pied. Il le quitte début 1942 quand celui-ci devient 4e Régiment de Spahis Tunisiens et rejoint l’état-major comme aide-major général en charge des matériels, avant d’être nommé général de division à l’été 1942. A une époque où l’essentiel des matériels de l’armée française provient d’Amérique du Nord, il apporte un soin particulier à l’optimisation des chaînes de débarquement et remontage de ces matériels en Algérie et au Maroc. Il garde une attention spécifique pour le matériel blindé et assure une étroite liaison avec le général Keller pour persuader l’US Army de passer en limited standard certains matériels dont l’armée française a bien besoin. Le retour en Grèce En février 1942, l’opération Croisade, qui marque le retour des armées alliées en Europe continentale – et plus exactement en Grèce, prévoit l’engagement de deux corps d’armée français au sein de l’Armée d’Orient, commandée par le général Giraud. Ces forces doivent comprendre au total une division blindée et la première brigade d’une seconde. Le choix des unités à retenir pour cette opération fait l’objet de longs débats au sein du commandement : les trois DB opérationnelles étaient volontaires. Finalement, sur l’insistance de Giraud, ce sont les unités ayant eu l’expérience de ce théâtre d’opérations l’année précédente qui sont à nouveau retenues : la 1ère DB (général Sudre) et la Brigade I/2 (général Leclerc de Hautecloque), complétées par la 3e BMLE (général Jouffrault). Les régiments de découverte déployés (progressivement) en Grèce seront le 2e GRCA (4e Régiment de Spahis Tunisiens du colonel Morio) et le 6e GRCA (1er Régiment de Chasseurs d’Afrique du colonel Langlade). Les combats dans le Péloponnèse, région montagneuse au terrain compartimenté, ne se prêtent pas aux grandes cavalcades blindées. Les chars français, engagés le plus souvent par brigade (voire par bataillon) rendent néanmoins de fiers services en appui des fantassins. La doctrine française de groupements inter-armes mêlant chars mais aussi infanterie (portée) et artillerie (autopropulsée) en sort renforcée. Cette campagne est aussi l’occasion de tester au feu les nouveaux matériels. Ainsi, le 25 juin 1942, dans les champs et oliveraies proches de la petite ville d’Aghios Sostis, les premiers chars moyens SAV-42 Bélier (deux compagnies de la brigade Malaguti de la 1ère DB) affrontent les blindés allemands. Douloureusement surpris, ceux-ci constatent à leurs dépens que ces nouveaux chars surclassent leurs Panzer Mk III tant au niveau de l’armement qu’à celui de la protection… et que leur supériorité en savoir-faire est devenue trop faible (si même elle existe encore) pour compenser leur infériorité matérielle. En juin, la brigade Hautecloque est retirée de Grèce pour se reconstituer en Afrique du Nord avant l’opération Torche (débarquement en Sicile) auquel la 2e DB toute entière doit participer. En septembre, c’est au tour de la 1ère DB du général Sudre de quitter le Péloponnèse. Outre les régiments de reconnaissance, les seules unités blindées engagées en Grèce au sein de l’Armée d’Orient sont désormais la 3e BMLE et la Brigade Blindée Polonaise (général Maczek). Eté 1942 : changement au sommet de l’Arme Blindée et conséquences Depuis l’hiver 1941-42, le général Delestraint, las de cette vie d’état-major et estimant avoir rempli son rôle de rénovateur de l’arme blindée, aspire à un commandement au front. Cependant, la doctrine d’emploi des blindés français évolue peu à peu, les perspectives de retour des opérations en France s’éloigne, bref la mise sur pied du corps blindé dont le commandement lui était promis ne semble pas d’actualité. C’est pourquoi l’état-major de l’Armée, désireux d’employer au front une des plus ardentes volontés parmi les généraux et une des meilleures connaissances de la guerre moderne et blindée, (et soumis à de subtiles – ou moins subtiles – pressions exercées par De Gaulle, reconnaissant envers son vieil ami), lui confie le commandement de la future 1ère Armée, destinée à être engagée en Sicile. Delestraint, nommé général d’armée, cède donc, comme prévu, en juin 1942, l’inspection générale de l’Arme Blindée au général Langlois. Dans le jeu de chaises musicales qui s’ensuit, Bougrain devient aide inspecteur-général de l’Arme Blindée. Le général Philippe Leclerc de Hautecloque prend la tête de la 2e DB tandis que le colonel Dodart des Loges le remplace à la tête de la I/2. Ces mouvements rompent avec le jusque-là sacro-saint équilibre entre officiers venus des chars de la Cavalerie et ceux venus des chars de l’Infanterie. Certains y voient une rupture avec le passé et un signe de la maturité de l’Arme Blindée ; d’autres interprètent cette décision comme la manifestation évidente de la volonté de De Gaulle de favoriser la carrière de son protégé (Hautecloque). Les mouvements chez les dirigeants de l’Arme Blindée se poursuivent en juillet avec la nomination du général de la Font au commandement des écoles de l’arme. Le général de Vernejoul devient le nouveau commandant de la 5e DB. Il cède le commandement de sa brigade au général Méric de Bellefon. Le général de brigade Henri Méric de Bellefon a opéré au sein du corps de cavalerie, tout d’abord en commandant le 1er régiment de Dragons Portés de la 4e Brigade Légère Mécanique (au sein de la 2e DLM) en mai 1940 en Belgique, puis à la tête de la 2e Brigade Légère Mécanique en France en juin et juillet 1940. Une fois évacué en AFN, il prend la tête du le 1er Régiments de Dragons Portés (un des régiments d’infanterie motorisée de la 5e DC), qu’il réorganise et entraîne. Nommé général de brigade en juillet 1942, il prend donc le commandement de la brigade II/5. Automne 1942 : vers l’apogée de l’Arme Blindée Le second semestre 1942 voit l’apogée de l’Arme Blindée en termes de nombre d’unités constituées. Si le nombre de divisions blindées n’évolue pas, deux nouveaux régiments de découverte voient le jour : d’une part le 3e Régiment de Spahis Marocains (colonel Mozat) qui devient opérationnel en septembre 1942, d’autre part le 4e Régiment de Spahis Marocains (colonel Navarre) qui ne devient opérationnel qu’en janvier 1943. En effet, les nouveaux plans de l’état-major ne réservent plus les régiments de découverte aux seuls corps d’armée blindés, mais demandent que chaque corps d’armée dispose de son groupe de reconnaissance de corps. Ce sont donc désormais cinq régiments de découverte qui seront sur pied début 1943 pour opérer au sein des cinq corps d’armée prévus pour être engagés à fin 1943. A la même époque, l’Arme Blindée-Cavalerie française, influencée par les interactions avec l’Armored Corps et le Tank Destroyer Command américains, se dote d’un nouveau type de régiment blindé : les régiments de chasseurs de chars. Deux régiments de ce type, dotés d’un mélange d’engins à canon en casemate (SAV-AU-42) et de d’engins à tourelles (M11 puis M36) sont créés à l’automne 1942 et deviennent opérationnels au printemps 1943 : le 6e Régiment de Chasseurs d’Afrique (colonel-prince Murat) et le 2e Régiment de Chasseurs d’Afrique (colonel de Loustal). Le colonel-prince Charles Murat 1 a commencé la guerre en tant que commandant du 68e BCC au Levant (Homs, Syrie), avec lequel il participe à la conquête du Dodécanèse en septembre 1940, puis à la garnison des îles de la mer Egée. Début 1941, les matériels et personnels du 68e BCC sont versés au 6e Régiment de Chasseurs d’Afrique (avec les 40 derniers R-35), créé au Levant, et dont le Lt-colonel Murat prend la tête. Il s’illustre ensuite dans la campagne d’Irak en avril et mai 1941. Revenu au Levant, le colonel Murat est rapatrié en AFN début 1942 pour diriger la remise sur pied du 6e RCA (finalement, après des mois d’hésitations, sur un modèle de régiment de chasseurs de chars). Le colonel de Loustal commence la guerre au sein du 1er Régiment de Cuirassiers (partie intégrante de la 3e DLM). Il opère en Belgique en mai 1940, puis, évacué via Dunkerque, reprend le combat sur la Loire et dans le centre du pays pendant la première campagne de France. Il est transféré vers l’AFN en juillet et intègre d’abord l’état-major, et plus particulièrement la commission chargée de dresser le bilan de la campagne de France et la mise à plat de la doctrine d’utilisation des chars. Il devient ensuite commandant adjoint de l’école de Saumur-Mediouna, au sein de laquelle, en 1941 et 1942, il dirige la formation des équipages de chars de l’armée française. A l’été 1942, il est nommé à la tête du 2e Régiment de Chasseurs d’Afrique 2 quand celui-ci se transforme sur le modèle de régiment de chasseurs de chars. Du côté des blindés de la Légion, outre la 3e BMLE déployée en Grèce et la 4e BMLE (général Schlesser) à l’entraînement en AFN, une 6e BMLE (général Faure) est créée, elle achève son entrainement en AFN au début de 1943. L’expérience sicilienne L’opération Torche, qui permet la conquête de la Sicile en septembre et octobre 1942, est une expérience à part dans l’histoire de l’Arme Blindée-Cavalerie. Plusieurs unités blindées sont engagées : outre la Brigade Blindée belge Tancrémont, on retrouve les deux brigades de la 2e DB, la 4e BMLE, le 2e RSA ainsi que la 3e DB (qui reste en réserve et ne prend pas part aux combats). Mais malgré la présence d’un expert des blindés à la tête de la 1ère Armée française (le général Delestraint), cette campagne n’est pas marquée par l’usage des chars. Le terrain très montagneux n’est pas propice aux grandes chevauchées. Les blindés alignés par l’adversaire, en l’absence de chars allemands, sont peu nombreux et de piètre qualité : ce ne sont pas les M13/41 italiens qui peuvent donner la réplique aux SAV-42 1 Descendant direct du célèbre maréchal d’Empire. Le 2e RCA (après sa participation à la conquête de la Libye à l’été 1940) devait former un des régiments de chars de la future 4e DC (avec le 8e RCA comme second régiment de chars et le 1er RSM comme régiment de reconnaissance). Il perd une grande partie de ses cadres et spécialistes pendant l’hiver 1940-41 quand ceux-ci sont mutés pour compléter les effectifs des premières DC mises sur pied. Après l’abandon du projet de mise sur pied de la 4e DC/DB, le sort du 2e RCA reste incertain pendant tout le premier semestre 1942 : on parle de le mettre sur pied en tant que régiment blindé qui déploierait deux bataillons blindés de corps d’armée, ou comme régiment de chars d’infanterie pour déployer les chars de deux nouvelles DI qui passeraient au TOE-42. Finalement, c’est bien le format de régiment de chasseurs de chars qui est retenu. 2 Bélier français (leurs adversaires les plus dangereux sont finalement les trains blindés italiens !). Néanmoins, les blindés français montrent l’efficacité de leur engagement souple par brigade et l’efficacité du commandement de l’avant, à la fois agressif et réactif, de leurs chefs. La 2e DB, lancée dans une progression centrale, sur des terrains très accidentés, connait là un engagement lourd et massif, les chars opérant en soutien aux attaques d’infanterie : Hautecloque, Dodart des Loges et Maître font preuve de leur compétence, tant dans la manœuvre pour déployer leurs forces malgré des routes étroites et peu nombreuses, que dans l’organisation de puissantes attaques qui font reculer l’ennemi. En définitive, le général Schlesser, à la tête de la 4e BMLE qui s’illustre dans la conquête de l’ouest sicilien, est le commandant d’une unité blindée le plus en vue dans cette campagne (qui le change pourtant de la plaine cambodgienne !). Hiver 1942-43 : la nouvelle promotion Après la fin des opérations en Sicile, l’état-major français se projette déjà dans la préparation du retour en France, prévu pour l’été ou l’automne de l’année suivante : il est temps de nommer les chefs qui devront conduire ces futures opérations, pour leur laisser le cas échéant le temps de se familiariser avec leurs unités et d’entrainer ces dernières. C’est aussi l’occasion de rajeunir à nouveau les cadres, en permettant aux plus anciens, qui ont tant donné pour reconstruire l’armée française en exil, de prendre un repos bien mérité. Dans l’Arme Blindée, ce changement s’opère à tous les niveaux. Au plus haut niveau tout d’abord, si ce n’est de la hiérarchie officielle de l’Arme BlindéeCavalerie, au moins de sa hiérarchie de cœur, l’événement majeur de la période est le décès du général d’armée Charles Delestraint aux premières heures de la nouvelle année 1943. Delestraint meurt d’épuisement après avoir tant œuvré pour la renaissance de l’Arme Blindée et la libération de son pays. D’autres changements moins brutaux interviennent. Le général de brigade Maurice Dodart des Loges, qui commandait la brigade blindée I/2 et qui approchait de l’âge limite de maintien en première section pour son grade, est promu général de division en décembre 1942 et nommé chef de la mission de liaison tchécoslovaque. Il est remplacé à la tête de la Brigade Blindée I/2 par le (désormais) général de brigade (à titre temporaire) Paul Girot de Langlade, promu après son superbe comportement dans le Péloponnèse. Ce dernier est remplacé à la tête du 1er RCA par le colonel Séchet. La promotion du général Paul Jouffrault suit un calendrier proche de celle de Dodart des Loges : en décembre 1942, il est promu général de division et nommé au commandement de la 192e DIA (en remplacement du général Jeannel, promu à la tête des troupes au Levant) et il est remplacé à la tête de la 3e BMLE par le général de brigade Guy Le Couteulx de Caumont. Paul Jouffrault, officier de cavalerie, commande une des dernières brigades à cheval (1ère Brigade de Spahis) début 1940, s’illustre dans la première bataille de France, du Luxembourg en mai jusqu’à la vallée du Rhône en juin et juillet en passant par Stonne, puis il prend la tête d’une unité mécanisée de la Légion Etrangère qu’il entraîne en 1941 avant de la conduire au feu en Grèce en 1942 ; il poursuit désormais sa carrière à la tête d’une division d’infanterie (africaine). Quant à Guy Le Couteulx de Caumont, il a commencé la guerre à la tête du 3e Régiment d’Automitrailleuses (au sein de la 3e DLC) et a combattu sans discontinuer de mai à fin juin 1940 pendant la campagne de France (au Luxembourg et dans les Ardennes, puis sur la Somme, la Seine, en Normandie et finalement en Bretagne où il est blessé) avant de rembarquer à Brest avec les restes de son régiment pour gagner l’AFN. Après une longue convalescence, Le Couteulx de Caumont est affecté début 1941 au 8e Régiment de Cuirassiers comme adjoint du chef de corps, plus particulièrement chargé de l’entraînement tactique (pour faire profiter cette unité de son expérience de la campagne de France à la tête d’une unité de reconnaissance mécanisée). Fin décembre 1942, enfin promu général, il reçoit le commandement de sa propre brigade. En novembre 1942, l’état-major de l’Armée redonne vie à la fonction de « général commandant les blindés de l’Armée ». Sur la base des expériences de l’Armée d’Orient en Grèce et, plus récemment, de la 1ère Armée en Sicile, et dans l’optique de la préparation du prochain retour en Métropole, l’état-major souhaite donner au général commandant chacune des armées françaises un adjoint issu de l’Arme Blindée-Cavalerie, formé à la doctrine et expert du commandement de forces blindées modernes, qui pourrait s’assurer que les diverses composantes blindées de l’armée (division blindée, régiment de découverte, mais aussi éventuelles brigades blindées – de la Légion Etrangère ou alliées – et autres bataillons de chars ou régiments de chasseurs de chars) soient utilisées au mieux et si nécessaire ensemble dans des groupements ad-hoc. Ainsi, en novembre 1942, le général de division Marteau est nommé « commandant les blindés de la 1ère Armée 3 » et le général de division Perré « commandant les blindés de la 2e Armée 4 ». Le général André Marteau, ancien commandant de la 7e DLM pendant la première campagne de France, puis commandant désigné de la 4e Division Cuirassée (puis Division Blindée) de fin 1940 jusqu’à la dissolution de cette dernière début 1942, a dirigé entretemps le camp de manœuvre des blindés au Maroc. Après plus de deux ans de frustration, Marteau retrouve ainsi la perspective réjouissante de servir au front lors de la reconquête de la Métropole. La nomination de Perré apparait plus problématique. Le général Jean Perré a supporté sans protester sa mise au piquet de l’été 1940 5, assurant les tâches de mise sur pied de la 3e DC sans avoir le titre de général de division. Il semble que – représentant ainsi les officiers venus des chars de l’Infanterie – il ait abjuré ses anciennes convictions de défenseurs des chars d’accompagnement de l’infanterie. Le 14 juillet 1941, il est enfin nommé officiellement général de division et commandant titulaire de la 3e DC. Après ces années de relative disgrâce, Perré croit avoir tourné la page quand sa 3e Division Blindée est retenue pour participer à l’invasion de la Sicile en septembre 1942, même si elle reste en réserve et ne joue aucun rôle actif. Mais De Gaulle a la rancune tenace. Le conflit entre Perré et De Gaulle n’est un secret pour personne dans l’armée depuis les années trente : il trouve sa source dans un débat de doctrine et des conceptions 3 ère 1 Armée en garnison en Sicile, et en cours de repos et recomplètement en vue d’être engagée en France en 1943. 4 e 2 Armée déployée en Grèce dans le Péloponnèse. 5 Voir la 1ère partie : Les Débuts de l’Arme Blindée-Cavalerie. radicalement opposées sur le rôle et l’utilisation des chars d’infanterie. Il se renforce quand De Gaulle se querelle avec Pétain, dont Perré est proche. Il se double d’une compétition datant de l’époque où ils étaient les deux jeunes officiers des chars les plus en vue, promis à un bel avenir… et donc rivaux ! Si De Gaulle n’a pas pu se débarrasser de Perré en 1940 ni en 1941, en raison du nécessaire équilibre entre officiers des chars de l’Infanterie et de la Cavalerie, ni début 1942, pour ne pas changer de chef à la veille d’engager sa dernière division blindée opérationnelle, il profite de la pause à la fin des opérations en Sicile et de la disponibilité de ce nouveau poste de « général commandant les blindés de l’armée » pour imposer l’apparente promotion de Perré à un poste sur un théâtre d’opérations qu’il considère comme désormais secondaire, le privant du même coup de la joie de mener sa division dans les opérations de libération de la Métropole et de la gloire de combattre en Italie 6… La succession de Perré à la tête de la 3e DB est une affaire compliquée entre tenants du maintien de la parité entre officiers des chars de l’Infanterie et de la Cavalerie et partisans de la promotion des officiers les plus aptes à appliquer la nouvelle doctrine de l’Arme Blindée. Les noms de Malaguti ou Maître sont cités, mais c’est finalement le général de division Geoffroi du Bois de Beauchesne qui est nommé. Ancien commandant de la 2e Brigade Légère Mécanique avec laquelle il combat en Belgique en mai 1940, puis chef de la 1ère DLM en juin 1940, il acquiert une solide expérience des combats de retardement et de contre-attaque menés par de petits groupements mécanisés interarmes en juin et juillet 1940. Une fois évacué en AFN, il utilise son expérience pour mettre sur pied le 1er GRCA. Début 1942, quand celui-ci devient le 2e Régiment de Spahis Algériens, il le quitte pour prendre la direction du Département de la Cavalerie au Ministère de la Guerre 7. Avec cette nomination à la tête de la 3e DB, il peut espérer retrouver un emploi au front. Cette nomination, qui brise définitivement l’équilibre entre anciens de l’Infanterie et de la Cavalerie dans l’Arme Blindée, marque une nouvelle étape dans l’évolution de celle-ci : définitivement adulte, elle peut cesser de se soucier de ses origines et concentrer toute son attention sur ses missions futures… 6 Perré atteindra le comble de l’amertume quand son successeur, à la tête de « sa » division, défilera dans Rome en libérateur… 7 Poste auquel lui succède le général de brigade Henri Préaud.