Georges Gloukoviezoff
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Georges Gloukoviezoff » Blog Archive » Deux myth... http://alternatives-economiques.fr/blogs/gloukoviezo... Georges Gloukoviezoff Georges Gloukoviezoff pour Alternatives Economiques « Microcrédit : des méthodes d’évaluation aléatoires ? Deux mythes sur le microcrédit : le marché contre la pauvreté (2/2) » Deux mythes sur le microcrédit : un outil pragmatique dépourvu d’idéologie (1/2) les derniers articles | imprimer | envoyer a un ami Décidément, entre mi-janvier et début février le microcrédit a eu le vent en poupe dans les médias. Esther Duflo a expliqué dans Le Monde que le microcrédit était loin d’être une panacée pour lutter contre la pauvreté dans les pays du Sud. À l’inverse, dans le supplément Économie de ce même journal, Laurence Fontaine en a fait l’éloge à l’aune de l’exceptionnelle inventivité des pauvres dans l’histoire pour trouver du crédit. Enfin, dans Libération cette fois, le prix Nobel de la paix, Mohammad Yunus voulait faire du microcrédit un nouveau droit de l’homme. Ces trois contributions invitent à revenir sur deux mystifications ou simplifications courantes à propos du microcrédit. La première qui est l’objet de ce premier billet, fait du microcrédit un outil dont la mise en œuvre dégagée de toute idéologie relèverait uniquement d’un pragmatisme gage de pertinence. La seconde qui sera développée dans un second billet, porte sur les liens établis entre cet outil et la réduction de la pauvreté. À lire l’interview de Yunus dans Libération et surtout les articles qui ont accompagné sa tournée française, les choses paraissent relativement simples : le microcrédit (et le « business social » qui l’accompagne) est un outil pragmatique pour remettre le marché au service des pauvres. Pas d’idéologie, juste du bon sens. Laurence Fontaine en est d’ailleurs convaincue puisque pour elle, la critique du microcrédit serait uniquement « marquée par la culture aristocratique et par l’idéologie marxiste de haine du marché ». Ainsi, ce serait le marché ou l’État, le pragmatisme ou l’idéologie, la dignité ou 1 sur 5 26/02/2010 12:38 Georges Gloukoviezoff » Blog Archive » Deux myth... http://alternatives-economiques.fr/blogs/gloukoviezo... l’assistanat, les démocrates progressistes ou les réactionnaires et les bolchéviques. On est dans le tout noir ou tout blanc, le triomphe des raisonnements binaires. Il flotte parfois autour du microcrédit comme un parfum de « ferme célébrité »… Mais voila, les choses sont un peu plus compliquées que cela. Une première rupture suppose d’accepter que l’idéologie ne soit pas un gros mot. Soyons encore plus provoquant : derrière le pragmatisme affiché se trouve systématiquement une idéologie. Et franchissons même les dernières limites de la raison : le pragmatisme de Yunus s’exprime moins dans le recours au microcrédit qu’au travers de la stratégie de communication et de développement de sa vision de la lutte contre la pauvreté…une vision idéologique. Mais répétons-le : lui attribuer une idéologie ne revient pas à lui manquer de respect. La conception de Yunus de la lutte contre la pauvreté passe par le développement de structures de « business social » qui ne recherchent pas le profit mais l’équilibre financier tout en s’adressant aux exclus du crédit. Ce faisant, il rompt avec le discours (idéologique) sur le marché et le primat du profit. Dans le même temps, s’il s’appuie sur l’initiative privée (par opposition à étatique), il n’invalide pas pour autant l’action publique. Au contraire, il l’appelle même à la rescousse pour « établir des législations pour mieux réguler le microcrédit et déterminer quel type d’établissement peut prêter aux plus pauvres. ». C’est donc parce qu’il a fait le constat au Bangladesh, que l’action publique et le système bancaire privé étaient tous deux incapables de répondre aux besoins de financement d’une partie de la population, que Yunus a développé une structure financière reposant sur une autre logique : celle de l’altruisme. Ceux qui connaissent les conditions de développement des groupes bancaires coopératifs dans la France du milieu du XIXe siècle et du début du XXe, ne peuvent qu’être frappés par les ressemblances. Toutefois, sa démarche ne s’inscrit pas dans la logique coopérative. Il faudrait pour cela que les emprunteurs ne soient pas seulement des clients mais également des sociétaires possédant de manière démocratique ces entreprises financières de « business social ». S’il se présente comme un homme d’action plutôt qu’un idéologue, Yunus n’en est donc pas moins guidé par une conception de l’action (une idéologie) qui privilégie l’altruisme à l’égoïsme et l’action privée à l’action étatique. Bien que cette idéologie se distingue de celle strictement marchande (l’altruisme préféré à l’égoïsme), elle ne s’assimile pas pour autant à celle coopérative comme l’illustre le mode de propriété des structures ainsi que l’origine des fonds prêtés qui, aux États-Unis, proviennent de fondations et donc de la charité privée… Ce positionnement spécifique et le discours qui l’accompagne, s’expliquent sans doute en partie par la nécessité – pragmatique – de convaincre les grandes entreprises et institutions partenaires pour se développer. 2 sur 5 26/02/2010 12:38 Georges Gloukoviezoff » Blog Archive » Deux myth... http://alternatives-economiques.fr/blogs/gloukoviezo... Il apparaît ainsi que si le microcrédit n’est pas, par nature, un outil idéologique, sa mise en œuvre en revanche se fait systématiquement selon une idéologie, celle-ci pouvant être rapprochée de celle marchande, étatique ou coopérative. Les choix organisationnels et les résultats obtenus seront alors conditionnés en partie par l’idéologie sous-jacente… mais cela est l’objet d’un prochain billet. Cet article a été posté le Vendredi, février 19th, 2010 à 20:46 dans la catégorie Non classé. Vous pouvez envoyer un commentaire en utilisant le formulaire ci-dessous. Envoyer un commentaire Nom (mention obligatoire) Mail (votre mail ne sera pas publié sur le site) (mention obligatoire) Site Internet Votre commentaire Envoyer le commentaire Accueil du blog 3 sur 5 26/02/2010 12:38 Georges Gloukoviezoff » Blog Archive » Deux myth... http://alternatives-economiques.fr/blogs/gloukoviezo... Georges Gloukoviezoff Georges Gloukoviezoff est docteur en économie et spécialiste des questions d’inclusion financière des particuliers. Il est membre de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale et dirige le bureau d’étude 2G Recherche. Ses travaux sont accessibles en http://gloukoviezoff.wordpress.com ligne à l’adresse suivante : Archives février 2010 janvier 2010 Catégories Non classé Recent Posts Deux mythes sur le microcrédit : le marché contre la pauvreté (2/2) Deux mythes sur le microcrédit : un outil pragmatique dépourvu d’idéologie (1/2) Microcrédit : des méthodes d’évaluation aléatoires ? Un blog sur l’exclusion bancaire… ? Blogoliste 4 sur 5 26/02/2010 12:38 Georges Gloukoviezoff » Blog Archive » Deux myth... http://alternatives-economiques.fr/blogs/gloukoviezo... WordPress.com WordPress.org Recent Comments gloukoviezoff dans Deux mythes sur le microcrédit : le marché contre la pauvreté (2/2) Galuel dans Deux mythes sur le microcrédit : le marché contre la pauvreté (2/2) Benoit Granger dans Microcrédit : des méthodes d’évaluation aléatoires ? gloukoviezoff dans Microcrédit : des méthodes d’évaluation aléatoires ? Benoit Granger dans Microcrédit : des méthodes d’évaluation aléatoires ? © Georges Gloukoviezoff pour Alternatives Economiques Ce blog a été conçu avec WordPress MU pour le site http://www.alternativeseconomiques.fr/. 5 sur 5 26/02/2010 12:38