LET IT BE... INQUIETANTE DETTE DU JAPON 127 millions

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LET IT BE... INQUIETANTE DETTE DU JAPON 127 millions
LET IT BE... INQUIETANTE DETTE
DU JAPON
127 millions d’habitants et une dette publique de 160% du PIB, l’économie no.2 du monde se voit à
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nouveau dans la tourmente. La croissance du PIB japonais au 3 trimestre (qui avait tellement surpris
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les marchés le jour de sa 1 publication, à 0.6/2.2% en q/q et y/y) devrait être révisée à la baisse cette
semaine.
Et les derniers développements financiers, bancaires et budgétaires (on nomme ici la nationalisation
de la banque régionale Ashikaga et le plafonnement de la dette publique 2004) laissent pressentir que
le vrai retour à la croissance du Japon doit être remis pour plus tard, car le pays n’est pas prêt à
décoller. Mieux vaut savoir la vérité: comme le disait le plus incisif des Beatles, celui qui nous a sitragiquement quitté il y a 23 ans, « All I want is the truth , just give me some truth. ».
LA DETTE: STOP….
Depuis plus de 10 ans dans une phase de stagnation, ultérieure à l'éclatement de la bulle spéculative
des actifs, le Japon se croit aujourd’hui au bout des ses peines, misant sur un timide début de reprise
économique. Sa raison d’y croire: la croissance semble être là (2.2% en taux annuel au T3), sans
vraiment l’être, car ce chiffre sera révisé à la baisse mardi, vers 1%, tandis que l’état des finances
publiques nippones est plus grave que dans n’importe quel autre grand pays, avec un déficit
budgétaire de 2.9 % du PIB mais surtout plus de 160% du PIB en termes de dette publique. A ce
propos, toujours faut-il se rappeler que le Japon est aussi le principal producteur mondial et
exportateur d’épargne..
Voilà pourquoi, à l’occasion de la présentation des orientations générales du budget 2004, le Cabinet
de M. Koizumi a fait savoir que le mot d’ordre de l’exercice fiscal suivant sera AUSTERITE: gros effort
de réduction des dépenses budgétaires et meilleur contrôle de la dette publique au menu. Tout
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simplement, le gouvernement veut que les dépenses budgétaires n’augmentent plus à partir du 1
avril 2004. Cela va permettre d’arrêter la montée de la dette globale du pays, déjà à un niveau
excessif, après des années de politiques budgétaires coûteuses qui avaient essayé de faire repartir la
machine éco japonaise.
Normalement, dans un pays où les recettes fiscales ne couvrent pas les énormes dépenses du budget
pour la relance économique, l’équilibre du système budgétaire est vite cassé. Le fossé qui s’est ainsi
creusé a dû être comblé par l’émission d’obligations, les JGB, qui s’ajoutent à la dette de la nation,
voilà pourquoi ce chiffre horrifiant de 160% du PIB !
… MAIS COMMENT FAIRE DES ECONOMIES?
Alors, pour éviter le pire, l’année fiscale à venir ne sera plus pareille, dit Tokyo: les dépenses
générales, c’est à dire la majorité des frais de l'Etat, spécialement celles pour équipements publics,
seront limitées, à un niveau inférieur à celui de l'exercice courant, soit 47 590 milliards de yens (440
mlds de $). Par contre, la décision de limitation des dépenses est tombée toute seule, sans préciser
les voies pour y arriver, ni les mesures concrètes à prendre, ni même le montant global du budget
annuel 2004 / 2005.
Selon les attentes de la presse, il serait d’environ 83.000 milliards de yens, donc plus que les 81.800
milliards de l'exercice en cours, service de la dette oblige, ainsi que davantage de charges de
protection sociale. A propos des JGB: le total des émissions pendant l'exercice prochain, selon les
analystes, est attenduà 40.000 milliards de yens, alors que les recettes fiscales à prévoir ne seraient
que d'environ 42.000 milliards.
Quant aux autres charges, l’équipe de Koizumi compte réduire de 1.000 milliards de yens les
financements spéciaux aux collectivités locales, au titre de rationalisation des dépenses - de quoi
rendre mécontents les élus locaux qui ont à leur tour raison: la situation économique n'a jamais été
aussi mauvaise dans les zones rurales du pays, et le poids des mauvais crédits dans les bilans des
banques régionales le prouve. Une solution partielle serait prévue: transférer certaines recettes
fiscales comme les droits sur le tabac, au niveau des régions; cela leur apporterait environ 500
milliards de yens.. et le reste ?
Une autre chose à préciser: une possible hausse de la TVA est à prévoir, afin de compenser le coût
de protection sociale d’une population de plus en plus vieillissante (à partir de 2007, la population
japonaise commencera à diminuer, et jusqu’à 2020 elle perdra 0.5 % / an de ses effectifs).
L’ORIGINE DU MAL : PAS ASSEZ DE REFORMES…
En fait, les officiels du Japon essayent de corriger les effets de leur politique fiscale trop
expansionniste, au lieu de couper à la racine leurs maux: les problèmes de l’économie nippone,
l’inefficacité de certaines de ses entreprises, artificiellement maintenues en vie par la perfusion des
fonds de l’Etat (d’où le besoin de fonds, alimenté par les émissions de JGB), l’ouverture pénible vers
le monde des ses marchés et le manque de réformes structurales qui bloque toute initiative des
entrepreneurs et rend la politique monétaire de la BoJ absolument impuissante..
Pour comparaison, les réformes les plus banales que les US ou l’Europe avaient faites au cours des
années 70-80, n’arrivent au Japon que ces dernières années. On a attendu 1998 pour reformer les
finances, à la suite de la crise (le big bang financier) ou pour autoriser le fonctionnement des stations
d’essence en régime self-service…. En 2000 seulement on a déréglementé l’aviation … En 2001 on a
commencé la « grande réforme fiscale» (principalement par le changement de noms des ministères:
le MITI devient METI!!)… Et seulement en 2002 on a introduit de nouveaux standards comptables...
Cette année, finalement, on a créé 117 zones économiques spéciales qui donnent (que maintenant!)
l’accès aux entreprises au secteur agricole …
Sans oublier le dernier coup de théâtre bancaire: l’étatisation de la banque régionale Ashikaga, dans
la préfecture de Tochigi, à 100 km au nord de Tokyo. C’est le no.10 dans le top des banques
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japonaises, et la 2 à être sauvée in extremis par le gouvernement de Koizumi cette année, après
Resona- 18 mlds de $ en bailout – opération de sauvetage qui a laissé le capital aux actionnaires.
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Cette fois, c’est par une nationalisation qu’on fait le ménage (1 opération de ce type depuis 1998),
donc les actionnaires perdent leurs investissements dans la banque, les dirigeants seront remplacés
par une équipe nommée par Tokyo et la banque va être soumise à un contrôle total de ses comptes.
Alors, quoi qu’il arrive, comptez sur l’Etat: aux US la règle d’or des financiers est que les gros noms
sont sauvés par l’Etat en cas de faillite, car trop grands pour chuter: « too big to fail » …la traduction
japonaise de cette règle donne: «NO ONE can fail» - personne ne peut chuter, car l’Etat sauve tout le
monde!! … Et alors, pourquoi s’étonner pour les 160 % de dette ?
CRISTINA VASILESCU