CONTRIBUTION DE LA BANQUE NATIONALE DE

Transcription

CONTRIBUTION DE LA BANQUE NATIONALE DE
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
ATELIER INTERNATIONAL DE DAKAR : LE FINANCEMENT DE
L’AGRICULTURE FAMILIALE DANS UN CONTEXTE DE LIBERALISATION :
QUELLE CONTRIBUTION DE LA MICROFINANCE ?
DAKAR : 21-24 janvier 2002
THEME III : MICROFINANCE, BANQUES AGRICOLES, BANQUES
COMMERCIALES : QUELS PARTENARIATS POUR LE FINANCEMENT DE
L’AGRICULTURE ?
CONTRIBUTION DE LA BANQUE NATIONALE DE
DEVELOPPEMENT AGRICOLE (BNDA) DU MALI
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
I GENERALITES
La création de la BNDA consacre l’avènement de la logique bancaire en matière de
financement du crédit rural. Jusqu’au début des années 1980, c’était la logique de
développement directif qui a eu cours. Le crédit était le fait de projets et d’opérations de
développement rural et permettait aux ruraux d’accéder aux équipements et intrants agricoles
dans le but d’accroître les rendements et les revenus.
Cette logique de développement privilégiait la distribution des prêts sur le recouvrement : les
prêts étaient mal gérés, peu suivis. L’objectif était de placer le maximum d’intrants et de
matériels, le reste devait suivre.
A la fin des années 1980, le constat fut amer : les opérations de développement rural ont été
fermées, les créances en souffrance étaient importantes et les banques commerciales et de
développement n’étaient pas très intéressées par le crédit agricole.
Ceci explique la création de la BNDA.
1.1 Présentation
1.1.1 Objet
La Banque Nationale de Développement Agricole (BNDA) a été créée en 1981 avec l’objectif
d’apporter son concours technique et/ou financier à la réalisation de tout projet qui serait de
nature à promouvoir le développement rural au Mali.
En outre, elle peut réaliser toute autre opération bancaire dont la collecte des dépôts.
Elle est donc une banque spécialisée, même si la BCEAO ne reconnaît plus de banque
spécialisée. Cette spécialisation n’est d’ailleurs plus incompatible avec l’ouverture à d’autres
marchés, d’autres clientèles et d’autres produits.
1.1.2 Capital social, actionnariat et organisation
Au cours des vingt années écoulées, le capital de la banque a subi une profonde mutation tant
dans sa structure que pour son montant.
Le capital initial de un milliard de FCFA était détenu par quatre actionnaires (Etat : 55%,
BDM : 10%, Banque Centrale du Mali : 15% et CCCE : 20%).
A date, le capital est de 10,1 milliards de FCFA et est détenu par l’Etat (39,95%), la BCEAO
(18,37%), l’AFD ou ex-CCCE (21,42%) et la DEG (20,26%).
L’on constate la sortie de la BDM et l’entrée de la DEG et les différentes augmentations de
capital ont été rendues possible par l’apport de ressources externes et par incorporation de
résultats.
La banque est administrée par un Conseil d’Administration de 11 membres dont :
- Etat : 5 membres (y compris le PDG) ;
- AFD, BCEAO et DEG : 2 membres chacun.
Le Conseil d’Administration dispose de tous les pouvoirs et en a délégué certains, notamment
au Comité des Prêts (composé de 4 membres choisis en son sein) pour accorder des crédits ne
dépassant pas 200 millions de FCFA et au PDG pour tous les actes de gestion et des crédits
sous plafond de 10 millions de FCFA (pour les particuliers) et 50 millions de FCFA (pour les
sociétés).
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
1.1.3 Activités
Les activités de la banque sont réalisées par un réseau de 20 représentations comprenant le
Siège, 7 agences, 3 bureaux autonomes et 9 bureaux permanents.
1.1.3.1 Activités de crédit
La BNDA accorde des crédits pour son propre compte, mais elle peut intervenir aussi pour le
compte de tiers. Dans ce cas, elle passe avec celui-ci un protocole d’accord qui détermine les
conditions de son intervention : objet et montant des prêts, durée, taux, bénéficiaires,
modalités de gestion, rémunération de la banque, etc…
Les crédits à moyen et long termes sont accordés :
- pour financer les investissements des ruraux : matériels de culture attelée, matériels de
transport, matériels de forge, équipements de pêche, infrastructures collectives (magasins,
centres de santé, moyens d’exhaure) et individuelles (habitat rural, moyens de
locomotion) ;
- pour les programmes d’investissement des industries et entreprises.
La banque accorde également des crédits à court terme servant à financer la campagne
agricole (intrants, fonctionnement) et les besoins à court terme des entreprises
(particulièrement l’achat et l’égrenage du coton et du paddy).
Une analyse de l’évolution des octrois de crédit de la BNDA fait apparaître la prépondérance
des octrois de crédit à court terme due à l’importance des besoins exprimés soit par les ruraux
(engrais, herbicides, embouche, commercialisation-stockage) soit par les entreprises
(financement de l’achat des produits agricoles).
Il importe donc de ne pas considérer le montant des seuls crédits à moyen et long termes
comme critères de jugement d’une banque de développement agricole.
Au cours des 5 derniers exercices (clos au 31/12), l’encours des crédits par terme a évolué
comme suit :
(en millions de FCFA)
Encours sains
. Court terme ordinaire
. Crédit de campagne
. Moyen et long termes
Encours des créances en
souffrance brutes
TOTAL ENCOURS BRUT DE CREDIT
TOTAL SANS CREDIT DE CAMPAGNE
PROVISIONS
ENCOURS NET DE CREDIT
1996
32574
11350
873
20351
1997
37534
16831
0
20703
1998
42964
19663
1917
21384
1999
42484
24899
0
17585
2000
41842
28786
0
13056
4982
37556
36683
-4613
32943
5840
43374
43374
-5056
38318
5987
48951
47034
-5589
43362
6470
48954
48954
-5667
43287
6056
47898
47898
-4000
43898
L’encours net de crédit a stagné pratiquement au cours des trois derniers exercices en raison
d’une baisse des encours de crédit à moyen et long termes surtout. C’est la conséquence d’une
politique interne qui a consisté à suspendre l’octroi de crédits à moyen terme dans une agence
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
de taille importante, afin d’assainir son portefeuille. La seconde raison est liée aux faibles
opportunités d’investissements sur la période.
1.1.3.2 Activités de collecte
Les activités de collecte de ressources portent sur la collecte de l’épargne d’une part et de
ressources extérieures (emprunts) d’autre part.
Au cours des cinq dernières années, l’on constate une augmentation de la collecte de dépôts.
En effet un développement soutenu et durable des activités de la banque est intimement lié à
la capacité de la BNDA à collecter des ressources locales. Ceci a l’avantage de préserver son
indépendance.
Toutefois, l’accès aux financements octroyés par les institutions de développement permet à
la banque d'obtenir des ressources sur une longue période à des conditions avantageuses. Ce
qui lui permet d’octroyer des crédits d’équipement tout en respectant le ratio de couverture
des emplois à moyen et long termes par des ressources de mêmes termes. Le grand risque
auquel est exposée la banque à cette occasion est le risque de change lorsque ces emprunts
sont libellés en devises, de sorte qu’en cas de dévaluation du FCFA, elle doit faire face à des
pertes de change qui peuvent à l’occasion être très importantes comme nous le verrons par la
suite. Ce risque est constant pour les devises autres que le franc français ou l’euro.
Les résultats obtenus apparaissent ci-après.
(en millions de FCFA)
Comptes ordinaires
Comptes sur livret
Dépôts à terme
Autres comptes
Epargne collectée
Emprunts extérieurs
Total des ressources
1996
12169
4977
866
708
18720
10206
28926
1997
11509
5883
388
368
18148
11203
29351
1998
12705
6096
915
684
20400
11029
31429
1999
12060
6814
1532
755
21161
14740
35901
2000
17167
7847
3111
5226
33351
14140
47491
1.1.3.3 La formation des ruraux
Suite aux nombreuses critiques formulées lors de la Conférence Nationale en 1991, la BNDA
a décidé d’entreprendre la formation des ruraux en techniques bancaires de base. Pour ce
faire, elle a écrit des modules de formation, lesquels après traduction en langue nationale ont
été testés par l’organisation de séances de formation. L’expérience s’étant avérée concluante,
et grâce au financement de donateurs (FED, KFW) la BNDA a confié la diffusion de cette
formation à un prestataire de services (le CESPA).
Cette formation s’adresse aux représentants des groupements de ruraux qui sont en relation
avec la banque, ainsi qu’aux agents d’organismes encadrant les ruraux.
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
1.1.4 Les phases d’évolution de la BNDA
Depuis sa création, la BNDA a connu trois phases dans son évolution, comme il apparaît dans
le tableau ci dessous.
En millions de FCFA
Phases
Années
Octrois
Encours
Créances Dotations Epargne Résultat
net
de Douteuses aux
collectée net
crédit
provisions
1
1982
11.915
4.255
30
34
1
1983
7.569
4.954
10
4
91
5
1
1984
6.768
3.400
29
14
2.950
26
1
1985
4.069
3.647
66
30
2.612
32
1
1985/86
7.538
4.343
208
73
1.900
16
2
1986/87
9.448
6.795
1.123
557
1.644
-70
2
1987/88
9.905
6.571
1.374
1.108
3.690
168
2
1988/89
11.913
7.780
1.732
1.452
3.794
263
2
1989/90
14.297
4.812
2.347
1.734
4.774
620
3
1990/91
9.361
7.881
2.431
2.049
8.336
658
3
1992
13.559
9.314
828
2.609
4.650
689
3
1993
9.781
8.159
539
3.313
5.370
457
3
1994
28.153
14.591
500
3.572
13.142
-1.841
3
1995
52.530
34.363
129
4.377
15.556
629
3
1996
26.020
32.943
4.982
4.613
18.720
681
3
1997
37.116
38.304
5.840
5056
18.148
780
3
1998
43.459
44.364
5.987
5589
19.770
984
3
1999
52.109
43.288
6.470
5667
25.901
667
La 1ére phase va du démarrage des activités à 1985-1986. Lors de cette phase, tous les types
de crédits, toutes les catégories de clientèle et toutes les zones géographiques ont été testés.
Elle a été instructive pour la banque puisqu’elle a permis de confirmer certaines méthodes de
travail et d’en éliminer d’autres. Le niveau d’activités est faible et les résultats sont équilibrés
à la limite. Une poursuite de la même politique de crédit aurait amené à la liquidation de la
banque.
La seconde phase court de 1986/87 à 1989/90. L’accent a été mis sur le redressement et la
consolidation de la situation financière et l’assainissement du portefeuille. L’informatisation a
été menée à bien et une sélection plus rigoureuse du crédit appliquée.
La troisième phase a démarré en 1990 avec l’adoption de plans à moyen terme. La perte
importante de 1994 s’explique par la dévaluation du FCFA.
De cette histoire, les leçons ont été tirées par la BNDA :
- toutes les activités économiques du monde rural et toutes les clientèles ne sont pas
bancables (prix peu rémunérateurs ou erratiques, atomisation des ventes, inorganisation
des clients, risques climatiques ou hydrauliques importants, etc…) ;
- l’octroi de petits crédits et la collecte de l’épargne rurale sont des activités déficitaires,
d’où l’intérêt de l’instauration de liens entre la BNDA et les SFD. En effet, les coûts
d’intermédiation de la BNDA dans ses activités avec la clientèle rurale sont
particulièrement élevés pour les raisons suivantes : la banque va au client dans un pays à
faible densité, l’atomisation des crédits et des dépôts entraîne une multitude d’opérations
de montants unitaires faibles, les ruraux sont peu au fait de la pratique bancaire d’où de
nécessaires et parfois longues explications.
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
II LA BNDA ET LA MICROFINANCE
Depuis une dizaine d’années, la BNDA a établi, avec succès, un partenariat avec les systèmes
financiers décentralisés. Ce partenariat est aussi bien institutionnel que financier.
Elle a entrepris, au cours des dix dernières années, des actions pour développer ce partenariat.
Mais quel que soit le rôle qu’ambitionne la BNDA, elle est convaincue qu’il est indispensable
de garantir et de pérenniser l’indépendance des SFD, de sorte que les relations entre la BNDA
et les SFD restent des relations de partenariat mutuellement profitables et basées sur la
complémentarité des actions.
Les actions de la BNDA ont concerné, pour l’essentiel, l’exercice du rôle de maître d’ouvrage
délégué, le refinancement des SFD, leur suivi, leur formation au métier de banquier et la
participation au Groupe Consultatif National. Elles seront poursuivies et développées.
2.1 L’exercice du rôle de maître d’ouvrage délégué
2.1.1 Généralités
Le rôle de maître d’ouvrage délégué comprend principalement les fonctions de membres de
comité de pilotage de projet, de bénéficiaire ou gestionnaire des subventions d’exploitation
consenties par les bailleurs de fonds et d'organisme payeur des subventions.
Le rôle de maître d’ouvrage délégué est exercé à la demande du bailleur de fonds, qui instruit
un programme et demande à la BNDA de gérer les différentes étapes de sa mise en œuvre, en
lui déléguant les crédits nécessaires, à charge pour la BNDA de lui rendre compte de l’état
d’avancement du programme.
Il est facilité par une répartition précise des risques et des responsabilités :
- le bailleur de fonds définit les grandes orientations des projets, apporte les fonds
nécessaires et supporte le risque financier et d’échec ;
- le maître d’ouvrage délégué assume la responsabilité de suivi technique et financier des
projets ;
- l’opérateur a en charge la responsabilité technique de la mise en œuvre des projets.
Le tableau ci-après permet d’apprécier l’implication de la BNDA dans le développement des
systèmes financiers décentralisés :
1998
Nombre de réseaux de SFD suivis par la BNDA (A)
5
Nombre de réseaux agréés par la CAS/SFD (B)
14
A/B
36%
Sources : rapports d’activités CAS/SFD 1998,1999, 2000.
1999
6
23
26%
2000
6
41
15%
Le rôle de pionnier joué par la BNDA dans le développement de la microfinance au Mali
apparaît clairement.
Les projets en cours pour lesquels la BNDA assure la maîtrise d’ouvrage déléguée sont
financés par l’AFD ou l’Etat.
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
- L’AFD finance les projets suivants : le projet Cveca en zone Office du Niger, le Paseca de
Kayes, le programme Appui aux Activités des Femmes du Mali (Miselini/Bamako, Nyeta
Musow Mopti).
La BNDA continuera à assumer le rôle de maître d’ouvrage délégué de ces projets jusqu’à
leur autonomie technique et financière.
Elle mobilisera auprès de l’AFD les subventions nécessaires pour l’atteinte de leur équilibre
financier.
A l’issue de leur phase projet, donc de la fin de la mission de maîtrise d’ouvrage, la banque
accompagnera, pour un maximum de deux ans, la consolidation de leur autonomisation
souvent fragile.
Cet accompagnement pourra se traduire par la mobilisation de subventions pour le
financement de plan de développement à moyen terme (business plan), de programme de
formation et des missions d’audit et ponctuelles d’appui technique.
-
L’Etat, qui a emprunté des ressources auprès du FIDA, finance le programme
CMEC/PDR.
La BNDA assume le rôle de maître d’ouvrage délégué du programme CMEC/PDR/San dont
le réseau de création récente comprend 29 caisses. Les caisses de première génération (au
nombre de 10) ont été ouvertes en 1999 et leurs résultats sont très faibles, pour le moment.
Le tableau ci-après donne des indications sur les SFD, dont la maîtrise d’ouvrage déléguée est
confiée à la BNDA, pour les années 1999 et 2000.
Montants : en millions de FCFA
Montants
Taux de
Montant
Montant
Nombre
Nombre de
caisses ou d’adhérents des encours des encours des fonds Recouvrem
ent (%)
crédits
propres
dépôts
de groupes En milliers
1999 2000 1999 2000 1999 2000 1999 2000 1999 2000
Cveca-ON
49
51 20,4 22,2 390 438 1008 1203 326 271
Paseca
14
22
1,3 3,2
41
89
12
66
4
44
Miselini
1264 16
6,5
5
55 158 175 251 137 163
Nyetamuso 193 232 3,2 3,9
51
69
67 105 70 103
Cmec-PDR
9
19
2
2,2
14
24 23,6
2,7
Source : Rapports d’activités
1999
98,3
98,8
98
97,1
-
2000
98
99,5
98,5
96,3
100
De nouveaux projets, nécessitant l’implication de la BNDA comme maître d’ouvrage délégué
démarreront prochainement.
La cellule nationale du CIDR, financée par l’AFD au début de 2000, a produit les études de
faisabilité de CVECA dans les cercles de Macina et Tenenkou. Il a été retenu la création d’un
seul réseau pour les deux cercles. Les premières caisses seront créées en janvier 2002.
Des études de faisabilité sont en cours pour choisir la zone d’un autre réseau de caisses qui
sera créé en 2002.
Il faut noter que pour le compte de la KFW, la BNDA a déjà assumé les missions d’appui à la
maîtrise d’ouvrage déléguée des projets Cveca au Pays dogon et Cveca en Première Région.
Ces deux réseaux de CVECA sont devenus autonomes respectivement en 1997 et en 1999.
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
A la fin de leur phase projet, donc de ses missions, la BNDA a mobilisé des subventions
auprès de la KfW pour accompagner la consolidation de l’autonomisation de ces deux
réseaux.
Les résultats obtenus par ces deux réseaux en 1999 et en 2000 apparaissent ci-dessous.
Montants : en millions de FCFA
Nombre de
Nombre Encours des Encours des Montant
Taux de
caisses
d’adhérents
dépôts
prêts
des fonds recouvreme
En milliers
propres
nt (%)
1999 2000 1999 2000 1999 2000 1999 2000 1999 2000 1999 2000
Cveca Pays
Dogon
61
65
29
Cveca Pays
Malinké
52
52
22
Sources :Rapports d’activités
31
496
414
400
350
125
61
90
90
26
150
128
401
329
95
218
98
98
En dépit de leur autonomisation, la BNDA continue d’être un partenaire technique et un
interface financier pour ces réseaux.
Elle a participé, à leur demande, à l’élaboration de leur plan à moyen terme (PMT), à la
définition des budgets des services techniques d’appui et constitue un relais pour l’obtention
de financement auprès de bailleurs de fonds (principalement la KFW) pour la mise en œuvre
de leur PMT. La KFW a déjà donné son accord pour couvrir partiellement le financement du
PMT des CVECA du Pays Dogon et une convention sera signée entre elles et la BNDA afin
de préciser les objectifs à atteindre et les moyens nécessaires pour ce faire.
La BNDA reste donc disponible pour apporter son appui à la création de nouveaux projets à
financer par d’autres bailleurs de fonds lorsque les conditions suivantes seront réunies :
- une étude établissant la faisabilité technique, financière, sociale et institutionnelle du
projet ;
- des objectifs de pérennité institutionnelle et financière ;
- des projections financières établissant clairement l’atteinte de l’équilibre financier dans
des délais raisonnables (une dizaine d’années) ;
- un schéma institutionnel lisible et réalisable ;
- l’adhésion du bailleur à l’idée d’assurer le financement du projet pendant une durée
suffisante pour lui permettre de s’institutionnaliser et d’atteindre l’équilibre financier ;
- un opérateur spécialisé ayant fait ses preuves au Mali ;
- l’implantation proche d’une représentation de la BNDA.
Dans ce cas, la BNDA intervient pour le compte de l’Etat et/ou des bailleurs de fonds et les
conditions de cette intervention font l’objet de convention entre les parties.
2.1.2
Les caisses villageoises d’épargne et de crédit autogérées de la zone Office du Niger
Le cas des Caisses Villageoises d’Epargne et de Crédit Autogérées (CVECA) de la zone
Office du Niger (plus de 120.000 personnes réparties dans 151 villages exploitent environ
45.000 hectares ) est intéressant à plus d’un titre, dans la mesure où c’est la BNDA qui a eu
l’idée de ce projet.
La zone Office du Niger est surtout une zone de production irriguée du riz avec maîtrise totale
de l’eau. Le riz produit localement est très prisé, mais était exposé avant la dévaluation à une
forte concurrence du riz importé.
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
La BNDA a ouvert une agence à Niono en 1987, au moment où la zone bénéficiait d’un
programme de réhabilitation des terres.
Les producteurs, regroupés en associations villageoises (AV), bénéficiaient d’importants
concours bancaires pour financer leurs besoins d’équipement (matériels de culture attelée et
de post récolte) et de fonds de roulement (acquisition d’engrais et couverture des frais de
main-d’œuvre).
L’introduction du repiquage a entraîné une réduction de la superficie attribuée à chaque
famille. Toutefois, les rendements se sont améliorés. Alliés à la double culture du riz parfois,
les revenus ont augmenté fortement en dépit de la forte croissance des charges (recours plus
fréquent à la main-d’œuvre salariée et besoins en intrants croissants).
Toutefois, une mauvaise gestion du crédit agricole a abouti à une dégradation de la situation
de l’agence BNDA. Les concours de la banque étaient importants : 221 prêts pour 792
millions de FCFA en 1990/1991, 474 prêts pour 1452 millions de FCFA en 1991/1992.
Au 30/09/1992, le portefeuille de l’agence était fortement dégradé (avec un encours
compromis égal à 18% de l’encours total) comme il apparaît sur le tableau ci-dessous :
( en millions de FCFA)
Court terme
Moyen terme
Total
Encours sain
1.120
97
1.217
Encours en souffrance
229
31
260
Total
1.349
128
1.477
L’importance des impayés a abouti à une distribution très sélective du crédit, avec une
exclusion de certaines AV du bénéfice des prêts.
Cette situation a amené la BNDA à rédiger, en 1992, les termes de référence d’une étude de
faisabilité d’un réseau de caisses en zone Office du Niger.
Le CIDR a mené à bien cette étude de faisabilité et la BNDA a pu mobiliser pour la
réalisation de ce projet trois bailleurs de fonds : l’AFD, le FED et la KFW.
Le réseau CVECA a été lancé le 1er août 1994 pour une première phase de trois ans avec
comme objectif la création de 30 caisses, avec comme opérateur technique le CIDR. Le coût
( investissement, assistance technique, fonctionnement, frais généraux et appui) de cette phase
a été estimé à 595 millions de FCFA au total.
La BNDA a joué dans un premier temps le rôle de maître d’ouvrage en :
- préparant les TDR du projet ;
- obtenant le financement auprès des bailleurs de fonds, auxquels elle rend compte ;
- signant avec l’opérateur un contrat de réalisation du projet ;
- décaissant des fonds auprès des bailleurs pour faire face aux besoins de l’opérateur ;
- suivant la réalisation du projet par l’opérateur et en rendant compte aux bailleurs de fonds.
Une seconde phase, financée par l’AFD, a débuté en 1997, avec comme objectif principal de
consolider et d’institutionnaliser le réseau.
Cette phase prend fin en 2001 avec la signature de contrats de rétrocession des biens, acquis
pendant la phase projet, aux associations de caisses et au service commun.
Sept ans et l’engagement important des bailleurs de fonds (1.200 millions de FCFA pour les
deux phases du projet ) auront donc été nécessaires pour mener à bien un projet de caisses
autonomes et indépendantes vis-à-vis de la BNDA, même si elle a joué un rôle prépondérant
pour sa réalisation.
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
2.2 Le refinancement des activités de crédit des systèmes financiers décentralisés
La BNDA, contrairement à d’autres banques maliennes, a vite compris la complémentarité de
ses actions avec celles des systèmes financiers décentralisés (SFD) dans la distribution des
crédits. Ainsi, elle octroie le crédit « en gros » aux SFD qui le distribuent « au détail ».
Le refinancement des SFD permet à la BNDA de diversifier ses emplois et de toucher des
populations qu’elle n’aurait pas pu toucher toute seule.
2.2.1 La politique de refinancement
Les grands principes de cette politique sont les suivants :
- avoir l’autorisation d’exercer en toute légalité (agrément ou reconnaissance) ;
- apporter la preuve de son savoir faire en épargne/crédit (opérateur compétent, bonne
qualité de portefeuille, présenter des perspectives d’autonomie technique et financière
claires et réalistes, présenter un schéma institutionnel lisible et réalisable) ;
- apporter la preuve de la rigueur de sa gestion par la mise en place d’un système
d’information de gestion fiable, notamment la tenue d’une comptabilité certifiée, et par la
réalisation d’audit comptables externes ;
- supporter une partie du risque par la constitution d’un dépôt de garantie minimum de 10%
du concours demandé ;
produire régulièrement dans la forme requise par la BCEAO les rapports d’activités
annuels ;
- s’inscrire dans une politique de complémentarité avec la BNDA.
2.2.2 Les emprunteurs
Chaque réseau a sa propre démarche pour se faire refinancer. Ainsi, selon les réseaux,
l’emprunteur peut être :
- la fédération,
- les associations ou unions,
- les caisses de base,
- l’opérateur technique, lorsque l’institutionnalisation n’a pas encore été effective.
2.2.3 Les conditions débitrices
Les premiers concours aux SFD ont été faits aux conditions habituelles de la banque en faveur
des associations villageoises. Par la suite, en fonction des résultats obtenus et de la spécificité
des SFD, des conditions préférentielles ont été consenties par la banque. Ainsi, actuellement
les taux pratiqués sont compris entre 9% et 8% l’an.
2.2.4 Les garanties
Les garanties exigées sont les suivantes :
- la caution solidaire des membres des caisses ou des unions ou associations de caisses,
- un dépôt de garantie de 10% minimum des montants demandés. Le niveau de ce dépôt
pourrait augmenter à l’avenir.
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
2.2.5 Les résultats
L’activité refinancement a démarré en 1989 avec les Cveca pays dogon. Elle a connu un
développement très rapide et soutenu. En onze ans, les concours sont passés de quelques
dizaines de millions de francs à plus de 2,4 milliards de francs CFA à fin 2000.
Le tableau ci-dessus retrace pour les trois derniers exercices l’importance du rôle joué par la
BNDA dans le refinancement des SFD :
Montants en millions de FCFA
1998
1999
2000
Refinancement accordé par la BNDA (A)
2 224
2 524
2 400
Refinancement accordé par l’ensemble du système bancaire (B) 2 400
2 964
2 700
A/B
93%
85%
89%
Sources : rapports d’activités CAS/SFD 1998,1999, 2000.
Jusqu’à fin 2000, le taux de remboursement des refinancements octroyés par la BNDA a été
de 100%.
2.3 Le suivi et la formation des sfd
2.3.1 Le suivi des sfd
La BNDA organise des missions de suivi des SFD pour lesquels elle assure la maîtrise
d’ouvrage déléguée, à l’issue desquelles un rapport de mission est établi. L’objectif est
d’organiser des missions semestrielles dans ces SFD et de les étendre par la suite aux autres
SFD qui travaillent avec la BNDA.
2.3.2 La formation
La BNDA accueille, en son sein, en stage des agents de SFD et fait participer les adhérents
des SFD aux sessions de formations offertes par la banque aux ruraux.
Elle organisera des séances de formation à l’intention des agents de la BNDA sur :
- l’articulation banques –SFD : expériences de la BNDA ;
- les critères d’accès au refinancement BNDA et conditions du refinancement BNDA.
2.4 Autres actions
La BNDA participe aux travaux du groupe consultatif national pour la microfinance comme
représentant de l’APBEF.
La BNDA participe activement à la coordination des interventions en faveur des SFD au Mali.
A ce titre, elle :
- dialogue régulièrement avec la CAS/SFD et les agents chargés des SFD au sein de la
BCEAO ;
- échange régulièrement avec les responsables des opérateurs spécialisés et avec les
bailleurs de fonds intervenant dans le domaine ;
- reçoit de nombreuses missions s’intéressant au développement des SFD, notamment des
bailleurs de fonds ayant peu d’expérience en la matière ;
- assiste à, voire anime, des séminaires et forums dont le sujet est le développement des
SFD ou les liens entre les SFD et les banques.
Le financement de l’agriculture familiale dans le contexte de libéralisation : quelle contribution de la microfinance ?/
Séminaire de Dakar, 21-24 janvier 2002 / Contribution
___________________________________________________________________________
III LES ENSEIGNEMENTS
A la lumière de nos interventions dans le domaine de la microfinance nous pouvons retenir
des leçons et formuler quelques interrogations.
3.1 Les leçons
-
-
-
-
Aucun intervenant dans le financement du monde rural n’est à même de répondre à
l’ensemble des besoins des clients au meilleur prix. Une synergie des actions du système
bancaire et des institutions de microfinance est indispensable, ce qui passe par
l’amélioration de leurs relations et par les échanges d’informations. La création d’une
centrale des risques est salutaire lorsque plusieurs intervenants coexistent dans une même
zone ;
Les relations de refinancement entre les banques agricoles et commerciales d’une part et
les institutions de microfinance d’autre part ne pourront se développer que dans un cadre
de complémentarité. Toute autre conception risque d’aboutir au surendettement des ruraux
et/ou à une concurrence entre les banques et les SFD, ce qui serait préjudiciable à la
bancarisation des ruraux ;
L’octroi de refinancement aux institutions de microfinance permet d’augmenter les
financements bancaires en direction du monde rural, tout en les sécurisant. La création des
CVECA a permis à la banque de poursuivre son financement en direction de ruraux qui
étaient «éliminés » à cause de la mauvaise gestion de leurs associations et de recouvrer
des crédits compromis. En effet, l’une des conditions d’ouverture des caisses était
l’engagement des villages à résorber les impayés qui perduraient ;
La création d’un réseau jusqu’à sa phase d’autonomisation nécessite un engagement, du
maître d’ouvrage délégué et des bailleurs de fonds, sur une période relativement longue
(7ans au moins). Sans cette certitude, la survie du réseau n’est pas assurée ;
Les relations de refinancement ne pourront perdurer que lorsque chaque intervenant
(banques et/ou institutions de microfinance) couvre la totalité de ses coûts ;
Quelle que soit la qualité de leurs liens, il convient que les banques et les institutions de
microfinance gardent leur indépendance de décision, les unes par rapport aux autres.
Sur le plan organique, la banque doit disposer d’une entité spécialisée capable de
capitaliser et de servir d’interface entre les acteurs (bailleurs de fonds, SFD) et les
fonctions (réseau de la banque, fonction financière, etc…).
3.2 Les interrogations
-
-
L’extension rapide, la taille et les activités de certains réseaux de SFD s’apparentent de
plus en plus à des pratiques bancaires classiques, alors qu’ils ne sont ni assujettis à la loi
bancaire ni soumis aux mêmes exigences de contrôle que les banques, d’où une distorsion
dont les effets sont pervers pour les SFD concernés eux mêmes (à cause des risques de
contrepartie, de taux voire de risque de change non maîtrisés). N’est-il pas opportun de
mener des réflexions pour fixer les limites d’un réseau de SFD ? En d’autres termes
comment faire pour qu’une institution de microfinance entre dans le système bancaire ?
Si l’objectif est d’arriver à financer l’agriculture familiale et si le problème est de
permettre l’accès des agriculteurs aux services financiers, la fixation de taux d’usure n’estelle pas de nature à freiner le drainage des ressources financières vers l’agriculture ?
Autrement dit, pour développer le financement des agriculteurs ne faut-il pas permettre à
chaque intermédiaire de couvrir l’ensemble des charges que lui coûte son intervention
dans l’agriculture par la fixation de taux d’intérêts adéquats ?

Documents pareils