Grande- Synthe, - Fondation Jean
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Grande- Synthe, - Fondation Jean
Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 1 GrandeSynthe, une ville industrielle en transition Damien Carême* *Maire de GrandeSynthe, président de la commission « Aménagement du territoire, tourisme, environnement, plan climat » de la Région Nord-Pas-de-Calais, vice-président de la Communauté urbaine de Dunkerque en charge de la Transformation écologique et sociale, président de l’association des maires « Ville et banlieue » F aisant face à la mer du Nord, Grande-Synthe est une ville côtière de 22 000 habitants marquée, dans son histoire, par de nombreuses mutations et préparant aujourd’hui la transition vers un futur plus harmonieux. Ancien village de maraîchers, cette localité du Nord-Pas-de-Calais devient dans les années 1960, sous l’impulsion de l’expansion industrialoportuaire de Dunkerque, une ville industrielle à la croissance démographique impressionnante. Dès les années 1970, le besoin d’un développement plus soutenable se fait sentir. S’engage alors une politique soucieuse de concilier mondes industriel et tertiaire avec la préservation des ressources naturelles. Les actions dans des domaines aussi variés que le transport, l’alimentation, l’environnement, l’énergie, l’urbanisme, la démocratie participative ou encore l’économie circulaire se développent ainsi au cours des ans. Dans ce territoire, l’annonce des crises économiques, écologiques et sociales résonne et trouve un écho politique à travers l’engagement vers un concept fédérateur et résolument positif qu’est la transition. La transition prépare le passage de la dépendance au pétrole à la résilience locale. L’autonomie, la sobriété ou encore la relocalisation en sont des maîtres mots. Cette volonté politique menée par la municipalité offre une vision positive de l’avenir, où le but est finalement de relever le plus grand défi auquel l’Homme n’a jamais eu à faire face. Les collectivités locales et leurs acteurs inventent chaque jour nos vies de demain. Dans de nombreux domaines, les initiatives des territoires participent à faire émerger une France durable, solidaire et citoyenne. L’Observatoire de l’innovation locale de la Fondation Jean-Jaurès s’emploie à repérer, analyser et valoriser ces innovations. Il est le lieu où se découvre et se partage une invention locale porteuse de solutions pour notre société tout entière. www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 2 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition Préparer la transition, ce n’est pas seulement vivre sans pétrole, c’est également tenir compte de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, consommer mais aussi produire différemment, se rendre compte de son impact sur l’environnement et finalement améliorer le bien-être et le bien-vivre de chacun. Cette démarche a permis la réalisation de nombreux projets au sein de la ville de Grande-Synthe dans de multiples domaines touchant au quotidien de chaque habitant et d’envisager un avenir meilleur. La cohérence globale de toutes ces actions a fait de la ville de Grande-Synthe une des étapes phare du « DD Tour », un circuit sur le développement durable récemment conçu par le Centre de ressources du développement durable (CERDD) de la région Nord-Pas-de-Calais mettant en valeur les expérimentations fortes, innovantes et duplicables d’une douzaine de territoires et communes de cette région. Un circuit qui sillonne la ville avec près de cinquante haltes permet de concrétiser les paris faits par Grande-Synthe, ville qui engage la mutation indispensable pour réussir l’avenir1. Une démarche d’avenir et de cohérence politique initiant la réflexion citoyenne Le pic pétrolier qui, selon l’Agence internationale de l’énergie, a eu lieu en 2006 pour le pétrole conventionnel a révélé l’imminente fin d’un pétrole abondant et peu cher. Tous les jours, de nouvelles études dressent un bilan dramatique de la situation dans laquelle se trouve la planète. Une terre et demie est aujourd’hui nécessaire chaque année pour satisfaire les besoins de l’humanité en ressources naturelles. Le jour du dépassement, c’est-à-dire la date où l’empreinte écologique dépasse la biocapacité terrestre, arrive de plus en plus tôt chaque année (19 août en 2014 contre début octobre en 2000). Près de 52 % des espèces de vertébrés ont disparu entre 1970 et 20102. En 2007, Rob Hopkins, enseignant en permaculture, a lancé en Grande-Bretagne, dans sa ville natale de Totness, le mouvement de la transition pour s’affranchir du pétrole et s’adapter aux 1. www.cerdd.org/Escapade-a-Grande-Synthe-ville-en 2. Rapport Planète vivante, WWF, 2014. www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 3 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition crises. Peu à peu, les habitants ont adhéré à la démarche et cette dernière s’est exportée à travers le monde entier. La ville de Grande-Synthe, souhaitant renforcer ses actions de développement durable et notamment celles concernant les pratiques de consommation et de production, s’est engagée dans cette même voie en 2011. Contrairement au mouvement initial « bottom up » de la transition, la ville de Grande-Synthe, forte de l’ensemble des actions entreprises au cours des quarante dernières années et consciente de l’urgence à mettre en place un autre modèle de développement, a lancé cette démarche afin d’initier le changement et d’aider la réflexion collective et l’action démocratique et citoyenne. Cette politique a également permis de révéler la cohérence des réalisations déjà entreprises et d’aller plus loin dans l’action. Regards sur les actions locales entreprises d’un défi et d’un changement global au service Environnement et urbanisme, cadre de vie Située à un carrefour écologique et migratoire aussi bien pour la faune et la flore que pour l’Homme, la ville de Grande-Synthe comporte une diversité d’habitats de nature mais aussi de logements bâtis. Le mode d’ordre est ici de créer une architecture en harmonie avec un cadre de vie vert et bleu et adaptée à un avenir plus respectueux de l’environnement. Un terreau fertile à une politique d’amélioration du cadre de vie La place accordée à la nature à Grande-Synthe est un juste retour des choses. La terre était, avant les années 1960, la richesse du village. Avec le développement de l’industrie, l’environnement y a été fortement modifié. Pour autant, dès le début des années 1970, la nouvelle municipalité souhaite ramener la nature en ville et pose ainsi la première pierre d’une politique d’amélioration du cadre de vie. Grâce à une forte volonté, elle va se donner les moyens humains, techniques et financiers de se créer une image plus positive sur un terrain où l’on ne l’attend pas : la nature. www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 4 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition Dès 1974, la ville décide la création d’un vaste poumon vert autour d’un lac artificiel de 28 hectares, le Puythouck. Pour y associer la population, les enfants des classes viennent y planter « leur » arbre. Aujourd’hui adultes, ils s’en souviennent encore. Cet espace de 130 hectares est, aujourd’hui, caractérisé par une grande variété d’espèces végétales et animales. Les espèces à croissance rapide, plantées rapidement pour faire face à la quasi-absence d’arbres, laissent aujourd’hui la place à des essences plus nobles comme le merisier, le frêne ou encore le noyer. Dans les années 1990, la municipalité met en place un verger pédagogique dans cet espace naturel du Puythouck, verger abritant près de 160 variétés locales. L’idée était de développer un verger traditionnel en implantant des espèces locales et régionales sorties de l’oubli. Ce verger fait aujourd’hui partie du réseau Fredon (Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles) pour son rôle d’expérimentation. Les efforts menés dans les plantations d’arbres sont récompensés dès 1992 avec le prix national de l’arbre, prix que la ville de Grande-Synthe obtiendra une deuxième fois en 2005, en lien notamment avec la création d’un second poumon vert, celui du Prédembourg. Cet espace de 85 hectares forme une barrière de biodiversité entre les usines et la ville. Il permet également de conforter des milieux humides à la faune et à la flore variées. Près de 170 000 végétaux y ont été plantés entre 2003 et 2004. Cette idée de barrière se voit également dans la mise en place d’une ceinture boisée autour de la ville, la séparant ainsi d’un axe routier important. Véritable chemin de biodiversité, la ceinture boisée incite à la promenade, promenade qui sera marquée par la présence de nombreux fruitiers et tapis de fleurs. À ce développement d’espaces de nature, s’associe, dès les années 1970, une politique de fleurissement de la ville et de création d’espaces verts. Pensés comme des lieux de détente, ces espaces permettent aujourd’hui à 95 % des habitants de se situer à moins de 300 mètres d’un lieu de verdure et de « disposer chacun » de 127 m² de nature. En 1990, la ville devient « 4 fleurs » et décroche le Grand prix national du fleurissement. Cette récompense est reçue depuis 24 ans sans interruption ! En 2009, elle devient « fleur d’or » et obtient le prix pour la participation des habitants. En effet, dès l’origine, les habitants sont impliqués et invités à fréquenter les serres municipales afin de mesurer l’effort entrepris et respecter le cadre de vie. www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 5 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition Vers une politique de préservation de la biodiversité amenant au prix de la « Capitale française de la biodiversité » Suite au premier Sommet de la Terre à Rio en 1992, qui voit se médiatiser l’expression « développement durable », l’engagement de la ville envers la préservation de l’environnement se globalise. En plus de sa politique d’amélioration du cadre de vie et de développement d’espaces de nature et d’espaces verts, Grande-Synthe s’engage alors vers la préservation de la biodiversité avec notamment la mise en place de la gestion différenciée, gestion qui sera récompensée en 2010 par la réception du prix de la première « Capitale française de la biodiversité »3. Ce terme, désignant la mise en place d’une gestion adaptée à chaque espèce et habitat, concrétise le souci d’adapter le développement durable au territoire communal. En pratique, la gestion différenciée se traduit par la création de microécosystèmes locaux adaptés au milieu (diversité des plantations, plantes locales, développement des corridors écologiques) afin d’arrêter le recours aux pesticides. Aujourd’hui, tous les espaces verts et de nature de la ville, même les pelouses des stades de compétition, sont entretenus sans utiliser de produits phytosanitaires. D’une manière générale, les jardiniers municipaux graduent les techniques de gestion selon une partition à trois temps. Les lieux centraux de la ville sont mis en valeur par une gestion horticole marquée par une protection biologique intégrée. Dès la culture en serre, les insectes auxiliaires attirés par les mélanges fleuris travaillent avec l’homme pour ne plus utiliser de substances nocives. Ce travail se poursuit dans les massifs avec le recours à des espèces couvre-sol et au mulching. Dans les espaces dits intermédiaires, les corridors biologiques, la marque de l’homme s’atténue encore plus. Des haies diversifiées remplacent les classiques troènes et des troncs d’arbres sont laissés afin de développer d’autres formes de vie. Les espèces locales sont favorisées. Cette pratique est également mise en place dans les espaces de nature où la gestion est encore plus naturelle. Ici, le travail de l’homme semble invisible. Les produits de fauches sont, par exemple, enlevés afin de permettre à la flore autochtone de se développer. Les initiatives de la ville engendrent des évolutions dans les entreprises. Ainsi, à force de venir pour des réunions dans le périmètre vert du Puythouck, les cadres d’entreprises sidérurgiques ont 3. www.ville-grande-synthe.fr/ville-de-grande-synthe-environnement-capitale-francaise-de-la-biodiversite-20103-176-c2.html www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 6 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition eu à cœur de décliner sur leur territoire des actions renforçant le retour de la nature au pied des... hauts-fourneaux ! Certains agents ont appris des métiers étonnants comme bagueur d’oiseaux, meneur de chevaux, spécialiste de champignons, lichens et mousses… De nouveaux assistants sont également apparus : moutons, vaches « rouge flamande » et chevaux de trait de races locales travaillent à un écopâturage dont l’exemplarité fut récompensée en 2013 avec le prix Chloro’Villes. Parallèlement, les agents ont été sensibilisés, formés, afin d’être en mesure d’expliquer les enjeux aux habitants rencontrés et de les faire adhérer à cette orientation : la gestion différenciée est une nécessité économique et écologique. Grâce notamment à cette gestion, on recense aujourd’hui près de 600 plantes différentes sur la commune, soit la moitié de la diversité floristique régionale. Cette politique attire aussi les chercheurs. La ville accueille ainsi le projet CUBA (« les Corridors des Uns sont les Barrières des Autres »). Ce programme de trois ans a été lancé suite à un appel à projets de la région Nord-Pas-de-Calais et de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité. Il est porté par le bureau d’études Biotope en lien avec des chercheurs et des étudiants de plusieurs universités (Angers, Montpellier) et en partenariat avec la ville et l’entreprise ArcelorMittal. L’objectif est d’améliorer la connaissance des corridors biologiques de la commune et d’apporter des préconisations afin d’améliorer ces corridors et leurs connexions. Ces experts en faune apporteront ainsi une nouvelle connaissance et reconnaissance au territoire. Cette reconnaissance sera renforcée, début 2015, avec le classement en RNR (Réserve naturelle régionale) de 172 hectares du Puythouck et du Prédembourg. Aujourd’hui, nature et architecture composent une nouvelle harmonie Parallèlement, côté urbanisme, Grande-Synthe avait réussi une première correction dès les années 1980. Grâce au programme d’État DSQ (Développement social des quartiers), la ville a « dédensifié » les quartiers et remplacé des immeubles par des espaces verts. Elle a su réaliser un rééquilibrage du bâti qui bouleverse les idées reçues sur les villes de banlieue. Plus particulièrement, deux secteurs – la place du Courghain et l’îlot des Peintres, secteurs intégrés au programme national de renouvellement urbain ANRU – ont achevé la mue qui fait actuellement de Grande-Synthe une ville résolument contemporaine. www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 7 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition Ce choix de bâtir dans l’esprit du développement durable se lit dans les lignes mêmes des architectures choisies ; les bâtiments ont une signification : l’avenir peut être beau et moderne. Ainsi, dans ce renouveau urbain en cours, il devient très agréable de se promener. À côté de l’aspect esthétique proposant une nouvelle image de la ville en harmonie avec la nature environnante, c’est toute la révolution qui répond parfaitement aux caractéristiques de « ville en transition » que cachent les murs des nouvelles résidences bâties depuis une dizaine d’années. Économie circulaire, autonomie alimentaire, bien-vivre À mes yeux, il faut imaginer une autre solution, d’autres modes de consommation. Je suis d’un naturel optimiste et je crois que la transition, c’est être optimiste. Cela équivaut à se dire : il ne suffit pas de se désoler, il faut agir parce que l’on a envie de bien vivre sur notre planète. La transition travaillant à la relocalisation de l’économie et à la résilience de la société, la ville de Grande-Synthe s’est également engagée sur des réalisations d’économie circulaire permettant notamment une amélioration de l’autonomie alimentaire. La ville, qui fut parmi les premières du Nord à proposer à une AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne) de commercialiser sa production sur son territoire, multiplie la plantation d’arbres fruitiers, de vergers en libre accès. Ces arbres fruitiers sortent ainsi des limites des vergers. En plus de sauvegarder des espèces locales, on permet aux Grand-Synthois d’accéder à « des fruits pour tous » en se baladant en ville. Le Centre communal d’action sociale de la ville organise ainsi des promenades en ce sens et, en partenariat avec des fermiers locaux, relance même l’activité de glanage pour les personnes défavorisées. Cet accès pour tous se traduit également dans la mise en place de jardins partagés au pied des immeubles. Les habitants peuvent ainsi effectuer des économies et en même temps créer du lien. Ces jardins vivifient les échanges intergénérationnels et cultivent non seulement des légumes mais aussi des liens d’amitié. Ils viennent s’ajouter aux jardins ouvriers déjà présents sur le territoire de la commune. www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 8 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition La municipalité a également aidé à la création d’une ferme d’insertion pour produire des légumes bio et a instauré un marché bio bimensuel. Depuis 2010, elle veille aussi à ce que 100 % des repas des cantines municipales soient bio et traçables et, depuis peu, elle met en place un conseil de gouvernance alimentaire. Cette notion de bien-vivre dans la politique de transition renforce les politiques menées par la ville dans le domaine de la santé. Forte d’un centre de santé créé il y a 35 ans, la ville s’attache aux problèmes de santé de la société contemporaine. Un projet lié aux effets nocifs des perturbateurs endocriniens sur la santé est ainsi en cours de développement. Dans le même esprit de bien-être, la ville incite les habitants à la pratique du vélo : 500 attaches-vélos sont présents en ville, des vélos électriques sont à disposition du personnel pour les déplacements intra-muros et la ville accueille un salon bisannuel. Transports, énergie, ressources naturelles Une politique multimodale de transports La production actuelle du pétrole est pour une bonne partie utilisée aujourd’hui dans le domaine du transport, ce dernier est donc un point essentiel d’une politique de transition. Elle se développe dans la mise en place d’un plan vélo mais aussi dans la création de zones de rencontres où la priorité est le piéton. Les transports en commun sont également favorisés avec des aménagements au cœur de la ville. Dernièrement, le projet « Cheval en ville » révèle toute la politique de transition menée par la municipalité. Ces chevaux utilisés aussi bien pour l’entretien des espaces que pour le transport de personnes permettent, de plus, dans un respect total de l’environnement, de créer du lien avec tous les habitants. L’énergie, un élément majeur d’une politique de transition La transition pose la question de l’après-pétrole, de l’épuisement des ressources naturelles, et notamment énergétiques, utilisées actuellement. Alors que la ville s’apprêtait à devenir première « Capitale française de la biodiversité » en 2010, elle s’engagea parallèlement à adopter la règle des « 3 fois 20 » prônée par la Convention des maires à l’horizon 2020 : www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 9 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition • diminuer de 20 % les émissions de gaz à effet de serre, • réduire de 20 % sa consommation énergétique, • avoir 20 % de part d’énergies renouvelables dans sa consommation énergétique. Se sont ainsi renforcées, dans la ville de Grande-Synthe, des alternatives aux modèles énergétiques contemporains et des solutions pour réaliser des économies d’énergie. Les résultats sont au-delà des prévisions puisque, grâce à sa politique multidirectionnelle particulièrement volontariste, on constate une baisse de 30 % des émissions de CO2 et la part des énergies renouvelables s’élève aujourd’hui à 56 %. Des bâtiments publics et des quartiers exemplaires Les bâtiments sont, en effet, le parfait exemple de cette politique de promotion des énergies renouvelables et de diminution de la consommation énergétique. Depuis l’an 2000, des solutions énergétiques sont mises en place, solutions qui se perfectionnent avec le temps jusqu’à la réalisation dernièrement d’immeubles passifs. Les anciens bâtiments publics se voient entièrement doublés d’une couche d’isolant et d’un bardage en bois et près de 2350 m² de panneaux solaires équipent les bâtiments communaux. La ville du Nord atteint ainsi le ratio de 10 Wc (Watt crête) d’énergie photovoltaïque par habitant. Dans la cadre d’un programme pluriannuel, l’éclairage public est également revu. Les lampadaires anciens sont remplacés par des « lanternes led » très économiques, la consommation passant de 150 à 50 Watt. Dans les locaux aussi, ampoules et spots sont retirés au profit des leds. Des réalisations extrêmement intéressantes car ces seules sources de lumières permettraient dans l’absolu de diminuer de 18 % la consommation énergétique de la planète. Toujours dans le domaine de l’électricité, les véhicules spécialisés communaux sont, dès que possible, remplacés par des versions électriques. De plus, 26 % de la consommation en gaz est désormais fournie par le biogaz de l’usine de méthanisation de Sequedin, près de la capitale des Flandres, Lille. Solutions de valorisation des déchets, réduction des gaz à effet de serre, production d’énergie renouvelable, le « gaz vert » www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 10 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition cumule de nombreux atouts. En signant une convention avec GDF-Suez, Grande-Synthe est devenue en 2013 la première ville de France à passer au gaz vert. Cette même année, la municipalité a également signé une convention avec EDF pour acheter des certificats d’énergie pour l’équivalent de la consommation de 3 000 foyers fonctionnant à l’énergie verte sans chauffage (10 Gigawatts-heures par an). La ville s’intéresse également à l’éolien avec la mise en place notamment d’un prototype d’éolienne se basant sur les principes mêmes qui ont permis l’élaboration de la plaine maritime où se situe la ville, ceux des moulins à vent. De nombreux exemples de bâtiments publics innovants en matière énergétique peuvent être évoqués. Ainsi, le Stadium du Littoral, où les performances ne sont pas seulement sportives, est le premier complexe à énergie positive de France : • bâtiment BBC, • 40 m² de panneaux solaires thermiques pour une couverture de 50 % des besoins en eau chaude sanitaire, • 700 m² de membranes photovoltaïques pour 31 kilowatts crête, • cuves de récupération des eaux pluviales, • éclairage automatiques à led, • fourniture de complément en énergie nécessaire grâce au biogaz, • site pilote du prototype d’éolienne. À ses côtés se trouve le club hippique, qui, comme le Stadium, se montre exemplaire avec son bâtiment BBC, son éclairage, ses panneaux photovoltaïques et son système de récupération des eaux pluviales. La nouvelle Maison de quartier et la cantine scolaire dans le Courghain apportent également des solutions énergétiques comme des toitures végétalisées, des pompes à chaleur ou encore des détecteurs de présence. Des logements passifs et BBC pour redonner du pouvoir d’achat Dans ce quartier du Courghain concerné par le renouvellement urbain avec le programme ANRU, l’urbanisme a été totalement repensé pour proposer des intérieurs lumineux et économiques avec des logements BBC, HQE et THQE. En ayant diminué leurs factures par deux voire plus, www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 11 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition leurs occupants sont ravis d’avoir pu dégager du pouvoir d’achat pour d’autres préoccupations. L’autre quartier marqué par le programme ANRU, celui de l’Îlot des peintres, va même plus loin. Forte isolation des parois (plus de 40 cm), triple vitrage, absence de ponts thermiques, grande étanchéité à l’air et contrôle de la ventilation : une réflexion globale a été menée pour atteindre un coefficient de 15 kilowatts par m² et par an, soit le quart de la plus récente réglementation thermique. Le chauffage et la production d’eau chaude sanitaire sont assurés par un échangeur couplé à une chaufferie au bois qui dessert près de 109 logements. Les performances thermiques acquises permettent de réduire l’appareillage des appartements à deux radiateurs. La lutte contre l’épuisement des ressources naturelles La raréfaction des ressources naturelles est un enjeu majeur de la transition. Dans la ville de Grande-Synthe, une politique de lutte contre ce déclin s’est engagée. L’eau, élément marquant de ce territoire situé dans une plaine maritime caractérisée par un enchevêtrement de canaux (la ville en compte six kilomètres), est gérée de façon durable avec notamment de nombreuses réalisations de récupération d’eau et un aménagement des nombreux cours d’eau. Au sein des bâtiments communaux, une politique écoresponsable est largement mise en place. Les achats sont notamment effectués dans une politique de développement durable, avec par exemple l’achat de papier certifié recyclé. Cumulé avec la collecte du papier, ceci représente un équivalent d’économie de CO2 de 162 tonnes pour la seule année 2013. Une politique de réduction des déchets en coopération avec la Communauté urbaine de Dunkerque marque également la volonté de préserver les ressources naturelles. Les services techniques de la ville ont même une déchetterie interne. Chaque type de résidus est trié à la source pour être ensuite confié à un industriel qui gère sa neutralisation ou sa récupération. Démocratie participative La participation de la population à la démarche de la transition mais aussi et surtout son appropriation est cruciale à la réussite de cette politique et à la création d’une communauté durable. À Grande-Synthe, une variété de méthodes a été développée pour inciter le public à www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 12 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition emprunter la voie d’un développement durable. De nombreuses actions de sensibilisation sont menées et les initiatives des habitants sont soutenues par la ville. Les programmes urbains sont discutés avec les habitants tout comme les schémas directeurs des pistes cyclables. Des réunions sont mises en place pour préparer la transition. Pour mener à bien cela, la ville utilise notamment l’Université populaire, une « instance » créée par la municipalité pour discuter des problèmes environnementaux, sociaux et économiques de la société d’aujourd’hui. De nombreux experts sont invités à donner des conférences grand public. Cette université organise également des « Ateliers de la fabrique de l’autonomie », ateliers consistants par exemple à créer ses propres produits d’entretien. Dans le domaine de l’environnement, la ville a réalisé de nombreux outils de sensibilisation afin que les habitants puissent comprendre la nature et participer par la suite au débat. On peut citer le verger pédagogique, mais aussi le Centre d’initiation à l’environnement, créé dans les années 1980, qui permet à de nombreuses classes d’écoliers de se familiariser avec les notions de préservation de l’environnement et d’avoir une prise de conscience collective. Cette conscience est aussi favorisée par la mise en place de week-ends nature, d’animations au jardin public, d’hôtels à insectes ou encore par la réalisation d’un jardin des plantes médicinales comportant près de 300 plantes. La ville accueille également des artistes dont l’œuvre porte sur le développement durable. Un projet pour un avenir en transition : l’écoquartier du Basroch L’ensemble des éléments de la ville en transition seront concrétisés dans la réalisation d’un écoquartier dont la préparation débutera en 2015. Afin de découvrir ce nouvel urbanisme qui se dessinera à Grande-Synthe, la ville a accompagné des habitants à Culemborg, ville néerlandaise reconnue internationalement pour son expérience et son innovation dans ce domaine. Les logements construits dans ce prochain écoquartier le seront avec des matériaux sains permettant des économies d’énergies (BBC, passif, positif). Les eaux usées seront gérées de manière naturelle avec la plantation de plantes aquatiques et en pratiquant ainsi la phytoépuration. La combinaison et l’aménagement des différents types d’habitats seront conçus pour améliorer le vivre-ensemble. Bois, clairières, prairies, potagers collectifs rythmeront le paysage formant une www.jean-jaures.org Note n°28 - Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale - 30 octobre 2014 - page 13 Grande-Synthe, une ville industrielle en transition large palette d’ambiances. Avec la création d’une ferme et de nombreuses activités ludiques liées à la nature, le lien social sera très actif. Le vœu de la transition – qui est, dans son aspect social, de créer une communauté de vie durable privilégiant le local et respectant les ressources – sera ainsi exaucé4. 4. https://www.ville-grande-synthe.fr/ecoquartier/ AVERTISSEMENT : La mission de la Fondation Jean-Jaurès est de faire vivre le débat public et de concourir ainsi à la rénovation de la pensée socialiste. Elle publie donc les analyses et les propositions dont l’intérêt du thème, l’originalité de la problématique ou la qualité de l’argumentation contribuent à atteindre cet objectif, sans pour autant nécessairement reprendre à son compte chacune d’entre elles. www.jean-jaures.org