Interview de JC Spinetta par JP Elkabbach, sur Europe

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Interview de JC Spinetta par JP Elkabbach, sur Europe
18 janvier 2005 (8h19)
Interview de J.C. Spinetta par JP Elkabbach, sur
Europe 1, à l´occasion de la présentation de l´A380
(script)
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Jean-Cyril Spinetta, bonjour.
JEAN-CYRIL SPINETTA, PDG de Air France
Bonjour, Jean-Pierre Elkabbach.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous êtes évidemment à Toulouse ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Je suis à Toulouse depuis hier soir.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors, le mystère est total, est-ce que vous, vous l’avez vu ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Ecoutez, je viens de le voir, je suis dans les locaux Airbus et j’ai eu l’émotion de
voir l’avion, rapidement.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Comment il est ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Il est absolument magnifique. Il est dans le hangar où il a été assemblé, peint
dans la livrée Airbus avec le nom des compagnies clientes...
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Tél + 33 (0)1 41 56 56 00 - Fax + 33 (0)1 41 56 84 19
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JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et le logo, comment ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
C’est un nouveau logo Airbus, mais je laisserai les gens d’Airbus le décrire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oh là, là. C’est un géant tout blanc, d’une dimension qui intimide, est-ce qu’il
vous plaît ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Il me plaît énormément. Air France a été, en 2001, la deuxième compagnie
cliente de l’Airbus A380 et donc, voir maintenant ce rêve, ce rêve européen se
concrétiser et la Compagnie pouvoir en bénéficier, c’est évidemment une très
grande émotion, et même un immense plaisir.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Naturellement, ce sont les avions sortis de la planète monde, les avions qui
raccourcissent les distances, qui vont récréer la géographie, et qui correspondent
à la mondialisation. Vous avez commandé 10 Airbus A380, c’est vrai ça ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Nous allons commander 10 Airbus ferme, nous nous y sommes engagé en 2001,
et 4 options, 4 de plus si le trafic le permet. Nous démarrerons en avril 2007 nos
premiers vols sur New York...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L’avion vous sera livré par Toulouse ou Hambourg à quel moment ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
En avril 2007, dans un tout petit peu plus de 2 ans et nous en recevrons ensuite 3
par an les deux premières années, et 4 la troisième année.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
A l’horizon, l’objectif d’Air France, si vous en avez les moyens, si ça marche, si
c’est le développement du trafic aérien, ce serait combien ?
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JEAN-CYRIL SPINETTA
Il faudra que nous nous ajustions en fonction des différents marchés sur lesquels
nous opérons. Pour l’instant, cet avion nous parait parfaitement adapté à
l’Amérique du Nord, New York et Montréal, là où nous démarrerons ; ensuite, à
l’Asie, Tokyo et Pékin. Et, naturellement, ce que nous espérons, c’est que le
trafic, la demande, soit suffisamment forte pour que progressivement nous
puissions utiliser de plus en plus de A380.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Jean-Cyril Spinetta, à quelle date avez-vous prévu le premier vol Air France sur
l’A380 ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Ce sera en avril 2007 sur New York.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors, l’avion va avoir, assez vite quand vous l’aurez reçu, les couleurs d’Air
France ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Oui, absolument. Les couleurs d’Air France, la dérive Air France chacun la
connaît, la dérive tricolore, donc, là, de ce point de vue, il n’y aura pas de
changement. En revanche, pour l’aménagement de l’avion nous tirerons
argument de la capacité qu’il offre, de la modernité qui est la sienne pour offrir à
nos clients un niveau de confort sans équivalent aujourd’hui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors, on va être un peu plus précis. Chaque compagnie doit choisir et peut
choisir l’aménagement et la décoration intérieure, elle sera sans doute
particulière. Combien il y aura de sièges et de classes ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Alors, pour nous, il y aura 538 sièges et 3 classes. Une première classe avec 9
sièges ; une classe affaires, très confortable, avec un véritable lit, avec 80
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sièges ; et, une classe économique, là aussi avec des nouveaux fauteuils plus
confortables, avec plus d’espace et de facilité pour nos clients de 449 sièges,
donc au total 538 sièges.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et, il y aura le bar, il y aura toutes ces installations qu’on nous montre
régulièrement à l’image quand c’est du virtuel ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Il y aura des espaces de convivialité à la fois en première, pour la classe affaires
et pour la classe économique, qui permettront aux clients de nos différentes
classes de se détendre pendant le vol s’ils le souhaitent.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Voilà. Est-ce que par rapport au voyage en Boeing 747, le prix des billets sera
moins cher ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Ecoutez, ça nous verrons. Ce dont nous sommes certains, c’est ce que Airbus dit
à l’ensemble de ses clients, que grâce à cet avion, avion moderne, avion gros,
avec plus de sièges, ils vont pouvoir réduire les coûts aux sièges de l’ordre de 15
% pour les premiers avions. Airbus dit même que ça pourrait être davantage
pour les avions qui viendront après, 24 %. C’est un atout économique pour nous.
Nos clients en bénéficieront mais j’espère que la compagnie elle-même en
bénéficiera en termes de meilleure rentabilité par rapport à ses concurrents.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quand on le compare à un 747 en taille, en dimension, comment est-il ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
En ce qui concerne la taille, la longueur est à peu près la même, deux mètres de
plus pour l’A380. Ce qui est impressionnant, c’est l’envergure, la taille des ailes,
presque 15 mètres de plus pour l’A380 par rapport au Boeing, près de 80 mètres
d’envergure par rapport à 65 m. Et puis, évidemment, la hauteur, la dérive est
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impressionnante, une hauteur de 24 mètres contre 19 mètres pour un 747, donc
une masse au totale beaucoup plus importante et une véritable émotion, je l’ai
dit, lorsqu’on découvre l’avion, comme je viens de le faire il y a quelques
minutes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous avez de la chance. Les futurs passagers sont déjà pour les Français
passionnés, mais ils ont un souci que vous connaissez bien vous, la sécurité.
JEAN-CYRIL SPINETTA
Oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Devant cette masse... ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Il y a une règle dans l’aéronautique, il y a une règle qui ne connaît pas
d’exception, c’est que plus les avions sont de génération récente, plus ils
intègrent dans leurs systèmes, dans leur construction des systèmes experts qui
les rendent de plus en plus sûrs. Alors, cet avion évidemment intégrera tout le
savoir-faire d’Airbus, des équipementiers, accumulé depuis plusieurs décennies,
et sera évidemment en matière de sécurité au plus haut niveau d’exigence parmi
les avions commerciaux disponibles.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quelle clientèle visez-vous ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Nous visons, vous le voyez à travers l’équipement qui sera le nôtre, première
classe, classe affaires et 440 sièges en classe économique, tous les types de
clientèle : les hommes d’affaires sur les longs-courriers, cet avion pourra
parcourir 15 000 km, ont besoin d’un très haut niveau de confort parce qu’ils
vont traiter un certain nombre de dossiers économiques et qu’ils ont besoin
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d’arriver en pleine forme ; et puis, évidemment, les clientèles touristiques, ceux
qui veulent découvrir le monde, connaître les différentes civilisations.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Julie, qui est à côté de moi, voudrait réserver sa place pour le premier vol ou les
premiers vols, il faudra qu’elle attende encore un petit peu...
JEAN-CYRIL SPINETTA
Il faudra qu’elle attende encore au moins un an, mais dès que la réservation sera
ouverte, je me permettrai de vous appeler pour que vous puissiez le faire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
D’accord. Certains pays construisent des aérogares spéciales pour l’A380, chez
nous, vous avez annoncé déjà que Roissy sera réaménagé ou est en train d’être
réaménagé, elle serait prête à accueillir l’A380.
JEAN-CYRIL SPINETTA
Oui, tout à fait, à Roissy, tout ce qui concerne les pistes a été fait par Aéroports
de Paris. Le terminal S3, le satellite 3 du terminal E, permettra d’avoir des
doubles passerelles, -vous savez que c’est un avion qui a un double pont- pour
faciliter l’opération d’embarquement et de débarquement des passagers. Cette
aérogare sera disponible en avril 2007 exactement au moment de la livraison de
l’avion par Airbus.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais, est-ce qu’il y aura des aéroports en France, d’autres villes qui pourront
accueillir l’A380 ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Pour l’instant, je ne crois pas mais pour les pistes, c’est un avion qui peut aller
partout, il ne présente pas des particularités telles que...
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C’est l’accueil, l’embarquement, le débarquement.
JEAN-CYRIL SPINETTA
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Oui, c’est plutôt pour les flux de passagers qu’il faut des installations qui
permettent d’avoir des doubles passerelles, au pont inférieur et au pont supérieur
pour faciliter l’embarquement et le débarquement.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Les chefs qui vont arriver, les chefs d’Etat et de gouvernement, messieurs
Schröder, Chirac, Blair, Zapatero, et peut-être M. Raffarin. Vous avez parlé de
New York, les Etats-Unis avaient entravé les débuts des vols commerciaux du
Concorde, cette fois-ci ils vont se comporter de quelle façon avec l’A380 ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Oui, ils vont se comporter de manière tout à fait convenable, il n’y a pas de
doute là-dessus. New York est le premier aéroport sur lequel on utilisera cet
avion et il a fait l’effort d’ores et déjà de se préparer à l’accueil de cet avion.
C’est un moment de très grande émotion partagée en France et aux Etats-Unis.
Je pense qu’il y a un symbole après la tragédie du 11 septembre à ce que le
premier Airbus A380 d’Air France vole sur Paris/New York.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
En 2008, les premiers Airbus A350 et concurrents du 7E7 de Boeing vont être
prêts, est-ce que vous allez en commander ? Si oui combien ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Nous nous intéresserons certainement à cet avion. Il intègre beaucoup
d’innovations en matière de masse, d’aérodynamique, de consommation des
moteurs, et donc on ne peut pas ne pas s’y intéresser. Mais, pour Air France, j’ai
bien eu l’occasion de le dire, nous n’envisageons pas de développement de notre
flotte avant 2008-2009, donc nous ne regarderons cet avion pas immédiatement,
mais nous le regarderons très attentivement et c’est le type d’avions dont les
opérateurs aériens ont besoin.
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JEAN-PIERRE ELKABBACH
Priorités au chouchou, l’A380. A quoi le trafic aérien va ressembler dans 5-6
ans ? Est-ce que le ciel sera moins encombré ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Oh, le ciel sera encombré comme il l’est aujourd’hui, je pense que l’A380 par sa
taille, par le nombre de passagers qu’il emporte, donne une réponse à
l’encombrement du ciel. Il donne également une réponse à des problèmes
d’environnement en matière de bruit, en matière de consommation de kérosène,
en matière d’émission de gaz à effet de serre.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On disait hier, avec Charles Champion, le patron du projet, que c’était un avion
écolo, donc...
JEAN-CYRIL SPINETTA
Absolument, c’est l’avion écolo, le plus écolo de l’ensemble des avions qui sont
offerts aujourd’hui aux compagnies aériennes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quand le prix du pétrole va baisser et que les voyageurs disposeront de tant
d’avions, est-ce que les tarifs vont diminuer ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Nous avons créé, vous le savez, comme les autres opérateurs, partout dans le
monde, des surcharges pour faire face en partie à l’augmentation des prix du
pétrole, et dès lors que le pétrole baissera ou baisserait, immédiatement nous
supprimerions ces surcharges, nous l’avons déjà annoncé. Et, donc, si le pétrole
était à moins de 40 dollars le baril pendant 30 jours consécutifs, nous
supprimerions la troisième surcharge.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Dès 2005 par exemple, même en 2005 ?
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JEAN-CYRIL SPINETTA
En 2005, immédiatement. Nous tiendrons les engagements que nous avons pris
sur la suppression de ces surcharges si le prix du baril atteint un niveau plus
raisonnable qu’aujourd’hui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Encore quelque chose qui ne manque pas d’intérêt, je lis à l’instant que Air
France-KLM, le puissant groupe européen, offre aux salariés 8 % du capital
entre le 1er le 21 février. Les salariés auront donc 8 % du capital et à l’issue de
transaction, la part des salariés dans le groupe va s’élever à 17.4 % et celle de
l’Etat à 18.3 ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Absolument, nous l’avons annoncé hier. Donc, les salariés, sur une base
volontaire, pourront soit acheter des actions dans le cas d’offre réservée aux
salariés, soit participer à un échange salaire/actions.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Je sais que vous y tenez, mais depuis votre présidence, l’Etat est passé dans le
capital d’Air France de plus de 50 à moins de 18.3 %, est-ce que la compagnie
s’est pour autant affaiblie ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Non je crois qu’elle s’est renforcée puisque ce mouvement était nécessaire pour
rendre possible la fusion entre Air France et KLM et cette fusion donne plus de
chance à Air France et aux salariés d’Air France.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C’est-à-dire l’ouverture du capital vous a rendu maître dans votre stratégie, plus
performant face à la concurrence mondiale ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Absolument et en situation de bénéficier de toutes les possibilités d’alliances, de
fusions, de partenariats avec tous les grands opérateurs aériens dans le monde.
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JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ca veut dire qu’il n’y a pas que des inconvénients à ouvrir le capital, je vais être
un peu lourd, avis aux intéressés. Est-ce que je peux vous demander ce que vous
pensez,
l’Europe
aujourd’hui
montre
qu’elle
est
technologiquement,
politiquement peut-être, commercialement inventive face aux Etats-Unis. Est-ce
qu’il faudrait à l’Europe n’en déplaise aux grincheux qui sont partout, de
nouveaux projets audacieux ?
JEAN-CYRIL SPINETTA
Oui, j’en suis convaincu, je le disais en commençant, cet Airbus A380 est
l’aboutissement d’un rêve européen, celui de construire une industrie
aéronautique leader mondial, c’est fait et c’est formidablement fait. Et, je pense
que l’Europe, si elle associe tous ses savoir-faire, toutes ses intelligences, a les
capacités dans d’autres domaines de développer des projets aussi ambitieux.
Nous en manquons, les Européens en manquent et je pense que les citoyens
d’Europe les attendent.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ecoutez, merci Jean-Cyril Spinetta. Il y a des jours où on n’a pas envie de faire
cocorico mais peut-être d’entonner l’hymne européen de Beethoven.
JEAN-CYRIL SPINETTA
Absolument !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Bonne journée.
JEAN-CYRIL SPINETTA
Merci Jean-Pierre Elkabbach.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Au revoir.
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