Officines en Europe : Anglais et Italiens dérégulent

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Officines en Europe : Anglais et Italiens dérégulent
Dossier Officine
Officines en Europe
Anglais et Italiens dérégulent
Dérégulation et nouvelles missions, les officines britanniques et italiennes
sont en pleine mutation. Du Nord au Sud, elles privilégient de nouvelles offres.
A
l’instar de la Hollande, le marché oicinal britannique est largement dérégulé : pas de restriction à
la création d’oicines (même s’il faut prouver le
bien-fondé de l’installation), ouverture du capital,
importance des chaînes et réseaux auxquels 44 % des oicines étaient ailiées en 2006 selon Eurostaf 1. Le pharmacien
est rémunéré par le NHS sur la base du nombre de lignes de
prescriptions délivrées et dans la limite d’un forfait mensuel.
Le monopole oicinal couvre les médicaments de prescription (70 % des ventes) et les produits OTC soumis
à dispensation oicinale obligatoire. La vente
en ligne est autorisée pour tous les médicaments, sous réserve de l’être par un
pharmacien diplômé possédant
une oicine « en dur ».
Pour pallier le manque de GP
(généralistes), les pharmaciens sont autorisés, depuis 2004, à renouveler
des ordonnances pour
des maladies chroniques ou des traitements de longue durée. Ils peuvent assurer
le suivi thérapeutique
de patients, proposer
des services comme le
maintien à domicile ou
la livraison à domicile.
D’autres services sont
proposés aux laboratoires,
dont la création de marques
de génériques, tels Evolutiv
d’OCP ou Almus d’Alliance
UniChem. Innovant en termes
de design et de packaging, Almus a
été lancé en 2003 au Royaume-Uni où il
occupe la 3ème place sur le marché des génériques. La marque vient d’être lancée en Allemagne.
Elle est apparue en France en 2006, avec un accès privilégié
pour les 400 pharmacies « indépendantes » appartenant à
Alphega, la « chaîne virtuelle » de dimension européenne
du groupe, et qui bénéicient par ailleurs de divers services
(logo, marketing, communication, inanciers, tarifaires…).
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PHARMACEUTIQUES - DÉCEMBRE 2007
Italie : Un monopole rogné par les GMS
Avec une densité légèrement supérieure à la moyenne
européenne – une oicine pour 3 383 habitants, une pour
2 542 en France – l’Italie compte, en 2006, 18 000 pharmacies d’oicine, qui réalisent un chifre d’afaire de moitié
inférieur à celui de leurs confrères Français (692 000 euros
contre 1,255 million d’euros) malgré des niveaux de marges
similaires (24, 3 % contre 24,9 %). Le circuit oicinal a vu
son capital verrouillé ce qui lui permet de bénéicier d’une
économie de rente. Si la privatisation des pharmacies communales a permis l’arrivée des répartiteurs européens dans le
circuit, la position de ces derniers demeure encore marginale.
Mais la Péninsule surtout pris de l’avance sur la France en
matière d’autorisation en vente libre des produits de médication familiale non remboursables. Le monopole oicinal a
été limité une première fois par l’ouverture à la concurrence
sur ce segment des produits OTC, qui s’ils sont commercialisés en grande surface doivent l’être sous l’autorité d’un
pharmacien. Depuis cette mise en concurrence, en 2006, les
oicines ont perdu environ 5 % de part de marché. Environ
800 points de ventes ou « corners » ont été installés par
les GMS (dont Conad-Leclerc et Carrefour). A noter enin
que depuis mai dernier, le Parlement italien a voté une loi
autorisant les parapharmacies des GMS à distribuer des spécialités de prescription médicale obligatoire non remboursables (produits de la classe C). Une évolution contre laquelle
s’élève en novembre l’association des oicinaux, Federfarma,
qui a tenté de faire bloquer la loi par la Chambre Haute du
Parlement et a proposé des mesures pour promouvoir une
forme alternative de libéralisation du secteur, dont une modiication des règles de propriété des oicines en vue d’une
réelle modernisation du secteur et de son ouverture. A noter
par ailleurs l’intervention récente du Pape Benoit XVI, qui à
l’issue du congrès des pharmaciens catholiques a encouragé
les oicinaux à devenir des « objecteurs de conscience » et à
refuser la vente de produits dits « immoraux ». Une injonction papale que la Federfarma a estimé irrecevable en l’état
de la législation italienne sur le médicament. n
Valérie Moulle et Jean-Jacques Cristofari
(1) L’avenir du circuit officinal français face à la dérégulation
européenne, 2007.