Ossian. Poesies galliques

Transcription

Ossian. Poesies galliques
O'^'k
'.
.
/•
-'
O
s s
I
A
N.
POESIES GAELIQUES
EN VERS FRANÇAIS.
OSSIAN.
POESIES GAELIQUES
EN VERS FKANÇAIS.
PAR
BAOUR-LORMIAN.
A PARIS,
DE L'IMPRIMERIE DE
A.U
P.
DIDOT L AINE,
LOUVRE, GALERIES,
II"
3.
f^OO
A
JOSEPH-DESPAZE.
Vous
place
:
n'occupez aucune grande
mais vous avez
tre Satires ;
cevez ce travail
gnage de
de
fait les
Qua-
vous aimez Ossian;
mon
mon amitié.
comme un
estime et
,
un
re-
témoitribut
DISCOURS
PRÉLIMINAIRE.
JLi E
hymnes d'un chantre sauvage
s
se sont
conservés jusqu'à nous. Quinze siècles ont
respecté ce
te
,
monument,
mais majestueux
,
irrégulier sans dou-
mais hardi
comme
la
nature du Nord. Les Français lisent Ossian
ils
admirent son génie brut
fortes
lui
,
sa touche
sombre
;
et
cependant
reprochent des incohérences
titions.
Qu'en faut
second traducteur
,
rien
ce
,
me
ils
des répé-
-il conclure contre
?
:
ses couleurs
,
son
semble. Les
chants du Barde étoient encore inconnus
parmi nous lorsque Letourneur les publia.
Cet
écrivain dut les offrir à notre nation
dans leur
état primitif,
qu'il les avoit
reçus
comme une mine
ploiter
tout
;
il
qu'il
entière
,
ou du moins
dut
les
falloit
tels
considérer
d'abord ex-
pour séparer ensuite
DISCOURS
8
du
l'alliage
métal. Mais ce qui fut
plume une
utile fidélité
sous sa
ma
n'eût été de
,
part qu'une aveugle condescendance. Aussi
pas
n'ai-je
choisis
il
;
le
même
plan.
conserva tout
et je tâche d'atténuer ses défauts, sans
difier
en rien ses
Malgré
traits
Mes
encore.
,
mo-
caractéristiques.
beaucoup de gens, certains
cela,
littérateurs sur-tout
fait
Il
et je
,
voulut faire connoître Ossian
il
;
sur
travaillé
traduisit, et j'imite
penseront que
,
j'ai
trop
vers, cités à leur tribunal,
n'y seront pas plus heureux que la prose
de Letourneur.
Ils
désordre
la
de m'en
de
et
affliger.
y trouveront
aussi
du
monotonie. Je suis loin
Mon
modèle n'eût plus
été
lui, si j'avois totalement fait disparoître ses
imperfections. Elles sont inhérentes à son ou-
vrage
qui
;
elles
tiennent aux lieux
les virent naître.
arts et séparé
du
reste
au milieu des frimas
du
chaos.
les
;
les
et
pertes
ses
qu'il
aux climats
du monde chante
pour ainsi dire
,
,
,
La nature qui
fre sans cesse à
,
Ossian, étranger aux
l'environne
yeux des monts
fait
dans
les
of-
stéri-
combats
PRELIMINAIRE.
son anie
affligent sans cesse
que ce
qu'il voit
il
,
9
et
:
il
ne peint
n'exprime que ce
qu'il
sent. Détruisez l'uniforraité, l'irrégularité
ses tableaux
;
de sa morale
poète de
du
<
«
;
de
maximes simples
vous aurez presque un
et
cour d'Auguste
un philosophe
,
dix -huitième siècle.
Dans
«
«
la
ajoutez aux
ne
ce cas
falloit
pas
reproduire
à l'oublier
çoit
perdoit rien
me
diront ses détracteurs
,
le
,
:
ou
paroit injuste
et
très
;
,
il
on commen-
notre littérature n'y
peu de chose
Tout
».
dans cette assertion
je
:
y répondre par quelques détails cinq
ans d'examen m'en donnent peut-être le
vais
;
droit.
Sans doute Ossia7i se répète. Mais ne nous
répétons-nous pas dans nos poésies descriptives
?
nos
sites
champêtres n'y sont -ils pas
éternellement mis à contribution
controns-nous pas à chaque page
les
troupeaux,
zon
,
la
les
ruisseaux,
le
?
les
n'y ren-
bergers
zéphyr,
le
ga-
rose? Et, puisque nous tolérons ces
peintures
,
qui certes n'ont pas pour
elles
le
charme de la nouveauté , jiourquoi ne pardon
DISCOURS
lO
nerions-nous pas au poète écossois ses torrents
ses neiges
,
,
dise la prévention
ses
bruyères
genres n'a pas tous
?
Quoi qu'eu
premier de ces deux
le
,
les
avantages. L'un re-
yeux l'autre , ce
que nous n'avons jamais vu celui là procure aux sens des émotions douces
celuitrace ce qui est sous nos
;
-
:
;
ci
l'ame
élevé
,
lutter contre le
vicissitudes
de
il
la fortifie
malheur
si le
il
la
l'habitue à
prépare aux
vie par le spectacle
la
<lésordre des éléments.
que
,
il
,
Observons
barde emploie
les
du'
d'ailleurs
mêmes images
plus souvent que les peintres français
raconte aussi beaucoup plus qu'eux
,
,
il
et brise
l'uniformité de ses descriptions par la variété
de ses
récits. Lorsqu'il a
ses chants les objets
le
touche
il
évoque
périls
,
il
,
rassemblé dans
inanimés dont
l'attrait
ou dont l'horreur l'épouvante
les
héros
énumere
,
il
les suit
leurs exploits
au sein des
,
il
raconte
de quelle manière leur valeur a succombé,
et
se
poète
montre
,
ainsi
et historien.
tour
- à -
tour peintre
D'un autre côté
faut d'ordre se feroit peut-être
le
,
dé-
moins sen-
PRELIMINAIRE.
tir
dans ses ouvrages,
,
II
M. Macpherson,
nord de l'Ecosse
en.
et les isles
Ebri-
n'eût recueilli dans la bouche des
mon-
visitant le
des
si
tagnards tout ce qui sembloit au premier
coup-d'œil porter l'empreinte de l'Homère
écossois.
Plusieurs journalistes étrangers
reprochèrent dans
lui
temps
le
tenté de croire qu'ils n'eurent pas tort
qu'on examine de près
rope doit à
fait
la collection
ses recherches.
le
et l'on seroit
;
Non,
,
lors-
que l'Eu-
celui qui a
Minona, Carthon, Témora, Lor?na
etc.,
ne peut être auteur de Catloda
et
,
de
Fingal. Ces derniers poèmes sont un long
tissu d'incohérences
idées se lient
sont bien ménagées
progressive.
le
barde
et
;
comme
On
dans
les faits
,
en
premiers
naturelle.
ou qu'on
lui ait attribué
Il
les
les
les transitions
marche
analysant
en main
méthode
,
,
l'intérêt suit la
,
voit
tient toujours
ses successeurs
les
le fil
,
que
de
la
faut nécessairement,
ou que
quelques essais de
ses
propres chants
aient subi de grandes altérations
;
ce qui est
encore plus présumable après une durée de
quinze
siècles.
Quoiqu'il en soit, ses détrac-
DISCOURS
xa
t€urs veulent faire entendre qu'il ne sait ja-
mais ni d'où
che
est
celle
pas outrer l'éloge
sian étonne à
ges
,
il
,
va;
et sa
mar-
aussi sûre que
de nos bons auteurs.
En un mot on
le
où
vient, ni
il
souvent aussi directe
par
la
outre
le
mais
;
par
la fois
blâme
:
pompe
la
grandeur des sentiments
charme des
ne veux
je
qu'Oj-
je dois dire
des ima-
attentivement ses tableaux, on s'oublie
transporte dans
voit le
les
par
et
,
Lorsqu'on examine
fictions.
,
on
contrées qu'il habita
mont escarpé
,
pin solitaire
le
,
la
,
se
ou
som-
bre forêt; on entend l'aboiement du dogue,
le cri
rent
,
de
l'aigle
;
on marche au fracas du tor-
aux lueurs de
avec
l'illusion finit
pas avoir lu
:
il
la
la
tempête
;
et
,
quand
peinture, on ne croit
semble qu'on
Quoi de plus pur que
sa
ait rêvé.
morale
?
Quel hé-
ros de l'antiquité l'emporte sur lui en affections louables
Que
fait
mes
,
rier
?
-
il
,
en dévouement magnanime
lorsqu'un roi
,
lai offre sa fille éprise
Il
aonce à
surprend
le secret
ses droits; et,
?
sauvé par ses ard'un autre guer-
de
celle-ci, re-
quoique sensible à
ses
PRÉLIMINAIRE.
au brave
attraits, l'unit
nemi qui
le défioit
,
abattu? au lieu de
tend
ma
la
l'étranger superbe est-il
donner
lui
Mathos
main.
1^
qu'elle aime. L'en-
mort,
la
avec l'épouse qu'il a ravie
en violant
,
arme Fingal d'un front
l'hospitalité
?
vère
,
il
prête des accents terribles
cuse
,
il
lui
lui
il
rentre- 1- il dans Sel-
il
épouvante
meurtrier de son
,
il
fils
accable
,
le
;
il
sé-
ac-
ravisseur.
l'assassin
Le
de son cher
demande - 1 - il ]îar l'organe de
du palais des vents? aux
soupirs de son ombre plaintive il oublie ses
Oscar
lui
,
Cathmor
,
attentats
et fait
Il
,
l'entrée
chanter son
ne croit jamais que
la
droit de s'étendre au-delà
prise l'humanité
tant que
dans
les
rils
et
,
,
ait
le
du tombeau.
Il
la piété,
presque au-
quoiqu'il se joue des pé-
,
ne connoisse qu'une gloire
tions de paix.
les
Il
la
,
hymnes
,
il
com-
guerre par des proposi-
prévient l'effusion du sang
moyens compatibles avec
de son caractère
Ses
,
funèbre.
courage. Quoique sa vie s'écoule
le
combats
mence toujours
par tous
la foi
hymne
vengeance
et la
trempe de
lorsqu'il les
ses
composa
,
la fierté
mœurs.
durent
DISCOURS
14
inspirer la vertu
de nos jours
:
ils
la
suppo-
sent dans ceux qui se plaisent à les lire
;
et
un héros qui aimât Ossian comme Alexandre aimoit Homère je répondrois
savois
si je
,
même
par cela
de
Les Dieux de
nation
la
bonté de son cœur.
Grèce ont
la
de
s'est lassée
vieilli
trouver
les
,
;
de
l'imagiles
ad-
mirer par-tout sous leurs innombrables for-
mes. La mythologie à'Odin révolte
peuples du Nord;
horreur à son T'^axhalla
où
le
même
,
palais effroyable
destin des guerriers est de se ranger en
bataille
,
de
se tailler
en pièces
pour s'égorger de nouveau,
bière forte dans
le
,
et
de renaître
de boire
tions est d'accoutumer
la
aux
et
but que se
il
n'a pas besoin
l'homme en éternel
cela de constituer
état de
le
qu'atteint en effet la
mythologie A'Ossiaji. Mais
pour
fic-
périls et de forti-
valeur. Tel est aussi
propose d'atteindre
la
crâne sanglant d'un en-
nemi. Le seul avantage de ces horribles
fier
les
ne peuvent songer sans
ils
guerre; aucune goutte de sang ne
rougit son palais aérien
servent leurs boucliers
;
et
les
héros n'y con-
leurs lances qu'en
PRELIMINAIRE.
jiiéinoire
de leurs combats
phes
s'y réconcilient
;
ils
et
l!>
de leurs triom-
avec ceux qu'ils ont
jadis détestés et combattus
tous
ils y retrouvent
;
de leurs affections. Le dirai-
les objets
je? sous
le
rapport mythologique Ossian ne
l'emporte pas seulement sur
Odin,
encore être mis en parallèle avec
Les Grecs puisèrent leurs
esprit;
Ossian trouva
les
fictions
leurs
Dieux
;
Grecs.
dans leur
siennes dans son
cœur. Ses Ombres durent avoir sur
d'ici-bas plus de
peut
il
les
les
choses
pouvoir que n'en obtinrent
elles
y tenoient par des
raj)-
ports plus directs; elles s'y rattachoient par
des
nœuds
plus forts.
nuage, appelant son
Un
fils
père
,
du haut d'un
aux exploits,
sa propre vie
donnant pour exemple
et lui
,
étoit
Mars agitant
son panache d'or. Quelque belle que fût Vénus elle ne pouvoit aux yeux d'un amant
sans doute mieux écouté que
,
,
égaler les charmes d'une amante. D'ailleurs
les divinités
du paganisme ne
sous des traits connus
en partie
:
il
étoit
vrais attributs
;
même
ils
;
il
s'offroient
falloit les
difficile
varioient à
de
pas
deviner
saisir leurs
l'infini
;
cha-
DISCOURS
l6
que poëte
son goût
les modifioit selon
;
personnages célestes
l'origine des
voit
son caprice ou
on mettoit en problème jusqu'à
comment
concilier
leurs
servir l'un sans déplaire à l'autre
roit lequel étoit le plus
de Jupiter lequel
ou de Vulcain
sa,
et
on igno-
:
vénérable du Ciel ou
étoit le plus vil
,
on ne
:
passions
de Mercure
laquelle étoit la plus chaste
,
de Minerve ou de Diane. Les Dieux du se-
cond ordre n'inspiroient que peu de crainte;
les
demi - Dieux
que peu de respect
,
;
tous
prenoient part aux foiblesses , aux passions hu-
maines;
et,
l'homme
comme
gie
dans ce
hésitoit
,
conflit
,
dans ce chaos,
incertain de ses
de leurs droits. Combien
du barde
est plus
la
devoirs
mytholo-
simple, plus naturelle,
plus consolante sur -tout! Qu'est l'Elysée,
par exemple, auprès du palais
noit-on d'avance
les êtres
aérien.-'
Con-
qu'on y trouvera
?
Prévoit-on d'une manière positive les décisions de
Minos? non, sans doute;
tude arrête
un
la
objet aimé
consolation; et
,
l'incerti-
quand on perd
on peut craindre de
le
perdre
pour toujours. Trois juges infernaux pro-
PRELIMINAIRE.
noncent
sur
ici
au contraire, ce sont
là,
les
I7
de
les destinées
l'autre vie;
vivants qui rè-
glent l'avenir des morts. Celui qui fut brave
généreux, hospitalier, peut quitter
sans effroi; son
hymne funèbre
ses amis le reverront,
ront pas de
seiller
,
ou plutôt
le voir. II
va devenir leur con-
et
radieux , tantôt menaçant
sur
qu'il leur
les
le
de toutes
leur ap-
entouré d'éclairs
,
char des tempêtes. Les leçons
donnera seront d'autant plus
pratiqua sous leurs yeux. Voilà
les
la
,
compliqué
,
faci-
qu'il les
plus belle
conceptions fabuleuses.
n'offre rien de
elle
Il
porté sur un nuage
d'autant plus douces à suivre
,
chanté,
ne cesse-
ils
leur régulateur suprême.
paroîtra tantôt satisfait
assis
est
,
la terre
rien de
Elle
vague
;
nous donne pour guides ceux que nous
avons chéris, pour modèles ceux que nous
avons admirés:
cun
dans ce monde,
un
elle
n'impose à l'homme au-
effort surnaturel
;
elle le
et lui fait
rend meilleur
jouer dans l'autre
rôle presque divin.
La
térêt
position à^Ossian ajoute encore à l'in-
de
ses
poèmes. Les ténèbres
qu'il peint
DISCOURS PRÉLIMINAIRE.
l8
l'entourent de leurs horreurs,
il
perdu tous
Il
il
est
ayeugle;
a pris part aux combats qu'il chante;
n'a
ses
amis
;
Malvina seule
que son bras pour
voix pour
comme
consoler.
le
père,
malheurs
comme
Il
fils.
le
il
a
lui reste.
soutenir, que sa
gémit
comme
frère
Le souvenir de
ses
se
mêle sans cesse au souvenir de
ses exploits.
Le passé le présent l'accablent.
humide de pleurs chacun de
un sanglot. Aussi n'est-ce pas à
Sa harpe
ses sons est
l'esprit
,
,
,
est
c'est
,
au cœur à
le
juger.
HYMNE DU
JL' o
MBRE
à
Des temps évanouis
peine voile
la
Se retrace dans
SOIR.
cieux
les
:
splendeur éclipsée
ma
pensée,
Et m'inspire des chants dignes de mes aïeux.
Tout repose, ou
se tait....
Les harpes suspendues
Languissent détendues.
d'un héros que
Dernier
fils
Mes pas
silencieux se traînent dans
Selrna^ palais des
Fingal
rois! asyle des
enflamma.
Selmn
(i)
j
conquêtes,
n'invite plus l'étranger à tes fêtes;
Tes murs harmonieux, par
Ne
la gloire
retentissent plus
la
mousse couverts,
du doux bruit des concerts.
Les braves ont vécu; Fingal
même succombe
Autour de moi tout dort du sommeil de
Et je ne puis mourir! et
ma
:
tombe.,
la
plaintive voix
Dit aux siècles futurs nos antiques exploits
!
Quand la Reine des nuits ne brille point encore.
Quand sous l'obscurité la fleur se décolore.
Que les vapeurs du soir, comme un nuage épais.
Enveloppent
De mon
les
monts,
les lacs, et les forêts.
génie éteint le flambeau se rallume
:
POESIES D'OSSIAN.
20
Le besoin de chanter m'embrase
me consume.
et
La tendre Mali>ina, charme de mes viens jours.
De sou
bras attentif
Elle guide
Il
prête
le
secours
destin alors s'adoucit
Une puissante
C'est la voix
la
rigueur
voix vient réveiller
du
passé...
Les
je les recueille, et
Eternisent le
Non, du
nom
O
et
mes chants favorables
ils
ne sont point l'image.
mélodieux,
ils
enchantent
Ses accords
amoureux
Mahnna,
toi
concerts
vagabonds.
!
réjouissent les monts.
que
le
Barde implore.
:
charmante, accours; viens ranimer encore
Les feux de
mou
;
,
ses doigts
Prête l'oreille à ses accents
Fille
les
les airs.
Liuha^ quej'aime ton rivage
Quand la veuve d'Oscar, sous
Anime la harpe sonore
Aimable
faits brillants;
de mille chefs vaillants.
ruisseau fangeux
terre de
;
mémorables
siècles
Ces chants qui de Littha rappellent
Doux
:
mon cœur
Se pressent sous mes yeux, chargés de
Soudain
:
sous un chêne au mobile feuillage.
s'assied
De mon
me
Ossian au pied du roc sauvage;
génie affoibli par les ans.
OINA.
n'étois point encore appesanti par l'âge
Je
Fingal arme
Mes
mon
bras
:
rapides vaisseaux,
Voguent
.lallois
vers Inistore
:
commande et soudain
sous un ciel sans nuage.
il
;
aux lueurs de Cathlin
du vieux M«/or dissiper
les
(2).
alarmes:
La guerre rugissoit au bord de ses torrents;
Une
étroite amitié,
Aux
armes de
J'arrive
Et,
a
me
Fils
:
du
'<
<
que respectoient
les
ans.
père avoit uni ses armes.
reconnoit l'étendard des héros;
tendant
«
c.
il
mon
la
roi de
Quel
main,
il
Morven ,
m'adresse ces mots:
sur mes vertes collines
esprit a guidé tes pas?
Chef du sauvage Ullin
(3) et des plaines voisines;
Dnnthalmon de ma fille adoroit les appas
:
Je nai pu l'accorder à son impatience;
«
Nos pères
étoient ennemis (4).
ses ordres
soumis,
«
Mais dix mille guerriers, à
«
Sur nos bords malheureuxpromenent
i<
Seul, privé des secours qui
.<
J'ai
«
Mais tous, fermant
«
Ont oublie Malor au jour de l'infortune.
voulu
réveiller la foi de
me
la
vengeance.
furent promis,
mes amis;
l'oreille à
ma voix importune,
POESIES
22
—
K
Et
«
Ne
Tesmauxmesoiitconnus;je vieuslessoulager,
«
de
sei-vir
mon Lias
a
Qui
R
J'ai
.<
Il
..
Le
«
Tes secours,
«
Mais
cause glorieuse
se dissipe et fuit à l'aspect
promis
à
Fingal de
du danger.
la
bords témoins de
jeta sur ces
Tu
:
veiller sur ta tète
encor du jour où
se souvient
«
c
ta
qu'Ossian soit une ombre trompeuse
crois point
tes
le lis
:
tempête
splendeur.
ta
présents charmèrent sa douleur:
asseoir à ta fête
;
sa reconnoissance égale sa valeur.
De Trevinor dans mes mains tu vois briller l'épée
Si j'en crois ma fougueuse ardeur,
Ton attente, Malor^ ne sera point trompée,
Des guerriers de Morven]e connois le pouvoir
:
«
«
—
«
<
c<
Fils
Tu
d'un roi généreux, appui de
«
'.<
CI
mon ame un doux
fais luire à
Ta voix console ma
:
la foiblesse
rayon d'espoir
tristesse
:
;
Tel daigne nous parler l'orageux Cruthloda
(5)
Lorsque, resplendissant des feux du météore,
hoda^
•<
Sa voix vient réjouir les vallons du
«
Et
«
Cependant
«
Commence
«
Viens t'asseoir dans mes tours, noble enfant des concerts».
«
fait taire les
Déjà
Je le suis.
la
vents sur les rocs d'Jnistore
l'aigle altier
abandonne
(6).
les airs;
nuit taciturne, voilée,
à parcourir sa carrière étoilée.
A ma
vue Oïna
se présente:
D O
s s
'
A
I
L'abattement se peint dans ses
Et sous ses doigts
la
N.
traits
23
douloureux,
harpe obéissante
Pousse des soupirs langoureux.
un
Ses yeux d'azur, que voile
sinistre
Roulent, chargés d'amour, de
Tels deux astres du soir brillent dans
Ou
telles
nuage,
tristesse et de pleurs
nous voyons, au pied du roc sauvage,
Les larmes du matin qui tremblent sur
Le
roi des jours s'apprètoit à
Sur l'horizon
Que
Des
La
;
le feuillage.
les fleurs.
répandre
ses nouvelles clartés.
j'écoutois encor sa voix naïve et tendre.
cris
tumultueux soudain se font entendre;
bataille et la
mort grondent de tous côtés
:
Dnntlialmon contre nous s'avançoit dans la plaine.
Je vole; et de mon œil, enflammé par la haine,
S'échappent à
En
la fois et la
foudre
Veulent coirvrir leur chef:
Le vieux
roi satisfait
me
il
et l'éclair.
un rempart de
vain mille guerriers, sous
tombe,
fer,
et je l'enchaîu».
presse dans ses bras
:
«
Ossian^ me
«
Sans emporter
«
Ma fille doit payer
«
Sa beauté, sa candeur, son aimable innocence,
«
><
«
dit-il,
le
tu ne partiras pas
prix de
ce
ta
que tu
noble vaillance
fis
pour nous
Réjouiront l'ame de son époux.
Je
te la donne...
Au
:
;
lever de l'aurore
Qu'elle vogue avec toi sur l'orageuse mer.
POESIES
a4
«
Pour ton bonheur que puis-je
«
De mes
Pour
la
seconde
fois
sur
le
encore?
sommeil me
Frappent
hérissée;
Des sanglots douloureux
fuit...
mon
»
plaine glacée
la
La nuit sombre descend, de frimas
Mais
faire
trésors accepte le plus cher.
oreille attentive:
C'est Oîna-, solitaire et plaintive,
Qui dans l'ombre chante
«
Objet de
mon
ses feux.
unique amour,
cœur rempli d'alarmes,
«
Sur ton rocher désert,
«
Peut-être, de l'aurore implorant le retour,
le
«
Loin de moi tu verses des larmes.
«
Hélas! tes
vœux
sont superflus.
«
L'aurore renaîtra plus touchante et plus belle
«
Mais ses jeunes rayons ne
demeure
me
«
Dans
«
Monts escarpés, sombres
la
paternelle.
forêts,
«
Solitaires vallons, noirs rochers,
a
Vous ne me
«
verrez plus de
c<
Poursuivre
«
O ma harpe,
Adoucis
les
les
;
trouveront plus
doux ombrage»,
mes rapides
traits
chevreuils sauvages.
qui tant de
tourments de
fois
mon ame éperdue,
D' O
s s
Repose désormais dans
Elle se tait.
Belle
«
«
De
C'est à
Que
d'elle je m'élance....
moi de sécher les pleurs
couler une injuste puissance
fait
Morven le
l'ille
:
barbare plaisir
Qui me
Fils
«
éveilla le désir;
Mais j'entends une voix sévère
crie:
Ossian^ respecte
le
malheur!
d'un héros, sois digne de ton père,
Etouffe une coupable ardeur.
'<
Tes larmes, Oïna, n'auront point été vaines:
«
Je ceàekDunthalnion tous mes droits sans retour.
Du
!
des rois, ta beauté languissante
Dans mon cœur un moment
«
».
presser dans leurs bras nue vierge tremblante
Il
i<
des rois,
lui dis-je, appaise tes douleurs;
Loin des chefs de
«
i
Soudain près
0/««,
n
»
AN.
Silencieuse et détendue
«
"
I
l'asyle
guerrier à ces mots
ma main
brise les chaînes.
Pourquoi, dis-je à Malor^ rompre ces noeuds d'amour?
Dunthalmon
avec gloire a
fait briller sa
lance;
Si vos aïeux d'une auguste alliance
Rompirent jadis
Maintenant de
la
haine
Et vuident à longs
Daus
les liens,
ils
traits la
ne sont plus
la
proie.
coupe de la joie
leurs palais aériens (7),
NOTES D'OINA.
(i) Sehna, nom du palais
Mon'cn^ et père à'Ossian.
Calhlin
(2)
nom
^
de
de Fingat
l'étoile
du
soir chez les
Calédoniens. Voici, d'après Macplterson
étoiles
principales de ces peuples
roi de
•,
,
les
sept
CaumathoTi
:
,
Rayon oblique Uloicho. Guide nocturne; Cathlin, Rayon des flots;
Tète de l'ours
;
Colderna
,
;
Reldurath , Etoile du crépuscule
de
la
colline
;
Tonthena , Météore
(3)
Ancien
nom
(4)
Lorsque
les ancêtres
Berthin
;
,
Feu
des vagues.
ÙLnVUhter^ partie de
l'Irlande.
de deux guerriers avoipnt
été désunis, leurs descendants liéritoient de leur
baine; elle se perpétuoit jusqu'aux géuérations les
plus reculées
ment
:
les liens
indissolubles.
de l'amitié étoient égale-
Deux Calédoniens
troient-ils dans la mêlée;
été divisés,
il
n'en
s'engageât entre
l'alloit
si
se
rencon-
leurs aïeux
avoient
pas davantage pour qu'il
eux un combat opiniâtre
et mortel.
Si au contraire l'intelligence avoit régné entre leur
lamille
une
, ils
écbaugeoient leurs armes,
éternelle amitié.
et se
juroient
NOTES
(5)
(6) Inistore étoit
(7)
DO IN A.
27
Criuhloda^ un des aieux de Malor.
une des Orcades.
Les Calédoniens croyoient que tons ceux qui
S'étoient distingués par leur
bravoure ou leur ver-
tu habitoient après leur mort
un
palais de
nuages
;
y conservoient tous leurs goûts , et s'y livroient
aux mêmes plaisirs qu'ils avoient connus durant
ils
leur vie
comme
et
;
paux , armés
la
li'nn arc
un
chasse étoit
des princi-
de nç/ge, ou d'une lance de
'Vapeur ^ Us poursuivoient, dans
les vastes plaines
firmament, des chevreuils de inéLeores
gliers
du
et des san-
de brouillards. Là s'éteignoit tout sentiment
de haine
;
les
habitants
du
palais aérien
apparois-
soient quelquefois à leurs enfants et à leurs amis
ils
les
tempêtes
d'ailleurs
,
troubloient les mers
aucun pouvoir sur
divisés en
se
;
disposoient à leur gré des éléments , déchaînoient
bons
et
les
mais n'avoient
;
hommes
mauvais esprits
;
les
:
ils
étoient
premiers ne
montroient qu'aux rayons d'un jour pur, sur
bord des ruisseaux, ou dans
les riantes vallées
:
le
les
seconds, au contraire, ne paroissoient qu'environnés
déclairs
,
orageuses.
au bruit du tonnerre
,
et
dans
les nuits
V/V.-^*^'W
^*-'X.'V/»>^.^^
DARTHULA,
SUJET.
Cromnal roi à'Etha eut trois fils Nathos Ardan et Morar. Ils attaquèrent Calrbar, usurpateur
,
,
,
,
,
de l'Irlande
,
Darthula
fille
,
de Caïrbar
dans plusieurs combats.
de Colla, roi de ÏUlster,
mais
elle vit
Nathos
trois frères se
rage
;
mais
ils
aimée
étoit
l'aima
et s'enfuit
,
vaisseau sur les
lui.
côtes
avec son armée.
défendirent long-temps avec cou-
succombèrent enfin sous
furent massacrés. L'infortunée
le
,
Une tempête rejeta leur
mêmes où Caïrbar campoit
avec
Les
:
et le défirent
nombre
le
Darthula
se
corps de son cher Nathos.
OSSIAN.
f
I
LL E
du
ciel
,
qne j'aime
tes
appas
Et l'éclat virginal dont ton front se couronne
Dans
Des
les plaines d'azur
où s'impriment
!
pas
astres de la nuit la foule t'environne.
Les nuages obscurs s'éclairent de
Par
tes
toi l'air est
tes
feux
,
et
perça sur
;
plus doux, la nature plus belle.
Les vents n'osent troubler ton cours silencieux.
POESIES D'OSSIAN.
Que
fais-tu loin de
Enveloppe ton globe
Vas-tu,
Dans
l'asyle
de
la
douleur
Reine aimable des nuits, connois-tu
Maintenant
Ton
,
?
plaintive, gémissante,
beauté languissante
ta
rebelle
cache à nos yeux
et le
comme Ossian^
Ensevelir
29
nous quand une ombre
?
le
malheur ?
revêtu de toute sa lumière
,
char voluptueux roule au-dessus des monts
Prolonge,
s'il
se peut, le
cours de
:
ta carrière,
Et verse sur les mers tes paisibles rayons.
NatJtos de l'Océan ouvre
A
ses côtés
Les trois
fils
sont
humide ;
le sein
Ardan
et
Morar.
Cromnal d'une course
de
Se dérobent aux
traits
rapide
du puissant Cdirhar.
Quelle est cette jeune étrangère
Qui des mers auprès d'eux brave
les flots
bruyants
Ses longs cheveux en boucles ondoyants
Flottent sur sa
C'est
taille
légère
Darthula l'amante de NatJios
,
De Caïrbar
elle fuit la
Et ses regards où
:
tendresse
se peiut la tristesse
Errent lauguissamment sur son jeune héros.
O
douleur
!
les
vents infidèles
Couple charmant , abusent votre espoir.
Ces monts chargés de glaces éternelles,
Ces ruisseaux que vos yeux viennent d'appercevoir
3.
I*
POESIES
3o
Ne
mouillent point Etlia d'une onde fugitive.
Les tours de Càirbar pèsent sur cette rive ;
Vous retombez en son pouvoir.
Tous qui déçûtes leur attente ,
Vents du midi, que faisiez-vous alors?
Pourquoi sur nos
Dépouiller
le
chardon de
paisibles bords
sa
robe piquante
.'
Que n'aUiez-vous enfler les voiles de Nathos?
Que ne présentiez-vous à sa vue empressée
Et le
Oh
toit paternel
sa
,
jeune valeur
et les riants
s'étoit tant
coteaux
exercée
?
Qu'aisément, 6 Nathos^ tu maîtrisas le cœui
De
la
jeune beauté qui
Ton
te suit et t'implore!
visage avoit la douceur
Des premiers rayons de
Ta chevelure
L'aile
effaçoit
du coibeau
l'aurore
;
en noirceur
à'Inistore
Le gazouillement des ruisseaux.
Le doux murmure du zéphyre
Qui
L'air
se
joue entre
pur que
le
les
roseaux,
chasseur respire
Assis le soir au bord des eaux
,
Sur les sens avoient moins d'empire
Que
les
sons flatteurs de
ta voix.
Mais quand dans les combats tu poursuivois
Tu
ressemblois à
la
mer
irritée
les rois
DO s SI AN.
Dont
les
vents orageux troublent
Au bruit
fut ainsi
vaste sein
que
la
foule épouvantée.
te vit
Darthnla
Tranquille au palais de ses pères
D'un
feu soudain elle brûla
O fille de
les
ses paupières...
vents ont trompé tes
vœux
Colla , tu t'égares dans l'ombre
Arrêtez, vents jaloux; silence
,
;
;
Des pleurs d'amour mouillèrent
Mais
;
dé tes armes d'airain
S'enfuyoit des héros
Ce
3i
le
;
!
vague sombre
;
Laissez-moi recueillir ses accents douloureux.
Darthcla.
Quelle clarté lutte avec
les ténèbres
.•'
Nathos les torrents écumeux ?
Revois-je Etha ? ces tours funèbres ,
Entends-je de
Sont-ce les tours de mes aïeux
Eh quoi Nathos me répond
!
.••
par des larmes
Où sommes-nous ?
NATno
s.
Auprès de Cdirhar
Dans
A
ses états
:
la
nuit et le hasard
de nouveaux périls vont exposer
Non, Darthnla
^
tes
charmes.
cette foible clarté
N'éclaire point la salle de nos fêtes, (i)
POESIES
32
Nous revoyons
TJllin^ noir séjour des tempêtes:
Voilà de Caïrbar
le palais détesté.
Ardan , Morar mes jeunes
,
Descendez avec moi
;
Qui nous dérobe aux
De
Toi,
fureurs meurtrières
homicide guerrier.
cet
Darthula , que ton cœur s'abandonne
Au doux
A l'ombre
espoir
;
t'est
il
encor permis
:
de ce roc, loin de nos ennemis
Repose en paix ,
Il
frères
cherchons quelque sentier
mon
glaive t'environne.
dit, et part. Seule avec ses
Son amante
s'assied sur la
douleurs
mousse sauvage
Et ses beaux yeux se remplissent de pleurs.
Tremblante au bruit des
Elle
promené au
flots
grondants sur
loin ses regards inquiets
Nathos d'une voix douce
Elle appelle
le
rivage
:
et tendre
Mais Nathos ne peut plus l'entendre
,
Ses cris ne vont frapper que les rochers muets.
«
Pâle
,
craintive
,
délaissée
»
Je veille dans l'horreur d'une profonde nuit.
i.
J'ai
«
Oh
que
!
mon ame est oppressée
et mon amant me
besoin de secours,
Il
me
fuit
!
où donc
peut-il être?
.'....
fuit
!
;
D O
'
s s
Quel cliarme impérieux
«
Nathos ,
Je suis seule
«
,
I
A N.
liàte-toi
de paroître
mon
reviens dissiper
Déjà bourdonne
33
loin de
le retient
la
tempête
Où
Hélas
trouver
<t
O
!
un
où reposer ma
tête
!
effroi.
;
Les vents séditieux se heurtent dans
«
moi ?
les airs
asyle en ces climats déserts
lune , écarte
les orages
:
?
?
;
Astres silencieux , que vos pâles rayons
«
Brillent à travers les
Guidez mes pas errants sur
«
Pourquoi
!
cime des monts.
Mais l'amour vers moi
C'est lui, j'entends ses pas
«
nuages
la
le
ramené
cette terreur soudaine
Chef d'£f/!<2, quelle
;
au loin retentissants.
?
crainte a passé dans tes sens?
Nathos revint morne
et
farouche
Quelques soupirs s'échappoient de
La haine allumoit
ses regards
La pâleur couvroit son visage
sa
;
bouche
:
Tel se plonge au sein des brouillards
Le
soleil
vaincu par l'orago.
:
;
\
POESIES
34
Darthula.
O mon héros! j'attendois ton retour
Tu
le sais
;
contrainte à
Sans parents , sans appui , je
:
la fuite
que ton amour.
n'ai
A quel affreux destin les combats m'ont réduite
Un silence éternel règne dans Selama. (2)
La tombe
Il s'est
éteint
dévoré
a
le
,
mon
père
feu qui l'anima
!
;
;
Et ce vieillard n'est plus qu'une froide poussière.
Les voiles de
Les
flots
la
nuit embrassoient l'univers;
tumultueux , appaisés par les ombres
,
Rampoient au pié des rocs que la mousse a couverts
Et
les
hiboux cachés dans leurs
Troubloient seuls par leurs
Assise sur
les
Je songeois
Qui
à
tours de
mon
loin de
Quand soudain
Se présente
retraites
sombres
cris le silence des airs
:
mon palais antique
frère
,
au généreux Colrnar,
nous combattoit Caïrhar ,
à
mon
mes yeux , pâle , mélancolique
père;
un
glaive
arme
sa
,
main.
Et de fréquents soupirs s'élèvent de son sein.
«
Darthula ^ me
«
Ton
dit-il
,
ma
famille est éteinte
;
frère infortuné vient de perdre le jour;
«
Mais d'un coup plus amer
«
Et c'est encor sur
toi
ma vieillesse est atteinte,
mon amour.
que gémit
D O
'
s s
I
A
35
N.
«
Caîrbar triomphant, suivi de son armée,
«
S'avance vers ces lieux, et nous porte des
«
Qu'il vienne, je l'attends
Pourra venger
Prends ce casque
,
Demain, dès que
le
(
ma
arme-toi
fers.
valeur ranimée
maux que nous avons
a
«
les
;
du
soufferts.
glaive de tes pères
jour aura sur
les
bruyères
«
De
«
Suivis de nos guerriers nous irons au combat.
ses premiers rayons versé le
Le jour
paroît.
Mon bras
Et
le
charge
mon armure,
sous un lourd bouclier,
ma
noire chevelure;
père m'ouvre le chemin
Quelques braves glacés par
D'un pas
éclat,
poids d'un casque d'acier
Presse
Mon
.Te
fléchit
doux
:
l'âge
tardif et lent suivent leur souverain.
Tous nos jeunes
guerriers, trahis par leur courage,
Naguère étoient tombés dans un climat
Leurs pères
affoiblis s'avancent
La lance pesé
Et
les
zéphyrs
,
lointain:
hors d'haleine
;
à leurs bras languissants
portés sur une
aile incertaine
Frémisssent dans leurs cheveux blancs.
a
«
Témoins de ma
Leur
dit
Colla
«
Vous m'avez vu
«
Daps
les périls
,
triste vieillesse
plus terrible et plus
jadis sous
fier
un rempart de
sanglants signaler
mon
fer
adresse.
;
POESIES
36
Hélas
a
!
ils
sont passés ces jours de
Comme moi vons
<i
ma
valeur
:
pleurez vos forces éclipsées
«
Jours de gloire présents à nos
«
Que
votre souvenir réveille notre ardeur
Il dit, et tirant
;
pensées
tristes
!
son épée
Colla s'élance furieux.
Soudain d'un bruit confus notre
Nous avançons,
et bientôt à
oreille est frappée
:
nos yeux
S'offrent mille guerriers en ordre dans la plaine.
Déjà
la
fureur et
Ont donné
haine
la
le signal affreux.
Mais pourquoi retracer ces moments douloureux
Percé d'un
Je volois
trait
mortel je vis tomber
mon père
recueillir l'ame de ce vieillard
.•
:
;
Mes mains alloient fermer sa sanglante paupière
Quand je vois accourir le sombre Ca'irlar.
A mon aspect
Brille
une
joie
en son œil farouche
homicide
et
sur son front livide
;
me parler de son barbare amour,
Dans mon propre palais il me traîne expirante;
Il
ose
Le
reste t'est
Et j'appelois
Lorsque
Tu parus
ïu parus
connu. Je maudissois
la
mort
à
mes
le
jour.
désirs trop lente
brillant d'ardeur, de gloire, et de beauté,
tout-à-coup à
:
Caîrbar
Et s'enfuit devant
mon œil enchanté
;
vit resplendir ta lance,
toi
comme un
chevreuil léger.
D'OS
s
Mais qui peut encor
I
AN.
37
t'affliger ?
Avons-nous, cher Nat/ios, perdu toute espérance?
Nathos.
Je crains peu
les
combats.
A peine en mon printemps^
Je ni'embrasois des feux de
la victoire
;
héros, rempli de leur mémoire,
Fils des
Je brùlois d'égaler leurs exploits éclatants
Et
Ce que
la
guerre étoit pour
l'astre
du jour
est
pour
les frais vallons
Quand au midi couronné de rayons
n y verse un torrent de flamme.
,
,
O
souvenirs
Plus d'une
6
!
fois
stériles regrets
dans
les
;
mon ame
,
!
champs du carnage
J 'a vois lancé d'inévitables traits,
Avant que
mon jeune
courage
Eût d'un joug tyrannique affranchi
Tes
doux que
attraits aussi
Qui tremble dans
Mais
le
Envelopper
l'astre
O Darthula ! les
Le
les cieuj:
nuage approche ,
et
tes attraits
au miheu de
pur qui me
luit.
ma
tendresse.
palais de ton père est encor loin de
Du
Mes
frères,
la nuit.
va, d'un sombre voile.
vents ont déçu
Nous sommes
seuls, exposés au
nous
;
courroux
ravisseur de ta jeunesse.
il
est vrai,
,
la brillante étoile
secondant mes efforts,
4
POESIES
38
Au
péril de leurs jours
vont défendre
tes
charmes
Mais que pourront nos foibles armes
Contre tant de guerriers défenseurs de ces bords
A R D A N.
Nathos, notre
J'ai
vu
flotter
d'Erin
reconnu
J'ai
la
perte est certaine.
(3) le
puissant étendard;
voix de Cdirbar :
Ses guerriers veillent dans la plaine.
A
la
lueur des rapides éclairs
Yois rouler leur phalange sombre.
Vois
briller leurs dix mille fers.
N AT H os.
Va,
je les vois, et n'en crains pas le
O mer àHUllin
(4)
Pourquoi précipiter
.'
tes
ondes furieuses
Pourquoi déployez-vous vos
Enfants de
nombre.
avec tant de fracas
l'air et
ailes
.'
orageuses,
des frimas
.*
Pensez-vous que vos vains éclats
Sur
ce roc aride et sauvage
De Nat/ios enchaînent
Non,
il
n'est retenu
les pas.""
que par son seul courage
Par l'espoir glorieux d'effacer son outrage
Ou
!1
se
de périr dans les combats.
couvre, à ces mots, de
l'airain
homicide;
,
?
;
DO s
s
I
A
N.
39
La lance paternelle arme son bras nerreux;
Un casque
Et
«
la
étincelant embrasse ses
Morar,
dit le héros
dans
;
du rocher
les flancs
Serpente une grotte profonde
«
Mon
amante peut
de ses jours que
,
mon bras
me
ta foi
réponde.
Et
«
Se refuse à servir
«
Si je dois
Morar ^
Va du
si
«
haine
Dis-lui,
Que Nat/ios
n
Qu'il est
«
Il
pour calmer
;
mon palais
misère
ses regrets
Sur
«
les
:
;
,
expirant songeoit à son vieux père
mort accablé, mais non pas abattu
Que, même
à
Et toi, lorsque
gazons
De son
flétris
,
;
,
son heure dernière,
n'a point démenti son sang et sa vertu
«
:
l'arène,
Cromnal adoucir la
"
«
ma
tomber sur
embarque-toi; regagne
triste
à l'ennemi
mal affermi
«
,
;
s'y cacher.
Pour nous , Ardan^ marchons
(
«
,
«
Va
«
<
cheveux
fureur se peint dans son œil intrépide.
le
dans
éclat stérile et
:
sombre automne,
les bois
dépouillés
,
monotone
«Viendra frapper tes yeux de pleurs toujours mouillés.
tt
K
Convie
te
«
Darthula
à tes
,
dans nos tours antiques
banquets
les filles
des héros
;
Et que leurs voix mélancoliques
Eternisent le
nom du malheureux
Natkos.
POESIES
4o
«
Mais plus henreux
harpe sonore
si la
«
Sons les doigts d' Ossian (5) pleuroit en mon honneur ;
«
Mon
«
ombre, alors errante au sein d'un météore,
S'enivreroit de joie et de bonheur.
»
Os SI AN.
Nous
étions cette nuit dans la salle des fêtes
Et, tandis
Se mèloient
les
;
qu'au bruit des torrents
soupirs des fantômes errants
Nous, du roi de Morven nous chantions les conquêtes.
Soudain un vent impétueux
Arrache un son de mort
Fingal
(6) à
pâlit.... l'effroi
ma harpe plaintive.
qui
le
captive
Perce dans ces mots douloureux
B
Un héros
«
La harpe de
«
Que de
de
;
tristes
accords s'élèvent sur sa tombe
.1
Ossian pleure son destin.
Il
se tait.
Cache
le
Son front plus
Commence
>
»
tranquille
trouble de son cœur.
Cependant j'obéis,
<
:
Morven en ce moment succombe
mon fils ne gémit point en vain
et
ma harpe
docile
ce chant de douleur
:
Penchez-vous du sein des nuages
Ombres
pâles de nos aïeux.
!
:
D O
s s
'
A
I
N.
«
Ecartez de vous les orages
,
«
La teneur ,
feux
"
"Voyez d'un regard favorable
«
Celui qui meurt en ce
«
Et que votre main secourable
«
Ouvre pour
«
Déployez
"
Trempez son
«
A
sang
le
lui le
,
et les
moment
firmament
sa robe légère
glaive
:
;
!
;
nébuleux
;
son char biillant de lumière
«
Attelez des coursiers fougueux
•<
A l'heure où
.<
Dans un repos déhcieux^
le
:
sommeil nous plonge
du songe
c<
Qu'y, vienne sur
«
Réjouir nos cœurs et nos yeux.
l'aile
»
Cependant, sur les bords d'une mer courroucée
L'intrépide
Nathos
Darthula^ près de
Garde un morne
veiiloit
lui,
silence
Le jour renaît enfin;
Découvre
Chacun
,
à leurs regards
fierté
maux
:
affaissée
et cache sa terreur.
un essaim de héros
armure
brillante
:
;
brandit deux javelots.
Tel qu'un vaste rocher qui
Dn milieu
pâle d'horreur
sa clarté vacillante
est revêtu d'une
Chacun avec
,
sous ses
commande
à la plaine.
des guerriers s'élève Caïrbar;
A-
POESIES
4*
Sa voix gronde,
Dans un
son œil, enflammé par la
et
orbite affreux roule
un
ATHo
Tu
ne peux
l'objet de
,
s.
Viens, chef de Tèmora^ descends sur
Ose me disputer
lialae
affreux regard.
mon amour
le
rivage
;
:
l'obtenir qu'en m'arrachant le jour.
Viens , nous sommes tous deux affamés de carnage.
Jadis , tu
me
Quand, aux
fuyois palpitant de frayeur
mon
plaines à'Etha^ je guidois
Maintenant je suis seul;
D'un nouveau
ta
armée
prudente valeur
feu s'est allumée.
CA
ï
R B A R.
Jeune présomptueux, modère
cette ardeur:
Crois-tu que Cairbar^ dégradant son épée,
La trempe dans
Le
nom
de
tes
le
sang d'un guerrier inconnu
aienx ne m'est point parvenu;
La terre de leur gloire
Sont-ils
Aux murs
a-t-elle été frappée.'
montés au rang des
rois.'
de leurs palais des armes attachées,
Par leur bras redoutable aux héros arrachées,
Rappellent-elles leurs exploits ?
Nathos
rougit
;
et
Tombe une larme:
de son œil humide
il fait
briller
son
fer...
Ses frères, plus prompts que l'éclair,
?
;
D O
s s
'
A
I
45
N.
Déjà se sont armés de leur glaive homicide
:
Caïrbar^ de meurtres avide,
Donne
l'affreux signal; les dards sifflent dans
Percés, couverts de sang,
Sur
Nalhos
et ses
l'air...
deux
frère»
rougi tombent décolorés;
le sable
La mort
Tels
a
fermé leurs paupières
:
de fraîches eaux entourés
,
Au haut d'un mont croissent trois jeunes chênes
Le voyageur, arrêté dans
D'un
Mais
la
œil surpris les
Nuit
à
son char
mesure tous
trois.
tempêtes.
attelé les
Les Autans font mugir leurs effrayantes voix
Les chênes, battus à
Et courbant sous
;
la fois.
vents leurs orgueilleuses têtes,
les
Roulent au pied du mont dont
ils
furent les rois.
Darthula muette, immobile,
L'œil
morne,
Dans
sa fureur
les
cheveux épars.
sourde
Promené par-tout
Mais bientôt
Un dard
ses
et tranquille,
ses regards.
genoux
est caché
fléchissent
dans sa main
Elle le
plonge dans son sein.
Et des
flots
de douleur son
ame
vain....
est déchirée,
Et sur sa victime expirée
Il
se
penche
,
et
:
;
de sang en jailUssent.
Caïrbar accourt, mais en
De remords,
;
les plaines,
maudit
le
barbare destin.
POESIES D'OSSIAN.
44
O s SI AN.
Tu n'es
La tombe
De
plus, 6 beauté charmante
te dévore...
l'aimable
Nathos
Un
presse la jeune amante.
Honneur de Sélama^ sous
Tu
ne toucheras plus
Un
!
sommeil éternel
la
le toit
paternel
harpe frémissante.
deuil lugubre et solemnel
Voile A'Vllin
gémissante.
la rive
Objet de l'amour des héros
Quand
t'échapperas-tu de l'étroite demeure?
J amais, sans doute, hélas
L'instant
où doit
Quand le
soleil,
finir
Qui peut connoître l'heure
vainqueur de
Viendra dorer
Il te
!
ton funeste repos ?
retrouvera, sous
le
la
la
nuit orageuse,
haut des monts.
pierre fangeuse,
Pâle, froide, insensible au feu de ses rayons.
Releve-toi
Déjà
le
,
fiUe adorée
La
Du parfum
noirs hivers
fleur, fraîchement colorée.
matinal
embaume au
Prends ton arc
Va
:
doux printemps succède aux
:
le
loin les airs.
chasseur
s'éveille
;
percer de tes traits le chevreuil bondissant....
Mais contre
lui
Près de toi détendu
ton arc est impuissant
,
dans
la
tombe
il
;
sommeille.
;
NOTES.
(i)
que
Aucun peuple
n'a porté plus loin l'hospitalité
anciens Ecossais
les
chaque souverain avoit
:
dans son palais une salle des fêtes; tous
gers
y étoient admis sans
chantoient et jonoient de
l'étranger,
ils
la
les étran-
distinction. Les Bardes
harpe.
S'ils
connoissoient
ne manquoient jamais de célébrer
ses
exploits et ceux de ses ancêtres. La fête duroit trois
jours, pendant lesquels
ses hôtes.
Dans
ces
le
chef ignoroit
chmats où,
le
nom
comme nous
de
l'avons
déjà observé, la haine des familles étoit héréditaire,
cette découverte auroit été souvent funeste à l'étran-
ger reçu
:
aussi Ossian, en parlant d'un roi barbare,
ajoute-t-il qu'il
demandoit son nom à l'étranger.
(2) Palais qu'habitoit
(3)
Darthula dans VUlster.
Erin , ancien nom de
l'Irlande.
(4)
Ancien
nom
(5)
Aucun
guerrier n'étoit reçu dans le palais de
nuages que
les
de VUltonie.
Bardes n'eussent chanté son
hymne
NOTES.
46
vœux ponr
funèbre. IVathos, prêta périr, forme des
Hn'Ossian chante
la sienne.
On
ne peut concevoir
quelle étoit l'influence des Bardes chez les habitants
du Nord,
que leurs hymnes
et le fanatisme de valeur
inspiroient.
Venez nous voir combattre, leur
«
di-
soient les rois prêts à livrer une bataille, et chantez-
nous
».
C'est par
eux que
la
Gaule,
lande et l'Ecosse, se défendirent
si
la
Germanie.
Romains;
et
lorsque, dans
Edouard tenta
la
conquête du pays de Galles,
les
put
l'asservir
mais
il
l'Ir-
long-temps contre
neuvième
le
siècle,
il
ne
qu'en faisant massacrer tous les Bardes
:
ne put anéantir leurs chants, qui perpétuèrent
dans ces contrées
la
haine du vainqueur
et
l'amour
de l'indépendance. Les .Scaldes chez les Scandinaves
aussi
étoient
nourris dans
les
le
dispensateurs
de l'immortahlé
culte sanglant d'Oelin^ leurs
désordonnés sont pleins d'une éloquence rude
rouche
:
on n'y retrouve point
;
poèmes
et fa-
mélancoUe tou-
cette
chante, cette loyauté presque chevaleresque qui font
le
charme des vers d'Ossian. Mais que sont devenus
les
poèmes de
ces Scaldes,
Norvégiens
et .Suédois?
peut-être sont-ils ensevelis sous les
murs d'Offensée^
ou dans
célèbres jadis par
les
Les
les
campagnes d'fjpsal^
si
temples qu'on y avoit bâtis en l'honneur d'Or/ in.
Saxons avoient aussi leurs Bardes. Charle-
magne , par
les
soins d'Eginhard
,
avoit recueilli
NOTES.
plusieurs de leurs ouvrages
lés, et
comme un
47
les siècles se
:
sont écou-
torrent rapide en ont emporté les
débris.
Lorsqu'un guerrier célèbre
(6)
grand péril,
les
son lugubre
et
étoit
exposé à un
harpes rendoient d'elles-mêmes un
prophétique
:
souvent
aieux du guerrier en pinçoient
les
les cordes.
ombres des
Les Bardes
alors
commençoient un chant de mort, dont
étoit
si
salutaire,
leurs palais
que
les
l'effet
fantômes retournoient dans
pour y recevoir avec empressement
revêtir de ses
armes fantastiques
le
héros décédé.
et
CHANT DE FINGAL.
SUR LA RUINE DE BALCLUTHA.
xliLLE n'est plus cette
Dont
la
cité
superbe
splendeur remplissoit nos déserts ;
Le sommet de
dans
ses tours s'élançoit
Et maintenant
Le deuil,
elle
le
désespoir, les cris
Habitent son morne rivage
J'ai
les airs,
languit sous l'herbe;
vu moi-même
Par-tout croît
la
:
ses débris:
mousse sauvage;
Par-tout an souffle des Autans
Frémit
le
chardon
solitaire.
Quelques chênes encor vivants
Versent une ombre funéraire
Sur l'écume des noirs
torrent*.
Bardes, prenez vos harpes douloureuses;
Entonnez
De
les
chants de
la
mort
:
ces héros éteints plaignez le triste sort,
Et consolez leurs ombres malheureuse».
Us sont tombés nous tomberons comme eux.
:
POESIES D'OSSIAK.
Quelle
49
fatale erreur t'enlraîne.
Homme foible et présomptueux?
Pourquoi
ces palais fastueux?
Le temps, dans
Traverse
sa
course incertaine,
vœux.
tes soins et tes
Aujourd'hui, rayonnant de joie,
Du
haut de
Ton
F,t
de
ta
plaine
Du
tes
superbes tours
regard au loin se déploie,
immense embrasse
voile des
Demain
les
contours
;
sombres années
tu dormiras couvert;
Et dans ces tours abandonnées
Sifflera le
P> raves
Dans
les
vent du désert.
guerriers,
combats ces
où sont vos pères?
astres ont brillé ;
Et maintenant, ombres légères.
De
sa
splendeur leur front est dépouillé.
Le bruit seul de leur renommée
Nous
atteste qu'ils
Leur gloire cependant
ont vécu
est par-tout
:
imprimée.
Et leur bras a toujours vaincu.
Puisqu'il faut succomber, laissons
Brillons après la
Ainsi, l'astre
Dans
mort d'un
du jour,
éclat
ceint d'un
l'occident, lointain et
un nom
célèbre:
lumineux:
voUe funèbre.
nébuleux
S
POESIES D'OSSIAN.
5o
Laisse encore après lui la trace de ses feux.
Vers leur déclin mes jours se précipitent ;
Déjà
mon bras
est affoibli:
Mais je ue tombe point dans l'ombre de l'oubli;
Du palais
Mes aïeux
O mou
père!
O
errant qu'ils habitent
se
penchent vers moi...
Comfial! je
Ainsi chante Fingal.
vais
munir
Dans uu profond
à toi.
silence,
Sur nos harpes courbés, nous écoutions
Moins douce
est
au chasseur,
L'haleine du zéphyr qui dans
Fingal, tu souriois
Que
ton front étoit
de
voix
:
l'air se
balance.
comme anx jours de l'hymen
pur! Que ta voix étoit fiere!
Mais tu n'eus point de
Fils
sa
ami des bois,
fidèle
Comhal,
rival, ô
mon
père!
roi puissant de Morvcit.
:
MINONA,
SUJET.
Minona
,
iCAnir,
fille
sionnément
Swaran
où Ton devoit
ordre à
les
,
roi
de
fils
du
Duvrnnna
Swaran de
aimoit pas-
,
Le jour
Fingal envoya
roi à'Inistore.
unir ëtoit fixé quand
se rendre à
Morven pour
l'ac-
compagner dans une expédition. Swaran obéit, mais
il promit à Minona que , s'il survivoit à cette entreprise
,
il
sur-le-champ
reviendroit
,
et fixa
même
le
jour de son retour; d'un autre côté Anir, accompa-
gné de son
Lathmon fut obligé de partir pou
Minona resta seule dans le palais de
î\%
guerre, et
la
Elle avoit autrefois dédaigné l'amour
Duvranna.
Duromath
,
souverain de
amant méprisé
mon
,
l-
,
enleva
profita
de l'absence à^Anir
Minona,
et la conduisit
et
de Lath-
dans son
Le poème commence au moment où Swaran
à
Duvranna
,
et n'y
Aux rives du couchant,
La lune ne versoit qu'une
Et
le
vent de minuit
le palais
de Latlimon:
pâle, silencieuse,
clarté
siffloit
dans
douteuse.
le vallou.
isle.
arrive
trouve plus son amante.
J_i'oBscuRiTÉ couvroit
de
de Tromaton. Cet
l'isle
POESIES
.Sa
L'intrépide S%varan s'avance dans la plaine:
Auprès de Minona
sa
flamme
ramené.
le
Mais quel morne silence habite son palais
!
Sur les monts, sou s les eaux, dans les airs, tout sommeille
Et
la
Du
Rappelle-toi l'instant,
«
'<
heure de paix,
l'oreille.
!
•(
"
à cette
Que fais-tu , mou amour quel obstacle jaloux
Aux regards de Swaran peut te cacher encore
<(
«
voix d'une amante,
héros empressé ne frappe point
si
cruel et
si
?^
doux,
Où l'honneur m'entraîna sur les mers d'Inistore :
Ta beauté des destins accusa le courroux;
Je vis, à mon départ, tes yeux noyés de larmes
;
Ton beau
«
sein palpita de terreur et
<
Ta
•<
Et tu ne parois point pour chanter
défaillante voix
Il dit.
m'exprima
Mais du palais
les
De
le
la
flétris.
désertes.
les voiïtes
douleur, an loin, semble pousser
luit
:
sur
la
Le malheureux Swaran
De
mon retonr
portes sont ouvertes:
Nord, mugissant sous
Nulle clarté ne
;
tes alarmes...
Le seuil est tout jonché de feuillages
Et
d'amour
les cris.
roche glacée
s'assied triste et rêveur.
noirs pressentiments roulent dans sa pensée.
Et des projets confus se heurtent dans son cœur.
Cependant
le
sommeil des peines
Vient redoubler encor
Et d'un songe, trois
le
tumulte
qu'il
endure
et l'horreur;
fois, l'épouvantable
augur*
!
i>
D O
s s
'
Dans
revoit
Il
I
voile ses
Ses noirs cheveux épars sont
le
N.
Minona^ que son ame
Un nuage de pleurs
Et
A
55
ses sens épeidus fait passer la terreur.
sang à longs
idolâtre:
yeux charmants
le
;
jouet des vents,
rougit son sein d'albâtre.
flots
•>
Il
dort sur son rocher l'objet de mes amours
«
Il
dort
!
et
Minona^
;
qu'il avoit tant chérie,
«
Par des
M
Eveille-toi, Stvaran...
Une mer en
«
Autour de Tromaton
précipite ses eaux;
'<
Là, dans un antre obscur, image des tombeaux,
impuissants l'appelle
cris
à
ma tristesse en proie.
Duromath y veille à mes côtés
«
Je
<i
Mais l'affreux
«
De son barbare amour ton amante
«
iSwflraw, viens
veille, je languis, à
Soudain
le
me
ravir à ses feux détestés.
comme
Sivaran frémit,
il
Furieux,
il
s'éveille
en frappe
l'orient
obscur
il
;
et les
agite
Enfin, de son éclat
firmament
Pour
la
le
:
le
lenteur de l'aurore...
premier rayon sur
Voit bondir
fer
attache les yeux;
la
le
»
l'éclair.
son
vents et les ombres
Son désespoir maudit
Et
:
est la proie...
vent rugit dans les feuillages sombres
Et l'aimable fantôme a fui
Sur
son secours.
furie
vaisseau
troisième fois,
Sous une armure d'or
les flots
se
du guerrier
du
le
dore.
écumeux
d'IriisCore.
sein de l'océan
Roi du jour s'élance,
5.
;
P O E S
54
Quand aux yenx
inquiets
r
E S
du farouche Swaran
Sur une mer d'azur Tromaton
Minona^
sur
la rive
se balance.
exbale ses douleurs
A l'aspect du guerrier, à l'éclat de
La honte,
la
pudeur, décolorent
ses
ses
:
armes,
charmes,
un ruisseau de pleurs.
Swaran, l'effroi de mon amante?
Et de ses yeux baissés coule
«
D'où
«
Lit-elle
a
N'es-tu pas un rayon dont
naît, lui dit
sur
mon
front la haine
ou
le
la clarté
trépas?
charmante
mes pas?
i<
Sur ces bords inconnus vient
«
Est-ce
«
Déjà , sûr de punir ses complots inhumains
<
«
un
vil
éclairer
étranger qui cause tes alarmes?
Mon glaive impatient
frémit entre mes mains.
Réponds, fille d'v^/i/r... Ne vois-tu point mes larmes
Min ON A.
Ah que
!
Qui sur
n'ai-je
le
vécu
comme la
fleur des
champs
roc désert naît et meurt inconnue
A peine seize fois des volages printemps
Mon œil sur nos forêts vit la robe étendue
Et
O
la
tombe
déjà s'ouvre
douleur! ô remords!
Mais peut-être, sensible
Peut-être, déplorant
;
pour m'engloutir!
Ma
Des larmes des héros ne
!
cendre dédaignée
sera point baignée
à
mon
mon
!
vif repentir.
crime involontaire.
?
D O
s s
'
A
I
Mon amant,
quelquefois, dans
Donnera des
regrets à la
Rassure-toi
Swaran peut
S
Où
Je
donc
:
mort. Mais
à ton ravisseur
O mon
R A N.
te
venger d'un
traître:
se cache-t-il? qu'il est lent à paroitre!
le vois déjà
Cède
nuit solitaire
d^Anir.
fille
WA
55
N.
la
si
mon foible bras
une indigne
unique amour
prends
!
victoire,
pitié
de
ma
gloire,
Et qu'elle m'accompagne au-delà du trépas
mon tombeau
Elevé
sur
la
:
roche escarpée;
Et, lorsque d'un esquif tes yeux verront les mâts,
Cours aux enfants des mers confier
Qu'ils
la
portent soudain au triste
Et, qu'instruit de
L'ame de
mon
mon sort,
M
Non
:
à
et
épée;
malheureux
vieillard,
retour à toute heure occupée.
N'attache plus sur l'onde
Et ta veux,
ce
mon
Coldannrd
I
un avide
regard.
N o N A.
tn crois l'emporter en courage!
mourir aussi je borne
Nous dormirons
mon
tous deux dans
le
orgueil
même
;
cercueil.
Mon cœur n'est point formé d'une roche sauvage.
Et mon ame n'est point comme ces flots errants
Qui, bercés par
le
calme ou gonflés par l'orage.
POESIES
56
A
travers les écueils roulent indifférents.
mon ame
Va,
déjà de la tienne est rivale
:
Tombons, moucher S waran^ percés des mêmes traits.
de
Isle
Tromaton ,
isle
ne quitterai point
.Te
à jamais fatale
!
tes sanglantes forêts.
Mon frère (i) combattoit en de lointains rivages:
mon palais je veillois tristement;
Seule dans
noir aquilon, précurseur des orages,
Et
le
A
travers les sapins
murmuroit sourdement.
Près de moi tout-à-coup des armes retentissent;
Le
fer frappe le fer, et les coursiers hennissent....
Dans mon cœur
à ce bruit se glisse
O mon héros!
mes yeux vont enfin
Won,
Duromath
Son
l'affreux
glaive dégouttoit
sein de ses vaisseaux
Que pouvoit
se présente à
contre lui
il
les flots
:
ma vue
:
pitié
pour mes cris,
m'entraîne éperdue.
la foible
Je t'appelois en vain... Mais
Qui fend
espoir
te revoir...
du sang de mes amis;
Sans respect pour mon nom, sans
Au
un doux
Minona?
c'est lui...
roulants d'une
Le voilà
mer enflammée.
Regarde; apperçois-tu son innombrable armée.'
Fuis, malheureux guerrier, ce barbare tyran.
WAR
Moi,
fuir
A.
N.
devant ses pas! moi, céder sans combattre
Qu'il ose abandonner l'orageux Océan
;
!
D O
s s
'
I
A
Sj
N.
Et ce fer paternel à mes pieds va l'abattre
La
crainte est étrangère à l'anie de
:
Swaran,
mon amour, dans cette grotte obscure:
amis, compagnons de mon sort,
Toi, descends,
Vous,
iideles
Que Dnromath
expie nne coupable injure.
Et que vos arcs vengeurs fassent voler
Il
Minona
dit; et
la
mort.
sous une voûte sombre
S'enfonce. Les soupirs n'agitent plus son cœur;
Un
aimable incarnat succède à sa pâleur :
Tel luit un long éclair qui serpente dans l'ombre.
Dnromath
La colère
cependant s'avançoit à grands pas
ridoit
:
son sinistre visage;
Et, sous de noirs sourcils, messagers
du
Rouloient ses yeux de sang allumés par
trépas,
la rage.
"
Etrangers, leur dit-il, les vents tumultueux
«
Vous
X
Ou
«
D'arracber de mes bras une beauté
«
Minona pour mon isle
»
Mon cœur s'épanouit à sa
«
Jeune
«
Voudrois-tu
«
Oui mais reverras tu
ont-ils dans la nuit poussés sur cette rive.'
bien nourrissez- vous
et foible rival,
me
est
un
présomptueux
captive.''
astre serein ;
douce lumière.
d'une beauté
si clierc
priver? est-ce là ton dessein.'
;
S
As-tu donc oublié
l'esjjoir
vy
le iils
le palais
AR
de ton père?
A w.
de Coldanard'l
t
POESIES
58
Ne
plus du jour où
te souvient-il
mon
épée
Te chassoit devant moi comme un chevreuil fuyard
,
Que le dogue poursuit sur la roche escarpée?
En vain mille guerriers veillent autour de toi:
Mon
amante, bientôt à
Dans
le palais
Aussi prompt que
Le lâche Diiromath
Swaran
échappée,
tes fers
à'Anir va rentrer avec moi.
l'éclair, à ces
fuit
le suit, l'atteint, le
Et son sang de
mots
s'élance.
il
dans ses bataillons.
perce de sa lance;
plaine inonde les sillons.
la
Ses timides soldats à cet aspect funeste
Se dispersent, poussant de lamentables
Morven en poursuivent
Les flèches de
Et bientôt
le
Mais quel
repose à
;
Le grand cœur de
s'approche,
Et d'une voix
il
l'antre favorable
des hasards.
frappé ses regards!
soupire étendu sur
Et de son sein percé
«
l'abri
triste spectacle a
Un jeune homme
Il
:
rivage est purgé d'ennemis.
Sivaran court aussitôt vers
Où Minona
cris
le reste
le
Swaran
lui tend
émue
il
le sable,
sang coule à longs
flots.
frémit à ses sanglots:
une main secourable
prononce
ces
mots
:
Compte, jeune inconnu, surmes soins tu télaires:
Il
Ton ame peut encor se livrer à
1
Je connois
«
Ma main
les
l'espoir
;
vertus des plantes salutaires (2)
;
sur plus d'un brave essaya leur pouvoir.
D O
s s
I
A
N,
5i)
n
Swaran fut payé par la reconnoissance.
Oh qu'il me seroit doux de calmer ta souffrance
«
Quel climat
<
Sans doute
«
Et
!
—
«
«
«
K
c<
Ils
!
fut témoin de tes premiers exploits?
tes
aïeux brilloient parmi
les rois?
Oui, répond l'inconnu, mes aïeux sont célèbres:
rougiront, hélas
!
de
me donner
des pleurs;
Ma gloire a disparu dans ces déserts funèbres,
Comme un rayon du jour au milieu des vapeurs.
Aux bords de Diivranna^ sur ces rochers antiques,
'
Que
<
S'élève
le
temps couronna de lugubres sapins,
un vieux
palais
dont
les torrents voisins
«
Réfléchissent au loin les tours mélancoliques
«
Là
«
Va... Remets-lui ce casque, et l'instruis de ma mort.
mon frère
EUe
dit; et
m'attend, inquiet de
Swaran que touche
mon
;
sort....
sa prière...
Minona.... Quel moment! Elle avoit revêtu
Au fond
de son asyle une armure guerrière,
Et parmi les soldats
«
O
«
Dit-elle
«
Je n'ai plus, je
fils
elle
avoit combattu.
de Coldanard! point dindigne foiblesse,
:
le
trépas s'empare de
le sais,
mes
sens.
de droits à ta tendresse;
mes douloureux
«
Mais daigne
«
Une tempête affreuse a battu ma jeunesse.
Que n'ai -je pu rester aux murs de Duçranna!
Sensible à mon amour, Anir dans sa vieillesse
Auroit béai du moins l'heureuse Minona. »
«
«
»
recueillir
accents.
->
POESIES D'OSSIAN.
€o
Elle expire.
Swaran dans
l'étroite
demeure
Ensevelit son corps glacé par le trépas
Sur
la
Mais
tombe attaché, durant
la
:
trois jours
il
pleure.
guerre l'appelle en de nouveaux climats
:
Mon'en ; nous vîmes sa tristesse.
Ma voix (3), de Minona célébrant la beauté,
Il
regagna
Fit luire
dans son ame un rayon d'alégresse;
Cependant,
En
les
soupirs de son cœur agité
trabissoient souvent la blessure profonde.
Ainsi, lorsque
Quand un
Dans
le
le
soleil
calme a reconquis
nouveau vient
les airs,
éclairer le
monde,
lointain encor brillent quelques éclair*.
NOTES.
(i)
(2)
Minona raconte
ques counoissoient
res
son enlèvement.
La plupart des guerriers de ces temps héroï-
que
la
la
propriété des plantes salutai-
nature prodigue aux montagnes du Nord
de l'Ecosse. Fingal sur-tout se rendit célèbre par
ses connoissances médicinales.
(3) C'est Ossi'an qui parle.
HYMNE AU
Invincible
Quelle main,
Dans
héros, roi du
les plaines
de
l'air te
ta
Nul
astre dans les cieux
Les
filles
la
monde
du jour,
et
couvrant d'une pompeuse armure
te
Et sema d'un or pur
de
SOLEIL.
marqua ton séjour,
blonde chevelure?
ne marche ton
nuit à ton éclat pâlissent
rival
;
;
La lune devant toi fuit d'un pas inégal
Et ses rayons douteux dans les flots s'engloutisseui
Sous
l'effort
redoublé de l'âge
et
des Autans
Tombent le chêne antique et le pin solitaire
Le mont même , le mont accablé par les ans
;
,
Incline sous leur poids sa tête séculaire
Mais
les siècles
jaloux respectent
Un
printemps éternel sourit à
Tu
traverses l'espace en
ta
ta
:
beauté;
jeunesse;
monarque indomté.
Et l'azur lumineux t'environne sans cesse
Quand
Quand
la
les
tempête éclate
et rugit
:
les airs,
vents font rouler au milieu des éclaira
Le char retentissant qui porte
ToQ
dans
disque ouvre
la
le
tonnerre
nue, et console
la terre.
POESIES
Hélas
Ne
D'
O
S S
I
A
N.
depuis long-temps tes rayons glorieux
viennent plus frapper
Je ne
Tu
!
te Terrai
ma
débile paupière
plus, soit que, dans
verses sur la plaine
un océan de feux ,
Soit que, vers l'occident, le cortège des
Accompagne
tes
,
ombres
pas, ou que les vagues sombres
T'enferment dans
Mais peut-être
!
ta carrière
d'une humide prison
le sein
ô Soleil
,
!
tu n'as qu'une saison
Peut-être, succombant sous
le
;
fardeau des âges,
Un jour tu subiras notre commun destin
Tu seras insensible à la voix du matin
,
Et tu l'endormiras au milieu des nuaget.
:
CARTHON.
U
s
Clessamor,
roi des vallées
,
E T.
de Lora, fut jeté par une tem-
Reuthamir,
pête à Balclutîta.
reçut chez lui
J
roi
de cette
donna en mariage
et lui
sa
ville, le
JMoïna.
fille
Un chef étranger, qui en étoit épris, insulta C/ewa/wor.
Les deux rivaux se battirent
le
:
tirer à
Morven
samor
avoit laissée enceinte,
s'enfuir et
,
et
de se re.
Moina que
près de Fingal.
nommé Carthon
thon
chef fut tué; mais ses
Clessamor de
guerriers forcèrent
,
donna
le
C/es-
jour à un
fils
mourut peu de temps après. Car-
encore dans l'enfance lorsque Conihal,
étoit
père de Fingal, prit
et brûla la ville de Balclutha.
du carnage par les soins d'un Barde
mais , quand il fut en âge de porter les armes, il
Carthon
fidèle
;
fut sauvé
résolut de venger le
qui depuis
Voilà où
la
malheur de
mort de
commence
sa patrie sur
Comhal
l'action
régnoit à
qui a quitté sa retraite pour féliciter
uouvelle expédition dont
il
Fingal,
Morven.
du poème: Clessamor,
est sorti
Fingal sur
la
vainqueur se met
,
malgré son grand âge , au nombre des guerriers du roi
de
Morven
«onnojtrc
,
: il
combat contre son
et lui
donne
la
mort.
fils
Carthon
sans le
CARTHON.
Xjvènements
Qu'à votre souvenir
des siècles écoulés,
Barde se
le
réveille.
Tes ruisseaux, 6 Lora, plaisent à
Et rendent la vigueur à
mes sens
mon
oreille,
accablés.
Malvina^ (i) vois ce mont couronné de bruyère
D'où pendent trois pins sourcilleux
Qui versent en tout temps une ombre funéraire
A
leur pied les vents
Caressent
Et
le
la fleur
amoureux
matinale
vallon silencieux
Respire, en souriant, le parfum qu'elle exhale.
Entre ces rocs que
Un
la
mousse
a voilés
couple belliqueux sommeille.
Evénements des
Qu'à votre souvenir
siècles écoulés
le
Environné de
Quel héros
Barde
,
se réveilla (î).
ses guerriers
,
traverse la plaine
?
L» paix semble adoucir ses regards meurtrier»
6.
:
POESIES
66
Ils
ne respirent plus
la
haine;
Calme comme un rayon du
Qui luit
Ou comme un
roi des airs
Enchaîne
Il
dont l'aimable pouvoir
bruyants orages
les
revient glorieux des rives
C'est le roi de
soir
à travers les nuages
Mon'en;
c'est
du Balva.
Fingal^
c'est
mon
père.
Mille flambeaux (3) brillants d'une vive lumière
Eclaii'ent à sa
voix
les
La coupe de
la jt)ie
Eveille dans
nos coeurs
,
voûtes de Selma.
à la
ronde vidée
les transports les
plus doux.
«
Pourquoi donc C/e55flwor
«
Dit Fingal; de douleur son ame possédée
a
S'endort dans
«
Mais
«
Teluncoursier fougueux, queles vents avertissent,
'<
Ses yeux lancen t
le silence et
je le vois....
«
a
il
poiut avec nous?
dans l'oisiveté
r
vient d'un pas précipité...
Sent de loin ses
Agile,
n'est-il
lîers
l'éclair, ses
compagnons
;
longs crins se hérissent
;
du sommet des monts
accourt, et ses pieds sur les rocs retentissent.
«
Il
«
Salut à Clessamor. Fils des braves
«
Ne viens-tu
»
— Roi de Mor^en^ mon cœurjouit de
,
pourquoi
pas t'asseoir à mes nocturnes fêtes
«
Mais un foible
«
Ils
vieillard
,
ne sont plus ces jours
tes
que pourroit-il pour
et
?
conquêtes ;
toi
de gloire et d'ivresse
,
.''
D O
'
«
Ces jours où
Moïna,
s s
A
I
N.
67
aimable des rois
fille
«
Vit Clessamor pour
«
Et lui donna sa naïve tendresse.
«
— Raconte-nous
la
première fois
premières amours
tes
,
:
"
Au bord
"
A d'éternels ennuis
«
Dis-nous quels noirs chagrins en on t troublé le cours.
de tes ruisseaux
,
accablé de tristesse
tu livres tes vieux jours
Clessamor.
Le zéphyr
A
l'éclat
Soudain
dans mes voiles
souffloit
mon vaisseau
Et
fendoit les mers
trompeur des
les
étoiles;
vents troublent les
airs.,
gronde,
La tempête
s'élève,
Et,
le front
allumé d'éclairs.
Un
noir esprit tourmente l'onde
;
Battu des flots, jouet des vents.
Enfin de Balcltu/i a j'ahorde
ReiUhamir par des
le
rivage.
soins touchants
mon naufrage.
Moina :
L'amour descendit dans mon ame
Elle fut sensible à ma flamme
Et son père me la donna.
Me
consola de
Je vis sa
fille
Mais un chef étranger brùloit aussi pour
H
arrive au palais; et son orgueil jaloux
;
elle;
,
;
POESIES
6S
Empoisonne
le
cours de l'ardeur
Nous combattons
De
ses guerriers
Des
Mais
Et
soudain
moi-même
mon
le flot
Moïna
il
esquif sur
la
plus belle.
tombe sous mes coups
mon
glaive ruissellent;
après de longs efforts
la
:
armes étinoelent.
les
de sang sous
flots
je cède
Je lance
;
;
mer azurée.
mugissant m'éloigne de ces bords.
sur
la rive,
inquiète, éplorée,
Ses noirs cheveux épars, son sein mouillé de pleurs,
M'apparoit; mais
les
vents emportent ses douleurs,
Et je fuis, entraîné par l'onde impitoyable.
Hélas! depuis ce jour tristement mémorable,
Mes yeux n'ont point revu
Elle dort, m'a-t-on dit,
Elle dort; et
Du
la belle
souvent son ombre gémissante
sein des brouillards entr'ouverts
Vient m'attrister; semblable à
Quand
la
Epouvante
«
Dit
la
lune naissante
neige en flocons tombe du haut des airs,
Et que des vents du Nord
«
Moïna:
aux murs de Balclntha;
la
fureur rugissante
les bois déserts.
Pleurons cette beauté chérie,
mon père des ans le fleuve s'est
Moïna repose sans vie...
" Balclntha même a disparu.
:
accru
;
<<
Le matin cependant nous trouve dans
>>
la joie;
D'OS SI AN.
Auos yeux
Le firmament sourit à
Et
O
69-
satisfaits l'horizon se déploie,
l'éclat
d'un jour pur,
calme s'assied sur son trône d'azur.
le
surprise! soudain la
mer gronde,
s'allume.
Et roule en bouillonnant ses flots blanchis d'écunle;
De
l'abyme s'élève une sombre vapeur;
Elle a pris
d'un vieillard
Déjà de tous ses
le
vêtement trompeur;
démêle
traits l'œil
Bientôt c'est un géant, c'est
Il
nous montre
ce prodige
Les héros de
:
sur nous fond en gouttes de sang.
et
Témoin de
aieul
forme;
qui tremble dans son flanc.
le trait
Se dissout,
De son
la
un fantôme énorme
,
et le
cœur plein d'alarmes,
Tremnor (4) Fingal revêt les armes.
Morven^ l'œil attaché sur lui,
Iminobiles,.muets, partagent son ennui;
Dans
ses traits
menaçants chacun croit voir la guerre,
Et dans ses yeux
l'éclair,
messager du tonnerre:
Les dogues, pénétrés d'une secrète horreur.
Par de longs aboiements annoncent leur terreur (5)
Les lîUes de Selma, d'épouvante glacées,
Ne
roulent dans leur sein que de sombres pensées
Et nous, prêts à combattre,
Nous attendons du
«
O
mes héros
Il
Et
la
«
Une ombre
,
à vaincre résolus,
roi les ordres absolus
dit- il,
un orage
mort en courroux plane sur notre
protectrice a
:
s'apprête,
prévu
le
tête
danger j
:
;
:
POESIES
70
«
La mer roule en
ses flancs le
superbe étranger
;
«
Remplissez vos carquois de flèches meurtrières,
«
Détachez de ces murs
Il
><
Du
armes de vos pères
les
(G)
pesant boucher chargez vos bras nerveux,
Et qu'un casque d'airain presse vos noirs cheveux.
Des
cris se font
Par
le flot
entendre
:
écumant sur nos bords
Triomphante,
elle fuit
•'
une foule ennemie
est
vomie;
l'empire des écueils
:
Tel qu'un cerf entouré de rapides chevreuils,
Tel s'élève Carthon; ses armes frémissantes
Sous des
'<
O
étoiles d'or brillent resplendissantes.
Carril^ dit Fingal^^ va, sors de
mon
palais,
'<
Et porte à ce guerrier des paroles de paix ;
«
Dis-lui que les combats plaisent à nos courages,
«
Que nos
fers, de héros,
«
Mais que
le
a
S'en retourne chargé de présents glorieux
«
M
ont peuplé
les
nuages;
brave, admis à nos bantpiets joyeux,
;
Tremnor le pouvoir me seconde,
Et qu'au bruit de mon nom tremblent les rois du monde
(7
Dis-lui que de
Carril part en chantant; et
mon
père rêveur
De loin sur l'ennemi jette un œil de douleur.
« Que ta démarche est noble, enfont du mont sauvage
un
«
La lance entre
«
a
Ta jeunesse est un chêne au front audacieux,
Qui supporte la voûte où reposent les cieux
3
Mais cet arbre superbe, atteint dans
tes
mains
est
feu qui ravage;
:
sa raeint^
!
)
D o
'
s s
I
A
7»
ri.
Bientôt de ses débris va joncher
«
la colline;
Ta belle éponse en pleurs vainement sut les eaux
D'un regard inquiet cherchera tes vaisseaux. »
«1
a
Déjà près de Carthon
messager
le
fidèle
Entonnoit fièrement son iiymne solemnelle.
«
Clief des braves, salut
<t
Quel fantôme de
«
Regarde autour de
<
Sous
Jusque dans ces climats
pu guider
tes pas.'
toi ces collines désertes
ces pierres, de deuil et de
Dorment d'un
I
!
gloire a
:
mousse couvertes,
roi puissant les foibles ennemis.
Ah! plutôt dans 5e/ma que tes braves admis.... »
Moi répond le héros moi guerrier sans audace,
K
—
«
O
>(
fêtes
Selma que j'aille prendre place!
Morven! connois-tu bien mon cœur.'
de
Barde de
Va dans
ix
,
,
Aux
>i
celui
du
lâche éveiller ta terreur:
mon enfance
ma lance.'
de Comhal furieux
Sais-tu bien que la guerre éleva
1
Et que
.
«
'<
'
le
sang des rois a coulé sur
Eh quoi donc ? sous les coups
vu Balcliuha s'abymer dans les feux,
Et j'irois, trahissant ma race glorieuse,
J'aurois
«
Partager de son
«
Et j'irois de
<
Avec
le fils
la
fils la
fête injurieuse!
paix serrer
les
doux
d'un roi fléau de tous
liens
les
miens!
pouvois comprendre
•<
J'étois bien jeune alors, et ne
«
D'où naissoient tous les pleurs que je voyois répandre
«
En voyant nos
ajnis s'enfuir
de toutes parts,
POESIES
72
«
Une innocente joie auimoit mes
«
J'ainiois à
regards;
contempler ces flammes meurtrières
«
Qui dcToroient
«
Mais quand
les
murs
élevés par
l'âge eut enfin éclairé
mes pères
mes
«
Quand je
«
La ronce serpenter autour de nos murailles,
«
Et
«
Des héros décédés plaignant
la
vis
du
:
esprits,
palais les informes débris,
pierre couvrir le
«
Furieux, j'appelai
«
Mes soupirs
«
Et
«
Ne
la
champ
des funérailles,
le triste sort,
vengeance ou
la
mort;
éclatoient au lever de l'aurore,
«
me retrouvoit encore
me disois-je tout bas;
Et le lils de Comhal ne me verra-t-il pas ?
Il me verra bientôt. Va, fuis de ma présence,
O Barde Tout mon cœur frémit d'impatience
«
D'une guerre sans
«
Et je n'offre à ton roi que
«
t<
la
nuit dans les pleurs
!
Il
:
combattrai-je point?
fin j'allume le
la
:
flambeau,
paix du tombeau.
>
yeux quelques larmes jaillissent
dit, et de ses
:
Mille fers à sa voix dans les airs resplendissent.
Et de loin au combat
il
appelle Fingal.
moi-même un
jeune rival
«
Dois-je attaquer
«
Dit
«
J'arrache avant le soir cette fleur matinale?
«
Quelle honte pour moi
«
Plaçoient cette victoire au rang des
«
Si pour vaincre
mon père,
et faut-il
si
que, d'une main
si les
.^
fatale,
Bardes futurs
un guerrier foible
faits
et sans
obscurs
!
renommée
"D'OS SI AN.
s
Ils
disoient que
73
Fin gai eux besoin d'une armée.
hauteur,
a
Je ne marcherai point; debout sur
«
Je serai du combat tranquille spectateur;
Œ
Mais
«
Sur
«
Amis ,
ma lance
Carillon triomphe, alors, prenant
si
lui, tel
qu'un torrent
à
grand bruit je m'élance.
lequel de vous marchera
L'intrépide Connais
Connal aux
Attaque l'étranger
et
Cathol
la
le suit;
Digne ami de
Qu'attends-tu
mesure
Carthon
mon
Dans un repos
,
père
oisif tu
? le
,
le
la
le
premier
.''
flancs d'acier.
plaine
;
renverse, et l'enchaîne.
illustre
Clessamor ,
sommeUles encor;
destin à nos
vœux
est contraire....
"Va, terrasse l'orgueil d'un jeune téméraire.
Mais Clessamor se levé,
S'arrête.
Il
marche. Cependant
et
L'audacieux Carthon sur
le
rocher pendant
voit de loin, à travers la poussière.
S'avancer fièrement son nouvel adversaire
soupire
«
Tremperai-je mes mains dans
«
Se
«
Carthon ne
3
Ah mon cœur
CI
Et ses cheveux blanchis commandent
dit-il
!
,
et
sur lui jetant
à lui
même
:
;
un long regard
Il
le
:
sang d'un vieillard?
affamé de carnage,
doit-il rien
aux vertus de son âge?
malgré moi s'émeut
à
son aspect,
le respect.
Mais déjà Clessamor d'un bras nerveux encore
7
POESIES
74
Le frappe ,
«
«
(I
n
et fait
gémir son armure sonore,
Que me veux-tu , vieillard ? ton invincible roi
Ne peut-il m'opposer d'autres guerriers que toi ?
Ou n'as-tu
point de
fils
Couvre d'un bouclier
dont l'ardente jeunesse
ta débile vieUlesse ?
«
Quel est tonnom, ton rang? puis-je sans déshonneur
•1
Sur un chef inconnu
—
<
"
«
'<
«
signaler
Jeune présomptueux
,
je
ma fureur ?
me
ferai
connoître;
Mais apprends qu'un héros, qui te vau t bien peut-être
Du plus beau sang des rois illustre rejeton ,
A l'ennemi jamais ne révéla son nom
Ces lieux sont pleins encor de mon antique gloire
:
ma mémoire
;
n
Le Barde
a
Cède, ou , sans m'accabler d'un reproche insultant,
<<
Donne-moi
Ils
à l'avenir portera
le
trépas, que
ma
combattent. Can/zo«, que
:
douleur attend.
la pitié
«
modère.
Semble craindre en frappant de frapper son vieux père;
Enfin de Clessamor
le fer
vole en éclats
Déjà pour l'enchaîner Carthon levé
Mais
le vieillard,
le
:
bras
honteux d'une semblable injure.
Le perce d'un poignard caché sous son armure.
Fingal a vu tomber Clessamor
Du sommet du
Cro?nla, furieux,
pâlissant
il
;
descend.
D'OS
L'armée à son aspect
Tel, avant que
s
I
AN.
s'arrête tout
déchiré
l'éclair ait
;•>
émue
:
nue,
la
Quand un tonnerre sourd résonne au haut des monts ^
Le chasseur inquiet tremble dans
Le
roi de
Balclutha , qui
les vallons.
se soutient à
Voit accourir Fingal enflammé par
Appuyé
Il
sur
le
Jeune héros,
<i
Tu meurs
.>
«
•<
ft
;
dit-il,
mon triomphe
,
s'apprête
:
;
mais tes aïeux dans leurs palais mouvants
:
Cède au
«
roi de
Morven
;
tu le
peux sans
foiblesse.
Es-tu donc ce guerrier, fameux par tan t d'exploits.
Et cet astre de mort qui consume les
rois.'
un aigle aux ailes étendues
Moins terrible un torrent du mont voisin des
Moins rapide
Ah
!
que
est
n'ai-je
péri sous ton bras redouté
mon nom
Bardes lointains
«
Par
«
Mais je meurs inconnu ,
'i
Et le glaive
—
<
;
front toujours serein
Vont te revoir porté sur les ailes des vents;
Qu'un sort si glorieux dissipe ta tristesse
—
«
le
,
haine
de son sang Fingal troublé s'arrête
tt
«
,
peine
l'attend avec joie, et le glaive à la main.
A l'aspect
«
roc
la
«
les
du
foible a terminé
Va Carlhon àoit
,
Emporte
la gloire
laisser
cet espoir: les
fils
ma
un
seroit
nues,
!
chanté
;
m'est ravie
vie.
brillant souvenirs
de l'avenir.
POESIES
^6
harpe avertis de
.
Par
X
A leurs
u
A
«
Ils
Sur
Il
la
fiers
ta gloire
immortelle
descendants t'offriront ponr modèle
l'heure où, fatignés de la longueur des nuits,
rediront les
les traits
faits
des temps évanouis.
de CartJionhriUe un rayon de joie;
mort qui vient
sourit à la
saisir sa
proie.
S'avance d'un pas lent vers Fingal attristé
,
Et remet en ses mains son glaive ensanglanté,
conserve cette épée,
o
Conserve,
•1
FoLble et vil instrument de
lui dit-il,
ma
trompée
gloire
4
Que
«
D'un chant injurieux ne me poursuivent
«
J'ai brillé
«
Mais de quels pleurs amers
u
Quel long deuil va régner sur
«
Et combien va gémir léponx de
Il
expire à ces mots
Tombe
Jette
tes
Bardes du moins par-delà
cri
:
ma mort sera
les
pas.
douloureux,
et
vie;
suivie
Moina!
»
le sable.
reconnoît sanglant
meurt en l'embrassant.
Trois jours entiers à leur fin déplorable
Nous donnâmes de justes
Trois jours entiers
En
la
pleurs;
harpe lamentable
funèbres accords exprima nos douleurs.
Fille
!
bords du Lora^
Clessamor, sur
fils , le
:
trépas
pour m'éteindre au matin delà
près de son
un
le
du grand Toscar, au pied de
cette
roche
D O
'
S'élève leur
Un
noir
s s
I
A
N.
tombeau , du chasseur respecté ;
Amtôme en
interdit l'approche:
Et quand de son char argenté
La lune épanche une
clarté
douteuse,
De Moïna l'Ombre mystérieuse
Y
vient gémir en liberté.
NOTES.
(i)
à
La plupart des poèmes d'Ossian sont adressas
Mah'ina. EUe
et avoit
ëtoit
fille
éponsé Oscar,
de Toscar^ roi de VUhter,
fils
d'Ossian. Ce Barde cé-
lèbre devint aveugle sur la fin de ses jours. Mali>ina
ne l'abandonna point
:
elle le
conduisoit par-tout , ap-
prenoit par cœur ses ouvrages, et les chantoit en
compagnant de
la
prodiguoit à ce vieillard,
prouvent,
ci,
pherson, que
le
la
reconnoissance de celui-
comme l'observe judicieusement AfrtCla
noblesse des sentiments n'est point
partage exclusif des peuples
(2)
civilisés.
Ossi'an termine quelquefois sa première stro-
phe par
(3)
s'ac-
harpe. Les soins touchants qu'elle
les
deux vers qui
l'ont
commencée.
C'étoient sans doute des flambeaux de cire qui
faisoient partie
du butin que
les
Calédoniens avoient
rapporté d'une province romaine.
(4)
Trcmnorent deux
fils,
Trathal,
et
Com/ial
père de Fingal. Fingal eut à son tour cinq enfants,
Fergus.)
Ryno
,
Fillan.^ Ossian, et la belle
Bosmina,
NOTES.
(5)
On
croyoit que les
79
animaux voyoient
bres des morts: aujourd'hui
même, dans
les
les
Om-
mon-
tagnes d'Ecosse, lorsqu'un animal tressaille subite-
ment sans aucune cause apparente,
ce
mouvement
(6)
ter les
le
peuple attribue
à l'apparition d'un fantôme.
Lorsqu'un guerrier n'étoit plus en âge de porarmes,
il
Rien n'égaloit
les attachoit
le
aux murs de son
palais.
respect religieux que ses enfants
avoient pour elles; et ce n'étoit que dans les occasions
importantes qn'ils escient s'en revêtir.
{7)
Les Romains.
COMBAT DEFINGAL
DU FANTOME DE LODA.
^/ u
v
N D reviendra ma
brillante jeunesse
?
Resplendissant sous mes armes d'airain,
Quand
iral-je
aux combats déployer mon adresse,
Et de tous ses forfaits punir
un souverain?
O Sehna! je revois tes riantes collines
:
Fijigal s'offre à mes yeux entouré des héros
Qui reviennent vainqueurs des nations
Mon
Ils
chantent ses exploits,
La force de son bras
Et
voisines.
père est an milieu des Bardes mes rivaux:
le roi
sa
craint
douce bienfaisance,
même
par les morts;
de Mori>en^ appuyé sur sa lance.
Ecoute en souriant leurs belliqueux accords.
Quels regards
Que
ses
yeux
Mais, hélas!
il
lancoit
étoient
il
aux jours de
doux au
sa colère
sortir des
n'est plus, ce guerrier tutélaire;
L'œil ne peut retrouver l'empreinte de ses pas
Sur
sa
î
combats
tombe, que
voile
;
une mousse ondoyante,
!
POESIES D'OSSIAN.
8i
Le chevreuil dn désert paît l'herbe verdoyante.
Souvent pour
J'y traîne
la
toucher de mes tremblantes mains
ma doulear
et
mes pas
incertains.
Approche, Malvina; d'une douce lumière
Les phosphores du soir rempUssent mes forêts.
Asseyons-nous tous deux sur
la
pâle bruyère;
Par des hymnes tous deux endormons nos regrets.
Apporte de Sehna
Unis
ta
voix
la
lé-gere à
harpe secourable;
mes
tristes accents
:
Le Barde va chanter un combat mémorable....
Vois ce qu'étoit Fingal à
L'ombre
voiloit et les
Tout reposoit dans
la fleur
monts
les
de ses ans.
et les plaines
;
camps ennemis ;
Les casques d'or des guerriers endormis
mourant des chênes.
Etinceloient au feu
Mon
père seul,
consumé de chagrin.
Au doux sommeil
se déroboit encore,
Et promenoit son regard incertain
Sur
les débris
du
palais à'Inistore.
Déjà Cathlin sur un
lit
S'étoit assis, et sourioit
Dans
A
sa
les
détours de
la
de frimas
au monde.
forêt profonde
lueur Fingal porte ses pas
Soudain
les
:
vents se heurtent et mugissent
POESIES
»2
Du
firmament
les clartés s'obscurcissent,
Et, du milieu d'un nuage entr'ouvert,
Fond
De
à
grand bruit un fantôme homicide,
feux, de sang, et de terreur couvert
Un glaive ardent arme sa main livide
L'éclair jailUt de ses
yeux
irrités
:
;
;
La mort s'étend sur son visage pâle.
Et
de sa voix sépulcrale
les accents
Grondent au loin par l'écho
¥ingal sourit
répétés.
à cette horrible
vue
;
Et, s'avançact vers le spectre jaloux:
«
FUs de
la
a
Et sur
tes
.1
«
«
a
Pourquoi
Te
Nuit, retourne dans
vents échappe à
sous
t'offrir
ta
flattois-tu d'intimider
ta
mon
nue,
courroux;
forme hideuse ?
mon cœur?
Que peut, dis-moi, ta lance nébuleuse,
Ton arc de neige et ton glaive imposteur ?
,
•i
Jouet des vents tu roules daus l'espace,
«
Et tu croirois m'inspirer quelque
«
Fantôme vain,
fuis, et dérobe-toi
"
Au châtiment
mon bras
—
c<
«
«
!
«
dont
te
effroi...
menace.
Ignores-tu qu'en ces bois révérés
Un peuple
entier se prosterne et m'implore
Dois-je quitter l'enceinte
où
l'on m'adore,
Où tout fléchit sous mes ordres sacrés.'
A mes accents les tempêtes rugissent;
:
D'O
Mon
j«
s s
I
A
N.
83
souffle exhale et la guerre et la
mort
«
Des nations mes mains règlent
«
Et devant moi leurs rois s'eTanouissent ;
«
Tandis qu'assis sur
B
Enseveli dans une paix profonde,
mon
le
sort,
trône d'azur,
monde
«
J'entends gronder
a
Flottant sous
•
Et laisse-moi poursuivre mes desseins.
«
orages du
les
moi comme un brouillard obscur.
Repose donc sur ton trône mobile,
«
Fi nga l iamais
«
Va, contre
troubla-t-il ton asyle?
lui tes efforts seront vains.
«
De
En
«
Fingal connoît
«
Epargne-lui l'horreur de ton aspect.
«
—
n
l'ennemi
les tribus
menaçantes
voyant frémissent de respect
le
tes
Roi de Morven^ regagne
ta patrie;
J'appaiserai les vents impétueux:
M
Embarque-toi; des
•
Mon bras
n
Ton
"
Depuis long-temps je
flots
moment
le roi
En
ce
::
Et
mon
•<
Fuis donc, ou crains
L'Ombre,
tumultueux
puissant calmera
adversaire est
il
veille
assiège
ma
la furie.
de Sora
:
sur sa gloire;
Lora^
secours lui promet
à ces
:
armes impuissantes;
n
e
;
la victoire.
trop juste fureur.
mots, penchant
sa tête
«
informe,
Contre Fingal pousse une lance énorme
:
84
POESIES D'OSSIAN.
Mais
le
héros rappelle sa valeur ;
Il fait briller
Frappe,
son glaive redoutable,
et l'acier perce le
corps trompeur.
L'Ombre vaincue en jette un
Roule dans
l'air sa
cri
d'horreur.
masse épouvantable,
Et se dissout en humide vapeur.
COMALA.
POEME DRAMATIQUE.
SUJET.
à la veille d'épouser la belle
Fingarétoit
qu'on vint
En
une
lui
annoncer
colline
même s'il
,
et lui
Comala
,
lors-
l'invasion d'un roi étranger.
combat
partant pour le
il
son amante sur
laissa
promit de venir
survivoit à la bataille.
Il
la
rejoindre le soir
vainquit, et envoya
Hidallan à Comala pour lui annoncer son retour.
Celui-ci, pour se venger des dédains de Comala, lui dit
que Fingal
Fingal
a péri dans le
arrive, et
Un moment
combat.
Comala meurt
de joie.
BOSMIN A.
JjA.'Nuit descend; ses voiles
Enveloppent
sombres
les flots glacés
Et les fantômes courroucés
De
cris
sonrds remplissent
les
Ce sont des présages de mort
Un
Il
roi
compte
tombe,
sa dernière
ombres.
:
heure
trahi par le sort,
;
après
POESIES
Au
fond de
Comala
,
l'étroite
fille
demeure.
des héros
Viens t'associer à nos larmes
Il
:
goûte l'éternel repos
Celui qu'avoient soumis tes charmes.
Hélas
!
avant
la fin
du jour,
Fingal^ resplendissant de gloire,
Devoit
offrir à
Les premiers
Mais
la
ton amour
fruits de sa victoire
nuit a voilé les cieux
;
;
Vingal ne paroit point encore
Comala^
beaux yeux.
levé tes
Et vois briller ce météore
Fingal
est
Comala,
parmi
(
ses aïeux.
s" adressant
au
torrent.
)
Enfant des monts et des tempêtes
Pourquoi rouler des
.Sur tes
flots sanglants
Ont-ils suspendu leurs conquêtes.'
Dort-il
O
mon
héros indomté
lune , perce
le
fais luire
?
nuage
Qui couvre ton globe
Et
.''
bords nos guerriers tremblants
argenté
sur ce rivage
ITne favorable clarté.
DO s s
Chef des
Brillant
Humide des
HiDALLAN,
(
à travers la
traîner
envojé par Fiugal pour annon
à Comala.
ma douleur
cbefs ont
mordu
la
)
amere!
regrets, 6 cris superflus
Nos
Le
nue
pleurs du matin.
cer son retour
Où
8:
ma vue
comme un rayon serein
Qui serpente
O
AN.
I
rois, parois à
!
poussière
:
roi des boucliers n'est plus,
C o M A L A.
Quel monarque
a
perdu
la vie
.*
Avoit-il la vive blancheur
Ou des frimas de la prairie,
Ou du cygne amour du chasseur ?
,
Son
œil étoit-il intrépide
?
Et dans les combats meurtriers
Sa lancé
,
comme un feu
Consumoit-eUe
rapide
les guerriers ?
H I D A L A N , [feignant de ne pas
I.
Oh! que
l'entendre. )
n'entends-je son amante,
Assise au pied
du roc
désert.
Appeler d'une voix touchan
te
-
POESIES
L'aimaLle guerrier qu'elle perd
Fils
du printemps , zéphyr
Soulevé
l'or
!
folâtre
de ses cheveux;
Découvre-moi son sein d'alhâtrc
Et l'humide azur de ses yeux.
COM AL A.
Fingal dort d'un sommeil
Réponds,
sinistre
paisible
.
messager;
Celui qui bravoit le danger
N'est-il
plus qu'une ombre insensible
HlDALLAIf.
Oui,
le
chef du peuple est tombé:
Ses guerriers mesurent
Aux
la
plaine
;
rigueurs d'une mort prochaine
Le hasard seul m'a dérobé.
CoMA
Que
par-tout
la
L A.
mort t'environne,
Transfuge de nos étendarts,
Qui, du trouble où je m'abandonne^
Repais tes avides regards
!
Qu'une amante désespérée,
lémoin de ton juste trépas.
'.
D O
s s
'
Sur
I
A
89
N.
tombe déshonorée
ta
Pleure et meurtrisse ses appas.
Barbare, ton récit coupable
Comble l'horreur de mon
Sans
destin
Pourroit être encore incertain
Un
:
malheur qui m'accable
toi le
;
un rocher, un nuage,
Auroient pu séduire mes yeux.
arbre,
Et m'offrir
la
trompeuse image
De mon héros
victorieux.
BOSMIN A.
Quel drapeau dans
l'air se
déploie ?
Quel bruit entends-je sur An'en?
Comalaf
Voici
les
renais à
Fin
Dépositaires de
Bardes
,
la
joie,
braves de Morven,
G
AI..
la gloire,
commencez vos concerts
;
Et que les chants de la victoire
Retentissent dans ces déserts,
O Comala,
fille
charmante,
Viens applaudir à mes exploits ;
Sors de tes rochers,
Que
j'entende
ta
mon amante,
douce voix.
POESIES
go
C o M A. L A ,
(
croyant parler à l'Ombre de Fingal. >
Emporte-moi dans
Ombre
chère à
si
tes
nuages,
mon amour.
Fin GAI..
Fingal des vents
N'habite pas
Il a
revu
le
et des orages
noir séjour;
l'objet qu'il
aime,
n le presse contre son cœur
Comala reviens à toi-même
,
Et souris à Fingal vainqueur.
Comala.
C'est
mon
héros.
Touche son
.
.
.
ma main
invincible
tremblau!»^
main ;
Voilà ses traits, son front serein,
Et sa chevelure flottante
Au
souffle des vents
Mais quoi
!
.
.
mes
.
du matin.
forces s'affoiblissent ....
Je cède à l'excès du bonheur
;
Et déjà mes yeux s'obscurcissent
Chargés d'une noire vapeur.
HlDAH-AH.
Elle expire
. .
.
.
O
douleur tardive
!
D'O
s s
I
A
.
Pourquoi d'une amante craintive
Ai-je éveUlé le désespoir
?
Mes yeux ne pourront plus
Foroer
la
biche fugitive
Et nul dans
le
la
voir
;
calme du soir
N'écoutera sa voix plaintive.
Fi
If
G
A. !..
Jeune homme aux farouches regards
Eloigne-toi, fuis
ma
présence;
Abandonne mes étendards.
la honte du silence
Va languir parmi les vieillards.
Vous, Bardes, chantez cette belle;
Et dans
Chantez au bord de ce torrent
;
Et qu'une plainte solemnelle
Console ce fantôme errant.
Comala
repose sans vie ;
Ses yeux sont éteints pour jamais
Le trépas, d'une ombre ennemie.
Enveloppe
Quand
O
la
ses
doux
rouvriras-tu
attraits.
ta
paupière
plus belle des beautés
Quand
viendras-tu sur
la
?
bruyère
;
,
(i)
POESIES
D O
'
S S
I
A N.
Presser les daims épouvantés?
Aussitôt que
Aura bruni
Oli
!
la
nuit obscure
l'azur des cieux,
reviens enchanter nos yeux.
Laissant flotter à l'aventure
Les plis du voile nébuleux
Qui va
le servir
de parure.
NOTE
(i)
Les rois n'infligeoient à leurs sujets aucune
peine capitale. Fingal, désespéré de
la
mort de Co-
niala victime d'un faux rapport, se contente de
bannir Hidallan.
De
tous les affronts c'étoit
le
plus
pour un guerrier peu y survivoient; plusieurs se donnoient la mort, ou la dcmandoient à
sensible
:
leurs pères. La cause de ce désespoir découloit de
croyance où
ils
étoient
par son chef devoit, avant d'être reçue dans
nuages
,
la
que l'ame d'un guerrier banni
gémir plusieurs
siècles
bourbeux, ou dans des plaines
les
au bord des torrents
arides.
LA MORT D'HIDALLAN.
L)v
palais de
Morven pour
Hicfallan furieux,
Franchissant
l'œil
les torrents, les
Regagnoit tout pensif
Durant
Et déjà
Quand
l'asyle
trois jours entiers
le soleil,
Faisoit de
les
jamais exilé
morue,
il
,
éclievelé,
rochers , les bruyères,
de ses pères.
erra sur les
monts;
couronné de rayons
pourpre
et d'or resplendir l'étendue,
tours du Bal\>a s'offrirent à sa vue.
moment
Son père en
ce
Respiroit
fraîcheur et
la
sous
un rhêne voisin
l'air
pur du matin
;
Ses yeux depuis long-tempg étoient voilés par l'âge ;
Seul an Lord du ruisseau, dans son désert sauvage.
songeoit à son
Il
Et des
Soudain
Le
II-
à
sou
espoir de ses vieux ans,
fils,
siècles passés
il
oreille
murmuroitles chants.
un
bruit confus résonne
vieillard attentif et se tait, et frissonne:
pressent le retour de son
fils
bien aimé.
Lamok.
Entends-je à'Hidallnn le pas accoutumé.^
POESIES
Ou bien
n'est-ce
Qui près de moi
Mon lîls,
me
Et ne
Mais
si
,
D O
'
S S
A
I
N.
(,5
qu'une ombre errante, fugitive,
s'arrête et
gémit sur
reste-t-il
que
ta gloire et
tn vis encor, qu'as-tu
rive?
la
du Carron ,
as-tu péri sur les bords
fait
ton
nom ?
de nos braves
?
Ont-ils perdu le jour? hélas! sont-ils esclaves?
Jadis
,
Tu me
avec
paix regagnant
la
tes foyers.
ramenois au bruit des boucliers.
les
H
Mon père,
les
Vivent pour
héros
les
De
gloire.... il
Le
destin
I
si
DAL
A N.
I.
chers à
combats , et
se
ta
mémoire
couvrent de gloire
n'en est plus pour ton
me condamne à
fils
malheureux:
languir dans ces lieux
Tandis que, loin de moi, plus prompt que
Le fer
Ah
!
brille sanglant sur l'aile
de
la
le
tonnerre
guerre.
lorsque les périls invitoient les héros,
Tes aïeux s'indignoient des douceurs du repos.
Regarde cette tombe on sommeille
Chargé d'ans
et
de gloire
il
N'entends-tu pas sa voix qui
a
Que
fais-tu loin de
moi?
mon père
finit sa carrière
me
crie
:
tes destins
«
;
:
O mon fils
sont remplis
POESIES
y6
«
Viensjoindre
Tombe
Germalon
de
Dans ton
ta dépouille à
,
ma
tombe
cendre honorée
me recevoir
sein désormais peux-tu
mon
Hidallan,
orgueil, a
tralii
:
y
révérée
si
?
son devoir.
HlDALLAN.
Roi du somire Balva^
Ah
!
le
Ne me
même courage
n'afflige
et
mon ame;
point
m'anime et m'enflamme
Vois quel est
Fingal, de
Charge de
mon
destin, et connois sa rigueur.
Comala
cette
pleurant
la
mort fatale,
mort ma tendresse
rivale.
me défend la gloire et dérobe aux combats
Par un ordre jaloux ma jeunesse et mon bras
Il
,
«
Retourne,
«
Va cours te dessécher aux bords de
tt
CI
:
reproche point une molle langueur;
m'a-t-il dit,
retourne dans
,
:
tes plaines
;
tes fontaines
Comme un sapin vieilli
dont la neige
Vers la terre ont courbé
les
et les
vents
rameaux languissants.
Lai
Lorsque mes yeux en pleurs, du sommet des nuages.
Tomberont sur ce« bords témoins de mes outrages,
Naissez, épais brouillards,
fils
de l'obscurité.
D O
'
s s
I
A
Et cachez Hidallan à son père
H
un jenne
Plains
Mais pour
ces
D A
I.
L A N.
guerrier que son chef déshonore.
ma
lance en de nouveaux climats?
monts , couronnés par d'éternels frimas ,
Si je poursuis le
daim,
la
biche aux pieds rapides,
Branno^û Luath^ mes dogues
Si
Forcent
le sanglier
Souriras-tu,
Et,
le
De tes
cœur
intrépides,
dans ses retranchements.
mon père, à ces amusements.
satisfait
,
le
front brillant de joie.
tremblantes mains toucheras-tu
L
Aux murs
Le
91
!
consoler que puis-je faire encore?
te
Dois-je porter
Sur
1
N.
irrité
fer de
Prends ,
A.
M o R.
de ce palais bâti par mes aïeux
Germalon va s'offrira
mon fils, prends ce fer
Hidallan
ma proie ?
obéit.
«
,
tes
yeux.
et l'apporte à
ton père.
Près de cette onde claire,
vieillard, et sous le
«
Ditencorle
«
Dans son
«
Guide mes pas
M
Toi, dont l'œilnébulenx
chêne épais,
asyle étroit ton aïeul dort en paix;
».
A peine
il
en touche
la pierre
veille sur cette terre.
:
POESIES D'OSSIAN.
98
GermaloUf du haut du firmament
o
Illustre
«
Contemple
«
Comme sa honte, hélas!
Il dit,
ta famille à
son dernier moment.
sa
douleur est extrême.
frappe son fils, et se frappe lui-même.
>
lW/». »/*/».«
LORMA.
SUJET.
Fingal
à son retour
,
d'Irlande d'où
Swaran donna une fête à tous
d'inviter Maronnai et Mathos
,
il
avoit chassé
ses héros
,
:
il
oublia
deux chefs qui ne
Tavoient point accompagné dans son expédition.
conçurent un vif ressentiment de cet oubli
Ils
et pas-
,
sèrent au service A^Erragon
l'ennemi déclaré de
Fingal et roi d'un canton de la Scandinavie appelé
Sora. La valeur de Mathos lui acquit bientôt une
grande réputation dans Sora ; et Lorma femme d'JS'rragon conçut pour lui une violente passion. Il trouva
les moyens de s'évader avec elle
et de revenir auprès
,
,
,
,
,
,
de Fingal
fit
,
qui demeuroit alors à
une descente en Ecosse
par Gaul,
fils
de
Morni
positions de paix que
thos fut tué par
Lorma
après avoir rejeté
Fingal
Erragon
Se/ma. Erragon
dans le combat
et fut tué
;
pro-
les
lui avoit offertes.
son rival
Ma-
et l'infortunée
mourut de douleur.
l^NFAWT
Les
,
,
doux sons de
Ils se
de
ta
la
roche isolée (i),
voix réjouissent
mêlent au bruit flatteur
mon cœur;
POESIES
100
Du
ruisseau qui baigne
clair
la vallée
;
Solitaire étranger, sur ces gazons flétris.
Un moment
Là
s'élève
,
que ton œil
s'arrête:
une tombe au miben des débris
Que du sommet
des monts a roulés
la
tempête;
Là tu dors, Erragon^ cbef des rois belliqueux
De
Et
l'éclat
de ton
nom Sora n'est
:
plus frappée.
des ans a noirci ton épée
la rouille
Dans
le palais
de tes aïeux;
Un long deuil de tes mers attriste les rivages.
O toi, pour les combats, pour la gloire nourri^
"Vaillant cliet'de
Sur
Swaran
ces
étoit
Sora^ comment as-tu péri
bords lointains
vaincu ; F/«gfl/
Revoyoient de Selma
Mon
père
A remplir
satisfait
tous ses
les
et
sauvages?
et ses guerriers
murs
bospitaliers.
nous commande une
vœux cbacun
fête
:
de nous s'apprête;
Nous tendons l'arc fatal le trait obéissant
Va percer dans les bois le chevreuil bondissant
;
Et tous vers
le palais,
Nous revenons, chargés d'une
Les Bardes au banquet invitent
Deux
Un
;
pleins d'orgueil et de joie,
seuls sont oubliés.
sanglante proie.
les
héros
Maronnai
et
:
Mat/tos.
farouche dépit dans leurs yeux étincelle
Sinistres, à travers la joie universelle ».
j^
D'O
Ils
Qui pèsent sur
les flots
L'aquilon est muet,
Mais
«
le
SI A
s
N.
loi
deux btouillards errants
s'élèvent, pareils à
azurés et riants
:
sans nuage ;
le ciel est
vieux nautonnier tremble
et
prévoit l'orage.
Partons, dit Maronnai y que nos légers vaisseaux
a
Fendent des mers du Nord
"
Mathos^ on nous
les
turbulentes eaux
:
oublie, et des chefs de l'armée
a
Nous ne partageons point
«
Du superbe Fingal quittons
la fête
les
accoutumée.
étendards
:
«
Erragon nous appelle à de nouveaux hasards;
Son palais retentit des chants de la victoire:
«
Viens, et dans ses combats allons chercher la gloire.
«
Ils
De
Et
voguent ,
et bieiitôt arrivent à
présents et d'honneurs
les vit,
Erragon les combla,
sous ses lois, par d'éclatants services
Lui rendre chaque jour
les destins
Mais du jeune Mathos
la
De
>
Sora :
l'aimable
Lorma
Epouse
à' Erragon^
Brilloit
comme
plus propices.
grâce et la valeur
surent toucher
Lorma
la fleur
que
le
cœur.
dans son aurore
le
printemps colore ;
Ses yeux charmants rouloient dans les feux de l'amour:
Assise chaque soir au
sommet d'une tour,
Elle s'entretenoit des peines de
son ame
:
Lasse enfin de combattre une amoureuse flamme.
Elle fait à
Mathos
le
Et du palais des rois
plus
ils
doux
des aveux;
s'éloignent tous
deux:
9-
POESIES
I02
Tous deux gagnent Moryew. Les regards de mon père
S'allument à l'instant d'un feu sombre et sévère:
Mathos^
«
Infidèle
«
D'appaiser
la
lui dit-il, est-ce à
fureur d'un époux
et
Erragon défendre
moi
d'un roi?
«
Dois-je contre
«
Et briser dans ses mains
«
Injuste ravisseur, qui voudra désormais
«
Recevoir mes guerriers an sein de son palais?
«
Retourne dans
«
Déplorer
«
«
tes bois,
la
ces murailles,
lance des batailles?
va dans leur solitude
ton ingratitude
et ta faute et
:
Tu rallumes la guerre en ces tristes climats.
O mon père! ô Tremnorl des ombres du trépas
'<
Tois quelle
«
Au
est
de ton
fils la
milieu des combats
j'ai
fatale vieillesse
passé
:
ma jeunesse;
nouveau,
M
Faut-il, hélas! faut-il combattre de
«
Etmarcherdanslesang jusqu'auxbords dutombeau?
«
O Morven! l'avenir se
«
Je vois sur
mon
découvre
palais la
à
ma vue
;
tempête étendue
«
En écraser les murs si long-temps glorieux.
Quand la mort de mes fils aura fermé les yeux,
Une race timide, habitant ce rivage,
«
Y
«
Et de tous mes exploits
«
Ne
«
X
trouvera
mon nom
consacré d'âge en âge,.
le brillant
paroitra qu'un songe
aux
souvenir
siècles à venir. »
Erragon cependant, enflammé de
furie
j
D'OSSIAN.
A la hâte
Il
io3
rassemble une foule aguerrie:
s'embarque avec
elle, et déjà
nos forêts
S'offrent à ses regards farouches et distraits;
A
peine de
Il
députe à Selma
Morven
Tous nos jeunes
Chassoient dans
le
Barde de
guerriers en ce
vieux
le
Entre dans
le palais
Erragon
>t
Son Barde vous
«
Prends,
«
«
"
((
les
Narmor^
«
B
fatal
ses amis fidèles.
Se rappeloit près d'eux
«
moment
ces hardis vieillards, nos illustres modèles,
Lorsque
«
la terre,
guerre.
la
désert, éloignés de Fingal.
Ce héros, entouré de
De
touchent
ses pieds
le
:
«
antiques combats.
précipitant ses pas.
Braves guerriers, aux armes
à sa suite entraîne les alarmes
lui
appelle
aux combats meurtriers.
répond Fingal^
les
superbes coursiers
Que nous avons conquis sur les maîtres du monde
Et que de mes projets ton zèle me réponde.
Ma
fille,
!
;
;
tu suivras ce généreux vieillard:
Va trouver Erragon^ et dis-lui de ma part
Que , s'il vient se placer au banquet de ton père,
Nous serrerons les nœuds dune amitié sincère;
Dis-lui que de Mathos les trésors souverains,
peut
les désirer,
vont passer dans
ses
mains;
«
S'il
«
Dis-lui qu'en mon palais
«
Et que l'âge a glacé notre antique vaillance,
Il se tait.
Bosmina,
nous sommes sans défense,
vers le
camp ennemi
»
POESIES
I04
S'avance
front calme et d'un pas affermi;
le
Sa main droite soutient une coupe dorée,
Dans
Sa
Sur
Et
A
elle
gauche étincelle une flèche acérée
en un moment attachent tous
son aimable aspect
Roi,
lui dit
«
Qui
Et
la
paix
:
épais
le feuillage
tours silencieuses
reposer tes armes belliqueuses.
Si les trésors des rois
«
Du
j
II te
<
yeux;
lui-même.
est consolé
Selma les
voile de
laisse
les
douleur extrême
Rosrnina^^e t'apporte
«
«
sa
Viens t'asseoir avec nous sous
«
:
beauté, son souris gracieux,
sombre Erragon de
le
«
«
sa
taille, sa
peuvent
généreux Mathos accepte
donne cent chars, cent
Cent rapides faucons, cent
flatter tes sens,
présents
les
:
cuirasses légères,
belles étrangères,
Cent superbes coursiers accoutumés au frein,
"
Cent dogues a ux flancs noirs,et cent casques d'airaiu:
.<
D'or
"
Brilleront à
Sora dans
»
Ou
pour ton cœur, plein de justes regrets^
et
de diamants dix coupes radieuses
bien,
si
tes fêtes
joyeuses ;
mêmes
«
Une
«
A
«
Mais qu'une pai^ durable à ce prix
«
A
«
Que lui-même
infidèle
ton
—
«
amour
Fille
fléchir
épouse a
bientôt
les
Lorma
attraits,
sera
rendue
:
soit conclue. »
aimable des rois, lui répond l'étranger,
sous Fiiigal penses-tu m'engager.^
à
mes pieds dépose
ses richesses.
D O
Qu'il ine cède
«
s s
A
I
deux monts,
io5
N.
et joigne à ces largesses
1
Les armes qu'autrefois portèrent ses aïeux
«
Mon armée à
—
ce prix
Erragon^
«
"
A
«
De
«
Regarde,
dit
abandonne
;
ces lieux.
ma sœur avec nn
lier
sonrire,
de pareils traités Fingnl ne peut souscrire.
l'ennemi jamais
et vois la
Elle dit, et retourne
il
ne reçut
mort prête
au palais de
la loi
à
:
fondre sur
mon
toi. »
père.
Firigal^ en la voyant taciturne et sévère.
Se levé furieux, prend sou armure d'or.
Et couvre ses cheveux du casque de Tremnor.
Quand
Le
il
porte
la
soleil à regret
Un nuage
main
à sa lance fatale
verse une clarté pâle.
sanglant des cieux voile l'azur.
Mille ombres, se penchant surleur brouillard obscnr,
Présagent
le trépas
de cent guerriers célèbres.
Et semblent murmurer des chants sourds
Une
Le
gaieté terrible
zèle
anime nos
vieillards
et funèbres:
;
belliqueux brille dans leurs regards;
Tous, songeant aux beaux jours de leur adolescence^
Autour de leur vieux
Ils
roi se pressent
marchent. Mais soudain
Annoncent
Oscar
le
est le
les
en silence
:
dogues aboyants
retour des chasseurs triomphants.
premier; Gaiil Fergits et
S'élancent sur les pas
,
du
Néini vient après eux;
il
Dermide
guerrier intrépide
:
porte dans ses mains
POESIES
io6
La dépouilk d'un cerf hôte des monts Toisins.
Ossian
les suivoit
En songeant au
:
il
imprévu
J^otre aspect
Lui-même du combat
fait
il
Rayonnent
trois
sourire Fingal:
donne
dune
Mille glaives, brillant
Et
son ame.
est pensif;
passé, s'attendrit et s'enflamme.
le signal;
affreuse lumière,
à la fois sur la verte
bruyère
;
Bardes plaintifs, commençant leurs concerts.
Du chant de
épouvantent
la bataille
L'étendard de
Morven dans
les
les airs.
cieux se déploie
Assis sur la colUne, et palpitant de joie,
Mon père
Et,
fier
Mais
le
suit de l'œil ses enfants
cor retentit, et le combat s'engage
Le farouche Erragon
Des
est
donc
Gaul
A
à'
Helas
!
il
est
il
soutient l'effort.
promené
la
mort.
:
Erragon
le sable
tombé
Sora., dans tes
,
sauglanle poussière.*"
ton amant a vécu.
son glaive homicide
Le jette sur
O
la
Lorma;
s'avançoit alors
Au-devant
seul
il
ce guerrier qui s'offre à sa colère.
Et mord en expirant
Pleure, belle
:
s'enivre de carnage;
Morven
tribus de
Et sur nos bataillons
Quel
généreux,
de leur valeur, se sent renaître en eux.
il
voit
aussitôt
il
.
.
Mathos vaincu
il
oppose
s'élance;
sa lance.
et lui perce le
cœur.
ce superbe vainqueur
murs quelle morne
!
tristesse!
:
D'O
s s
I
A
N.
107
Ton roi bouillant d'ardeur, de gloire, et de jeunesse,
Ne te défendra plus contre tes ennemis....
dort sur
1 1
La
auprès de ses amis
la colline
victoire à sa
mort ne
:
fut plus indécise.
Près d'un cliène enflammé languissamment assise,
Lorma
veilloit alors
au palais de Matlios
:
Elle attend le retour de l'aimable béros.
Sur
la
plaine déjà la nuit est descendue;
La cascade du mont
Le zépbyr
En mots
est
s'arrête
muet;
et
suspendue;
Lorma
dans
les
pleurs
entrecoupés exhale ses douleurs
«
Mailios ne revient pas
«
Peuplent de son palais
«
.Aimable et beau chasseur, qui peut te
;
:
crainte
la tristesse et la
la solitaire
enceinte
«
Hélas
"
Le cerf, que poursuivoient
«
T'aura-t-U entraîné par-delà nos bruyères.'
u
Les étoiles du soir s'élèvent sur
«
Pourquoi n'entends-je pas
«
Descends, ô
Elle dit
!
,
avec
le soir
tu devois revenir
mon amour!
et se tait
:
sur
la
:
retenir.''
!
tes flèches meurtrières,
tes
les
monts.
dogues vagabonds?
descends de ta colline,
roche voisine
Un
fantôme
De
poussière et de sang ses cheveux sont souillés;
Son bras
se
montre
agite encore
Il s'arrête,
à ses
yeux
effrayés
un tronçon de
;
sa lance
soupire, et s'éloigne wi silence.
:
n
POESIES
io8
Lonna comprit
que Mathos
alors
n'étoit plus:
Pâle, d'un œil avide, et les sens éperdus,
Le long de
la
bruyère
lOmbre
elle suit
errante.
J'entendis les sanglots de sa voix déchirante;
Tel
murmure un zéphyr
D'un antre
solitaire
à travers le
ou d'un sombre
Jusqu'au champ de bataUle enfin
EUe trouve Mathos étendu sur
gazon
vallon.
elle se traîne:
l'arène....
La mort deux jours après termina ses douleurs
:
Les Bardes attendris chantèrent ses malheurs.
Tous
les
ans, quand l'automne et l'humide froidure
Dépouillent
Les
filles
de
les
coteaux de leur fraîche verdure,
Morven pleurent
cette beauté.
Solitaire habitant de ce roc écarté (2),
Tu
foules
une
terre
Chante ces morts ,
Quand
la
en
batailles féconde
la gloire et la
reine des nuits,
Luira dans
la
commençant
et
bcUe encor,
Tu l'entendras
Et redemande
à briller.
caverne où tu dois sommeiller.
Sur un rayon tremblant que
Rêveuse,
:
splendeur du mond«
gémir;
elle
aux vents
Lonna descendue,
se présente à ta
vue
:
pleure toujours,
l'objet
de ses amours.
NOTES
(i)
Ossian adresse ce poème
à
un
des premiers
missionnaires chrétiens qui furent envoyés en Ecosse.
On
les appeloit
cause de
(2)
Culdées^ c'est-à-dire solitaires, à
la vie retirée qu'ils
Le poëte parle au
poëme.
nienoient.
solitaire à qui
il
a adressé ce
MINVANE.
V haut d'un roc, voisin des mers,
JL)
Solitaire, triste,
Mirn'ane^ sur
muette,
les flots
amers,
Egaroit sa vue inquiète:
Elle apperçut tous
nos guerriers.
Couverts de leurs armes brillantes
Du
Ils
sein des
combats meurtriers
revoloient vers leurs amantes.
Mais Rino n'est point avec eux,
Rino que Minvaiie idolâtre
:
Des pleurs obscurcissent
Elle frappe
yeux:
son sein d'albâtre.
Et de ses cris trouble
Couché sur
<
ses
la
les
cienx
:
verte prairie,
mon invincible amant?
a
Dort-il
n
Le bras qui
«
Etoit
t
II n'est
l'étendit sans vie
donc un bras bien puissant
:<
Zéphyrs , qui frémissez encore
'<
Dans
.
!
plus celui que j'adore.
les flots
de mes longs cheveux,
Zéphyrs, interrompez vos jeux;
POESIES DOSSIAN.
<
Cessez de parler à
<
Le doux langage des
<
<
:i
la
rose
plaisirs
A mes pleurs mêlez vos
Loin de moi
mon amant
Où sont
dogues vigilants,
ses
repose.
Son bouclier impénétrable,
<
Son
<
Hélas
!<
Ses armes roulent au hasard
i<
Peut-être
^
De
"
>
arc, ses traits étincelants?
!
peut-être sur le sable
honorable
Réjouit son affreux regard.
Cher Rino ,
la
voix de l'Aurore
Ne
«
La
<
D'un J'en pur l'horizon
a
Jeune chasseur ,
éveille-loi
Prends ton arc ,
et
<i
;
un vainqueur implacable
cette dépouille
K
«
;
soupirs ;
te dira-t-elle
jamais
:
nuit rentre dans son palais;
Dans
les forêts
se
dore
répands
:
l'effroi
que je colore.
«
FiUe du jour, cache
«
L'ami de
n
Les cerfs bondissent sur sa tombe,
«
Ils
c(
«
'^
tes
feux
:
Minvane succombe
;
foulent son arc paresseux.
Mon héros, dors en assurance;
Ton sommeil
Dans un
sera respecté
religieux silence
;
POESIES D'OSSIAN.
«
Je vais m'étendre à ton côté
«
An sommet blanchi des
«
Demain mes
•<
agiles
Me demanderont
:
montagnes
compagnes
à Téclio
;
compté ma dernière
«
J'aurai
n
Et dans son obscure demeure
«
Je dormirai près de Rino.
»
lieore,
EYELINA,
FRAGMENT DU POEME DE FINGAL.
-M A L V
C'iTOiT
la
I
N A
un songe
voix d'Oscar... rarement dans
Son Ombre
vient
me
consoler...
Je lui parlois... Le jour détruit ce
Et je sens que
mon ame
doux mensonge.
est prête à s'envoler.
Le fantôme d'Oscar remonte dans
sa
nue
;
Sa robe ^e vapeurs , flottante au gré des vents
Sous
Et
les
l'or
Tu
feux du
soleil resplendit à
ma vue,
de l'étranger brille en ses plis mouvants.
vis,
mon
cher Oscar ^ dans ce cœur qui t'adore
Mes larmes
coulent dans la nuit
3Ies larmes coulent à l'aurore ,
Mes larmes, quand le jour s'enfuit.
Demandent à couler encore.
Hélas! comme un jeune arbrisseau
Qu'un zéphyr matinal balance
Sur l'onde pure du ruisseau,
en
présence.
.le
fleurissois
Le
souffle brùlaat de la
ta
mort
;
POESIES
ii4
A desséché mon verd feuillage
Mes compagnes
plaignent
Et les ennuis de
mon
En
vain pour réjouir
Leur main sur
la
veuvage
:
mon coeur
harpe
Ces accords blessent
:
mon sort
voltige...
ma
douleur;
Tout m'importune, tout
m'afflige.
Os SI AN.
Ta voix s'est fait entendre à mon cœur agité
Oui , le cœur du vieillard répond à ta tendresse.
Quand notre ame est en paix, il est dans la tristesse
;
Une
secrète et
douce volupté
;
Mais un chagrin profond lentement nous consume.
O ma
fille!
des
maux, que
souffre ta beauté,
Puissent mes chants adoucir l'amertume
!
Nous goûtions dans Selma les charmes du repos
Autour d'un chêne en feu nous écoutions mon père
:
Racontant
les
combats des antiques héros;
Et près de lui Fillan
,
mon jeune
frère,
Poussoit, à ce récit, de belliqueux sanglots
Mon fils, lui dit le roi, j'aime
J'ai
vu
briller ta lance, et
ta
:
noble audace;
ton père joyeux
S'est enorgueilli de sa race ;
Sois l'égal de
Tremnor^
Dès son enfance
ce chef de
nos aïeux
instruit à la victoire;
D'O
Son
glaive
renommé
Il s'éteignit
Mais
la
s s
veilla
I
A
N.
ii5
sur nos climats ;
enfin dans les combats
harpe guerrière éternise sa
;
gloire.
J'avois ton âge et presque ta beauté
Quand
à
mes yeux, plus
Plus blanche que
Ou
le lis
Pour
le
embaumé que Morven
première
la
fraîche
Je traversois
que l'aurore,
cygne au plumage argenté.
la forêt
de
voit éclore,
Eçélina:
fois s'offrit
Cona
;
Quelques braves suivoient ton père:
Un
cri plaintif, parti
Glace
mon cœur de
de
bruyère
la
surprise et d'effroi
;
Nous approchons Evélina tremblante
Me reconnoit, et s'avance vers moi;
:
Sa chevelure, au gré des vents errante.
Voile à demi son sein mouillé de pleurs,
de
beauté, d'oii naissent tes douleurs.''
a
Fille
"
Quel dessein
Il
conduit dans ce bois solitaire
Fingal de
pour l'infortune un
est
—
te
Instruis
.<
«
la
et
tes
.•*
;
astre tutélaire»
C'ief des combats, toi
i<
Toi dont
«
D'un
«
Tu
«
Mille guerriers brillèrent
le
malheurs
que Morven révère^
Barde a consacré
le
nom
,
roi puissant à qui je fus bien chère
vois en
moi le dernier rejeton:
pour mes charmes.
POESIES
ii6
«
Et
«
Plus d'une fois virent couler leurs larmes
"
Le noir Bolbar m'apperçut
les
A fuir de mon palais
—
«
Fille
m'aima
et
son amour m'a contrainte.
Qu'il vienne ce sombre guerrier;
«
A l'abri
mers ,
les
Bientôt dans
de
à ces
le
mon bouclier.
mots
je
,
lointain,
«
promené ma vue
comme une
Le vent du nord mugit dans
sa
;
épaisse nue,
S'avance de Bolbar l'esquif audacieux
;
voUe étendue,
Et son poids ouvre au loin un siUon écumeux
Noble étranger, enfant de
Il
la
Dis-je à
Bolbar^ Selma
De mon
retour on prépare
Viens écouter nos chants,
Le
traître
bande l'arc fatal ....
brille
de feux;
la fête
:
et t'asseoir à
me répond par un
:
tempête,
nos jeux.
affreux sourire
;
soudain
le trait siffle
Eçélina chancelle, tombe, expire
«
Applaudis-toi du sang qu'a répandu
.(
i.
est aisé
Il
Mais
:
;
de l'océan, repose-toi sans crainte
«
Sur
Croma
rochers du sourcilleux
«
1
e bras
d'immoler une femme
de Fingnl
sait
punir
ta
main
;
:
l'assassin. »
Nous combattons; la rage qui m'enflamme
En ma faveur fait pencher le destin
;
D O
'
s s
I
Bolbar vaincu roale dans
Il
A
la
N.
poussière:
ose ni'adresser une lâche prière;
Mais sans
pitié je lui perce le sein;
Et de son corps, gisant sur la bruyère,
Laigle des monts vient repaître sa faim.
LATHMON.
U
s
Lathmon
fils
,
l'absence de
de
Fingal qui
,
une descente dans
le
colline,
et fait prisonnier
étoit
en Irlande
Il
pour
,
faire
s'avança jus-
Selma. Mais comme il étoit
Fingal arriva Lathmon se
sur le point de l'assiéger
une
T.
prince breton, profita de
pays de Morven.
qu'à la Tue du palais de
retira sur
E
J
Nuath,
:
où
il
fut surpris
par Ossian
et
pendant
par
Gaul
la nuit,
,
fils
de
Morni. Le poème commence au moment ou Fingal
paroît sur la côte.
\J Selma dans tes murs quelle effrayante paix!
Aucun son de tes bois ne trouble le silence
En des climats lointains Fingal levé sa lance.
^
;
Et
le
Les
deuUet
filles
de
la
crainte habitent son palais
Morven
ont devancé l'aurore
:
;
Leurs yeux mouillés de pleurs s'égarent sur les eaux.
Mais
le fils
. .
de Conihal ne paroît point encore,
Le vent du nord mugit,
et retient ses vaisseaux.
Quel est ce noir torrent qui descend des montagnes
Et roule avec fracas ses flots tumultueux?
POESIES DOSSIAN.
C'est
119
Lalhmon ; son armée inonde nos campagnes.
Et porte vers
Sebna ses
Ivre d'un fol espoir,
pas impétueux
:
s'arme pour abattre
il
connu des nations
L'orgueil de ce palais
:
Les braves sont absents; contre ces bataillons
Les vierges de
l'huis,
Selma
doivent-elles combattre?
superbe étranger,
fuis....
sur les flots lointains
Vois-tu se déployer nos voiles ondoyantes?
Fin gai, vainqueur des flots, des vents,
et
des destins,
Ramené sur nos bords ses cobortes vaillantes.
Nous entrons dans la baie: 0«s/fl« furieux
Monte sur la colline, et son œil intrépide
Voit rouler dans
la plaine
une foule homicide
Trois fois son bouclier rend
A
ce son
imprévu
la
:
un son belliqueux
;
bicbe épouvantée
S'enfuit, en bondissant, vers sa grotte écartée;
L'ennemi m'envisage
Du
parois à ses
.le
,
Qui pesé sur
Assis en ce
aspect fatal
lui le signal;
yeux comme un sombre nuage
moment
Monii s'entretenoit
Gaiil, son
mon
pour
les airs et recelé l'orage.
Et le front appuyé sur
Ils
et
péril qui l'attend est
fils,
près du ruisseau joyeux,
un bâton noueux,
des batailles antiques.
écoutoit ses récits héroïques
charment son
oreille^, et
;
remplissent son cœur
D'un n^lange nouveau de respect
et d'ardeur;
P
I20
Souvent, dans
Il
se levé, et ses
Mais
le vieillard
Mon
S
TE
S
de son jeune courage,
mains font voler
entend
Son ame reconnoît
«
O E
les transports
fils, dit-il
le
le feuillage;
son du bouclier;
ce signal meurtrier:
à Gaiil^ la guerre se réveille,
<
Et des accents de mort ont frappé
«
Fingal
'I
est
mon
Ces armes qui jadis semoient par-tout l'effroi,
«
Ces armes, monuments des jours de
•<
Et toi,
«
oreille.
de retour: va, cours, apporte-moi
ma puissance;
mon jeune fils, toi, ma seule espérance,
Qui du nom paternel dois soutenir l'éclat
«
Prends une armure
«
il/orni fut des guerriers et la gloire et l'exemple,
«
Aussi, vois de quel œil sa tribu
CI
De ma
vieillesse
,
et vole à
au loin
les
ton premier combat.
le
contemple
pas sont honorés
!
:
«
Je m'avance; d'amour, de respect pénétrés,
«
Tous
"
A mes cheveux blanchis leurs hommages s'adressent,
«
Et chacun de ton père attend un seul regard.
Gaul
les
jeunes héros autour de moi s'empressent
s'éloigne et revient
S'est revêtu d'acier
Succombe sous
Il
le
;
:
»
le débile vieillard
mais sa main défaillante
poids de sa lance brUlante
marche vers Fingal;
Ganlhù
:
prête son bras.
Et, guide vigilant, conduit ses foibles pas.
DO
Mon
s s
père à leur aspect
a
Noble chef de Strumon^
«
Courbé sous
«
Tu
«
I
A
N.
121
laisse éclater sa joie
l'appareil
faut-il
que je
voie
te
d'un guerrier menaçantf
briUois autrefois comme nu astre naissant
Qui chasse les brouillards flottants sur mes collines ,
«
Et dore d'un feu pur
«
Le moment du repos
est arrivé
pour
«
Ton peuple
conserve
lui
o
Cependant, bon
«
C'est assez de
—
«
:
«
Si
te bénit
les
;
campagnes voisines.
vieillard, je
-
toi
:
son roi
:
rends grâce à ton zèle :
Fingal pour punir un
rebelle.
mon bras a perdu sa vigueur
mon antique valeur
son fourreau retirer mon épée,
Roi de Morveiu,
;
par fois rappelant
,
«
Je veux de
«
Elle résiste, hélas
a
Mais , Fingal^ pour mon fils elle brille auj ourd'hui
«
A son premier combat
«
Je
«
Ah du nom
«
«
l'ai
!
à
ma force trompée
il
vu s'enflammer au
a
;
besoin d'appui
récit
de
ma
gloire
Morni périsse la mémoire
Et puisse l'ennemi, de ma vue alarmé,
Dire, Voilà de Gaul le père renommé
!
;
;
de
:
!
!
—
«
Roi de Strumon^ ton
fils
mérite
ma
tendresse;
a
Fingal d'un bouclier couvrira
«
Toi, tranquille à Selma, loin des combats sanglants,
sa jeunesse
;
POESIES
122
«
Viens goûter cette paix que t'imposent
«
Par les mâles accords de
"
Mes Bardes charmeront ton àme noble et
entrent.
Ils
Sur Morven
Les rois se sont
ans
:
fiere.
sombre nuit descend
la
d'un chêne brûlant
assis près
ornement de nos
XJllin chante; sa voix,
Du
les
harpe guerrière
la
:
;
fêtes,
père de Fingal célèbre les conquêtes.
Soudain Morni frissonne,
Lance un regard
Le chant cesse;
et
son œil
et
irrité
au Barde épouvanté,
terrible
Fingal:
(i)
Quelle sombre tristesse
«
De ces heureux moments vient troubler l'alégresse ?
«
Si la haine autrefois divisa
«
Ils
•-
nos aieux,
commandent ensemble aux vents
séditieux.
»
Oubhons, à Morni
«
La paix
•
Oui, répond
"
«
Combien de fois j'ai vu son courage bouillant,
Comme un feu destructeur,consumer les phalanges!
«
Ce héros disparu
a
»
a joint
^
leurs antiques querelles
nos coeurs, demeurons-lui
le vieillard
revit
;
:
luleles.
ton père éloit vaillant
dans
les
;
louanges;
Moi-même j'ai donné des larmes à sa mort.
De hathmon cependant sachons tromper l'effort
«
Ossian,
«
Observez tous
et toi
Gaul, sur
la
coUine sombre
ses pas à la faveur
de l'ombre.
;
D' O
s s
I
A
N.
123
a
Et sur-tout modérez votre rcssen liment
«
La jennesse
Il se tait
;
est
fougueuse
nous partons une
:
Tremble encor dans
les
Déjà nous entendions
Quand,
Gaiil
la
me
main sur son
dit,
et s'égare aisément.
»
clarté légère
cieux,
les
:
et luit
sur
la
fougère.
pas de l'ennemi,
fer
qui brilloit à demi,
emporté par l'ardeur qui l'enflamme,
mon ame ?
«
Pourquoi, fds de Fingal, sens-je brûler
B
D'où peuvent naître en moi ces transports inconnus?
«
Dans le
«
Je sens trembler mon cœur, mes forces s'affoiblissent
sable à regret
mes pas sont retenus
;
«
Et d'un voile jaloux mes regards s'obscurcissent.
«
Ossian, dis-le-moi, près d'un
a
Le cœur du brave
«
Quelle gloire pour nous, pour i^/w^a/, pour mon père,
«
Sil'étrangersurpris...
«
«
péril certain
ainsi tremble-t-il dans
son sein
.''
— Quecetteardeurm'estcliere!
O mon ami! notre ame en secret se confond
A la témérité si le succès répond,
:
«
Noos nous couvrons tous deux d'une gloire immortelle
«
Et quand
«
Nos pères , il est vrai nous donneroient des pleurs,
«
Mais
«
Ilsdiroient:
«
Leur nom
la
mort
seroit le prix de notre zèle,
,
un secret
«
orgueil viendroit enfler leurs cœurs
Sinos fds dorment sons
;
cette pierre
seul de \Iorven doit illustrer la terre
».
:
POESIES
124
«
Eh! pourquoi du tombeau
«
La mort
«
Le lâche en vain
«
Et de ses bras sanglants l'entoure dans
aimfe le
brave
la fuit
Je m'élance à ces mots
Uû
déjà
et craint
;
elle
nous occuper?
de
le
frapper
Gaiil marche sur mes pas
:
et
sans chaleur,
me sépare
ma lance fidèle,
franchir le torrent, qui
Lorsque le jeune Gatil:
M
:
endormie.
versoicut qu'une pâle et mourante lueur.
Déjà je m'appuyois sur
«
elle étoit
feux de son camp, sans force
les
Pour
«
;
torrent, dont les bords sont couverts de frimas,
Tranquille et sans défense
We
»
sa fuite.
Roule et serpente autour de l'armée ennemie
Et
:
vole à sa suite,
d'elle,
Ossian que fais-tu?
«
,
Ne va point démentir ton sang et ta vertu
Que de ton bouclier le bruit se fasse entendre,
Que l'ennemi s'éveille et puisse se défendre. »
Je
;
me
rends
à ses
vœux
:
de l'homicide airain
Le son retentissant frappe
Tout
s'éveille à la fois,
l'air
;
et
soudain
tout frémit, tout s'agite;
L'étranger au hasard court et se précipite;
11
croit
dans sa terreur que
Morven l'a
surpris,
Délibère, s'égare; et nous, poussant des cris.
No us frappons. Sous mes coups le lier Cre/no/' chancelle
Nenni tombe, et se perd dans lu nuit éternelle;
;
DO s s
Et toi,
Tu
fonds sur
En
vain, pour échapper à
Donthormo
Ta
Et
A
125
N.
,
guerrier foible et craintif;
ta
juste colère,
nu chêne antique
gravit contre
Il
I
de Alorni, ton bras n'est point oisif,
fils
et solitaire,
lance le poursuit, pénètre dans son flanc.
le
tronc du
Mais l'aurore
vieil
arbre est rougi de son sang.
se levé; à sa clarté
mourante
L'étranger se rallie, et perd son épouvante:
Lathmon nous
a
«
apperçoit, et pâlit de fureur:
Hé quoi deux seuls guerriers ont semé la terreur
Hé quoi, dans notre sangleurs mains se sont trempées!
!
!
eux
briller dix mille
épées?
«
Dois-je faire contre
"
Et, tandis que leur bras a vaincu sans secours,
«
Dirai-je à
«
Non, je combattrai
mes
tribus de terminer leurs jours
?
seul: Ossiari, plein d'audace,
des rois, est digne de sa race
«
Ossian,
«
Sulmatk, va
«
Connoît depuis long-temps et
«
Qu'à l'heure du combat nul
«
Qu'ilattenddansla plaine, etquesa lance estprête.
fils
J'accepte
le
trouver, et dis-lai que
le défi:
sa gloire
effroi
:
Lathmon
et son nom
ne l'arrête,
nous combattons;
»
l'éclair
Est moins prompt dans les cieux qu'en nos mains n'est le fe
Sous
De
les
coups redoublés nos cuirasses gémissent;
nos casques d'airain mille flammes jailhssent;
Tout
ce
que peut l'adresse,
et la ruse, et l'ardeur,
I
POESIES
a6
Et
force
la
du bras,
D O
S S
'
et l'audace
I
A
N.
du cœur,
Nous l'employons déjà nos lances
De leurs éclats brillants parsèment
:
meurtrières
les
bruyères;
Ainsi que deux Esprits sur leurs troncs mouvants
Se lancent
la
tempête,
et la foudre, et les vents,
Ainsi nous nous portons atteinte sur atteinte:
De notre sang mêlé déjà la terre est teinte
Lathmon enfin, Lathmon doit subir le trépas,
Un tronçon de ma lance embarrasse ses pas
II tombe; mon épée est déjà sur sa tète,
Quand du fils de Morni le bras puissant m'arrête.
:
;
un
Lat/iinoTi]ette sur nous
Et nous prenant
la
main
:
«
regard attendri;
Couple auguste
et chéri,
(1
Nous
«
Eli
«
Vous épargnez
«
Autant que vos exploits j'admire vos vertus.
—
«
'<
!
dit-il,
sans rougir je cède
qui peut effacer
Viens ,
le
l'éclat
la victoire;
de votre gloire?
sang des guerriers abattus ;
lui dis-je
;
Fingal
à
Selma nous
appelle ;
Serre avec lui les noeuds d'une paix éternelle;
«
Du
«
Et jamais ses enfants n'ont vaincu qu'à regret.
sang, qu'il voit couler,
il
gémit en secret^
NOTE
(i)
gnoit
ne
Ullin avoit mal choisi son sujet
quen chantant les exploits
réveillât
dans l'ame de Fingal
anciennes querelle*.
:
Morni crai-
de Coinlial^
le
le
Barde
souvenir de leurs
LA MORT
D'OSCAR FILS DE CARUTH
,
,
ET DE
DERMIDE FILS DE DIARAN.
,
SUJET.
Caruth père
,
Ôl
Oscar, raconte
Dermide, son ami. Il ne
et ce
la
mort de son
fils
faut pas confondre cet
,
et
de
Osca r
les héros de même nom dont il est
Témora comme nous en avons averti
Derrnide avec
question dans
,
dans une note sur
cédent.
11
n'est pas
comme
le
premier chant du poème pré-
sûr que celui-ci soit à'Ossian
n'est pas sans mérite
mais
,
qu'il
ne déparera point ce recueil.
il
louRQDOi
Pourquoi de
rouvrir
la
,
source de mes larmes ?
mon Oscar me demander le
Fils d'y^/pin, tu le sais, sa jeunesse, ses
N'ont pu
O mon
le
dérober au glaive de
la
sort.'
charmes
mort.
unique amour! ma douleur paternelle
Vainement de ton
nom
;
nous croyons
attendrit ces forêts;
POESIES
Tout
D O
'
S S
I
A N.
couvre à mes yeux d'une ombre
se
129
universelle...
Je ne vis que par mes regrets.
Il s'est
Quand
Comme
De son
éteint
l'orage
le roi
comme un
astre timide
nocturne éclate sur
les
,
monts;
du jour, quand un brouillard liumide
bouclier d'or nous cacbe les rayons
Et moi , de
mon
palais
lugubre
Comme un chêne vieilli,
dont
:
et solitaire
le
Nord en furear
Déjjouille et fait rouler la tète octogénaire,
Je
me
flétris
sous
L'herbe des champs
Le brave
Tu
éclair
bras à l'ennemi
Mais
toi,
malheur.
vit et
meurt inconnue
:
n'a jamais partagé son destin;
Sa lance est un
Son
le
qui déchire
la
nue,
donne un trépas
mon cher Oscar
^
certain
:
tu succombes sans gloire;
n'as point dans ta chute entraîné l'ennemi,
Et ton glaive fameux, pour dernière victoire.
Fume du
sang de ton ami.
Dermide^ Oscar,
dès leur plus tendre enfance
Etoient unis par les plus tendres noeuds
Age, beauté, grâce, douceur,
Peine, plaisir, tout fut égal entre eux:
Dans
les
:
vaillance,
combats leur lance dévorante
POESIES
ï3o
Embrasoit
les rois renversés
Tels roulent deux torrents dont
la
:
course écumante
Précipite le deuil, le trouLle, l'épouvante
A
travers les rocs fracassés.
Dargo tomba sous leur épce,
Dargo qui jamais n'avoit fui
:
Sa
de larmes trempée,
fille,
Demeuroit seule
et sans
appui
:
Elle étoit innocente et belle,
Belle
comme le jour naissant.
comme la fleur nouvelle
Fraîche
An parfum doux et
ravissant;
Ses beaux yeux étoient deux étoiles
Qui tremblent au milieu des
Ou
rayonnent parmi
airs
les voiles
Des brouillards hôles des
déserts.
Les deux héros soupirèrent pour
Ou
la
elle
:
posséder ou mourir;
Voilà leur vœu. Mais N/'iia fut rebelle
A l'aimable Dermide
Elle adora
mon
fils
,
:
Oscar eut son désir;
quoique
sa
Fumât encor du sang d'un père
Eh! qui peut de
Enchaîne-t-on
«
Oscar ^
sa
vaillante
infortuné...
flamme accuser une amante?
un cœur
lui dit
main
vers
un
autre entraîné?
Dermide^ abrège ma
souffrance
;
D O
s s
'
I
A
N.
i3i
Ta connois mes tourments; tu sais que dans mon cœai
o
«
De
«
Mon ami, prends
—
—
te ravir
A' /«a je garde l'espérance
ton glaive, et
donnant
mort Oscar
:
mon malheur.
«
Qu'en
it
Eh! quelautrequ'Oicardoit mepriverdujour?
te
«
Possède sans
<i
Trappe, éteins dans
—
finis
Ah
«
rival la
la
se
beauté qui t'adore
mon
sang
un
plutôt combattons, et puisse
!
M
Dcrtnide ^ défends-toi; songe, songe
•<
Que
;
la victoire
du sang de mon ami!
Ne
fer
!
criminel amour.
«
point rougir ce
déshonore
à ta gloire;
par l'amour ton bras soit affermi
».
Leurs fers bi illent soudain... Mais Dermide succombe.
Oscar près du torrent bourbeux
Dépose
Une
Il
<
va trouver
Tiens,
EUe
X
I
la
tombe.
«
Beauté qui m'es
d'Oscar suis
les
si
chère,
pas incertains
>.
obéit: sous des arbres voisins
tous deux:
Sais-tu, dans le
«
«
Nina:
loi dit-il;
Ils s^arrèteat
o
corps dans
le
farouche joie éclate dans ses yeux:
Sais-tu
«
Regarde
cette pierre;
tombeau, qui dort en ce moment?
que
ma main
meurtrière
En immolant Dermide immola ton amant?
o Nina! charme heureux d'une trop courte vie,
Mon Ombre va s'unir à son fantôme errant ».
Il se
frappe à ces mots, et sur l'herbe rougie
Son sang
coule, et se mêle aux ondes du torrent.
LES CHANTS DE SELMA,
SUJET.
Les Bardes s'assembloient tous
.
chef auquel
ils
les
poëmes. Le roi nommoit ceux
d'être conservés
ans dans
étoient attachés.
,
et
on
les
Ils
le palais
qu'il jugeoit
dignes
apprcnoit avec soin aux en-
Ce fut une de
à Ossian le sujet de
fants poiu- les transmettre à la postérité.
ces fêtes solemnelles qui fournit
ce pocme.
(jOMPAGNEdela
Qui, sur
Imprimes de
tes
nuit, étoile radieuse
l'azur
pas
du firmament,
la trace
lumineuse^
Astre paisible, en ce
Que
moment
regardes-tu daus
L'aquilon est muet,
la
la
plaine?
cascade lointaine
Ne murmure que
du
récitoient leurs
foiblement,
Les insectes du soir font retentir
à
peine
Un triste et sourd bourdonnement
;
Au bord de l'horizon tes clartés s'obscurcissent,
Tu descends dans le sein de l'océan fougueux.
POESIES D'OSSIAN.
Les
flots
bruyants
Et baignent
l'or
de
tes
cbeveux;
Mais ton dernier rayon
a lui sur la bruyère
Astre charmant, adieu.
Que mon
Se rallume,
Je
le
et
succède à
i5
se réjouissent,
vive lumière
ta
:
génie éteint
:
sens qui renaît dans sa force première,
Et des coups du malheur lui seul n'est pas atteint.
Je vois à
sa clarté se
rassembler encore
Les nobles compagnons de mes jeunes travaux.
Sur
le
Mora.1 qu'éclaire un pâle météore,
Fingal briUe, entouré des Bardes mes rivaux
Aux
L'harmonieux Rino,
Et
le
;
accents de sa voix s'empressent de se rendr*
sombre Carril^
Et
Minona^
O mes amis,
si
le
belliqueux Ullin^
et le
brûlant Alpin^
plaintive çt
que vos
si
traits
tendre.
sont changés
Depuis ces jours de bonheur
On Selma
nous voyoit, dans
De la harpe et du chant
Pareils
Qui
Ce futnn de
caressent
de gloire
murs ombragés,
disputer la victoire
!
une onde pure,
le
un doux murmure
naissant gazon.
ces jours, à jamais
Qu'on
et
aux zéphyrs du vallon
Et viennent tour-à-tour avec
Agiter
ses
rit s'avancer
mémorables.
Minona^
POESIES
i34
Cliantant tes
amours déplorables
Et de Salgar
et
Snlgar avoit promis à
De
de Colma.
sa
Colma
venir la rejoindre avant la fin
fidèle
du jour
:
Déjà l'ombre est universelle,
Et Salgar n'est point de retour ;
Flottante entre l'espoir, et
le
doute
,
et la crainte,
Colma sur la colline , et seule avec sa voix,
Oe ses cris douloureux fait retentir les bois.
Ecoutons
sa tendre complainte.
CHANT DE MINONA;
Colma.
LiOiN de moi Salgar eH
errant;
Par-tout règne la nuit profonde
Sous mes pieds mugit
Sur ma
tête la
me
délaisse et
Je suis seule sur
Que
O
la
le
;
torrent.
foudre gronde
Pas un asyle où
Tout me
le
cacber
;
;
m'abandonne;
rocber
sombre mer environna.
lune, sors du sein des monts;
Paroissez, étoiles nocturnes,
Paroissez, et
que vos
rayoni^
D'OSSIAN.
Eclairent
i3'5
mes pas taciturnes
mon amant;
Conduisez- moi vers
ma voix
Qu'il entende
:
plaintive
:
OSalgar, songea ton serment.
Rejoins une amante craintive;
Le rocher,
Sont
les
l'arbre, le ruisseau,
témoins de
t'attendent sur
Ils
Et répondent à
Nos
ta
le
ma
promesse
:
coteau.
tristesse.
pères furent désunis.
ma
Mais nous, seul objet de
flamme,
Nous ne sommes point ennemis ,
La haine
Ah
!
la
lune paroît enfin
Mais , à
Qui
dans notre anig.
n'est point
l'éclat
s'élève
;
de sa lumière
du mont
Qu'apperçois-je sur
voisin
la
,
bruyère
?
Hélas! deux guerriers teints de sango..
La mort
a
Le glaive
Que
O
fermé leur paupière.
est
vois-je
!
encor dans leur
Salgar
et
mon
flanc.
frère.'
mes amis, répondez-moi;
Qu'avez-Tous
fait
dans
mon abience
.''
POESIES
i>36
Parlez, dissipez
mon effroi.
cruel silence
Ils se taisent ....
Mes yeux de
Salgar^
mon frère,
quelle haine
L'un par l'autre vous
frappés?
a
Pourquoi dormez- vous dans
Combien vous
Faut-il
,
!
larmes sont trempés.
hélas
!
la plaine ?
m'étiez chers tous deuxi
vous perdre ensemble
!
Mes amis, exaucez mes vœux.
Qu'un même tombeau nous rassemble
Dans
O
ses flancs je
veux me
cacher.
Salgar! Ombre que j'implore,
Près du ruisseau, près du rocher.
Tu
m'entendras gémir encore.
Au
sein des nuages
Quand
la
mouvants
,
nuit versera son ombre,
Je viendrai sur l'aUe des vents
Attrister la colline
sombre
Ma
douceur
voix aura de
la
En plaignant deux
;
;
guerriers célèbres
Trctnblant et charmé
,
le
chasseur
L'écoutera dans les ténèbres.
Ainsi cbantoit
la
tendre
Minona :
i
:
D'OS
SI AN.
i37
tîne aimable rongeur couvroit son bean visage;
Et nos larmes couloient en songeant à Colma.
JJllin chante à son tour: dans la force de l'âge
Ullin nous embrasoit an feu de ses accords.
Il
entendit
un
au retour de
soir,
chasse,
la
La voix du vieux ^//7in , chantre
illustre des
morts
Rino^ dont vainement nos yeux cherchent la trace,
Etoit alors auprès de ce vieillard
Ils
déploroient
Minona
fut sa sœur.
Nous
Semblable à
la
Cache
Quand
la
harpe plaintive
redit sous les doigts A'Ullin
Les plaintes de Ritio
Qui prévoit
:
chute de Morar.
la
,
désespoir à' Alpin :
le
la
lune cralutive
tempête,
et
dans l'épais brouillard
sa tète radieuse
jVf/nowa disparut, triste, silencieuse.
Et jetant sur Ullin
un douloureux
CHANT
J_iE ciel est
pur,
regard.
D'ULLIN.
l'air est
tranquille.
Le nuage s'étend en rézeaux lumineux;
Le
soleil, sur le
De son ehar éclatant
roc stérile.
fait rejaillir les
feux
;
;
POESIES
i38
Le torrent, moins impétueux
A
travers les ravins roule
O
murmure;
torrent, j'aime ton
Mais je préfère encor la douce voix
n
Tombe en
s'avance
;
,
une onde plus pure.
à' Alpin
:
sa chevelure
flocons de neige éparse sur son sein
Par
les
;
aus sa tête est courbée,
Son œil creux est rouge de pleurs
Dans les ennuis et les douleurs
Son ame paroît absorbée.
Roi des harpes, pourquoi sur
le
;
mont ténébreux
comme un flot qui mouille le rivage,
Ou comme un doux zéphyr dont le souffle amourenx
Gémis-tu
S'égare et meurt dans
Ai. p
I
le feuillage ?
w.
Mes pleurs sont pour les morts superbe, belliqueux.
:
Aujourd'hui
Tu
le
plus beau des enfants de
triomphes , jeune
Peut-être
le
homme,
et
la
plaine.
demain sur l'arène
trépas viendra fermer tes yeux.
Comme toi Morar fut célèbre,
Comme toi Morar fut vaillant;
Il
n'est plus, sur
son
lit
funèbre
L'étranger s'assied en pleurant.
Morar
Le
^
brave chasseur, guerrier plus brave encore.
cerf de
nos forêts fut moins léger que
toi
;
D'OS SI AN.
La tempête en courroux,
Dans nos climats
Que
moins dans
ton glaive dans
les
lig
brûlant météore.
déserts répandoient
L'éclair brilloit
Et
le
moins
combats,
les
phalanges éperdues
Disparoissoient devant tes pas
Mais lorsque
Que ton
:
avoit conduit tes armes.
la victoire
visage étoit riant
Des vaincus tu séchois
Moins pur
d'effroi
nues
les
les
!
larmes;
de l'Orient,
est le soleil qui part
Moins doux l'astre des nuits quand sur unchar d'argent
A
nos regards, sans voile,
Tes
attraits
il
offre tous ses charmes.'
maintenant dorment ensevelis
Au fond de la demeure
O
toi
qui fus
si
obscure
:
grand, en trois pas je mesure
L'espace étroit que tu remplis
;
Un arbre, qui n'a plus qu'une feuille tremblante,
Aux bords de ce ruisseau quatre pierres sans art.
Un gazon qui frémit sur sa tige mourante,
Indiquent au chasseur
Mais quel
Par l'âge
et le
malheur
Tantôt
De
sa
la
est ce \-ieillard
il
garde
tombe de Morar.
qui lentement s'avance ?
ses traits
bouche tantôt sortent de
C'est ton père, ô
De
Morar l
ses jours
semblent
flétris
;
le silence.
le
foibles cris
:
bruit de ta vaillance
charmoit
le déclin;
POESIES
140
Hélas
!
il
n'a
Ni
pu
voir les éclairs de
le trait
ta
qui perça ton sein
lance ^
!
Pleure sur ce héros, gémis, malheureux père;
Morar s'est endormi pour
des siècles entiers;
Des rayons du matin l'amoureuse lumière
N'ira pas dans la
tombe ouvrir
ses
yeux
guerriers.
Rassure-toi, chevreuil timide,
L'arc
du chasseur
est
détendu.
Adieu, conquérant intrépide.
Adieu, jeune héros que nous avons perdu
:
Le son des harpes frémissantes
Fera voler ta gloire au-delà du Lubar^
Et
dans mes hymnes touchantes
les siècles futurs
Ajiprendront
Aux doux
le sort
de Morar.
accords d'Ullin une douleur secrète
Se réveille au fond de nos coeurs;
Mais de tous
les
héros rassemblés à
la fête
Nul plus qvLylrmin ne répandit de
L'image de son
fils
tombé dans
pleurs.
sa jeunesse
Se retrace à son souvenir.
Carmor., touché de
«
Pourquoi,
«
Pourquoi de
tes
«
Armin que
de nos chants
,
«
Soit
lui dit
sa tristesse.
chagrins toujours t'entretenir.'
pour ton ame
ainsi
la
douce mélodie
qu'une vapeur
D O
'
«
Qui
«
£t du
Ah
!
s'élevc
Lis
du
s s
I
A
N.
lac, s'étend sur la prairie,
abattu ranime
la
fraîcheur.
ensemble
et
mou
je regrette
lils
"
et
ma
fille
:
Trop fortuné Carrnor! tu peux voir chaque jour
Fleurir les rejetons de ta jeune famille,
Et les enfants A'Armiji l'ont quitté sans retour.
O ma chère Danra! sur un lit froid et sombre
De quel sommeil tu dors Roulez, fougueux torrents
!
;
Levez-vous,vents d'automne,et rugissez dans l'ombre;
Forêts, remplissez-vous de fantômes errants;
Lune, verse par
intervalles
Tes rayons languissants
Rappelez cette nuit
Cette nuit, dont
si
et pâles
;
féconde en malheurs,
mes yeux trouvent par-tout l'image,
Où mon cher Arindal tomba sur le rivage.
Où ma chère Daiira s'éteignit dans les pleurs,
./^/•/nar,
De ma
Il
jeune guerrier plein de force
fille
Danra
recherchoit
la
et d'adresse,
tendresse
:
l'obtint; et déjà l'on attendoit le jour
Qui devoit par l'hymen couronner
leur
amour,
Quand Erath^ pour venger le trépas de son frerc
Qui sous les coups à'Armar avoit péri uaguere.
Forme un affreux
dessein, prend d'un vieux matelol
POESIES
142
Les vêtements connus,
laisse sa
barqne à
flot,
ma fille, et dit: « Beauté charmante,
aimable Annin^ sur la mer écumante
S'approche de
«
Fille
ai!
«
Non loin d'ici s'élève un rocher sourcilleux
OÙ croît un arbre immense aux fruits délicieux,
C'est là que ton Armar attend sa bien -aimée
«
Viens, de ce court
«
n
;
trajet
ne
sois point alarmée. »
La crédule Dnura sans hésiter
Elle arrive
Aux
Et
:
soudain
regards de
fait
d'un
ris
Daura pousse
ma
le
fille
offre
moqueur
des cris;
Le seul écho répond
le suit.
Erath
lâche
s'enfuit,
son noir visage.
retentir le rivage.
du rocher ténébreux
à ses cris
douloureux:
Elle élevé la voix, elle appelle son frère.
Son père, son époux.
Oh
Si
Daura vous
venez, sauvez-moi de ce rocher
!
est chère.
fatal.
Sa gémissante voix vient frapper Arindal:
Il
revenoit alors d'une chasse lointaine;
Cinq dogues sur
Son
ses pas accourent
arc est détendu,
bord,
se présente à ses
Et déjà sur
le
Mon
reconnoît,
De
fils le
cent
hors d'haleine;
quand Erath ^ tout joyeux.
le
yeux.
renverse, l'entraîne.
nœuds redoublés
le lie
S'élance dans l'esquif, et, la
au tronc d'un chêne,
rame à
la
main.
S'ouvre jusqu'à sa sœur un orageux chemin.
D'OSSIAN.
Armar ea
moment
ce
143
descendoit sur
la rive;
Il
avoit de sa belle ouï la voix plaintive;
11
apperçoit
O mon
Il
mon
tombe,
Armar le
un
croit
fils, le
un
cher Arindall
trait
ravisseur...
perça ton cœur...
se débat, expire... Plein de rage
voit tomber;
se jette à la nage.
il
Et fend les flots bruyants de ses bras vigoureux.
Soudain de l'aquilon
le souffle
Retentit dans les airs, et sur
la
impétueux
mer profonde
Daiira voit son amant qui lutte contre l'onde
Elle lui tend les mains... à ses
;
yeux éperdus
L'infortuné s'abyme, et ne reparoît plus.
Seule sur
A
^on
Il
le
rocher que
tout son désespoir
ma
foudre environne
la
fille
père l'entendoit toute
la
s'abandonne;
nuit en pleurs
languit sur la rive en proie à ses douleurs
Le tonnerre grondoit;
Répandoit sur
l'éclair vif et
les flots
J'entrevoyois alors
la
un jour
tremblante
sa
Et
premier rayon vint l'offwr à
le
Pâle et sur
Ah
!
s'éteignit
le
;
rapide
pâle et livide;
Mais
voix
Daura;
enfin elle expira
ma vue
rocher tristement étendue.
depuis cette nuit, chaque fois que
Descendent en courroux sur
Chaque
fois
#e viens,
:
;
que
l'éclair
triste et
les flots
déchire
le
les
vents
mugissants.
nuage,
rêveur, m'asseoir sur
le
rivage,
144
POESIES D'OS SI AN.
Et gémir
à l'aspect
du funeste rocher:
Je vois de mes enfants
les
Ombres s'approcher
;
Elles versent des pleurs, traversent l'onde amere.
Et passent tristement sans regarder leur père.
O ma
lille!
mon fils!
ô
vous que j'appelle en vain,
N'aurez-vous point pitié du malheureux yérmin?
renommées
Tels à nos fêtes
Eclatoient dans
Selma
les
chants mélodieux.
Ces chants l'appui de nos armées
Et
Tout
Et
la
la
harpe sonore,
Au
On
et la brillante
voyoit accourir et
Mon ame
Et des
Brille
;
les chefs et les rois.
ma
langue est glacée,
siècles détruits l'image retracée
le
à
ma
voUe de
Ossian^
finis tes
Barde décrépit!
«
On
triste
la
pensée
douleur
au fond de
secrète voix crie
«
O
voix
n'a plus de chaleur,
confusément
Sous
Une
:
bruit de sa douce harmonie
Maintenant
«
nos aïeux
gloire de
alors A'Ossian célébroit le génie,
la
t'attend
:
mon ame
:
accords;
tombe
te
réclame,
au palais des morts,
r.
MORNI
L'OMBRE DE CORMAL.
Mos
P
I,
ÉA
u des boucliers , habitant des tempêtes
Toi qui lances
Contre
Dois-je
O
ton
foudre et décbaînes les vents,
Morni! du
fijs
Cesse de
La
la
Dunscar mes phalanges sont prêtes:
effacer ce roi du nombre des vivants ?
le fier
père de
De
te
l'aigle
Le chêne
sein de tes orages
bien-aimé daigne entendre
jouer sur ces
de
VArven
est ébranlé
Ton approche
la voix.
tristes rivages;
environne mes bois.
bataille sanglante
Mais
ir-i.
,
s'envole frémissante;
l'éclair luit
à la fois
dans
me charme
et
les
cieux . ...
m'épouvante.
Roi des sombres brouillards, viens-tu combler mes vœux
l'Ombre.
Quelle vois
me
réveille
au sein de
mon nuage ?
!3
r
DO S SI AN.
POESIES
146
MORN
I.
Un ennemi jaloux
Ose jusqu'en ces lieux défier mon courage.
Vaillant chef de Clora^ seconde mon courroux;
C'est celle de ton
fils.
Ordonne , tu peux
tout.
l'Ombre.
Que
Mo
R N
veux-tu?
I.
Ton
A l'heure
Dans un
du
péril qu'elle brille
fleuve de sang que, par
Des murs où tu naquis
pour moi
épée
:
;
mes mains trempée
elle écarte l'effroi.
Lorsque tous
ces héros,
Gémiront sur
l'orgueil qui les avoit conduits.
trompés parla victoire,
Je jure par ce glaive, instrument de
ma
gloire.
De le rendre au tombeau.
l'Ombre.
Prends , combats
,
et détrui
MORT
LA
D'AGANDECCA,
•RAGMENT DU POEME DE FINGAL.
Or A R N o
,
long-temps Taincu par
le
brave Fingal^
JMéditoit contre lui des projets de vengeance
Mais du roi de
Morven qui
Uu jour enfin, cédant
Il
à
(i)
:
fut jamais l'égal?
son impatience,
appelle Snivan^ vieillard dont les accords
Enflamment
les
héros d'une ardeur dévorante,
Jusqu'au palais des vents réjouissent
Et dans les
tt
champs
les
morts,
guerriers font voler l'épouvante,
Vieillard , lui dit Starno , va sur les rocs à'Arve?i
«
Que de ses noires eaux baigne la mer profonde
Va trouver de ma part cet astre de Motven^
«
Cejeaneetbeanguerrier,vainqueurdesroisdu monde.
«
Je lui donne
<t
ma
fille,
espoir de
mes vieux ans,
«
Ma fille Agandecca la première
Un azur lumineux brille dans ses
«
Son
«
,
sein a la blancheur de
mes
des belles
;
prunelles;
flots
écumants.
;
POESIES
148
«
Dis aa roi dn désert que
•
A cet
I
Qu'il vienne,
mon ame charmëe
henrenx hymen Ta devoir
accompagné de
ma
le
repos;
ses vaillants héros
M
Recevoir de mes mains
a
Elle sera le prix de ses nobles travaux.
Au
palais de
Selma
fille
le vieillard se
Fingal impatient ouvre
bien-aimée
présente
le sein
des eaux
Et son cœur, que l'amour, que
la gloire
Devance sur
<•
<*
les
mers
Enfant de
le
:
»
;
tourmente,
vol de ses vaisseaux.
l'isle solitaire,
Salut, lui dit Starno: vous qui suivez ses pas,
de vos combats
«
Illustres chefs,
«
Puissent mes fêtes vous distraire
!
o
Troisjoups vous poursuivrez les cerfs de mes forêts
*
Trois jours vous remplirez
H
Consolera Starno de ses tourments secrets.
«
la
coupe hospitalière;
Trois jours votre splendeur guerrière
Ainsi parla
le
Roi des neiges.
Et, sous les pas d'un chef si
Le
Mon père cependant
Couvert d'or
En
renommé,
lâche^alloit tendre des pièges.
ne
et d'airain
secret le
s'est
il
point désarmé
s'assied à la fête.
meurtre
s'apprête,..
:
»
;
D'O
s s
I
A
Les regards de Fingal troublent
N.
149
les assassins
:
Léclat de sa beauté, son front plein d'assurance.
Les glacent de terreur; et, loin de sa présence,
lis
vont tramer encor de
Déjà
les
sinistres desseins.
cent barpes frémissent
;
Les Bardes chantent tour-à-tour
Les héros et les morts,
les
combats
et
l'amour,
Et nos braves leur applaudissent.
Ullin alors, Ullin^
le
Barde de Selma^
Elevé cette voix tendre et mélodieuse
Dont
La
fille
si
long-temps
la
douceur nous cbarma,
de Siarno , belle et silencieuse,
L'écoutoit, célébrant les exploits paternels.
Quelques larmes brilloient sous ses longues paupières.
Elle avoit
vu
s'enfuir les
Et connoissoit , hélas
A
l'aspect de
!
hordes meurtrières,
leurs complots criminels.
Fingal une subite flamme
Avoit brûlé son jeune cœur
Elle
Pour
les
Mais
la
fit
des
vœux
:
dans son ame
jours d'un héros, son aimable vainqueur.
troisième aurore éclaire enfin la chasse
:
Le sombre roi, suivi de féroces guerriers,
Part
:
mon père le suit; et déjà, plein
n perce les noirs sangUers.
Agandecca^ soudain
se
d'audace.
présente à sa vue:
POESIES
i^;©
Le Tent frémit dans
Un effroi
Tremblante
"
M
ses
cheveux épars ;
coflvulsif se peint dans ses regards...
et
d'une voix émue
:
Fuis, aimable étranger, Starno veut ton trépas:
«
La mort t'attend dans cette forêt sombre;
«
Les ennemis environnent
Je connois
ta
valeur
Mon père, furieux,
....
appelle ses héros.
Les assassins surpris, à mille
Tombent
;
tes pas...
mais ils sont en grand nombre.
traits
en butte,
leur sang au loin fume , coule à longs flots.
Et l'immense forêt retentit de leur chute.
Starno
se réfugie
au sein de sou palais;
Ses yeux roulent sanglants sous des sourcils épais
Il
Qu'on amené,
Il
L'aimable
1
dit-il,
qu'on amené à son père
Agandecca
:
Fingal doit en
Recevoir de mes mains une épouse
si
ce jour
chère.
Agandecca^ dans le fond d'une tour,
Soupiroit loin du choc des armes.
Les ordres de Starno redoublent ses alarmes....
Elle parut
EUe
,
le sein
parut.... le
Et de
la
baigné de pleurs
pointe de sa lance
Perce ce sein d'albâtre....
Elle
;
barbare s'élance.
O
mortelles douleurs!
tomba , comme du roc sauvage
;
DO s
Tombe un
Troublent
Fingal
s
I
A
N.
flocon de neige à l'heure
le
i5r
où
calme du feuillage
De
leurs lugubres sifflements.
Un
horrible combat s'engage
et ses
amis,
comme
Dévorent de Slarno
la
Mon père entre
emporte
à
;
'
des feux vengeurs,
tribu pâlissante.
ses bras
vainqueurs
Enlevé Agandecca sanglante
Il
mille vents
Morçen son
:
corps inanimé,
Le dépose, en pleurant, dans une grotte obscure
Et chaque soir, de regrets consumé.
Vient gémir sur sa tombe où
le
zéphyr murmure.
NOTE
(i)
Quoique dans mon Discours
parlé sans
pi'éliminaire j'aie
ménagement du poème de Fingal^ je ne
disconviens pas qu'il ne s'y trouve des beautés; mais
elles
sont bien moins fréquentes que dans les autres
marche du
chants du Barde écossois.
Eu
poème
souvent interrompue par
est
désordonnée,
des épisodes et des
faits
et
général
la
absolument étrangers à
l'ac-
tion principale. J'ai cru cependant pouvoir en extraire le
min
et
chant qu'on vient de
Galvina. Ces
trois
Yivc,
Evelina^
et
Ar-
fragments m'ont paru
avoir assez d'intérêt pour être conservés dans ce recueil.
LA BATAILLE
DE
TEMORA,
POEME EN SIX CHANTS.
SUJET.
Càirhar^ roi A'Atka, avoit assassiné lâchement
jeune Corniac dans son propre palais ,
le
jeune roi,
Tons deux
armée. Fingal
la famille
chargea son
et
son
Témora^ nom du
environs de
de
de remettre
Cairbar
famille. Il attaqua
lande.
et
fit
le
Cathmor aux
palais des rois d'Irla
défaite de leur
Clommal
,,
seul rejeton
de Cormac^ au palais de Téniora^
fils
le
par sa mort,
sceptre dans sa
frère
périrent après
conduire
,
Fingal résolut de
avoit usurpé le trône de l'Irlande.
venger
et
et
Ossian de ce noble soin. On ne trouve
dans aucun poème connu de plus beau caractère que
celui de
Cathmor: son humanité,
générosité, en font
chement pour
est le seul
le
sa bravoure, sa
un héros accompli; et
soi^ atta-
lâche Caïrl/ar, son indigne frère
reproche qu'on puisse
lui faire.
CHANT PREMIER.
SOMMAIRE.
matin. Caïrbar est éloigné desou
commence au
L'action
année,
et déchiré
par ses remords.
avoit envoyé à la découverte
vée de Fingal.
conseil
,
Il
différent d'opinion.
à'Ossian
il
Lena,
la
,
pour
s'élève entre
et
Foldath
Il fait
,
,
qu'il
annoncer l'arri,
deux de
ses chefs
préparer une fête dans
députe un Barde à Oscar,
et
l'inviter à s'y
Caïrbar
un
et tient
et lui
rendre.
Oscar
fils
arrive
une dispute au
,
la
:
de
sujet
lance (\o^Oscar avoit reçue jadis du malheureux
Cormac
vient
,
et
dont
il
étoit
aux mains. L'un
de Fingal entend
cours
à! Oscar.
à son frère.
La
le
bruit
perdent
la vie.
du combat ,
Cathmor qui
nuit vient,
On
armé en ce moment.
et l'autre
en
L'armée
et vole
L'armée de Cairbar-çvenà.
va s'unir à celle de
le
Morannan
vient lui
assemble ses guerriers
où Malthos
plaine de
,
au
la fuite
se,
etAlthan raconte
à
Fingal
meurtre de Cormac.
iJ É JA
Sous
la
l'aile
mer
d'Ullin.,
du zéphyr,
et
accouroit se joindre
aux rayODS d'un jour pur,
rouloit ses flots d'azur;
POESIES D'OSSIAN.
îo6
les monts voisins brilloient d'une douce lumière:
Les chênes secouoient leur épaisse crinière.
Et l'aigle matinal planoit au haut des cieux.
Deux
coteaux, couronnés de pins audacieux
Qui balancent dans
Dominent une
Là coule un
l'air
leur tète échevelée.
étroite et riante vallée:
clair ruisseau.
Caîr/mr sur
bords,
ses
Tel qu'une ombre échappée au noir séjour des morts
Pâle, les
yeux hagards
et
chargés de tristesse,
en proie aux remords qui le rongent sans cesse.
Veille,
L'image de Cormac^ par sa main massacré,
Tout-à-coup
Le fantôme
se présente à
son œil égaré
est couvert de blessures
:
profondes
Plus foible qu'un zéphyr qui souffle sur
les
;
ondes
Sa voix d'un sourd reproche alarme l'assassin.
Et des torrents de sang jaillissent de son
Le
roi
à'Atha
Veut repousser en valu
Il agite
sein.
(i), saisi d'horreur et d'épouvante,
cette
Ombre menaçante
;
au hasard ses gigantesques bras,
Et d'une voix troublée appelle ses soldats
Leurs rangs autour de
lui se pressent, se
;
confondent,
Et les échos des bois à leurs clameurs répondent.
Là sont Clonor, Dunscar, des braves redoutés,
Et
le
jeune Hidallan
,
cher à tant de beautés.
Sous son casque de fer, Cormar^ aux
"Voile
uu
traits farouches,
front téméraire, et roule des
yeux louches.
LA BATAILLE DE TEMORA.
Le regard de Malthos
A
leurs côtés,
Foldath brandit
Homicide guerrier,
Et
le
il
iSj
est plus terrible encor.
a soif
sa lance d'or;
du carnage
dédain toujours perce dans son langage.
non moins fameux, environnent leur roi.
Quand soudain Morannan^ pâle, glacé d'effroi,
D'autres,
Des bords de l'océan accourant hors d'haleine
«
"
Eh
quoi!
Rrin et son armée attendent mon retour
le déclin du jour
«
Aussi calmes qu'un bois vers
«
Fingal est sur la côte
><
«
A peine de
:
ses pas l'œil
il
s'avance,
peut suivre
comme un
Ses héros roulent-ils
ti
Dont la course écumante ébranle
«
Leve-t-il conti'e
«
Ou
—
1
menace
!
;
la trace,
As-tu vu ce guerrier? interrompt Caîrbnr.
«
t!
n
il
Et mille bataillons lui servent de rempart.
—
"
:
eh quoil dans une oisive plaine
dit-il,
«
veut-il
Non,
que
j'ai
II est
la
«
Elle
«
Que
et
vieux; mais
pend près de
rivage?
le
lance des combats,
sa
main
gronde à
même fierté
la
!a
paix règne dans ces climats
la
vu dans
Sa voix éclate
Et
nous
torrent sauvage
les
la
l'égal
?
lance delà guerre
du tonnerre;
ans respectent sa vigueur,
fait tressaillir
son cœur.
lui cette fatale cpée
mort accompagne
et n'a
jamais trompée.
14
;
POESIES D'OSSIAN.
S8
Ossîan
(2)
de
Et ce
fils
Et
léger
le
,
si
fameux par
Morni
(3)
Connais
du
S'élèvent à côté
Fillan bande son
fils
sa
harpe
voix,
et sa
funeste à tant de rois
et l'aimable
Dermide^
vieillard intrépide.
mais quel est ce héros
are....
Dont la jeune valeur
C'est le
,
s'indigne
du repos
?
d'Ossian, Oscar; son beau visage
A l'éclat d'une étoile, ou
d'un soir sans nuage;
Ses longs cheveux, jouets des zéphyrs du matin.
Volent abandonnés à leur souffle incertain;
A chacun
de ses pas ses arnïes retentissent;
Sa cuirasse est d'or pur,
O
—
Caîrbar!
"
et des
je fuis ses regards
feux eu jaillissen
Quelle indigne terreur s'empare de
"DïtFoldalh
(4)
en courroux; enfant de
Au
tes
ruisseaux va cacher
bord de
Cet Oscar ^ que
la crainte
N'ai-je pas autrefois
Né du
, il
sens?
tes
la
mollesse,
ta foiblesse.
exagère aujourd'hui,
combattu contre
sang des héros
est brave
,
lui ?
sans doute
Mais peux-tu bien penser que Foldalh
C'est à toi, Caîrbar^ de remplir tous
le
connois
Est
an
ma
foifcle
valeur, et tu sais
rcseau que
le
si
;
redoute?
mes vœux.
Laisse-moi m'opposer à ce torrent fougueux
Tu
V.
menaçants.
ma
lance
zéphyr balance
;
LA BATAILLE DE TEMORA.
-^
ira-t-il seul
iSg
combattre l'étranger?
Répond Malthos; Foldath, ignorant le danger,
donc oublier que la mer turbulente
«
Peut-il
«
i<
Foldath
«
A
vomi sur
ces bords
une foule
vaillante,
main
«
Que
n
Du meurtre de Swaran (6),vainqueur même d'Erin?
«
Présomptueux Foldath , apprends-nous la victoire,
ses chefs ont jadis ensanglanté leur
«
Et que Malthos de loin applaudisse à
«
Je pourrois à
"
Mais
—
<
<
«
c'est
mon
au Barde seul de compter mes exploits.
Guerriers , mettez
On
craignez que
Dit
le
un terme à ces débats frivoles,
Fingal n'entende vos paroles,
sage Cathol; et, sans vous outrager,
drapeaux A^Erin accourez vous ranger;
«
Sons
"
Et que Fingal, contraint à céder
«
Pleure dans ses vieux ans
les
Comme on voit
la
la victoire,
perte de sa gloire.
Une lueur rougeâtre
la
»
au sommet du Cromla sonrcilleax
Se former lentement l'orage ténébreux
Par
ta gloire.
tour faire valoir mes droits ;
éclaire la vallée
foudre bientôt
la
:
;
roche est ébranlée;
Les esprits en courroux s'enveloppent d'éclairs,
Et sur le char des vents se heurtent dans les airs
.Ainsi le roi
B.oule
A'Atha, dans un morne
silence,
an fond de son coeur des projets de ve
:
POESIES D'OSSIAN.
i(io
«
« Qu'on prépare une fête en ces lieux.
Mes Bardes, commencez vos chants harmonieux
Dans la plaine aujourd'hui faisons régner la joie;
Demain sur l'ennemi que la mort se déploie
«
Toi , Dedgal^ prends maliarpe, et va trouver Oscar;
«
Au
Mais soudain
«
"
:
;
!
festin de
ton roi qu'il vienne prendre part
'<
Ses exploits sont connus des chefs de
«
Moi-même, je
«
Il
«
En
->
«
chéris sa haute
ose cependant, sans égard
Du
renommée
pour ma
discours insultants éclater contre
meurtre de
Demain
Cormac
il
mou
noircit
:
foi,
moi
mon
;
courage
son sang versé lavera cet outrage
Mille cris à ces
mots
;
armée;
».
s'élèvent jusqu'aux cieux.
Nous (6) cependant, surpris de ces transports joyeux,
Nous crûmes que le roi, suspendant sa colère,
Célébroit
le
retour de son généreux frère.
Tous deux doivent
leur sang
Mais combien eu vertus
L'ame de Caïrbar
étoit la nuit
Et l'ame de Cathmor^
Sous
ses
aux plus nohlesaienx;
différent tous
ils
heureuses
le
lois
deux
jour qui
brille
Atha goùtoit
au monde.
la
paix.
Sept routes conduisoient à son vaste palais
Sept tours le couronnoient
;
et les fils
,
des tempêtes, (7)
Par sept chefs introduits, prenoient place à ses
Dedgal inyhcOscar ; mou
!
profonde,
fils
fêtes.
arme son bras.
LA BATAILLE DE TEMORA.
i6r
Part^ et trois cents guerriers accompagnent ses pas.
Les dogues devant lui bondissent dans
Fingal
Il sait
suit
mon Oscar
:
que Caïrbar peut ourdir des complots,
Et tremble pour
A
la plaine.
d'une vue incertaine
les
jours du premier des héros. (8)
l'approche d'Oscrtr, les cent harpes frémissent;
Les cent Bardes A'Erin par leurs chants l'applaudissent;
Les guerriers
et les chefs
sa beauté;
admirent
Et dans leurs yeux se peint une douce gaité
C'est le rayon
mourant de
:
l'astre tacitucne
Prêt à cacher son front dans l'orage nocturne.
La lance de Cormac
A ce fatal aspect
,
Fronce ses noirs
le
brille
la
Oscar.
Ôl
harpes
se taisent.
même instant s'appaisent.
lointain entonne
le
main
sourcils"; les cent
Et les transports joyeux au
Dedgal dans
en
sombre Caïrbar
un chant de mort.
Mon fils mon cher Oscar déjà prévoit son
,
Mais de ses ennemis
il
brave
Oscar ^
«
L'orgueil de
mon palais
«
Mes aïeux la
levoient
—
«
a
Moi, répond
Dont
le
jeune
le
,
et la
mort des
guerriers.
aux combats meurtriers.
héros,
moi
te
céder
Cormac honora ma
1 Crois- tu qu'il l'ait
sort;
puissance.
cede-moi cette lance,
•<
loi dit le roi,
la
la
lance
vaillance.'
remise en de timides mains?
14.
POESIES D'OSSIAN.
i(i2
a
Que m'importent ta rage
et tes
chants assassins ?
«
Me vois-tu frissonner au bruit de ton armure?
Me crois-tu le jouet de ta lâche imposture?
«
Que
"
Je n'en suis point surpris.... Oscarest un rocher.
«
—
le foible te
Cesse,
«
fils
«
/^jrtg^a/ a-t-il
«
A-t-il
«
Fingnl^
voie et coure se cacher,
A'Ossian^ une vaine menace.
nourri ton impuissante audace?
mis dans ton cœur ces dédains orgueilleux
roi décrépit
«
Ne
Cl
Qu'il vienne; et telle
«
S'évanouir aux feux d'un
«
Tel s'évanouira
—
«
«
combattit jamais que
bientôt ton
le guerrier
timide:
on voit une vapeur humide
le débile
Si jusqu'à toi
Que
Fingal
soleil
matinal,
Fingal.
abaissoit
son courage,
Erîn deviendroit son partage!
Cormac^
respecte ce vieillard;
«
Assassin de
Cl
II est
«
Marchent avec respect
les
«
Insulte-moi plutôt
nos forces sont
On
comblé de
interrompt
Chacun
gloire
la fête,
a revêtu
?
de cent monts sourcilleux,
,
on
sous son étendard
et
nations rivales.
se levé
,
soudain
et
son armure d'airain
égales.
;
Tous fondent sur O^crtr... Pourquoi verser des larmes,
LA BATAILLE DE TEMORA.
AiuiaLle
L;'
MaU'ina? modère
destin,
tromper son
est vrai, doit
il
JMais avant
de mourir
il
i&3
tes alarmes.
donnera
effort;
mort.
la
Cent héros sous ses coups ont mordu
la
poussière:
sa pesante paupière.
Connacliar ferme au jour
Et Clochai se débat dans son sang répandu.
A ce
spectacle affreux Cairbar éperdu
Fuit derrière
un rocher
L'œil fixé sur
Le frappe;
Ciiancelle
Il se
et
;
;
et là,
brûlant de rage.
mon fils, il l'attend au passage,
mon héros, percé d'un trait mortel,
mais, plus
prompt que
Et le glaive vengeur de son corps
Mais
il
tombe lui-même
Font retentir
les airs
Fingal entend
«
I.
dit-il;
Erin
de leurs
ces cris
Peut-être loin de
Nous
;
nous
il
;
la
foudre du ciel,
du baibare.
redresse, atteint la tète
la
sépare.
et ses enfants
triomphants.
cris
pâlit,
il
soupire....
mon jeune Oscar expire,
mes héros, volons
à
son secours.
Tels qu'on voit des torrents,déchaînés dans leur cours^
Rouler avec fracas leurs ondes turbulentes
A
travers les ravins et les roches tremblantes,
Tels
on nous voit franchir
La plaine de Lena
Quel cœur,
même
se
le
mont audacieux.
découvre à nos yeux.
d'acier, eût bravé
Quel courage eût vaincu
le
ma
colère?
courage d'un père
POESIES D'OSSIAN.
164
En
proie au désespoir, de fureur enivré...?
Erin cède, tout fuit, ou tombe massacré.
Nous trouvâmes Oscar sans force, sans
haleine;
Lan^issamment couché, son cœur battoit à peine.
Nous pleurons; mais Fingal^ retenant ses sanglots,
Se penche sur
mon fils,
et
prononce
ces
«
Quelle main de nos pleurs pourroit
«
Ce bel
«
Quelle sombre douleur va régner dans
astre s'éclipse
au milieu de
mots
tarir la
sa
:
source ?
course
!
Selma!
«
Oscar ^
est-d éteint le feu qui t'anima.'
«
Fingal
restera-t-il le dernier
«
L'âge a blanchi
n
Privé de tons les
a
Dans mon
palais désert attendre le trépas?
se tait
soupirs se pressent dans sa bouche.
Il
:
les
ma
Seul à l'écart, je garde
Et
Luath
et
de sa race
.''
ma gloire s'efface
miens, me faudra-t-il, hélas
tète, et
un
silence farouche
;
!
:
Branno^ dogues reconnoissants
Poussent aux pieds fCOscar de
Quand mon
fils
apperçoit
la
hurlements.
tristes
foule gémissante.
Il
soulevé à regret sa tète languissante
«
Ce deuil , dit-il ,ces chauts qui viennent jusqu'à moi,
«
Ce mélange inconnu de tendresse et
«
Les pleurs de ces vieillards, de ces dogues fidèles
•
Font
à ce
cœcr
si fier
:
d'effroi,
des blessures eiuelles.
LA BATAILLE DE
«
TEMORA.
Osslan^ porte-moi sur mes côteanx chéris
«
Roi des concerts, élevé une tombe
«
Du
«
Entraînera
«
Et
«
Dira,
où
le sable
chasseur, sur
morne
O mon fils,
sera
elle
braveras plus
iils,
l'écits
un regard,
seul appui qu'attendoit
de
la
mer
secondés par
la gloire
ma
cI'Çs^qslX. »
ma vieillesse.
tendresse ;
les timides
poursuivras plus
D'autres
Des
épée, (9)
J^oilà le fer
L'inexorable mort t'enlève à
Tu ne
Tu ne
mon
attachant
et pensif,
fils.
un jour l'onde échappée
roc voisin, peut-être,
le
à ton
iG5
;
chevreuils;
et ses écueils;
les destins
prospères.
attendriront leurs pères
;
Seul je n'entendrai plus les accents de ta voix.
Plus douce qu'un zéphyr soupirant dans
Quatre pierres sans art,
Attristent de leur deuil
Là repose à jamais
le
et
les bois.
de mousse couvertes.
mes
collines désertes;
plus grand des guerriers.
Nous pleurâmes Oscar durant troisjours entiers.
Mais Fingal^ repoussant une longue
K
.<
Enfants des moûts,
Des regrets
dit-il,
tristesse
:
point d'indignefoiblesse;
éternels et des larmes
d'amour
«
Au
«
Nous naissons pour mourir;mais,entourésd'hommage
«
Conquérons en mourant
brave qui n'est plus ne rendent pas
le palais
le
jour.
de nuages.
POESIES D'OSSIAN.
i66
«
«
Selma le corps inanimé
Dubéros que je pleure, et que j'ai tant aimé
Ullin, porte à
;
«
Anx
..
Et qu'un voile funèbre enveloppe leurs cbarmes.
I
«
.<
filles
de
Mon'en
va demander des larmes
Nous , restons dans ces
lieux, et combattons Erin.
Mes jours, vous le savez, penchent vers leur déclin;
Mes aïeux, fatigués de me voir sur la terre,
•»
M'appellent dès long-temps au séjour du tonnerre;
a
Ma
'1
Guerriers, je touche enfin à
Tl
autour de moi répand assez
vie
se tait.
mon
d'éclat.
dernier combat.
Cependant, taciturne, voilée,
La nuit roaloit son char dans
la plaine étoilée.
On prépare la fête. An pied d'un ebène assis.
Mon père s'abandonne à ses mornes soucis.
Le vénérable Allhan
Et du jeune
«
Cormac^
o)
(i
commence un chant de gloire
Cormac nous
dit-il,
raconte l'histoire.
régnoit sur les peuples A' Erin;
comme
»
Sa jeunesse
•
Qui semé d'un or pur
«
Et baigne ses rayons dans l'onde matinale
a
J'habitois avec lui l'antique
brilloit
l'astre serein
la rive
orientale,
:
Temora;
hauteurs du mont de Slimora
«
Mais un jour des
o
Roule
et se précipite
»
Par
voix de son chef au carnage animée.
^
Cairbar
la
la conduit.
une puissante armée,
Tranquille en son palais ^
LA BATAILLE DE
moment
TEMORA.
167
Cormac^ en
ce
«
Cent Bardes
lui chantoient les exploits
u
Et,
«
Et reprend, au matin,
<>
U
«
D'homicides guerriers, poussés par la vengeance,
ic
Inondent tout-à-coup
«
comme un jeune lis
se livroit à ia paix.
qui s'ouvre à
la vie et la
de son père ;
la
lumière
fraîcheur,
sentoit à nos chants s'épanouir son cœur.
le palais
sans défense.
main,
«
Caïrl/ar, l'œil farouche, et le glaive à
"
S'élance sur Corniac, et lui perce le sein.
«
Mon jeune
ic
Adresse an meurtrier une plainte touchante.
roi chancelle, et de sa
la
voix mourante
«
Témoin de son
«
Fils
«
Va
«
Avec
«
Sois
«
Cormac^ paix à ton ombre, et mort à l'assassin.
n Le lâche Caïrbar de ma plainte murmure
à'Artho
,
trépas, et, tout haigné de pleurs
m'écriai-je, objet de
miheu des orages,
rejoindre tonpere au
toi
:
nos douleurs,
de nos cœurs emporte les hommages;
du moins consolé par
les
larmes à'Erin
;
;
m'enferme aussitôt dans une tour obscure;
it
II
«
Et cependant son bras, au meurtre accoutumé,
«
N'osa verser
«
Là
«
Mais Çathmor
M
Emn
«
Et jetant sur son frère un regard de courroux
«
Caïrifir, lui dit-il, ton cœur impitoyable
le
sang d'un Barde renommé. (11)
je chantai long- temps
arvïvA,
par mes accents
mon malheur déplorable
Ce héros secourable,
si
plaintifs et si
doux,
:
:
POESIES
i68
D O
S S
•
«
De
«
Tu promenés
'
Mais Cat/imorest ton frère;
«
Ta Lassesse obscurcit
t<
Que
«
Rends
A
I
N.
larmes et de sang est donc insatiable ;
la gloire
par-tout
ravage et
le
l'effroi
le
toi
:
flamme
mon
fond de
:
pour
comliattra
cette immortelle
alluma dans
à la liberté ce
il
Barde malheureux
ame.
:
"
Nous mourrons, Caîrbar;mais ses chants généreux,
Que le lâche dédaigne, et que le brave implore,
"
Dans
«
«
«
On
les siècles futurs retentiront encore.
détache mes
«
Nous
«
Il
allons le revoir.
accourt pour venger
Qu'il vienne, dit
Contre tous
Des braves
Il
Ma voix d'un
mon libérateur.
les
Enflammé de
le
colère,
trépas de son frère.
Fingal ; j'aime un
tel
ennemi
:
dangers son cœur est affermi ;
et des rois
vécut pour
chant flatteur
fers.
Paya l'humanité de
Cathmor
est le
modèle
;
la gloire, et lui sera fidèle.
La nuit sur nous encore étend son
Des hauteurs du
Mora rien ne
voile épais
trouble
la
paix
;
:
Craignons que l'ennemi ne vienne nous surprendre.
Sur
O
le
penchant du mont bâte-toi de descendre,
Fillan^ à
mon
fils, veille
Et du premier péril donne
Songe que
la vieillesse
jusqu'au matin,
un
signal certain.
affoibUt
mon audace,
Et que tu dois veiller à l'honneur de
ta race.
LA BATAILLE DE TEMORA.
Il dit:
Fillan s'éloigne,
Sous de sombres sapins
Moi
seul, le
veille, et
169
nos mille héros
se livrent
Mon père au doux sommeil
Je
et
au repos
;
s'abandonne lui-même:
cœur rempli d'un désespoir extrême.
de Fillan^ au bas du mont allier.
J'entends de loin en loin frémir le bouclier.
CHANT DEUXIEME.
SOMMAIRE.
Ossian
l'Ombre de Tremnor,
s'adresse à
recevoir son
fils
Oscar dans
le bruit ile
Cathmor qui
son frère
qui vcilloit sur
,
et la prie
le palais aérien. Il
s'avance.
Il
de
entend
va trouver /''///an,
la colline
,
et
y allume un
grand feu.
Cathmor
l'armée de
Fingal réprimande sévèrement Foldath
,
trop généreux pour surprendre
,
qui avoit conseillé l'attaque de nuit. Les chefs de l'armée
à'Eri'n se livrent au sommeil. Mais Catfirnor veille
encore. Ossian
lui qu'il fera
(le
le
rencontre
,
tant
celle
une hymne au
;
il
la
lui
RF.MNOR,
le
ordonne de chautci
roi des héros, père des tourbillons, (i)
l'éclair
en tortueux sillons,
ouvrir
les
Des Bardes décédés rassemble
les
palais
Que
tombeau
trouve
montagne en chan-
de Caïrbar.
Toi qui roules
Du
soleil
obtient de
le
Cathmor,
Caïrbar. Ossian , en quittant
Barde Carril qui descendoit de
1
Cathmor
et
chanter l'hymne fuiiebre sur
orageux
fais
cent portes:
cohortes;
leurs chants solemnels arrivent jnsqu':i
moi
LA BATAILLE DE TEMORA.
In
monte point vers
guerrier inconnu ne
C'est
O mon fils,
Oscar:
Toile ses
traits
toi
171
;
quelle pâleur soudaine
charmants que Morven
vit à peine
I
Ton
père, loin de toi, pleure en ces froids déserts....
Mais
les
vents courroucés t'emportent dans les
aii.s.
Ûssian, pourquoi donc ce funèbre nuage
Qui pesé sur ton ame
Songe au
Ne levé
roi
de
et glace
Mon'en:
qu'à regret
la
il
ton courage.*"
est seul, et
son bras
lance des combats...
voit tous ses enfants s'éteindre à leur aurore....
Il
Mais, non...
me levé
Je
Ne
il
n'est pas seul...
à ces
mots,
Ossian
et j'écoute
:
vit encore.
nul bruit
m'arrive à travers le calme de la nuit.
Inquiet ponr Fillan^ troublé de son silence,
Du sommet du Mora^ furieux, je m'élance.
A la pâle clarté des astres incertains
.Te vois mon frère... Un glaive arme ses jeunes
m'entend,
«
l'ils
«
D'un héros de Morven
«
Quel
—
.<
<-
de
la
et bientôt,
Nuit,
dit-il,
A'aillant fils de
C'est
aux
seuls
:
(2,
dont l'audace impuissante
affronte le courroux,
t'amène et
fol espoir
mains:
d'une voix menaçante
I]
Clatho
te livre à
mes coups ?
(3), méconnois-tu
ennemis que tu dois
ton frère?
ta colère.
POESIES DOSSIAN.
172
«
Hélas!
la
solitude (4) environne Fingal:
«
Les ans de son repos ont donné
«
Ce
«
C'est à
—
«
ic
«
«
vieillard
le
signal;
généreux compte sur notre
nous de
O mon frère
zèle
:
servir la cause paternelle.
à
,
mon
Le Barde consacroit
âge Oscar étoit fameux.
ses exploits belliqueux
Et moi, foible guerrier, moi, perdu dans
la
;
foule,
Obscur comme un ruisseau qui dans l'ombre s'écoule
d'un héros, par mes
<>
Frère et
u
Je n'ai point de
—
«
Va,
iîls
mon
faits éclatants
père honoré les vieux ans.
tu n'as pas besoin de prouver ton courage.
u
Mais pourquoi
«
Pourquoi du
me
nom
tenir ce sinistre langage
d'Oscar accabler
.>*
ma douleur.'
u
Ah
«
Entends-tu danslesbois de sourds et longs murmures
«
Le
cliquetis des fers, et le
Il
La
bataille s'ébranle, et s'avance
Je
!
plutôt excitons notre oisive valeur
me penche
à ces
Cathmor, qui
choc des armures
;
:
à sa clarté soudaine
s'avançoit, s'arrête dans
ressemble au torrent que
Suspendent dans
les airs
Fuldath
de
est près
.^
en grondant.
mots ma main d'un cliêne ardent
Attise encor la flamme
Il
:
les
la
plaine.
noirs aquilons
en chaînes de glaçons.
lui: plein
d'une aveugle rage,
,
LA BATAILLE DE TEMORA.
Et, brûlant de hâter
le
Cathmor ce
II
adresse à
«
Frère de Cairbar^
la
173
moment du carnage
féroce discours
:
nuit presse son cours
«
Le superbe étranger repose sans défense;
«
A la faveur de l'ombre, et sur-tout
du
;
silence,
«
Laisse-nous pénétrer dans ces rangs endormis,
«
Et ce glaive, baigné du sang des ennemis....
«
Quoi!
«
Les guerriers de Morven sont-ils en si grand nombre
«
Un
«
i^i'ra^fl/
«
Il
«
Qu'environnent
»
Demain je combattrai
—
«
lui
répond Crt//iwor, veux-tu frapper dans l'ombre.?
héros doit combattre
d'ailleurs,
veiUe sur
Fils de
f*'«§«/ n'a point fermé ses yeux;
mont comme un aigle
le
les
rapide
vents sur son rocber aride.
suivi de
Bobar Ditthul^ ne
mes
tribus.
te souvient-il
«
Que Foldath compagnon
«
"Vit
«
Mais C«?r^«r m'aima, d'une étroite amitié
,
toujours
«
A
«
Hélas
j'ai
vu tomber
son audace
mon cœur
ce roi
plus
des héros de ta race
le soleil éclairer
son cœur belliqueux
!
.'
des cieux.
à la clarté
si
étoit
lié.
redoutable
languit près de nous, étendu sur
le
.?
;
sable,
a
II
>
Et des pleurs, cependant, n'ont point baigné son corps
«
On n'a point
«
Nul Barde
de
la
harpe entendu
n'a chanté
les
accords ;
son départ delà vie;
;
POESIES D'OSSIAN.
174
«
Et Foldaih laisseroit au gré de son envie
«
Se reposer dans l'ombre un barbare vainqueur
«
A son
«
Entouré de
«
Et lui-même
«
Sans que l'hymne du Barde éternise leur nom.
roi décrépit je percerai le
ses
lils il
mordra
la
!...
cœur;
poussière;
et ses fils quitteront la
lumière,
—
«
« Présomptueux guerrier, l'esperes-tu? Non, non;
Le père A'OssianJxe peut mourir sans gloire.
<c
Les Bardes, malgré toi, béniront sa mémoire.
><
Et leurs chants de triomphe à ses vertus offerts
ame
errante dans les airs.
<c
Réjouiront son
«
Foldath , à ton trépas ,
«
Mais pourquoi dans mon cœur réveiller la vengeance ?
i<
Puis-je oublier
-
Se mouillèrent souvent de pleurs délicieux,
.<
Quand, vainqueur fortuné, du milieu des batailles,
.1
Je regagnois
Tl dit
:
à'
crains plutôt leur silence....
mon freie ?
Atha
les
il
m'aimoit
:
et ses
yeux
antiques murailles.
mais chaque chef dans
la
plaine étendu
Se livre au doux sommeil sur ses yeux descendu.
Des
étoiles
du
soir les clartés vacillantes
Font au loin resplendir
Mais
les
L'Ombre de Caîrbar,
De
les
armures brillantes
yeux de Cathmor ve&lenX. encore
errante en ces déserts,
soupirs douloureux afflige son oreille
;
ouvci-ts.
:
LA BATAILLE DE TEMORA.
175
Inquiet, à travers la foule qui sommeille,
Il
s'égare,
eu frappant son large bouclier.
Ce bruit vient jusqu'à nous
•<
:
«
Invincible guerrier,
Dis-je au jeune Fillan (5), reste dans ce passage.
«
Je vais à l'étranger opposer
«
Mon frère, si je
mon
meurs, cours
courage.
éveiller
Qu'il songe à sa mémoire, et punisse
Je francbis
Se soufflent
L'airain
Si
mon
torrent
le
deux
Pareils à
au
Catlimor
:
esprits qui,
la
tempête
oeil,
s'offre à
rival.
ma vue
;
penchés sur leur nue,
et les
même instant
Fingal;
un
vents en courroux.
eût gémi sous nos coups,
égaré dans d'épaisses ténèbres,
N'eût reconnu Catlimor à ses armes célèbres,
A
son casque ombragé par un panache d'or.
D'où
l'aigle,
vers les cieux, semble prendre l'essor.
«
Est-ce le roi à'Eriji qui m'apparoît dans l'ombre
«
M'écriai -je
«
Ossian de
;
ta
mort
peut-il s'enorgueillir
A ces mots, à ce nom, je
Et,
"<
?
étranger, que ton aspect est sombre
me tendant la main
:
«
le
» ?
!
(6)
vois tressaillir;
Roi des chants mémorables
Qui promets au héros des triomphes durables,
«
Chef des Bardes vantés , je bénis
«
Sais-tu
«
Charmé de
combien de
tes
fois
,
le destin.
dans son palais lointain,
vertus et de
ta
bienfaisance,
POESIES D'OSSIAN.
176
«
Catkniork
«
Mais, avant de combattre, attendons qu'à nos yeux
ses
banquets désira
ta
présence?
«
Brille
du jour naissant un rayon lumineux,
«
Et
guerriers futurs remarqueront la place
les
«
Où jadis nous
«
Tremblants
«
Ainsi, l'aspect des lieux par les ombres peuplés
,
aurons signalé notre atidace;
ils
songeront aux
«
Dans l'ame du chasseur, muet
«
Yerse un
—
effroi
et solitaire
mêlé d'un cbarme involontaire.
Oui, dans ces mêmes lieux
«
siècles écoulés.
les fils
Des antiques combats viendront
«
de l'avenir
s'entretenir:
K
Cette piei're grisâtre à leurs regards offerte,
a
Par
•<
Leur
les siècles noircie, et
dira
Ossian
.<
et
,
de mousse couverte,
qu'autrefois, dans ce climat lointain
Cathmor
se
donnèrent
la main...
— Nous quitterons
«
Mais pourquoi me fuis-tu ?
"
Et, promis l'un et l'autre au palais du tonnerre,
«
Des accords belliqueux y conduiront nos pas.
Ossian , j'eus un frère... il ne nous suivra pas;
«
son partage,
la terre
et ce guerrier célèbre
u
La honte
«
Erre autour de ces bois, prive du chant funèbre.
—
«
est
Rassure-toi,
Cathmor
(7)
.•
à
l'ennemi vaincu
u
La haine A'Ossian n'a jamais survécu;
*
L'Ombre de Caïrbar entendra
ses
louanges.
;
LA BATAILLE DE TEMORA.
«
Cûtkmor pousse un
11
177
Et joindra dans les airs les mobiles phalanges.
brilloit
dans
Comme un
la
soupir, et s'éloigne à l'instant.
nuit, sous l'acier éclatant.
pâle fantôme à travers la fougère
Le voyageur, perdu sur
L'apperçoit, prend
Du
la
:
rive étrangère,
la fuite, et,
caché dans
les
bois,
spectre solitaire entend la foible voix.
Mais qui vient tout-à-coup du sein de
Son regard
Sur
»
la
Et des
naissante aurore
la vallée
i'
démarche troublée;
est pensif, sa
il
attache les yeux.
de rosée humectent ses cheveux.
flots
C'est le Barde Carril ; sa voix mélodieuse
Entonne du matin l'hymne
i<
A l'aspect
du
soleil les
religieuse.
ténèbres ont fui. (8)
épouvantés reculent devant
«
Les
«
Héros du firmament,
flots
les étoiles
voix sous
lui
:
honteuses
mers écumeuses
«
Se cachent à
a
Dans
a
«
Que j'aime, roi du jour, ton éclat effrayant
Quand ton disque, couvert de vapeurs enflammées,
«
Dans
«
Ou
ta
main
les
sur
ta
étincelle
champs de
les
la
un
les
glaive flamboyant
mort roule sur
monts déserts amasse
les
;
:
armées,
les brouillards!
doux rayons enchantent mes regards
«
Mais que
tt
Quand, vainqueur, tu jaillis du sein des noirs orages,
tes
LA BATAILLE DE TEMORA.
17»
«
Et que tes cheveux d'or flottent sur les nuages
!
«
Le chasseur consolé, sur
M
Poursuit
«
O
«
Soleil, dois-tu sans cesse éclairer le carnage?
«
Barde,dis-jeà Cwatz'/, tes accords sont touchants
a
Mais cejour qui nous luit n'est point propice aux chants
c>
La
«
toi
le cerf
dont
le
gazon naissant
rapide et le daim bondissant.
les bienfaits s'accroissent d'âge
bataille et la
Debout sur
mort environnent mon père
la colline,
s'apprête au combat, et ses
yeux
t
II
Comptent les flots guerriers dans
•'
Au
«
Sous
"
Une tombe, ô
"
Là , du sommeil sans
«
C'est le frère d'un roi digne de nos
les
:
enflammé de colère,
"
sein de ce
en âge,
la
vigilants
plaine roulants.
vaUon qu'arrose une onde pure,
rameaux
flétris
d'un chêne sans verdure,
Carril^ se présente à tes yeux.
fin dort
un chef belliqueux
;
hommages.
«
Son ombre
«
Ouvre-lui
a
Et qu'on n'entende plus ses douloureux soupirs.
désolée attriste ces rivages
le palais,
;
objet de ses désirs,
(9)
CHANT TROISIEME.
SOMMAIRE.
Aussitôt que le joiirparoît, i^/>/g'a/ harangue sou armée,
commandement
et
en remet
11
se retire avec
le
cliamp de
Ossian sur
bataille.
Gaul donne
la
à
Gaul
Mora
le
,
fils
àeMorni.
qui dominoit
Tullamin
à
et à d'autres chefs
moins considérables.
Cathmor
gai, avoit donné
commandement de son armée
le
:
traite; i^'/Wg'a/
Sulmala
suivre
côté
,
,
qui
,
pleure
s'est
Cathmor
renouvelle
la
la
le
,
à l'exemple
,
fait
cor de Fingal sonne
à la guerre.
La
férocité de
querelle qui s'étoit élevée entre
son autorité
d'une manière obscure
Discours de
uR
Pans
les
sa
la re-
mort de Connal. Episode de
armée. L'ombre de son frère Caïrbar
Sulmala
à
plusieurs actions
,
Foldath
Malthos
et fait cesser la
va se reposer à quelque distance de son
Il
lui prédit
de Fin,'
déguisée en jeune guerrier pour
et lui. Ca//"rao/' interpose
dispute.
le
Description de Taction générale
mort
Foldath qui de son
d'éclat. La nuit survient
Î5
,
:
Cathmor
:
il
monologue de
lui
l'issue
découvre
le
apparoît, et
de
la
guerre.
déguisement 4e
cette belle étrangère.
bords du Lnbar quel
est
doac
ce héros
nerveuse main brillent deux javelots;
?
POESIES D'OSSIAN.
i8o
C'est le roi de
Debout,
tel
Son armure
«
Alorçen;
l'âge a blanchi sa tète.
qu'un rocher qui brave
étincelle
tempête
la
aux feux purs du matin.
Mes guerriers, levez- vous!., des bataillons iVJ£ri?t
champs de Lena l'étendard
«
Sur
«
Dans l'ame de Fingal luit un rayon de joie
«
J'aime que l'ennemi soit
«
Si la
ti
Dans
«
Mais, parmi tant de chefs connus de
les
mort me
la
saisit
se déploie.
nombreux
;
et puissant.
de son bras menaçant,
tombe du moius j'emportei'ai ma
gloire
:
la victoire,
«
Lequel doit en ce jour vous conduire aux combats ?
«
Fingal^ vous
le
«
Ce
btiller
fer
ne doit
savez, ne peut guider vos pas
qu'en un péril extrême,
mes aïeux
volonté suprême
;
(i)
«
Telle est de
«
Instruit par leur exemple et soumis à leurs lois,
«
Fingal n'enfreindra point
la
la
coutume des
:
rois. »
Tous les chefs, à ces mots, se penchent vers mou père
Tous briguent en
Tous vantent
secret
une faveur
si
leurs exploits... Le seul
fils
de
Gaiil, demeure à l'écart; muet et recueilli,
ïl
repasse en son
cœur
;
chère;
ses actions vaillantes,
Et contemple l'acier de ses armes brillantes.
Trois fois, de ces héros audacieux rival,
Fillan voulut parler au sévère Fingal;
Morni.
LA BATAILLE DE TEMORA.
Sur
Trompa
Il
i3i
ses lèvres trois fois la parole arrêtée
le
vœu
ne pouvoit
secret de son
citer
ame
agitée;
nul combat glorieux.
Accablé de douleur, morne, silencieux,
Il
s'éloigne à grands pas, sur les Hots solitaires
Se penche, et sent couler des pleurs involontaires
Quelquefois de sa lance
Ou
fait
effleure les
:
eaux.
voler an loin la tête des roseaux.
Son généreux dépit,
Attendrissent
De son
il
mon
qui l'enflamme,
le zèle
père et pénètrent son
bien-aimé Fingal voit
fils
les
ame
;
douleurs,
Et sous ses cheveux blancs nous cache quelques pleurs;
Mais, détournant
de
les
yeux
:
«
Rocher indestructible,
Morni^ dont
bras invincible
«
"Vaillant
«
Promené
«
Va, guide
«
Le
«
Et ton ame
«
Obéis avec joie à ce chef redouté,
«
Fillan;
il
«
Vois ce
fer
fils
la
le
terreur sur les rangs ennemis,
ces héros à
mes ordres soumis
glaive entre tes mains est l'égal
tressaille à la
est
couvert de
voix de
Vous
Il
Que mon
guerre.
mon autorité
qu'au retour ton père
Ossian, près de moi, reste sur
<i
la
:
du tonnerre,
:
te destine.
la colline.
tous, de vos aïeux gardez
le
souvenir:
dernier combat étonne l'avenir.
Les enfants de
Morven pressent
•>
leurs pas rapides
iG
:
POESIES D'OSSIAN.
i82
Un
Ils
noble espoir se peint sur leurs fronts intrépides;
marchent, plusnombreux que les sables mouvants,
Ou les
roseaux d'automne agités par
De son
Cathmor conduisoit
côté
Cent Bardes réunis entonuoient
Mais quand
il
vit
Fùigal sur
Son indomtable cœur
s'enfla
le
les vents.
ses
phalanges
;
ses louanges.
roc du chevreuil,
d'un noble orgueil
:
Hé quoi! dit-il, Cathmor combattroit en personne
Quand le roi de Mon<en au repos s'abandonne!
«
«
a
VaillantchefdeA/or««(2), conduis mes bataillons,
«
Et sois pour eux un astre aux propices rayons.
Il
se tait; et
»
Foldath, comme un sombre nuage
Qui porte dans
ses flancs les esprits de l'orage.
S'avance furieux, et voit autour de lui
Se presser
les tribus
dont
il
devient l'appui.
Sa longue chevelure, en flammes ondoyante,
Semble rouge de sang: d'une voix foudroyante
Magnanime
Il
appelle Collan:
«
•
Au bas du mont
serpente
Que
cache, et que
!«
t
ta tribu s'y
Elle-même
Bardes
«
i
«
<
,
se livre
guerrier,
un tortueux
aux coups de ton
épée.
que nul de vous n'ose élever
Des amis de Fingal oubliez
sentier;
Morven trompée
voix
sa
les exploits
!
:
Je veux qu'autour des lacs , marécageux et sombres,
Ceintes d'un noir brouillard, errent leurs pâles ombres;
LA BATAILLE DE TEMORA.
Et que
<
Ecoute en frissonnant leurs
Il
a dit
le
Collan^ que
et
;
S'enfonce dans
Mais Gaitl
"
Tu
le
les rocs
troupe accompagne.
sa
qui bordent
yeux
suit des
stériles regrets. «
;
la
montagne:
appelle Fillan
il
:
...
vois quel lâche espoir ose nourrir Collan
Mon héros
«
iS'
-voyageur, perdu dans les forêts,
"
va combattre et vaincre
Gaul ne peut
s'éloigner des phalanges qu'il guide.
Déjà
la
mort frémit,
Vole
et
pleut en sifflant une grêle de dards.
Fingal de
déjà de toutes parts
ses guerriers
admire
mont opposé Cathmor
Et du
:
le perfide;
le
courage ;
suit le carnage.
Ainsi quand deux esprits, errants au sein des airs.
Ont vomi
Quand
les
la
tempête
et
soulevé les mers.
vagues en feu, de l'abyme élancées,
Retombent
à grand bruit et roulent entassées.
Tranquilles, au-dessus et des vents et des flots,
Sur leur char nébuleux
ils
goûtent
Mais quel rayon soudain vient
C'est le fer de
Morni (3) ;
le repos.
briller à
ma
vue.^
d'une atteinte imprévue
Gaul a déjà frappé les bataillons à'Enn.
Tu meurs dans ton printemps, ô jeune Tiillamin!
Hélas
!
si
loin de toi ton épouse chérie
Sommeille au bruit des eaux de
la
verte prairie,
POESIES D'OSSIAN.
ï84
Et, dans le songe hcnreux qui vient
Entre ses bras dalbâtre
la
caresser,
elle croit te presser....
Ne te réveille pas, épouse infortunée!
Ton époux accomplit sa triste destinée
Tu ne l'entendras plus, noble enfant des
Des accords de
Tu ne
le
sa
harpe attendrir
concerts
tes déserts;
verras plus, au retour des conquêtes.
S'asseoir auprès de toi dans la salle des fêtes.
Foldalh de son côté
Du
se
malheureux Connal
baigne dans
sa
sang ,
le
main perce
le flanc.
Ami des étrangers, voici ta dernière heure;
Tu roules dans le fond de l'étroite demeure.
Connais paix
Quel
à
ton Ombre! au sein de ton palais
silence et quel deuil
vont régner désormais!
Jadis le voyageur, fatigué, hors d'haleine,
Venoit
s'y
reposer de sa course lointaine
:
Près d'un chêne enflammé tranquillement assis,
Son ame par degrés
Il
se réjouissoit
De
la bise
Et,
du banquet des
A la
écartoit les soucis
au funèbre
;
murmure
des nuits, sifflant sur
la
verdure
;
rois partageant la faveur,
reconnoissance abandonnoit son cœur.
Plus d'asyle pour lui: Connais hélas! succombe.
Et
le
torrent
Ganl
a
bourbeux va rugir sur
vu son
Un invisible
trépas... Il s'élance...
trait
sa
tombe.
soudain
ensanslante sa main.
BATAILLE DE TEMORA.
LA
La fureur de Morven
à cet aspect redouble
Pressé de toutes parts, Voldath
Peut-être
Sur
le
il
alloit fuir;
champ de
Les accents de
Tous
On
le
tribus de
loin se font entendre
carnage, et
le
cor de Fingal
Mon'en donne un même
la fête,
la forêt
on
s'assied
;
signal.
voisine
la colline:
et le roi
Après de longs soupirs qui nous glacent
«
Qu'est devenu Connal, l'ami de
«
Dont
u
Je ne l'apperçois
«
Mais avant de tomber
le glaive
:
voix s'empressent de se rendre.
S'allument à l'instant au haut de
prépare
se trouble;
étend un crêpe noir.
bataille
Cent chênes abattus dans
On
même
retour du soir
le
Cathmor au
les chefs à sa
suspend
Aux
mais
i8S
:
vengeur
pas...
brilla
d'effroi:
mon enfance,
pour ma défense ?
sans doute,
mon héros
il
vécu
a
:
a vaincu.
^
Bardes , creusez sa tombe, et que des chants funebre«
«
Accompagnent son ame
ic
Elevé dans
la
«
Que
•<
Rends l'Ombre de
«
Et pleure tous
la
à travers les ténèbres.
nuit ta consolante voix;
harpe, ô Carril^ frémisse sous tes doigts
Co/z/zfl/ à
les chefs
Le vieux Barde obéit
à des ordres
Et du chant des tombeaux
Mais Filin n vient
s'offrir
;
jamais fortunée,
morts dans cette journée,
il
si
chers
attriste les airs.
aux regards de
mon pore;
i6.
«
POESIES D'OSSIAN.
i86
A ses traits
belliqueux, à sa démarche altiere,
Le grand cœur de Fingalhat de joie
Tel que du haut des cieux sourit
Quand
l'arhre,
Sur
le lac
Tel
mon
i<
De
«
Lui
c<
Pour
«
M
tes
dont
ses
et
d'amour.
du jour
l'astre
feux ont hâté
le feuillage.
du vallon verse un naissant ombrage
père sourit à son
jeunes exploits
dit-il
fils
mon amour
mes aïeux répondent
;
;
bien-aimé.
à
est
charmé,
ma joie
:
comme eux tu suis la même voie.
La prudence, mon fils, doit conduire tes pas
Ne fuis point les dangers, mais ne les cherche pas.
l'illustrer
:
Comme on voit au-dessus
des vagues d'Inistorc (4)
Les nuages rouler autour du météore
Dont
la
flamme
Ainsi près de
Non
La
Dans
roulent ses bataillons
loin de lui, timide et les
belle
Fille
brillante éclaire leurs flocons.
Calhmor
Suhnala
veille
yeux
:
pleins de larmes,
au sein des alarmes;
aimable des rois, son jeune et tendre cœur
le vaillant
Du palais
de
Cnthmor a trouvé son vainqueur.
Lnmon par sa
flamme arrachée.
Déjà, depuis trois jours, sous ses armes cachée,
A l'insn
du héros, par-tout
Tandis que,
Sous
le toit
Debout
solitaire,
paternel
il
efle le suit
an milieu de
la
:
nuit
croit qu'elle respire,
à ses côtés elle veille, et soupire.
LA
BATAILLE DE TEMORA.
Oui, Cathmor^
le voilà cet
Mais un casque jaloux
Auprès du
le
187
objet de les feux;
dérobe
à tes
roi d'Erin (5) le vieux
yeux.
Fonar
s'avance
:
'
Les ténèbres, dit-U, ramènent
«
Les âmes des guerriers sollicitent des chants
«
Cathmor^ occupons-nous de ces devoirs touchants;
le
silence,
:
«
Ordonne que
«
Commence pour
«
Qu'ils restent dans l'oubli, dit le sombre Foldath,
la
harpe au loin retentissante
les
morts l'hymne compatissante.
perdu
combat
«
Qu'ils restent dans l'oubli
«
Ma
«
Le sang que j'ai versé fume encor dans
«
Mais de foibles guerriers accompagnoient mes
«
Abandonne, Fonar^
;
j'ai
valeur cependant n'a point trahi
le
ma
la
plaine;
pas...
ces belliqueux climats.
«
A la
K
Va, cours
"
Foldnth auprès de
"
Roi du puissant Erin , interrompit Malthos^
vierge timide et de fleurs couronnée
faire
applaudir
lui
ta
voix efféminée.
ne veut que des héros.
8
Arbitre de nos jours et de nos
«
Dans
«
De
renommées
leur sang confondu tu roules les armées
tes
rayons sereins nos yeux sont éblouis
a
Les braves devant
«
Et, du sein des combats ramené par
«
Qui
toi se
sont évanouis
:
haine,
;
;
la gloire,.
t'entendit jamais parler de fa victoire
?
;
POESIES DOSSIAN.
i88
«
M<iis le guerrier farouche,
'<
S'applaudit hautement
«
Sourit au
nom
au carnage exercé,
du sang
qu'il a versé,
de mort, et contemple avec joie
succombe
et
Le
«
Folclath a
«
Mais il est d'autres chefs non moins vaillants que lui
Et
1
Ijrave qui
si
Morven
en proie.
valeur aujourd'hui
:
;
sur eux obtint quelque avantage,
Qu'il accuse le
"
à ses douleurs
fait briller sa
nombre
et
non pas
le
courage.
»
Les deux chefs à ces mots agitent leurs poignards,
Et se lancent déjà d'homicides regards.
Cathmor^
le glaive
Téméraires,
a
en main, s'élance,
dit-il,
ne troublez point
et les arrête
ma
:
fête;
ic
Retirez-vous dansrombre,ou craignez que mon bras
"
Ne mette
enfin
un terme
à ces
Les chefs intimidés dans
Cependant des guerriers
Et
le
sommeil
les
Le seul CatJnnor
rend
les
honteux débats.
nuit disparoisseut.
la
paupières s'affaissent.
songes chéris.
à leurs
veilloit: à ses regards surpris
Un fantôme apparoit... Hélas c'étoit son frère
Du miheu de sa nue inconstante et légère
!
Il
semble
Que
;
lui sourire, et ses foibles accents
Arrivent jusqu'à lui sur
.1
»
la joie,
les ailes
des vents
:
ô Calhmor ^ t'accompagne sans cesse
!
LA BATAILLE DE TEMORA.
«
L'hymne augnste du Barde
a
calmé
ma
i8y
tristesse;
«
A tes pieux
n
Et
«
Léna-^ quels sons plaintifs tes déserts font entendre
<!
Fils de Tl/ori'é'rt... quel
«
"
désirs
Ossian
s'est
rendu
,
des morts ne m'est plus défendu...
le palais
?
sang brùler.-vous de répandre?
Vous frappez... ô douleur!., ô regrets superflus!..
Cnthmor^ hélas Cathmor bientôt ne sera plus'.
!
L'Ombre
mots,
fuit à ces
et le front
du vieux chêne
Se balance ébranlé par sa fuite soudaine.
Cathmor
lance
saisit sa
;
à pas précipités
Il
marche,
n
C'étoit de
"
Enfant des tourbillons, dans
«
Crois-tu verser
«
D'un héros
«
Cathmor
et jette
au loin
ses regards irrités...
Caïrbarla voix accoutumée
le
trouble et détourner les pas
d'un roi formé pour
et
doit
:
mon ame alarmée,
donc
périr... d;ins
les
combats.'
sou dernier asyle
donc descendre. ..Ombre informe et débile,
«
Crtr/(7«o/- va
«
Qui t'apprend
«
Fais, coule dans
K
Et ne
«
La gloireest tout pour moi combattre est mon partage.
«
Inutile à
«
Le lâche seul
a
Et
me
à régler le destin
la
lasse plus
des mortels.''
moments étemels,
paix
tes
d'un
sinistre présage.
;
,
lui-même, étranger aux exploits,
quand
la
vieillit
au milieu de ses bois,
mort descend sur
sa tête blanchie.
POESIES
iQo
<t
Son OmLre du Légo
D'OSSIAlSf.
(6)
ne peut être affranchie.
«
Elle erre tristement sur les flots paresseux,
«
Et ne monte jamais au séjour nébuleux.
Ainsi parla
CaUimor dans
Mais déjà l'Ombre
»
sa noble colère
;
fuit, et l'horizon s'éclaire:
Le chef d'^;/i« contemple avec étounement
Ses guerriers au sommeil livrés tranquillement
Tel qu'un esprit du
ciel
qui plane sur
les
:
ondes,
Qui voit les vents captifs dans leurs grottes profondes,
Inquiet et jaloux
du
silence des flots,
Commande aux aquilons
de troubler leur repos
Tel Cathmor^ appelant ses phalanges guerrières,
Repousse
le
Sous un
Aux
sommeil qui ferme leurs paupières.
feuillage épais l'amante de
Calhmor
charmes du repos s'abandonnoit encor;
Mille songes heureux, égayant sa pensée,
La reportoient aux jours dune gloire passée.
L'aimable
Sulmala
revoit ses verds coteaux,
Ses rocs silencieux, ses bondissantes eaux,
Le
palais de
Lumon
,
et ses
Précipitant leurs pas au
jeunes compagnes
sommet
des montagnes.
Et d'un père chéri tous les chefs valeureux
Contemplant
sa beauté
d'un regard amoureux.
Le destin de Cathmor
Sous son déguisement
il
le
conduit auprès
reconnoît sa belle;
d'elle
:
LA BATAILLE DE TEMORA.
Il
donx
voit ce
Du
consume immortels
feu qui le
Que
doit-il faire? hélas!
Cathmor
Et s'éloigne...
191
souris, ce front, ces traits charmants
il
aliments.
verse quelques larmes,
(7), dissipe tes alarmes:
Redoutable ennemi, ce n'est point en ce jour
Qu'un héros
tel
La guerre sous
que
tes
toi
peut écouter l'amour;
pas furieuse, sanglante.
Roule comme
les flots
Rientôt
à'Atlia frappe son bouclier:
le roi
A ce bruit imprévu
Sulmala
d'une mer turbulente.
frémit chaque guerrier.
se réveille; et faible, pâlissante,
Couvre d'un casque lourd
Elle tremble
sa tète languissante
:
en songeant qu'un regard indiscret
Peut-être au jour naissant a surpris son secret;
Timide,
elle s'enfuit
Et là, seule, à
A
l'abri
au fond de
la vallée;
d'une roche isolée,
travers les soupirs, les pleurs et les sanglots.
Sa gémissante voix laisse échapper ces mots
:
«
Le songe du bonheur
«
Des yeux de Sulmala des pleurs coulent encore
«
Mon amour, je
»
La robe de
c
De nos
;i
Peuvent ravir une ame
la
s'enfuit avec l'aurore;
t'appelle, et tu ne reviens pasi
guerre embarrasse tes pas
pères, dit-on, les
Ombres
à ses
maux
:
secourables
déplorables.
:
192
LA BATAILLE DE TEMORA.
faut
que
mon liéros périsse
<t
S'il
<<
Viens emporter
u
O mon
<«
S'égare avec
la
mienne au
père, et qu'au moins
Cathmor dans
sous mes yeux,
palais
ta fille
lumineux,
consolée
la plaine étoilée. »
CHANT QUATRIEME.
SOMMAIRE.
Ossian, après une courte invocation à
le
de valeur de Fillan;
il
voyant ce héros expirant
ses secours.
lais, et
mor,
line
,
tue
oublie sa liaLue
,
,
et lui offre
L'ame de Foldath s'envole dans son pa-
va s'offrir aux regards de sa
Nina. Cath-
fille
qui a vu tomber Foldath, descend de
raUie son armée
,
recommence
le
combat
taque Fillan avant l'arrivée A'Ossian
envoyoit au secours de son frère.
Ossian
combat.
et
harpe, décrit
sa
du Lubar. Prodiges
Foldath. Malthos, en
cojnbat qui a lieu sur les rives
Fillan
à
arrive
s'étoient battus
:
La
l'endroit
il
,
la col-
et at-
,
que Fingal
nuit termine le
où
Cathmor
trouve son frère mortel-
lement blessé après sa mort il le porte dans une caverne
;
voisine.
Fingal
,
en apprenant
la
mort de son
décide à combattre lui-même. Le chant
finit
fils,
se
par uu
monologue de Cathmor, que l'aspect de tantde tombes
récentes enflamme d'une nouvelle ardeur.
loi
qui dors suspendue auprès des boucliers,
Toi qui charmas souvent roreille des guerriers,
17
i'OESlES D'OSSIAN.
194
Eveille-toi
,
ma harpe
Descende avec
Ne me
la
!
et
que
paix dans
ta
mélodie
mon ame
engourdie.
refuse pas tes accords inspirants
:
Hélas seul, accablé de soucis dévorants,
!
Privé de son Oscar, privé de
Ossian n'a que
toi
Tout repose ou
se taît; le
Murmure
foiblement dans
Voici l'heure des chants...
Silence...
Le passé
la
pour calmer
lumière,
sa misère.
zéphyr amoureux.
les hois
ténébreux
mon ame
se retrace À
ma
vne.
Les rayons du matin serpentoient dans
A
la
voix de Cathmor
les chefs
:
s'est émue...
les
cieux
audacieux
Guident leurs bataillons. Une épaisse poussière
Yoile
le roi
L'intrépide
du jour entré dans
Foldath
Moissonne en
Il
I
'<
't
'1
"
«
'<
même temps
se livre à l'excès
sa carrière.
est par-tout, et
son bras
les chefs et les soldats
:
d'une barbare joie:
Bientôt, dit-il, Fin gai ^ à sa douleur en proie,
Va pleurer ses états, sa gloire et ses amis.
Compagnons de FoldaLh^\e vous l'avois promis.
L'Ombre de Càirbar triomphe dans sa nue
Fin gai même, frappé d'une atteinte imprévue
Tombera, comme on voit sous les noirs aquilons
Tomber un haut sapin, vieux monarque des monts.
Dermide cependant
:
s'oppose à son passage
;
:
LA BATAILLE DE TEMORA.
Mais
11
le destin trahit
est blessé.
igiï
son généreux courage
Foldath veut redoubler
Quand un jeune héros
Mon frère, accourt, brandit
Et du sein de Foldath
ses
coups
;
bouillant, plein de courroux
sa lance étincelante,
la retire
sanglante.
Puis vole sans retard à de nouveaux exploits, (i)
Foldath tombe
:
la terre a
gémi sous son poids
;
Mais Mrt/r/f05(2), à l'aspect du guerrier qui succambe:
«
Où
«
Sera-ce dans Vllin,
«
Qui de Nina,
'
veux-tu, lui
dit-il,
que j'élève
ou sur
ta fille,
ont vu
ta
tombe?
bords riants
les
les
premiers ans
Pourquoi, répond /^o/t/ai/t d'une voix courroucée
«
Pourquoi verser
«
Veux-tu me rappeler que je
«
Qui venge mon
le
trouble en
trépas sur
n'ai
mes
point de
fiers
fils
ennemis?
ma mémoire.
ma gloire:
Va,
«
Assez d'exploits sans doute attesteront
«
Entasse autour de moi ces superbes rivaux
"
je n'ai
,
mon ame oppressée?
«
«
?
pas besoin qu'on venge
Que mon glaive plongea dans la nuit des tombeaux ;
Que je dorme, entouré de victimes sans nombre,
•;
Cet aspect tout de sang réjouira
Il
dit, et
mon Ombre.
meurt son ame, errante dans
;
S'envole vers des lieux qui lui furent
Elle s'offre à
Nina:
seule
»
les airs
si cliers.
aux bords d'une eau pure,
POESIES D'OS
igfi
Nina
Son
livroit
SI AN.
sa noire chevelure
est
se
montre
son œil éperdu
à
couvert de sang,
et le brouillard
Vole autour de son front menaçant
La belle pousse un
cri;
:
humide
et livide.
l'Ombre lance un
éclair.
comme un feu léger s'évanouit dans l'air.
Cathmor a vu tomber le chef de son armée
Et
De
II
;
arc à ses côtés reposoit détendu.
Le fantôme
Il
aux vents
haine et de courroux son ame
est
:
enflammée;
se levé, et saisit le fer de ses aienx.
Incertain et troublé, Fingalle suit des yeux:
«
Cathmor,
«
Fillan touche peut-être
•
Dérobez
à
s'apprête à combattre lui-même;
dit-i),
ma vue un
son heure suprême.
à
spectacle d'effroi;
«
Sombres forêts des monts,courbez-vous devant moi
«
Ossian, suis ton
«
Cher Fillan, de
«
Ne
«
Meurs, mais
t'affligera
J'obéis à
,
et
jours
reçois
mon père;
les flancs
Les
de
et lui,
Vole
et
trépas glorieux.
baigné de larmes,
du roc nous cacher
la bataille, à
tel
tendresse occupée
du moins un
qu'un
ses alarmes.
mes regards tremblants
Roulent impétueux, rapides
Mon frère,
cache ton épée.
ma
point d'un doute injurieux.
Va dans
flots
frère
tes
aigle
et sanglants.
aux
ailes
déployées
chasse d'Erin les tribus effrayées
:
>
LA BATAILLE DE TEMORA.
Il
s'ouvre dans leur sang
L'éclair est
dans ses yeux
Mais Caihmor
Trois fois
II
un tortueux
l'air
fait briller
la
Rassemblent
la
;
foudre est dans sa main.
son glaive redoutable
retentit de sa
appelle les chefs
Honteux de
,
les chefs
voix formidable
obéissants
à leur tour la foule dispersée
L'ordre se rétablit ; et sous
Mes
:
:
terreur qui raaîtrisoit leurs sens,
La plaine en un moment de dards
S'élancent de
19
cliemia;
nouveau
:
s'est hérissée;
un mur
d'airain
les bataillons
à'Erin.
regards de Fillan suivoient au loin
la trace:
Tout-à-coup, emporté par sa fougueuse audace,
Il
marche sur Cathmor. La foule au
S'ouvre , et livre un passage à ce
Cathmor^ calme
et serein
Voit accourir Fillan^
le
Leurs glaives renommés
Descend...
fier
même
comme en un jour
contemple,
les
On interrompt la
se croisent....
mais
et les
Les heures se pressoient,
et
deux camps
sous un
nuit
le bruit.
à
peine agitoit
;
le feuillage
avoit suspendu les horreurs
;
du carnage,
do Comlial. fatigué des combats.
;
respirent.
ciel glacé
La nuit rouloit son char de frimas hérissé
F.t le fil.s
la
,
;
vaincus à pas lents se retirent
mort,
Le vent d'au tomme
de fête
et s'arrête
du choc affreux je n'entends que
Les vainqueurs,
L'Ombre
instant
combattant.
POESIES D'OSSIAN
198
A la fête du
soir appeloit ses soldats.
Loin deux, d'un pas rapide
à traTers la bruyère,
Mes yeuxcherclioient Fillan Fillan monjeune frère;
,
Long-temps contre Cathmor
avoit combattu:
il
Enfin je l'apperçois pâle, morne, abattu.
Appuyé
sur
le
roc, et respirant
«
Jeune chef de ikforfew , que
«
Lui
«
Fingal prête
«
Il
«
Sur
«
Tu
dis-je
:
à
fis
harpe
l'oreille à leurs
à
la
plaine?
chants glorieux;
commencer
ton tour viens chanter
trembler Cathmor;
o
Ont arraché des pleurs
Fingal^ impatient, près de son
«
Dans
cœur du
à
sa
tes exploits
«
le
:
dans
environné de ses Bardes joyeux,
n'attend plus que toi pour
la
peine
fais-tu
mes yeux
vieillard viens
fils
la fête.
conquête
;
immortels
fraternels.
m'envoie;
répandre
la joie.
>!
Lorsqne tout fuit ou meurt sous leurs coups triomphants
Uu
père aime à revoir ses généreux enfants;
sont vaincus, quand la honte leur reste ,
Mais quand
ils
Doivent-ils
l'affliger
de leur aspect funeste.'
Ossian^ de Fingal pour jamais exilé
Je ne
Mon
le verrai
bouclier
,
mon casque est mutilé
meurtri, mon armure sanglante;
plus ;
Et ce glaive émoussé çese à
ma main
tremblante.
.
LA BATAILLE DE TEMORA.
ig(5
O s s I AN,
O mon
fiere
N'es-tu pas
!
bannis cette sombre douleur;
un rayon dont la douce chaleur
Réchauffe de Fingal
Loin du
A
lils
Rien de ce noble
Mais ton père
Je ne
la fleur
mon
il
!
fut toujours aimé;
roi ne lui ravit l'estime
gémit.... tout retard est
Ossian^ plains
te suivrai pas.
mon
Déjà, déjà
A
débile vieillesse?
ton âge Ossian étoit moins renommé.
De Fingal cependant
Et
la
des héros cet excès de foiblesse
sang est glacé par
crime.
mon
mort
sort.
;
de mes ans je suis tombé sans gloire.
premier combat a
Ah du moins
!
Mon frère,
les
ma mémoire.
honneurs du tombeau
:
réunis mes armes dispersées.
Près de moi dans
le
flétri
sauve-moi d'un reproche nouveau
Je ne mérite pas
Et puisse
la
:
un
le
roc qu'elles dorment placées;
chasseur, en ces bois égaré,
Ignorer que Fillan mourut déshonoré!
OsSlAN.
Il expire!....
6 douleur!....
Son ame courageuse
!
POESIES D'OSSIAN.
200
S'envole sur les vents dans
la
nue orageuse;
y goûte déjà le Lonheur et la paix.
Ombres de mes aïeux, ouvrez-lui vos palais;
Elle
Préparez, au milieu de vos brillants pbospbores,
Sa robe de vapeurs, son fer de météores.
A.
mots, dans
ces
Je dépose
le
les flancs
du rocher ténébreux
corps du guerrier malheureux.
Soudain la sombre nuit redouble
Des tonnerres lointains
les
Sèment de tout côté l'épouvante
Mais, bravant
la
tempête
ses ténèbres.
roulements funèbres
et l'horreur;
et le ciel
en fureur.
Tout plein du souvenir qui déchire mon ame.
Je donne un libre essor au courroux qui m'enflamme.
combattrai ce héros inhumain
«
Oui
i<
Qui d'un
»
Ni
X
Ne pourront
le
<•
Fantômes de
la nuit,
,
je le
frère chéri vient de percer le sein;
ses mille guerriers, ni
soustraire
son mâle courage,
aux
efforts de
ma rage.
allumez vos éclairs,
"
Guidez mes pas errants au sein de ces déserts
«
Guidez-moi vers Cathvior; que ma main vengeresse.,
«
Malheureux! où m'emporte une juste tendresse
u
Voilà donc
"
Héros en cheveux blancs, entouré d'ennemis,
«
Si je l'abandonnois
«
Qui
les
;
secours qu'à Fingal yai promis
!
!
en ce péril extrême,
veilleroit surlui.'
Sonbrasn'estplus
le
même;
LA BATAILLE DE TEMORA.
n
Dans les champs de
«
Volons
la
Supporter tout
«
L'entendre
«
Non, jamais ....
me
le
poids de
crier
il
,
voix que m'apportent lesvents?
Mais n'est-ce point
Il
«
J'obéirai,
«
Je revole vers toi, seul avec mes ennuis,
<•
fils....
sa
ses
fils
par
Fingal
:
Le cœur gros de soupirs,
Mon père
rage impuissante
!
la
foudre des nuits. (3)
appuyé sur ma lance,
je gardois le silence.
dans mes yeux lut
Une sombre
!
père, à ta voix menaçante.
Comme un aigle blessé
J'avois rejoint
pâleur voile ses
la
mort de son
fils
ce héros ne voit plus
:
lumière,
«
Guerriers,
«
Une oisive douleur peut-elle le venger.-*
Que le poids de la guerre accable l'étranger!
tt
«
Sous vos coups réunis
«
Amis,
qu'il
la
tombe dans
la plaine...
je combattrai; la victoire est certaine.
»
Vingt chênes abattus s'embrasent à l'instant,
Et remplissent
les airs
d'un
;
traits flétris:
Mais bientôt, reprenant son audace première
si
?
ah! plutôt en ces cruels moments...
«
mon
:
sa juste colère,
Qu'est devenu ton frère
«
appelle ses
aoi
n'est plus sans rival
Qui, moi, revoir F/nga/.''
à ses côtés...
«
mort
éclat pétillant.
Fingal erre au milieu des ombres entassées ,
Et roule dans son cœur de sinistres pensées;
Son large bouclier, son casque radieux
(4)
»
POESIES DOSSIAN.
202
Brillent par intervalle à la clarté des feux;
Le besoin des combats tourmente son audace
Dans
ses traits convulsifs respire la
;
menace;
Ses pas précipités s'égarent au hasard,
Et de sa lance d'or
Le noble
roi
Promené
il
frappe
le brouillard.
à'Atha^ du haut de
ses regards sur les
Là dorment, confondus
,
ses collines
tombes voisines;
les chefs
des
deux
partis.
Sa grande ame s'émeut; ses yeux appesantis
Laissent tomber des pleurs....
«
i<
Brillants
Ont
lui
comme
l'éclair,
<
Les guerriers mémorables,
comme
lui
peu durables,
quelques instants pour s'éteindre à jamais;
11
Dans
«
Surpris par
l'asyle des
n'ont
le
morts
qu'ils
reposent en paix
!
trépas dans leur course guerrière,
pu des grands noms
éclipser la lumière
11
Ils
"
Mais ces plaines du moins, ces torrents écumeux,
1
Instruiront l'avenir de leurs destins fameux.
'<
it
1
i<
.1
•<
Ah
!
puisse ainsi Cathrnor triompher d'âge en âge,
Et du sommet des airs, promis à son courage,
De ses Bardes chéris entendre le concert
Quand il voyagera sur les vents du désert,
Quand de ses fiers aïeux il ornera les fêtes
Ou
;
qu'il se cachera
sous
l'aile
des tempêtes
!
»
CHANT CINQUIEME.
SOMMAIRE.
Le poète
dant
fait la
nuit
la
description
du
lac
du brouillard qui
de Légo.
Ou
s
eleve pen-
croyoit que les âmes
des morts icstoient enveloppées dans ces vapeurs
,
jus-
qu'à ce que les Bardes eussent chanté leur éloge funèbre. Apparition de l'Ombre de
où
étoit
Fillan sur
nor pour
le
avertir ses guerriers qu'il va
du son de ce bouclier. Sulmala
saut, et court éveiller
demander
lée
paix.
demain.
Il
de
Cathmor.
ro-
les ar-
ordonne de
la bataille
réveille
Sulmala
se réveille
en sur-
Elle veut l'engager à
reste dans la résolution
de conti-
se retirer dans la val-
qui devoit se livrer
,
et d'y
le len-
son armée en frappant sur son bou-
Description du bouclier de
paroît.
prendre
demeuroit un vieux Druide
,
la fin
11
Il lui
Lena où
attendre
clier.
la
guerre.
la
de
le
bouclier de Trern-
combattre en personne. Effets extraordinaires
et
nuer
caverne
son corps. Sa voix réveille Fingal sur
cher de Cormul. Fingal frappe
mes
la
se retire
dans
la
Cathmor. \.e\çfax
de Lena.
vallée
J_iORSQUE les vents du soir aux bords de l'occident
Ont poussé du
soleil le
disque moins ardent,
POESIES D'OSSIAN.
204
Des
du Légo , de
forêts
ondes dormantes,
ses
S'élèvent tout-à-coup mille vapeurs fumantes.
Noires exhalaisons qui voilent à nos yeux
De
la
reine des nuits le char silencieux:
C'est là
que
dont
le guerrier
harpe propice
la
N'a point encor chanté l'hymne consolatrice
Choisit l'épais brouillard qui doit ceindre ses flancs
mon
Là
emporté par
frère,
les
rapides vents
:
,
A déjà revêtu sa mobile ceinture.
L'aimable et beau fantôme, errant à l'aventure,
Cède aux jeux du zéphyr,
et
Les torrents répétoient
Les vents
frais
de
la
l'or
La
au repos
plainte de
mon
Eli
«
M'a-t-il
frère
donc oubUé dans
«
Moi,
«
Moi
«
Qui pourroit
te
Qui
«
Quel
«
Ton sang versé pour
lui
astre à
mon
effacer
fils
!
et
le réveille.
son père sommeillé!
ses songes riants.
répond Fingal^
brilloit
;
son cœur troublé;
en sursaut
!
l'oublier,
étoiles
tristesse accablé.
livroit
quoi Fillan n'est plus,
>i
des bois.
mouvant des
nuit faisoient flotter ses voiles;
Tout reposoit: Fingal, de
Un moment
mêle quelquefois
murmure
Ses douloureux soupirs au
les
yeux
Eh de
!
une image
plus que toi dans
si
le
étincelants,
l'ame d'un perc
chère ?
feu
du combat?
son matin répandit plus
d'éclat ?
uoi fume encor dans la plaine...
LA BATAILLE DE TEMORA.
«
Va, tu
frappe par trois fois
le
pesant bouclier
Jusqu'aux cieux étonnés mille
Les
ma
2<»d
haine.
»
levé à ces mots, et de sou bras guerrier
11 se
Il
n'as pas besoin de rallumer
flots
Dans son
éclairs
:
en jaillissent;
roulent émus, les cavernes mugissent (i)
lit
de genêt
le
;
chevreuil étendu
Se réveille en sursaut, de terreur éperdu;
Et
les
morts, désertant
les bois
Regagnent, effrayés, leurs
mélancoliques,
palais fantastiques.
Le sommeil, Suhnala^n'a point charmé
Du
boucher des
Viennent glacer d'effroi ton
Plus prompte que
Elle fuit sons le
tes sens.
rois les sons retentissants
le
oreille attentive
daim, ou
la
:
biche craintive,
chêne où son unique amour
travaux du jour:
Dormoit, appesanti par
les
A
l'aspect
tremble et frissonne.
«
Pourquoi troubler le calme on son cœur s'abandonne
«
Dit-elle.
u
Hélas! de
Mais
le
du héros
Un
elle
songe heureux l'occupe en ce moment
Snlmala
lui peint-il le
tourment?
son meurtrier
et s'accroît et
redouble
:
L'étrangère frémit; tout entière à son trouble,
Elle
veut s'éloigner, mais son casque d'airain
i8
»
;
:
POESIES D'OSSIAN.
2o6
Tombe,
Le héros
roule, et bondit sur
le
rocher voisin.
se réveille; et, d'une voix
émue,
qui t'amène à
ma vue?
«
Enfant des nuits,
K
Es-tn l'Ombre d'un chef des temps qui ne sont plus
M
Pourquoi
—
"
t'off'rir
dit-il,
soudain à mes regards confus?
Ombre et fugitive et
Je ne suis point une
vaine,
«
Qui roule dans
«
Mais je viens
"
Frère de Caïrbar^ songe à sauver tes jours,
«
Entends ces sons de mort; vois quelle est la puissance
«
Du
—
.(
t<
l'avertir des
dangers que tu cours.
guerrier qui des nuits trouble ainsi le silence.
Le bouclier sonore
Que
—
o
«
l'espace et s'égare incertaine;
le foible
Illustre
est la
harpe des
rois
;
l'entende et tremble dans ses bois.
chef â'Atha^
Ne manquoient, comme
les
héros de
toi,
ma
race
de zèle ni d'audace;
«
Cependant du trépas ce bruit avant-coureur
«
Malgré moi dans mes sens
a jeté la terreur.
'
La guerre aime Fingal : de sang toute trempée
<
Elle descend déjà sur sa fatale épée.
•
.
Il
s'avance, celui qui ne céda jamais.
Cathmor,
fais éveiller le
Barde de
la
paix. (2)
\ cet effroi naïf, à celle voix louchante,
»
LA BATAILLE DE TEMORA.
L'intrépide
Il
se love, et des pleurs mouillent
—
«
™
Cathmor reconnoît son amante
<
O
lille
son
oeil
207
:
guerrier.
de Liimon^ dès long-temps sous
l'acier
Mes yeux ont reconnu l'idole de mon ame
Mais la guerre à mes pieds, comme un torrent de flamme,
:
'
Précipitoit sa course; et le devoir jaloux
'<
Défendoit à
«
Cesse de l'alarmer, et songe au jour prospère
«
»
ma
gloire
un
entretien
si
Où nous verrons tous deux le palais de ton père;
Où Cathmor dissipant ton amoureux ennui
,
Séchera tous
les
pleurs que tu verses pour
tempête gronde,
«
Mais
la
ti
Sous
ce rocher qu'habite
«
Vit
un
et le
une paix
sage vieillard, dont les
éternelle,
yeux pénétrants
«
Sondent
Autour de
«
Sur
«
Dont
«
Voit bondir
«
C'est là qu'il vit, content d'être sans
Va
la
lui.
danger m'appelle.
«
ti
doux.
profondeur de l'abyme des temps;
sa retraite
sa grotte s'incline
le front,
le
une eau pure serpente;
une roche pendante,
couronné de chênes toujours verds,
chevreuil, hôte de ces déserts;
trouver ce vieillard , cours , ô
ma
moment où
renommée.
bien aimée
yeux
M
Attends auprès de lui
«
Reverront de Cathmor
A
ces mots, sur les traits de la belle étrangère
le
tes
le front victorieux. »
!
POESIES D'OSSIAN.
2o8
Se répand par degrés une rougeur légère
Et
plus
le
doux espoir se
"
Poursuis, 6
«
On
f
Quand
mon
glisse
suspendroit plutôt
elle voit
dans son
sein.
héros, ton généreux dessein.
le
un daim
-
Qu'on ne détourneroit
«
Du
vol de l'aigle altiere
errer sur la bruyère
tes
pas audacieux
sentier de la gloire et des faits périlleux.
marquoit
•>
Mais
«
Songe que Sulmala^ plaintive, abandonnée,
"
Loin d'un père cbéri, seule avec
•
Va
—
«
«
si le
sort
ta
dernière journée,
les
dangers,
languir désormais sous des cieux étrangers.
Repousse undésespoirquini'étonneetmeblesse.
mon cœur
As-tu jugé
capable de foiblesse?
du
il
Mille fois j'ai bravé les flèches
«
Mille fois la tempête a grondé sous
Il
Et toujours
mon
épée
Comme un
éclair
vainqueur qui perce
•I
Cathmor frappe
à ces
a
trépas
;
mes pas;
chassé les orages,
les
nuages.
mots son large bouclier;
Sept étoiles du soir y brillent sur
l'acier;
On y voit Cauniathon dans l'ombre rayonnante;
Au palais du midi Coldema flamboyante,
Ulnicho perçant
le
brouillard ténébreux.
Et Cathlln d'un feu pur doraut l'azur des cieus.
Plus loin, de Reldurath
la
lumière mobile
LA BATAILLE DE TEMORA.
Se brise sur
209
de l'occident tranquille.
les flots
Berthin semble sourire au chasseur égaré
Qui
Au
sort
du
sein des bois d'un pas mal assuré.
milieu d'un
ciel
pur Lonthena
Lonthena du nocher
se déploie,
l'espérance et la joie.
Autrefois, quand Larthon^ le premier des héros
Qui s'ouvrirent sans guide un chemin sur
les flots,
Dirigeoit vers Ullin sa course tortueuse,
ïout-à-coup, descendant sur l'onde impétueuse,
La nuit d'un voile sombre enveloppa
Larthon
livrant
,
aux
les airs;
humides déserts,
Incertain, à travers ces
flots sa fragile nacelle.
Déjà ne tenoit plus qu'une route infidèle.
Mais Lontliena sourit,
Poursuivit son voyage à
et le
héros joyeux
l'éclat
de ses feux.
Bientôt sur l'horizon, qu'un feu tremblant colore.
Souffle
un zéphyr
léger, précurseur de l'aurore;
Le ruisseau du vallon, dans son cours inégal.
Brille et serpente
Des chevreuils
Commence
Et
aux yeux du chasseur matinal
et des cerfs la
à s'égarer sur la
l'aigle, s'élançant
du roc
;
troupe vigilante
mousse ondoyante.
silencieux.
Vole au-devant du jour dans
les plaines des cieux.
Les guerriers de Cathmor, à sa voix belliqueuse,
Dissipent du sommeil
Leurs
cris
la
vapeur paresseuse
;
frappent les airs .les rochers, et les bois:
POESIES D'OSSIAN.
2IO
Leurs nombreuses tribus se lèvent à
la fois
:
Ainsi, lorsque les vents, de l'océan tranquille
Agitent tout-à-coup
surface mobile
la
L'un vers l'autre poussés, l'un sur
S'amoncelent
La
Sitlmala, vers
triste
l'autre roulants,
rapides et grondants.
les flots
la
grotte enfoncée,
Se retire pensive, et de crainte glacée
Souvent
tourne,
elle se
Suit encore des
Mais quand
La
il
;
dans l'éloignement
et
yeux son invincible amant;
disparoît à travers la poussière,
belle sent des pleurs rouler sous sa paupière,
Se perd dans
Du combat
la
caverne
et
,
va près du vieillard
qui s'apprête attendre
le
hasard.
Approche, fils à' Alpin (3) du Barde qui t'implore;
,
Et
si
,
Pour
Oh!
dans
les
le triste
accords de
Ossian
il
ta
est
harpe sonore
quelque douceur.
viens en pénétrer, en réjouir
mou
cœur.
Hélas! autour de moi se pressent les alarmes;
Aveugle, délaissé, dans
Etranger à
la gloire, à
le
deuil et les larmes.
l'amour,
Je foule, en gémissant,
la terre
à
l'hymen.
de Morvcti.
Sur mes cheveux blanchis s'entassent
Mon
les
orages
père, mes amis ont peuplé les nuages
D'un trépas glorieux tous ont suhi
Et de tant de héros
Approche,
fils à!
il
ne
reste
:
;
la loi,
que moi.
Alpin ^ (VOssian qui t'implore;
LA BATAILLE DE TEMORA.
Viens suspendre mes maux,
O
Barde, je
te vois
dans
Mais plutôt interromps
Pour l'ame d'Ossian^
Il
nuit de
la
Bel arbre du vallon
bonheur
,
de
tes
Nul zéphyr murmurant ne
N'est-il point dans les airs
Qui
t'effleure,
Quel
silence
mes yeux
;
chants harmonieux
tes
à sa tristesse
n'est plus ici-has de
211
tu le peux, encore.
si
:
en proie.
ni de joie.
rameaux
épais
vient troubler
la
paix.
quelque Ombre mensongère
en passant, de
en nos bois,
et
sa robe légère?....
sur nos monts glacés!...
Ullin^ Carril ^ Rino^ Bardes des temps passés.
Doux fantômes,
venez ranimer
mon
génie:
Je ne vous entends plus, enfants de l'harmonie;
Quelle ardeur près de vous m'enflammoil autrefois,
Quand, la harpe à la main, dans le palais des rois
Nous faisions retentir de nos hymnes guerrières
Ces voûtes où brilioient
les
armes de
no.s pères
!
CHANT SIXIEME.
SOMMAIRE.
Au
travers
du brouillard qui couvre
rocher de
le
Cormul
on apperçoit de temps eu temps Fingal. Description
de sa descente de
Dermide
mal,
,
et
colline
la
:
au Barde Carril
il
en marchant à Teunemi, arrive à
où
étoit le
l'entrée
leur.
ordonne
corps de Fillan.
de cette caverne
Cathmor
Il
cette
:
la
voit
;
Gaul
,
à
Lubar
Branno couché à
caverne de
vue renouvelle sa dou-
range son armée en
tion de l'action générale
à
chercher ClomCormac. Fingal,
d'aller
seul rejeton de la famille de
bataille.
exploits de
Desciip-
Cathmor
et
de
Fingal; tempête; déroute totale des Irlandais. Les
deux rois se battent leur entretien après le combat.
Cathmor expire. Fingal remet sa lance à Ossian.
:
L'ombre de Cathmor apparoît à Sulmala dans
grotte
où
elle s'éloit retirée. L'arrivée
annoncée par
les
de
chants de cent Bardes.
par un discours de Fingal.
Quand la bise d'hiver, attristant la
A chargé
de glaçons
le lac
de
la
la
Clommal est
Le poème
campagne,
montagne.
Le chasseur, dès l'aurore, ennemi du repos,
finit
LA BATAILLE DE TEMORA.
2i3
En vain prête l'oreille au murmnre des flots
Tous les flots sont muets; leur surface glacée
De touffes de gazon, de feuilles hérissée,
Tremble au souffle des vents, et luit aux doux rayons
Que verse un jour naissant sur la cime des monts
:
:
Ainsi brille an matin notre vaillante armée.
Le brouillard qui voltige en épaisse fumée
Voile encor
Du
le
Cormid
front victorieux.
le
Mais bientôt, paroissant à travers
Mon père
des héros reçoit
Tout Morven
le
yeux
(i), et cache à tous les
grand roi de Morven
le
nuage,
un pur hommage:
salue, et sa bruyante voix
Fait retentir l'écho des vallons et des bois.
Ossian
et
Dennide ^ appuyés
Gardoient auprès du roi
Nous
n'avions pas vaincu
sur leur lance,
plus profond silence
le
Fingal
:
vit
;
nos regrets
:
«
D'où vient
«
Nous dit-il mes enfants, n'ètes-vous point ma gloire
«
La force de
«
Ossian, songe à vaincre
«
.Te
«
Quand aux mursde5e^« nous suspendrons nos armes,
«
Alors, ô
n
Chante les deuxhéros (2) que nous ne verrons pins:
«
Mais
«
Gatil, Derm/c^e, approchez
cette tristesse
empreinte dans vos
traits?
:
connois
la
mon bras,
tes
mon
guerre
l'ame de
et
non
douleurs et dois
cher
fils, laisse
rugit... tes
ma
victoire.''
à t'affliger;
les
partager
:
couler tes larmes;
pleurs sont superflus...
:
non loin de cette plaine
POESIES D'OSSIAN.
:ii4
«
S'élève
«
An
un mont sauvage où
le
Nord
déchaîne
se
;
milieu de ces rocs, blanchis par les hivers,
mousse
»
Et de ces vieux sapins que
«
S'étend une caverne au jour impénétrable;
n
Elle prête à
"
Depuis linstant
la
Clommal son ombre
fatal
a couverts,
secourable.
où son père frappé
«
Tomba dans son palais lâchement usuipé,
Par un Barde soustrait au vainqueur sanguinaire,
«
Dans
«
Du malheureux Connac il
«
Quandlanuit dans les cicux vient régnera sou tour,
n
Et sur
«
A
la foible clarté
"
Il
parcourt
I
Y
surprend quelquefois
a
Que
K
Je veux
<»
Compagnons de Fingal,
•1
Que
«
Qu'il voussuiveencesUeux; et, grâce à
<
Qu'il aille resaisir son antique héritage.
n
le
le
il
firmament tendre
languit solitaire.
a reçu le jour.
ses
sombres voiles
,
qui tombe des étoiles
son arc ennemi
les forêts, et
le
chevreuil endormi.
puissent ses destins devenir plus prospères
le rétablir
ce fer
II se tait
Et
caverne obscure
sa
:
les
pour
sa
les
allez, et dites-lui
cause étincelle aujourd'hui,
deux chefs
Barde Carril
!
au trône de ses pères.
mon courage,
»
s'éloignent à l'instant,
précède en chantant.
Mais l'aurore paroît du sein des mers bruyante»
;
Jaillissent tout-à-coup des
flammes ondoyantes;
LA BATAILLE DE TEMORA.
Le
roi
Verse
du jour
l'or
monts
s'élève, et sur les
de son char emporté dans les
Des braves de Mon'en
Et de l'âpre
2i5
déserts
airs.
les bataillons s'étendent.
Cormul en tumulte descendent.
Fingal guide aux combats leur belliqueux essor;
Un aigle
Il
sur son casque étend ses ailes d'or
:
s'avance couvert des armes paternelles,
nud volent mille étincelles
un rocher couronné de sapins
Et de son glaive
Tel s'élève
Les orages fougueux,
Le battent
Il
:
;
à la t'ois
les
aquilons mutins.
de leur courroux
stérile...
repose vainqueur sur sa base immobile.
La grotte de Lubar frappe
yeux du roi
un morne effroi;
les
Cet aspect dans ses sens éveille
Là repose Fillan: Branno^ dogue
:
fidèle.
N'a point abandonné sa dépouille mortelle,
Près du jeune héros
il
languit attristé;
Autrefois, orgueilleux de son agilité,
A son maître docile,
il
Et chassoit devant lui
voloit dans
la
plaine,
biche hors d'haleine;
la
Aujourd'hui, s'étonnant d'un aussi long sommeil.
Du chasseur
Mais
Il
ses
qui n'est plus
yeux
semble par
ses cris lui
Et tourne vers
Fingal
il
la grotte
s'arrûte...
il
attend
le réveil
:
mon père;
demander mon fi'ere.
vigilants ont
reconnu
un regard langoureux.
pousse un soupir douloureux;
POESIES DOSSIAN.
2i6
/
Accablée un instant, sa grande aine sommeille...
Mais
la
Et d'un
Il
guerre bientôt frémit à son oreille.
bond vigoureux, par sa lance affermi,
Lubar^ et vole à l'ennemi.
franchit le
Cathmor a déployé
phalanges sans nombre
ses
Moins fougueuse est la mer ,
Parmi
et
Parmi tant de guerriers on distingue Maltlios,
Morannan
à l'épaisse et noire chevelure,
Connar au
front livide, à
la
Hidallan aux yeux bleus,
à
haute stature,
l'aimable souris.
Jusqu'aux cieux tout-à-coup s'élèvent mille
On embouche
Dans
Déjà
les
;
par
la
le
bouclier choque
les
La douleur
les
et la
armée
;
;
bouclier.
flamme aux flammes de
casques d'airain
Les lances et
le
cris
rage enflammée,
la plaine s'ébranle et l'une et l'autre
L'acier mêle sa
Sur
cors
les glaives
l'acier,
rebondissent,
dards se croisent, retentissent;
mort volent dans tous
les
rangs
:
Ainsi, lorsque des mers deux rapides courants.
Battus par
la
tempête
et
par des vents contraires.
Et, rugissants autour des rochers solitaires.
Se heurtent en courroux,
De
fantômes joyeux
leurs funèbres voix épouvantent les cieux.
Tourmentent
De
les
la
les forêts,
cime des monts
les
;
moins épaisse est l'ombre.
cette forêt de brillants javelots,
déracinent leurs chênes,
roulent dans
les plaines.
LA BATAILLE DE TEMORA.
217
Les poursuivent encor, dispersent leurs débris.
Et parsemant
les flots
Ainsi brillent
les chefs
de feuillages
au
Par l'excès du péril l'audace
Le sang au loin jaillit
Mais
le roi
flétris.
fort de la
mêlée
:
redoublée ;
est
et rejaillit encor.
de Mon'eti
,
mais
Plus terribles cent fois que
la
le vaillant
mer
Cathmor^
et l'orage,
Brisent les cbars roulants, sèment sur leur passage
Les boucliers rompus
dards émoussés:
et les
Ils
marchent au hasard sur
Et
la
morts entassés,
les
foule incertaine, entre leurs mains rapides
Croit voir étinceler cent glaives homicides.
Morannan^ sous les coups de Fingal furieux,
Tombe dans le torrent; les flots impétueux
Entraînent ce guerrier dont
Heurte contre
les rocs et
la
pesante armure
rend un sourd murmure.
Cronar tomboit; un pin qu'ont
L'arrête et le saisit par ses
incliné les ans
cheveux
flottants,
Et sur son bouclier, que des liens suspendent,
Ses larmes
Mais
et
son sang goutte à goutte descendent.
le jeune
Son âge,
Hidallan
sa beauté,
vient s'offrir à
désarment
mon
mes coups;
courroux:
J'hésitois à frapper... Lui, dans sa folle audace,
Me lance un foible trait qui meurt sur ma cuirasse;
Je me retourne alors, de colère enflammé,
Et levant sur sa tète
un
bras
si
renommé...
19
POESIES D'OSSIAN.
2i8
Oh
!
Que
mieux valu pour lui, pour son amante.
qu'il eût
tous
deux,
les
Célébré sur
la
harpe
Les roses de son
Ne pourront le
dans
assis
la
plaine riante
nous eussions tour-à-tour
Pacifiques rivaux,
et la gloire et
teint, l'or
l'amour!
de sa chevelure
,
guérir de sa large blessure....
L'infortuné n'est plus une molle pâleur
;
Couvre son beau visage
ainsi
:
tombe une
Qu'en son rapide vol l'aquilon
A
cet aspect touchant
Mahhos a vu
Furieux,
il
fleur
a flétrie.
mon ame
est attendrie.
de loin succomber Hidallan;
accourt. L'intrépide Ossian
S'apprête à repousser cet ennemi célèbre...
Soudain
l'air
Enveloppe
s'obscurcit;
Le pin gémit, battu par
Sur des
un nuage funèbre
les airs, et la plaine, et les
ailes
les
monts
;
noirs aquilons;
de feu Tcclair vole
et
serpente;
Le Lubar en fureur roule une onde écumante....
Mais où sont
les
Résonnant sous
Sans doute
ils
coups du glaive meurtrier.
sont aux mains: les tribus étrangères,
Fuyant , comme
A
deux rois .•'j'entends leur bouclier
les
le
daim sur
Se cachent sous des rocs par
Je
les
noires fougères
travers la tempête et les feux redoublés.
les
la
foudre ébranlés.
poursuis au sein de leurs retraites sombres;
Mes coups mal
dirigés se
perdent dans
les
ombres.
LA BATAILLE DE TEMORA.
219
L'orage enfin s'appaise, et de son char d'azur
Le
soleil
Mes
recommence
à verser
un jour
pur.
mon père:
regards inquiets cherchent au loin
Je l'apperçois enfin; son front n'est plus sévère;
A
ses pieds
étendu
le fier
Calhmor
Pâle et presque sans voix, soulevé
Fingal
:
k
il
est juste, sans
«
Tu
«
A son ombre
«
Mais je ne fus jamais inflexible
m'as privé d'un
fils, et
plaintive en
étoit
Morven dans mon camp
La
Viens ; nos chants calmeront
«
Des plantes de nos monts je connois
se
Mes
Viens , chef de Téniora , que ton cœur
Moi
te suivre!., la
mon
Des tours de
Qu'habitent
«
Fais-y porter
«
Y
se rassure.
»
mort est déjà dans mon sein.
palais
un rocher
est voisin;
vienne
la fraîcheur, la
nuit, et
le silence
;
mon corps, et qu'une amante en deuil
quelquefois gémir sur mon cercueil.
Non,non, qu'unautreespoir...Maislehérossitccombe,
tombe:
«
La mort, d'un bras de fer, l'entraîne dans
«
Ainsi tout doit périr; ainsi moi-même un jour
« Il
:
vertus,
en ses flancs une caverne immense
«
«
:
secouraLles mains panseront ta blessure....
« Il recelé
—
prépare
les
«
I
:
tes esprits abattus
«
«
dû
et barbare;
«
—
:
doute:
ton sang répandu
hommage
«
fête de
mourant.
ceil
Jeune héros , écoute
voulu ton trépas;
J'ai
<
est attendri
sanglant,
un
me
faudra quitter
le terrestre séjour.
la
POESIES D'OSSIAN.
220
rempli mes hautes destinées;
«
Ossian,,
«
Il
«
A leur voix qui me crie:
j'ai
temps de répondre
est
.<
Toujours des
«
Ton cœur
flots
doit-il
à la voix des années,
Hé! quels sont
tes desseins?
de sang rougiront-ils
toujours palpiter pour
tes
mains?
la
guerre?
«
Fingal
«
Voix puissante des temps, j'écoute
«
Fj«^fl/ne vaincra plus. Prends ma lance, ô mon fils!
«
Leve-la,
M
Tiendront de mes tribus insulter
«
Quand
«
Sans respect pour
«
Ossian ,
«
Dans
le
n'est-il
point
quand des
las
mon nom
Consumoit l'ennemi
Mais
«
Sois
«
Et pour les opprimés
De
les
bannières,
mes
main essuya
pour
les
mots
d'un père
son pouvoir;
du désespoir.
un ardent météore,
pleurs
un rayon de
sa lance entre
l'aurore. »
mes mains.
leurs cris, répétés par les échos lointains.
Nos
tribus aussitôt remplissent les campagnes.
Mais
les
ombres du
soir descendoieut des
montagnes,
Et les fleuves rouloient des flots plus rembrunis.
A la fête du roi tous les
chefs réunis
Cèdent aux doux transports d'une vive alégresse:
I^n
:
feu de sa colère
rebelle à
les
oppresseurs
à ces
le
forêts,
fera voler ses traits.
suis l'exemple et les conseils
jour des combats
remet
et j'obéis.
guerrier superbe, au sein de
le
«
Il
la terre ?
hordes meurtrières
rois les
«
sa
de ravager
mélange confus de gloire
et
de tendresse
LA BATAILLE DE TEMORA.
Au roi victorieux arrachoit
Fillan ne cliarmoit plus ses belliqueux
Du tombeau
dévorant Oscar étoit
Leur destin de
mon père
221
des soupirs.
loisirs;
la proie...
empoisonnoit
la joie.
L'aimable Sitlmala^ que faisoit-elle alors? (3)
Son
oreille
du Barde écoutoit
Tout-à-coup
le
Eclate dans les
chant cesse
Sulmala,
D'où
•
Le combat
«
Plein de gloire,
M
C'est
Un
Le
naît, dit
est fini;
qui
l'a
ses
solitaii-e...
ta subite
mon héros
est
douleur?
vainqueur:
revole auprès de son amante
je l'appercois.,.
fantôme à
fer
il
les accords...
uu trouble involontaire
yeux du Barde
«
lui...
;
yeux
»
O
;
mortelle épouvante!
se présente
soudain
;
percé brille encor dans son sein;
Ses membres de vapeurs bientôt s'évanouissent,
Et
se
La
triste Siiltnala pâle, les
mêlent aux vents qui dans l'ombre rugissent.
S'élance
et le
poursuit
yeux hagards,
à travers les brouillards...
Elle expira bientôt sur ce fatal rivage,
Comme le
Des
vent du soir qui meurt dans
le feuillage.
voiles de la nuit déjà tout est couvert;
Des sons harmonieux remplissent
le désert
:
Dermide et Carril ont fini leur voyage,
Et ramènent Cromnal fibre enfin d'esclavage.
Gaiil^
Fingal avec transport
«
O jeune infortuné
!
le
serre dans ses bras
je te
:
rends tes états,
19.
LA BATAILLE DE TEMORA.
222
pour toi , pour ton malheureux père
«
Lni dit-U
«
Que Fingal a
a
Demain, dès que
«
Abandonne, ô Cromnal!
«
Retourne
«
Remettre entre
«
Nous, cependant, chantons
«
Peuple, chefs de Morven^ln paix est de retour;
a.
Dans
«
Demain que sur les mers mes
«
Mon peuple est nnrocher,d'oùj'ai pris vers les deux
«
De
;
c'est
à
livré sa bataille dernière,
le
jour aura lui sur ce bord,
Térnora:
la félicité
l'aigle, roi
tes
cette plaine de
mon
fils ira
mort;
lui-même
mains l'autorité suprême.
que tons
les
la gloire
cœurs
de cejour.
se noient;
voiles se déploient
des monts, le vol audacieux.
Fin du Pokme.
«
:
NOTES.
DU PREMIER CHANT.
(i)
Caïrbar.
(2)
On
ne peut trop admirer avec quelle adresse
Ossian place son propre éloge
Oscar dans
(3)
(4)
dans
la
et celui
lils
Gaul.
Folclath, roi de
la suite
Morna^ joue un grand
du poëme. Son
passage
du second chant,
conspiration contre
il
paroît, par
un
con-
beaucoup de part
à la
jeune Cormac.
ne faut pas confondre re
Il
guerrier
le
:
qu'il fut le principal
fident de Caïrbar, et qu'il eut
rôle
caractère fier et in-
flexible se soutient jusqu'à la fin
(5)
de son
bouche d'un ennemi.
Swaran
avec
le
du même nom qui combattit contre Duro-
math daus
l'isle
de Tromathon, et dont
se souvient d'avoir lu
Minona.
l'histoire
dans
le
le lecteur
poëme de
NOTES.
224
Le poète transporte
(6)
scène dans
la
camp de
le
Fin gai.
C'est-à-dire les étrangers qui étoient arrivés
(7)
par mer.
Ossian parle toujours avec complaisance de
(8)
son
fils
bien-aimé
intéressoit
;
tout ce qui lui
son ame paternelle
:
il
ses poésies de sa lance d'or, de ses
Combien sur- tout
cbere
Quand un
dogues
la
guerrier s'étoit rendu
la
fidèles, etc.
lui être
plupart de ses chants.
placoit toujours son épée dans sa
couche de sable
appartenu
veuve Malvina devoit
aussi lui adresse-t-il
!
(9)
sa
a voit
parle souvent dans
fameux, on
tombe
;
une seule
recouvroit. Ainsi Oscar suppose
avec raison qu'elle pourra frapper
un jour
l'œil
du
chasseur.
(10)
Althan
étoit chef des
à' Irlande^ aj)rès la
dit
Bardes
X Artho
mort du jeune Cormnc.
auprès de Fingal 1
et fut
Il
.,
roi
se ren-
reçu au nombre de ses
Bardes.
(11) Tel étoit, dans ces
temps héroïques, le respect
NOTES
«jiii
environnoit
225
Bardes, que
les
Cdirbar
le féroce
après tant de forfaits, n'osa se rendre coupable de
la
mort de l'un d'eux.
NOTES DU CHANT DEUXIEME.
(i)
Il
paroît, par la suite de cette apostroplie,
qu'0««fl«
s'étoit retiré loin
pleurer en secret
la
du
mort de son
reste de l'armée
fils
pour
Oscar. Cette nar-
ration indirecte, et en quelque sorte dramatique,
n'est pas rare
(2)
dans
les poésies
Le poëte commence
de Fillan, qui joue
poëmc.
On
(3)
si
à peindre ici le caractère
grand rôle dans
voit déjà son ardeur
et l'impatience
Fillan
un
A'Ossian.
pour
la suite
la gloire, le
du
feu
qui caractérisent un jeune héros.
Ossianet Fillan n'eurent point la même mère
étoit fils de la belle
épousée après
la
,
mort de Roscrana, mère d'Ossian et
de Bosmina , dont
de Lorma.
:
Clatho que Fingal avoit
il
est fait
mention dans
le
poënre
NOTES.
226
Cette expression peut paroître extraordinaire
(4)
au premier coup-d'œil ;
Toutes
les fois
elle est très familière à
que Fingal
de lui, notre poëte dit qu'il est seul, dans
tude,
Ossian.
n'a point sa famille
autour
la soli-
etc.
Le lecteur
(5)
pendant la
nuit.
qu'on avoit envoyé
se souvient
Fillan sur la colline de
Mora pour observer l'enuemi
Ossian, qui
de ne point quitter
le
l'avoit joint, lui dit
donc
poste que Fingal lui avoit
confié.
(6)
Ossian, par une
fierté
droit point se mesurer avec
demande
Cathmor s'il peut
à
bien entendue, ue vou-
un
le
guerrier obscur
,
et
combattre sans com-
promettre sa valeur.
(7)
Quoiqu'05«rt?2 fût l'homme à qui Ca'irbar
eût causé
tué son
les
fils
plus grands malheurs, puisqu'il avoit
par
la
plus indigue des trahisons, notre
poëte oublie son ressentiment aussitôt que son en-
nemi
n'est plus.
(8)
Carril chante l'hymne du soleU.
(9)
Cairbar.
NOTES DU CHANT TROISIEME.
(i)
Ce
n'étoit
que dans un
rois combattoient en
ils
:
nairement sur nue hauteur d'où
vus
et voir toute l'armée. Si
imminent que
péril
personne
ils
pouvoient être
quelque bataillon ctoit
repoussé ou commençoit à fléchir
vers son chef
les
se plaçoient ordi-
un Barde qui par
,
ils
députoient
des chants relevoit
son courage; quelquefois leurs propres enfants remplissoient cette honorable fonction. Si la défaite de
l'armée paroissoit inévitable, alors
fois les -voix
de la guerre ,
ils
frappoient trois
c'est-à-dire les bosses
de
leur bouclier, faisoient déployer le soliflamme, leur
étendard accoutumé,
(2)
(3)
et se
portoient contre l'ennemi.
Foldath.
Gmtl^ dans
la bataille, se
servoit de l'épée dv
son père Morni.
(4)
La scène se passe dans
(5)
Cathmor.
le
camp
des Irlandais.
NOTES.
228
(6) IjC
Légo, dont
poèmes d'Ossian
les
comme
les
il
,
est si
souvent question dan»
étoit
saines , et quelquefois mortelles
que
c'étoit le séjour des
s'écouloit entre la
lac
et sans
,
marécageux
:
Bardes feignirent
les
âmes pendant
l'intervalle
qui
mort et l'iiymne funèbre. Les âmes
des guerriers pusillanimes
ment
un
vapeurs qui s'en élevoient étoient mal-
y séjournoient
nul espoir de se réunir à
éternelle-
celles
de leur»
ancêtres.
(7)
Ossian suspend
apostrophe
à
sa narration
,
et adresse cette
Cathinor.
NOTES DU CHANT QUATRIEME.
(1)
Le poète, pour douner une haute idée de
la
valeur de l'illan^ omet les détails de son combat
contre
(2)
le
redoutable Foldath.
Les caractères de Foldath
et
de Maltlios sont
bien soutenus: Foldath étoit impétueux et cruel;
Malthos
opiniâtre et méfiant. Leur attachement à
la
NOTES.
Famille d.'Atha étoit égal
bats étoit
la
Malthos
généreux,
et sa
aag
leur valear dans les
même. Foldath
d'ostentation;
étoit
;
étoit plein
de vanité et
n'étoit pas indulgent, mais
(3)
il
conduite à l'égard de Foldath^
son ennemi, prouve qu'un caractère sombre
n'exclut pas toujours
com-
la
et
dur
bonté.
La comparaison qui termine ce beau mono-
logue à'Ossian paroit étrange au premier coup-d'œil ;
mais
où
il
les
faut se souvenir
hommes
(4)
que
le
poète habitoit un pays
orages étoient fréquents, et qu'il parloit à des
à qui ces images étoient familières.
Les rois
,
avant de combattre en personne
étoient dans l'usage de se retirer sur
,
une hauteur, pour
réfléchir sur la bataille qu'ils alloient livrer, et con-
sulter les
ombres de leurs pères.
NOTES DU CHANT CINQUIEME.
(i)
tèrent
Les Bardes qui vinrent après Ossîan débi-
beaucoup de fables sur ce bouclier, auquel Os-
sian , par amour pour sou père
,
avoit attribué des
ao
NOTES,
23o
surprenants. Dans
effets si
tous
les exploits
la suite
à renchérir sur ce qu'en avoit dit
un
firent
sur les fleuves
les
les autres le faisoient
;
comme
pour déclarer
paix, etc.
combat,
ils
;
et se
avoient vu.
son poste,
la
guerre
la
mou-
marcher
,
de hé-
,
pour demander
la
ne prenoient jamais une part active au
un Ueu de
rethoient dans
Quand un
ils le
sûreté d'où
mettre en vers ce qu'ils
et
guerrier quittoit son rang
ou
diffamoient par des satires dont ja-
mémoire ne
se
perdoit chez des peuples pas-
sionnés pour les combats.
tine à les défendre
Il est
uns en
sur une terre solide, etc.
pouvoient tout voir
mais
Ossian:
Les Bardes servoient d'ambassadeurs
(2)
ils
prit à la lettre
colosse dont le bras d'airain faisoit
voir une triple épée
rauts
on
de Fingal, et chaque Barde se plut
pendant
Un
la
corps de troupes, des-
mêlée, veilloit sur eux.
naturel que les chefs se soient intéressés plus
que personne
à la conservation des poètes qui étoient
dans leurs camps car ces poètes étoient seuls capables
;
de
faire passer leurs
noms
à la postérité.
On ne
noissoit pas encore l'histoire; et lorsqu'on
mença
à l'écrire
Germanie,
les
la
en Suéde
,
en Danemarck
Bretagne, et la Gaule,
chants des Bardes, que tout
il
le
fallut
,
con-
com-
dans
la
rassembler
monde
savoit par
NOTES.
«eenr.
On
Nord on
a tiré de ces
des annales
:
poèmes
aussi doit
remplis de fables
(3)
23i
pent être certain que chez
et
les
premiers chapitres
les voir
de fictions.
Ossian, fatigué de décrire,
poème pour
peuples du
-on peu s'étonner de
et rappelé à lui
sentiment de ses propres malheurs
le
les
,
par
interrompt
digressions, que des lecteurs français trouveront
peu brusques, sont
du
célèbre
le
déplorer son infortune. Ces sortes de
fils
très fréquentes
de Fingal:
plaintes donnoient
il
lui
dans
un
les poésies
sembloit que des
une nouvelle force à son ame ,
et
plus de vigueur à son génie naturellement sombre
et
mélancolique.
NOTES DU CHANT SIXIEME.
(i)
Le Cormiil
étoit
une roche de
Mora^ où nous avons vu Fingal
Premier chant.
(2)
Oscar
et
Fiîlan.
la colline
de
s'asseoir dès le
NOTES.
23a
(3)
On
combattre
n'a point oublié
,
que Cathmor, arant de
avoit envoyé Siilinala l'attendre
une grotte qu'habitoit un yjeux Barde.
dam
ARMIN
GALVINA.
ET
Dans les combats les plus vaillants guerriers
Aux pieds A'Armin tomboient froids et
Dans
de
les forêts
la
L'ours expiroit sous ses
De
sans vie;
Scandinavie
traits
meurtriers;
cent ruisseaux les fugitives ondes
Désaltéroient les troupes vagabondes
Des daims
Aux
légers dans ces forêts nourris
;
aboiements de ses dogues cbéris
Retentissoient cent cavernes profondes.
Le
bel
Armin
Aimable
Même
brûloit
pour Galvina^
fleur de ce triste rivage;
désir vers
Armin
entraîna
Cette beauté dédaigneuse et sauvage.
Dans
les vallons blanchis
Dans
les palais,
par
les frimas,
au sommet des montagnes,
Se montroit-elle auprès de ses compagnes?
On n'admiroit
que
ses
jeunes appas.
L'arc pluvieux qui, dans l'or de la nue,
Fait resplendir ses mobiles couleurs,
L'astre
du
soir
Du jour éteint
dont
les
rayons flatteurs
consolent l'étendue
20.
POESIES
a54
Ont un
moins touchant
éclat
et
moins pur
Ses yeux charmants brilloient d'uu doux azur:
En
noirs anneaux flottoit sa chevelure
Dès que
De
l'aurore,
humectant
la
;
verdure
ses rayons, éclairoit nos climats,
L'arc à
la
main, précipitant ses pas
Au fond des bois, témoins de son audace,
Du sanglier elle suivoit la trace.
Et lui lançoit
les flèches
du
trépas.
Le noir GrHma/ brùloit aussi pour
Mais à
Du
elle;
vœux Gal\>ina fut rebelle
Armin son œil fut enchanté;
ses
seul
:
Et quel guerrier joignoit à plus de grâce
Plus de vaillance,
Un jour
et sur- tout
de beauté!
tous deux, fatigués de
la
chasse.
Le front couvert d'une noble sueur,
Pour
respirer le calme et la fraîcheur,
S'étoient assis dans
Grotte écartée,
On y voyoit
et
une grotte sombre.
bien chère à leurs yeux;
étinceler dans l'ombre
Les boucliers que portoient leurs aïeux.
«
Repose
•
Dit
le
ici
sans crainte,
héros. Sur
la
mon
amie,
roche noircie
Je vois errer un chevreuil bondissant;
«
J'y cours...
»
— Soudain
la belle
en rougissant
:
D O
s s
'
I
A
235
N,
«
Armin^ pourquoi me laisser sans défense?
Ne sais-tu pas que Gnimal quelquefois
«
Rassasié de féroces exploits,
«
a
Sous
«
Mon bien-aiiné
Armin s'éloigne
A
chercher
cet abri vient
veille
,
et
:
Elle revêt
D'un
le
d'airain ;
nu charge
sa foible
Armln^
Voit resplendir
à travers la bruyère,
le
formidable acier
Saisi d'horreur, de rage,
bande
Vole ,
l'arc
et se
L'infortuné
;
la flèche
!
obéissante
quelle douleur amere
s'applaudit de la
Mais de quel sang
fatal
mort d'un
il
a
rougi
O désespoir!
ce sang noir et
D'un
sein de
lis et jaillit et
C'est
Gahinn^ que
Qui
:
d'épouvante,
plonge au cœur dn faux guerrier.
Doit expier ce triomphe
Il
main,
la visière,
roc profond sort d'un pas incertain.
Bientôt
Il
»
héros
Et, de son casque abaissant
Du
repos.
biche fugitive.
la
une armure
glaive
le silence?
mon
Gahina craintive
son insu veut suivre
Déjà pressant
sur
se présente
la
!
rival;
la terre
!
fumant
bouillonne....
mort environne,
aax yeux, de son amant.
POESIES D'OSSIAN.
236
Armin^ penché sur la fleur qu'il moissonne,
Ne peut donner l'essor à ses regrets....
Il
Et
pousse un
le
cri.... sa
force l'abandonne,
trépas se répand sur ses traits.
Dormez tous deux sous
Jeunes amants
,
Dormez en paix aux
Au
la
pierre sauvage,
dignes d'un meilleur sort;
sifflements
du Nord,
bruit des flots tourmentés par l'orage;
Mais, dans
les airs, brûlez
Et quelquefois , à l'heure
de nouveaux feux,
solitaire
Où les brouillards enveloppent les
Accompagnés de l'ombre
De vos
et
cieux,
du mystère.
soupirs attendrissez ces lieux.
LA GUERRE
D'INISTONA,
POEME.
SOMMAIRE.
Cormalo gendre Ae Normal
,
,
roi
à'Inistona,
s'étoit
révolté coutre lui, et vouloit le détrôuer. Fiiigal ea-
Toya Oscar, son
Cormalo tomba
petit-fils
au secours de
,
sous les coups du héros de
Normal.
Morven.
Ossian pour faire briller davantage la valeur de son
cher Oscar, suppose que c'est lui-même qui demande
,
à partir pour Inistona.
Il
est minait... tout repose, tout dort...
Le hibou seul pousse des
Le météore de
Tremble sur
Le voyageur,
Cherche de
Et
le
la
cris
nocturnes,
mort
les flots taciturnes;
traînant ses pas douteux.
l'oeil la
tour hospitaUere ;
chevreuil, dans son
lit
de bruyère.
Frissonne au brnit des vents tumultueux.
Descends de
ta
voûte guerrière,
POESIES
238
O ma harpe
!
et frémis
sous
les doigts
Réponds aux tendres vœux,
Ossian va parler
Mon fils
Il
A'
à la
du
-vieillard;
douleur d'un
père....
Oscar.
revenoit de la chasse;
entend célébrer
les
louanges du roi
(i)
;
Et sent redoubler son audace.
«
Chef de mille héros,
«
Le premier après
«
Vos deux noms
«
Mais Oscar ^ sans
Cl
Passera dans Moriteti
«
Héros comblés de gloire, ah ne permettez pas
«
Que
Fingal,
dit-il,
et toi
lui, roi des chants, ô
illustrés vivront
mon
père!
dans l'avenir;
moindre souvenir,
laisser le
comme une ombre légère.
!
votre
fils,
opprobre
et
fardeau de la terre,
«
Près de vous, sans honneur , attende
«
Inistona gémit sous
«
Laissez partir Oscar; qu'il aille, loin de vous,
«
Par de nobles travaux préluder à sa gloire ;
«
Et
«
A
s'il
le
doit succomber,
ses trop foibles
poids de
si le
la
le trépas!
guerre
:
destin jaloux
mains refuse
la victoire,
M
De sa chute du moins le bruit injurieux
Ne viendra point troubler vos moments belliqueux.
Le Barde, appercevant ma tombe solitaire,
Me paiera dans ses chants un tribut de douleurs,
a
Et peut-être
«
«
«
le soir, à l'heure
du mystère.
D'OS
SI AN.
239
Quelque jesue beauté me donnera des
*
—
«
mon
Héritier de
sang
et
de
pleurs.
»
ma renommée,
répond F/"«^rt/,- que mes nombreux v:iisseaux
«
Pars, lui
«
Reçoivent dans leurs flancs une vaillante armée,
«
Et qu'à
voix d'Oscar
la
Au
Et
le
traversent les eaux.
»
sein des voiles frémissantes
Déjà
Sous
ils
le
vent souffle
et rugit;
vaisseau d'Oscar l'onde en fureur mugit,
les rocs
sont battus des vagues blanchissantes.
Aucun nuage
épais n'enveloppe les airs:
Enfin, après un long voyage.
Du
Mon
Il
fils d'
milieu des bruyantes mers
fnislona découvre
arrive bientôt au palais de
Lui remet son épée,
Le
et
garde
le rivage.
Normal,
le silence.
vieillard reconnoîl le glaive
de
Fingai.
Et ses larmes soudain coulent en abondance.
Douces larmes de joie
Mon père et
Dans
l'âge
de
la
d'heureux souvenirs!
gloire et des nobles loisirs
S'étoient assis
«
et
ce héros, au retour des conquêtes,
Etranger, dit
aux mêmes
Normal,
fêtes.
l'âge affoiblit
mon
bras
:
POESIES
a4«
Plains -moi, plains un \ieillard dontla main incertain*
<
«
Ne soulevé
«
La lance des combats.
qu'à peine
«
Mon glaive suspendu depuis long-temps sommeille.
«
Hélas! j'avois trois
Ne
«
«
Sous
«
J'avois
«
Le
<c
Et des bords du
«
fils:
réjouit plus
leur consolante voix
mon
la pierre insensible ils
A
Connalo, chef des
donné ma
traître a
fille
,
oreiUe
;
reposent tous
trois.
tribus lointaines
orgueil de
mes vieux
Lano
s'avance vers ces plaines.
«
O vous, dont la vaillance égala mes exploits,
O mes enfants, du fond de votre étroit asyle,
«
D'un déplorable père entendez- vous
«
Est-ce la vôtre, hélas
«
Soupirer à travers
«
—
«
«
!
la
voix?
que j'entends quelquefois
le feuillage
mobile?
Normal^lui dit Oscar, comment
Ces héros, boucliers de ton
sont-ils tombé»
illustre race?
«
Comment à
«
Pour monter sur
«
Belliqueux habitants du nuage léger,
•
y poursuivent encore
Le chevreuil fantastique et le daim mensonger,
«
«
Leurs
A
la
ans.
rassemblé ses guerriers menaçants,
tes
regards se sont-ils dérobés
les
clarté
vents
,
et rouler
dans l'espace?
du météore
traits aériens
(a)
D'OS
Corma/o,
- «
lui
Dans mon
c<
De mes
fêtes
SI AN.
s4i
répond le vieillard tout en larmes,
palais hospitalier,
un jour
vint pariagcr les charmes.
Rien
u'effaçoit alors cet aimable guerrier;
Dans
ces
n
II
Mes
Ma
jeux que
remporta
la
les
paix inventa pour la gloire
prix de la valeur
guerriers à son bras cédèrent
fille
la
;
victoire,
à sa beauté livra son jeune cœur.
Mes fils étoient absents. Au retour de la chasse,
Quand ils eurent appris qu'un étranger heureux
A voit
de tous les miens domté
la
Des larmes de dépit coulèrent de
Argon
et
Cor/na/o joiiterent à
Qui pouvoit
Cormalo
résister
noble audace.
leurs yeux.
la
lance;
au premier de mes
fils?
terrassé cacha ses noirs soucis.
Mais nourrit dans son cœur des projets de vengeance.
Mes généreux enfants l'accompagnoient un jour
Au fond des
bois, peuplés de biches vagabondes:
Ses flèches fendent
Ils
tombèrent
Le perfide revient;
Il
Et
l'emmené avec
Normal^
l'air..,
les fils
il
lui
dans ces forêts profondes
que pleure
enlevé
ma
mon amour.
fiUe,
dans ses états lointains
;
délaissé de toute sa famille,
Languit dans son palais , jouet des noirs destins.
«
Cependant l'ombre
fuit
:
le
jour qui lui succède
21
POESIES
242
c<
Disparoit à son tour; et mes
yeux éperdus
(t
Cherchent , mais vainement,
les lils quej'ai
«
Rien ne soulage, hélas
«
«
Runaro tout-à-coup entre dans le palais,
Runaro, chien léger, bondissant, et lidele,
Qui sur les monts déserts et dans les bois épais
Aux ordres du chasseur ne fut jamais rebelle;
«
Sa langue s'échappoit de son gosier brûlant:
«
Il
«
Plein de trouble , après lui , je m'élance sur l'heure
M
Et jusqu'au fond
«
ti
me
!
la
ma
regarde, et sort de
«
O
ce
Retrouve
désespoir!
du bois
Normal
perdus.
douleur qui m'obsède.
me
il
sur
triste
,
guide en hurlant.
la terre
ses enfants percés
demeure.
du
sanglante
trait mortel...
«
Dans ce tombeau,que baigne une onde murmurante,
«
Ils
dorment tous
—
«
«
t<
«
S'écrie
les trois
Cnigal, Conor, chefs de
Oscar;
bataille à
Rassemblez sur mes pas
Nous
Ils
du sommeil
mon
mon élite
le
guerrière
désert aride
leur sein ténébreux s'échappe
:
du Lano.
:
Tels on voit s'entasser des nuages brillants
De
père,
Cormalo!
allons aujourd'hui sur les bords
s'engagent soudain dans
éternel.
un jour
;
livide,
Et des tonnerres sourds résonnent dans leurs flancs.
Déjà du cor guerrier
les éclats reteatissenl
;
D O
'
s s
Des Lois profonds
Lano
Les vagues du
Et
Cormalo
A la
A
I
palais frémit.
voix de ses chefs s'élance chaque armée
Le lâche Cormalo meurt sous
Mon fils
rend à
Et regagne
Normal sa
Quand
les traits
fille
Morven^ béni par
Quelle fut A^Ossian
Il
243
bondissent ^
son
Ini-jnêine en
N.
l'écho gémit;
:
à Oscar:
bien-aimée,
le vieillard.
surprise joyeuse
la
sur les flots lointains et d'écume blanchis
apperçut
les
mâts du vaisseau de son
Le voyageur, quand
fils
!
nuit ténébreuse
la
D'épais brouillards voile les monts déserts,
Q uand les morts, s'échappan
t
des rochers entr'ouverts,
Traînent en longs soupirs une voix sépulcrale.
Avec moins de transport,
Un doux
voit briller dans les airs
rayon de l'aube matinale.
Nous conduisons Oscar au
Autour de
lui
palais de
Morven.
chaque guerrier s'empresse
Et moi sur ce héros, seul
fruit de
;
mon hymen.
Je répands quelques pleurs de joie et de tendresse.
Vous, qui voyez encor
Conduisez Ossian sur
la
lumière des cieux,
ses vertes collines
;
Qu'assis au pied du roc, sous les ombres voisines
POESIES
a44
Du
coudrier mobile,
D'un
D O
'
S S
I
torrent éloigné j'écoute le
tes
Et console
Qu'à
ta
doux accords
les
voix
S'empare de
soir,
essayer le pouvoir.
maux que ma
le
N.
murmure.
Aimable Malvina^ chante l'hymne du
Tiens de
A
ou du chêne noueux.
foiblesse endure;
sommeil, descendu sur mes yenx,
mon ame,
et
ferme mes paupières!
Songes de ma jeunesse, ô vous, songes heureux
Environnez mes sens de vos douces chimères....
Je vais m'entretenir avec tous mes aïeux.
F
NOTES.
•
(0 Fingal.
(2)
Ceci est conforme à l'opinion mythologiqnc
des anciens Ecossais, qui pensoient qu'après
les
gueniers se livroient dans
d'une chasse fantastique.
les airs
aux
la
mort
plaisirs
UTHAL.
J-Jxîf s l'âge des combats, dans l'âge de l'amour,
Des
belles, des héros,
triomphant tour-à-tour,
Ronnan^
Contre son père un jour
Uthal^
Il le
fils
de
charge de fers, et
Dans une
le
avoit
un cœur barbaie:
sa haine se déclare;
plonge soudain
humide, où jamais
grotte
le
matin
De ses rayons épars, sur la noire bruyère
Ne fit briller la douce et joyeuse lumiei-e.
Nul chêne, dans la nuit, n'éclairoit de ses feux
La morne obscurité de
Et
les
mugissements
ce séjour affreux,
(!es
vagues courroucées
Seuls du vieillard par fois y troubloient les pensées.
Snitlio^ son vieil ami, les
Arrive,
et
Fingal tremble
Il saisit,
et pâlit
furieux,
la
:
Il
réveille
ordonne
Je pars
:
en son ame,
à
son
fils
trois fois
dans sa colère
lance de son père;
Trois fois de ses combats
Se
yeux mouillés de pleurs,
de ce roi nous apprend les pialheurs.
le
souvenir vainqueur
et retient sa fureur.
de déployer ses voiles
;
déjà le soir, le front paré d'étoiles,
Piépandoit sur les eaux son éclat incertain
:
POESIES D'OSSIAN.
Tranquille, je voguois
,
247
quand, d'un rocher lointain.
Les accents d'une voix mélodieuse et teudie
Jusqu'à u fond de mon cœur viennent se faire entendre.
me
Toscar, cette plaintive voi»?
«
Quelle est,
«
Est-ce l'Ombre d'un Barde? O^s/a/z, j'apperçois
«
Une jeune beauté
«
Ses cheveux sont épars
«
Repose sur son bras
«
Allons,
Il
dit
:
fils
dit
près de nous gémissante:
;
sa tète languissante
éclatant de blancheur....
des héros, consoler sa douleur.
a la faveur de l'ombre.
nous approchons
Bientôt l'écho des mers et de
Nous apporte une voix
Les soupirs et
»
la ro<
he sombre
qui, parmi les sanglots,
pleurs, laisse échapper ces mots;
les
murmurants, nuit
«
Flots
«
Rocher
«
Dans votre
«
Recueillez
«
Au
«
Je n'ai pas toujours habité
«
Long-temps
«
De mon
«
Mon
solitaire,
.sauvage et ténébreux
voile funéraire
mes pleurs douloureux.
fond de
l'autre d' s
l'éclat
palais
père
me
de
orua
tempêtes
ma
,
beauté
les fêtes.
voyoit fleurir
POESIES
48
«
«
«
«
*
Comme le lis de nos montagnes
Ma douceur me faisoit chérir
;
De mes innocentes compagnes.
]Sina fut l'amour des héros
;
vœux iVmareheUe,
«
Mais
«
Sans aimer troubloit leur repos,
«
Et n'en paroissoit que plus
«
Tu
«
Brillant
à leurs
belle.
mon cher Vthal^
comme un astre paisible;
vins alors,
«
Nul brave
"
Je t'aimai; je
«
Tu promis
«
Et maintenant tu
«
Trop aimable
n
Trahir de
«
En
faveur de les ennemis
«
Ma
foible
o
Ingrat , quel crime ai-je
n'étoit ton égal
te
:
crus sensible.
de n'aimer que moi,
si
«
Pourquoi ne
Me
délaisses.
douces promesses?
main
«
me
guerrier, pourquoi
s'est -elle
suis-jê plus
voici seule au
armée.'
commis ?
aimée?
bord des eaux,
ma douleur profonde,
maux
«
Seule avec
«
Sans autres témoins de mes
«
Que
la
nuit,
le
léphyr,
et l'onde.
>•
D O
s s
•
A
I
N.
De mes yenx
*4g
nos cœnrs;
Elle dit. Sa complainte a déchiré
malgré moi je sens couler des pleurs,
Et ni'avancant vers elle:
«
O jeune infortunée!
«
A d'éternels
ennuis tu n'es point condamnée ;
Morvcn
veillent sur tes appas.
«
Les héros de
«
Pour consoler
«
Feront-ils resplendir leur lance vengeresse.-'
«
A
«
Viens, lumière d'amour; peut-être quelquefois
peiue en quels lointains climats
ton sort déplorable Ossian s'intéresse.
d' Ossian t'ont
«
Tes Bardes
n
Viens donc,
—
ta
«
Qui ne
te
et suis
les exploits.
connoît pas,
fils
de
la
Le
«
O mon héros Nina
!
être alarmée.
renommé»?
ton aspect sourit de son
«
foible à
chanté
mes pas sans en
s'abandonne à
effroi.
ta foi. »
Elle dit, et descend dans
mon
Un léger incarnat rougit
son front timide;
Et, bientôt emportés par
Nous touchons
ses pâles
les flots
à' Altheuta les
L'aurore en ce
De
vaisseau rapide.
moment
bondissants,
bords retentissants.
répaudoit sur les plaines
rayons les clartés incertaines.
Les chasseurs, dispersés au fond des bois voisins,
Poursuivoient des chevreuils
Uthal
les
est à leur tète; entre ses
rapides essaims.
mains vaillantes
Resplendissent deux arcs et deux lances
Cinq do^es,
l'ceii
brillautc-s
;
eu feu, marcheut devant .ses pas.
POESIES
25o
Rien
n'égaloit,
Ut fiai
^
Ta beauté, ton souris,
force de ton bras,
la
tes
yenx,
ta
chevelnre;
Mais comme un noir brouillard ton ame
Ut/ml nous appercoit , sur
Les chasseurs près de
Il
s'arrête
le
étoit obscure.
bord descendus
lui s'arrêtent
:
éperdus.
lui-même, eallammé de colère,
Fait retentir les airs de sa voix téméraire.
Jette
un œil de courroux
Et députe vers nous
sur les chasseurs tremblants,
un Barde en cheveux blancs.
Barde, un destin déplorable
«
Etrangers, dit
«t
Vous
a
Uthal règne en
«
Ouvert aux étrangers son sauvage
«
Uthal qui ne
«
Ni préparer pour eux
«
Uthal qui s'applaudit de leur
a
Et rougit de leur sang ses torrents écumeux.
le
auroit-il jetés sur ce
ces lieux;
sait
Selma vous
bord redoutable?
Uthal qui
n'a jamais
palais
;
point jouir de leurs conquêtes,
la salle
vit naître,
de ses fêtes;
sort rigoureux,
an sein de
ses murailles,
a
Si
«
Envoyez
«
Qu'ils aillent , de ce pas , apprendre an \ien^ Fingal
a
Que son peuple
a
Peut-êtreqnelquejour/^jw^rt/ viendra lui-même....»
—
ï
«
Lui
.'
trois héros,
s'écrie
messagers des batailles;
a péri
sous
Ossian dans
Barde insensé, ton roi,
la
sa
lance d'Uthal.
fureur extrême
comme un
:
timide daim.
t)
Au
a
O
s s
seul bruit de ses pas
A
I
231
N.
disparoîtroit soudain.
,
quand il s'avance,
«
Connois-tu bien Fingal?
«
Que la guerre et la mort sout au bout de sa
Que l'éclair de ses yeux embrase les béros,
«
sais-tu,
a
Et que son souffle au loin en
CI
Gloire au roi de
Mon>en! de
a
Tu veux que trois
«
O Barde
a
Que
Pareil
!
s'ils
fait
rouler les flots?
notre mort cruelle
guerriers lui portent la nouvelle.
y vont, Fingal saura du moins
de notre valeur ces bords furent témoins.
au sanglier qu'une blessure
Ossian au combat vole
Les guerriers
Ossian
et
à' Altheuta
.,
près
irrite,
d'L'^f/ia/
Toscar marchent daus
Allheuta cède,
fuit,
Loin du combat,
vieux Bar
e
»
et se précipite.
rassemblés.
S'opposent vainement à nos coups redoublés
Du
lance,
le
ou meurt sur
assise
le rivage.
au bord des vastes mers,
Lethmal écoutant
T^ina pâle, tremblante,
:
carnage;
et les
les
concerts,
yeux pleins de larmes,
Tout-à-coup aux clameurs, au tumulte des armes.
Entendant succéder
le
calme des tombeaux:
«
Ah
«
Dit-elle, et sur la rocbe escarpée et lointaine
a
Où du
«
Mes yeux n'auroient pas vu
!
que ne
suis-je encor seule
perfide
au milieu des eaux,
Uthal m'abandonna
le
la
haine
coup qui
l'a
.^
frappé.
POESIES
25»
Vthal! de tant d'amonr trompé,
ï
Cher
«
Malgré
«
Redoutables vainqueurs, prenez aussi
et perfide
ta
trahison, je ne suis point guérie...
Elle s'avance alors, et de
Elle voit dans
Eperdue
elle fuit...
Elle cherche...
Le
Je
vie. »
son lâche amant
le
bouclier sanglant...
A travers la bruyère
O douleur!
privé de
la
lumière,
sein percé d'un dard, le front décoloré,
Vthal
A
mes mains
ma
s'offre bientôt à
son œil égaré.
ses côtés sans voix, sans haleine, elle tombe...
les pleurai
Ronnan
tous deux, et j'élevai leur tombe.
est libre enfin, et des
hymnes de paix
Escortent ce vieillard jusque dans son palais.
Il
n'est rien, dans l'excès de
Ou
Il
que
sa
son joyeux délire.
main ne touche, ou que sou œil n'admire;
contemple sur-tout, avec ravissement,
Ces armes, des héros antique monument.
Ces arcs, ces boucliers que
Suspendit autrefois
On chanla
à ces
le
bras de ses pères
voûtes guerrières.
devant lui nos exploits belliqueux
Lui-même avec transport nous
De son
coupable
fils
:
bénit; mais ses
cherchoient encor
yeux
la trace.
Nous lui dîmes qnUthal^ puni de son audace
Perdu dans
l'épaisseur des plus
sombres
forêts,
D O
'
Y cachoit loiu de
nous
s s
sa
I
A
honte
N.
Mais Uthal reposoit étendu sous
la pierre,
Froid, immobile, sourc^ aux accents de
Nous fendîmes
ses vaillantes
guerre.
la
alors les flots de l'Océan,
Nous gagnâmes Morven;
Sur
!
et ses regrets.
mains,
et
l'heureux Ossian
à la gloire fidèles,
Sentit couler eacor les larmes paternelles.
HYMNE
LE DERNIER
D'OSSIAN.
\J de Lutha
Roule
impétueux ,
torrent
dans
tes flots d'azur
le
vallon tranquille
!
Forêts, versez sur lui votre ombrage mobile.
Et d'un jour trop ardent amortissez
Nou
loin croît
Qui, balançant au
Sa
tête
Semble
a
«
souffle
humide
et
dire avec
les
feux!
fleur solitaire,
la
du zéphyr
piintanniere,
un soupir
Zéphyr jaloux, dans
la
:
rosée
Laisse-moi rafraîchir mes attraits languissants;
ma
«
Bientôt sur
«
Je serai
«
Aujourd'hui
le
tige brisée
jouet des vents
le
«
Des parfums qu'exhale
«
Hélas!
«
Demain j'aurai
Demain
il
aussi,
:
chasseur s'enivre
mon
sein...
reviendra demain...
quand
cessé de vivre
la
»
;
nuit sur les bois
Etendra son écharpe immense.
Le chasseur à'Ossian n'entendra plus
Epouvanté de
Il
mon
silence.
portera ses pas vers l'asyle des rois
;
la
voix;
POESIES D'OSSIAN.
Ma harpe
Ma
harpe, dont
veuve
les
et
255
détendue,
chants l'émurent tant de fois,
Soudain viendra frapper
sa
vue.
Et de sa tristesse imprévue
Des pleurs soulageront
Viens donc, ô
MaUinal viens
le
poids.
sous
le
chêne antique
Qu'assiègent les vents et les flots.
Elever de tes mains la tomhe pacifique
Où va
se reposer le dernier des héros.
Viens.. Mais l'esprit des bois
.
Le fïls
Owj'aTi,
Un
j'ai
mort
J'allois
filles
i
)
répond seul à ma plainte.
Alpin.
passé près des murs de Littha;
silence de
Des
(
d'
du
attriste leur enceinte.
y chercher Mal\>i7ia..,
palais la foule consternée
Bientôt
s'est offerte à
mes yeux:
Ses pleurs couloient pour une infortunée...
L'épouse de ton
fils a
rejoint ses aïeux.
Os SI AN.
O
toi
que pleurent
tes
compagnes.
Repose en paix dans ces Lois ténébreux ;
Astre charmant,
tes
rayons amoureux
N'ont pas long-temps brillé sur nos montagnes!
Tes feux de mes vieux jours réchauffoient le déclin;
Mais tu m'as
De mes
laissé seul
au milieu des ténèbres.
soupirs, de mes plaintes funèbres,
Je ne lasserai pas l'écho du mont voisin.
POESIES
256
Tn
n'es pins, et dans
Ne luit que la
clarté
nos campagnes
du météore
affreux...
Astre charmant, tes rayons amoureux
N'ont pas long-temps
Repose en paix dans
Mais, belle
Tu
Là
de
les flancs
flotte
et d'éclairs
ta
entourée,
demeure azurée
t'assieds sur
An sommet
Dont
sur nos montagnes.
prends un lumineux essor.
Et dans
Tu
brillé
ces bois ténébreux.
VAnien
un
trône d'or.
s'épaissit
un nuage
argentés s'élèvent jusqu'aux cieux
sur les vents
Là résident Fingal
le palais
de l'orage;
et ses bx-aves aieux.
Mon père, enveloppé de vapeurs éclatantes,
Du glaive aérien arme son foible bras
:
Les Ombres des héros autour de lui flottantes
Se rappellent encor leurs antiques combats;
Il
écoute d'Vllinln voix mélancolique.
Le vieux Barde, au milieu des héros assemblés.
Presse encor sous ses doigts
la
harpe fantastique,
Et module les chants des siècles écoulés.
La belle Mah'ina s'avance
Une aimable rougeur peint son front ingénu
;
Elle s'arrête, et
De
contemple en silence
ses aïeux le visage
inconnu.
:
:
D O
'
«
s s
I
A
N.
aa:
Pourquoi, lui dit F/nga/, viens-tu dans ma demeure?
As-tu pu sans remords abandonner
«
Tes soins, de
«
Dévoient charmer
mon
fils ?
ses jours obscurcis,
la dernière
heure
:
«
Quel deuil dans son palais... Descendez , ô Zéphyrs
«
Allez, et portez-lui nos douloureux soupirs.
»
Mais du pâle occident, porté sur un nuage,
Quel fantôme apparoit aux yeux de Malvina?
Un
sourire de joie anime son visage
Que
«
«
sombre mort
sillonna.
Je suis Toscar. Quelle noire vapeur
«
De
tes
«
Ma
fille,
Eh
Du
la
Astre d'amour, reconnois ton vieux père:
jeunes rayons éteignit
la lumière.»'
d'OMJrt« pleures-tu
le
malheur?
»
quoi, Toscar^ ton ame généreuse
plaintif Ossiaii garde le souvenir!
Un jour
De nos
la
renommée
à l'aile
impétueuse
exploits rivaux instruira l'avenir:
Notre jeunesse ardente
et liera
Plus d'une fois illustra ces déserts:
A
nos pieds mordoient
la
poussière
Mille héros, de blessures couverts
Dans leur sang confondu
les collines
;
trempées
Retentissoient sous nos rapides pas...
Gloire à ton
nom,
roi des épées,
aa.
!
POESIES
258
Suprême
combats
arbitre des
!
Bientôt nos âmes consolées
Voltigeront dans
le
Sous
les
la
douleur,
même
palais.
ans, et les regrets
Je sens mes forces accablées.
Conduis, ô
fils dH
Les sombres
Retombent
Alpin ^
flots
à
du
lac
le vieillard
grand bruit sur leur rive écumaute....
Le Barde va chanter pour
Sur
le
dans ses bois:
que l'aquilon tourmente
dernière fois.
la
un vieux chêne
torrent se balance
Que d'un
souffle de glace ont blanchi les hivers;
Ma
est
harpe
suspendue
à sa
branche prochaine.
Je l'entends qui frémit au sein de ces
Est-ce le vent,
Qui
déserts...
ma harpe, ou bien quelqu'Ombre vainc
t'arrache en passant ces funèbres concerts?
Quel transport m'agite
Approche,
fils
à' Alpin]
Accompagnez
le
O
et
m'enflamme.'
mes chants, dans
départ de
La mort va mettre un terme
à
mon
les ;iirs
ame.
mes longues douleurs.
Rugissez, vents du nord, et déployez vos ailes;
Portez jusqu'à Fingal mes plaintes solemnelles.
O Fingal! je te vois, assis
sur des vapeurs
Tu n'es plus l'effroi des armées
De tes prunelles enflimmées
En
rapides éclairs ne
Qu'il est foible
,
jaillit
plus
;
la mort....
celui qui fut jadis si fort
!
:
D O
s s
'
Mais dans
Et tu
Le tonnerre
les
à ta
I
A
semés sur
tes
259
N.
mains tu caches
tes
pas
les
tempêtes , (2)
:
Toix éclate sur nos
têtes,
Et des clartés du jour tu prives ces climats.
Quand
ta
fureur est appaisée
Le zéphyr du matin caresse
Et sur
le
les
ruisseaux.
front des arbrisseaux
Frémit en gouttes d'or une humide rosée.
Le soleU du printemps
Des parfums
les
plus
Voit bondir
Sur
la
Mais l'aquilon
le
la
embaumée
colline
chevreuil joyeux
verdure ranimée....
se tait;
un
S'est élevé de la
Et meurt dans
Un héros
couronne de feux;
se
doux
bruit sourd et confus
bruyère
chênes touffus.
les
m'apparoît sur son char de lumière;
Il
m'appelle et m'invite à m'élaucer vers
«
Oisian^
me
ton dernier jour
dit-il,
«
Rien ne manque
«
Tes chants,
la gloire
Frappent depuis long-temps
«
Réunis-toi ,
«
Viens...
Et
»
Le char
comme un
fils ,
oreille
charmée,
mots
à ces
se
dérobe à
;
ma vue,
feu léger remonte dans la nue.
O le plus grand des
le
de Selina^
mon
à tou t ce qui t'aima
Toi que j'ai tant chéri,
Et goûter
:
ma renommée
à
«
mon
lui.
a lui
repos
rois
si
!
toi
qne j'ai tant pleuré,
je vais te voir
souvent désiré.
encore
,
26o
POESIES
Vents orageux du
soir,
De
Ossian va
La nuit
dormir... ne le réveillez pas...
S'empare de
Ne
implore
:
doit être longue... Et quel penser funèbre
Réponds,
Et
ma bouche vous
vos bruyantes voix retenez les éclats
mon ame
fils
que
sais-tn pas encor
le guerrier
et
semble
la flétrir.''
de Fingal , as-tu peur de mourir?
le
guerrier célèbre
obscur doivent tous deux
périr.'
Pourquoi des chagrins qui t'obsèdent
Par d'indignes terreurs augmentes-tu
le
poids*
O débile vieillard! les hommes se succèdent
Comme les flots des mers et les feuilles des bois.
L'inexorable mort a-t-elle été touchée
Des
attraits
Fillan^
Ne
Et
s'est-il
point
sur les bords du
douleurs
l'âge et les
Meurs
fleur de sa tige arrachée.
flétri
Barde insensé, tu voudrois fuir
toi,
Sous
de Rino^ du courage A'Oscar?
comme une
:
ta gloire vivra
La verront
Qni brave
s'élever
la
tombe!
succombe.
nos derniers descendant»
comme un chêne
les assauts
Et compte sans
;
ta foiblesse
Lubar?
sauvage
du ténébreux orage,
vieillir et les
jours et
les ans.
Fin des Poésies galliques.
;
NOTES.
(
vn
I
)
Les anciens Ecossois croyoient que l'écho étoit
esprit qui se plaisoit à répéter les derniers sons.
(2)
Cette superbe description
gal sur
ses
les
mains , semble
a dit dans
du pouvoir de Fîn-
vents, sur les tempêtes, qu'il cache
la
dans
contradictoire avec ce qa'Ossian
strophe précédente, où
Fingal comme une Ombre vaine
\ effroi des armées. Mais tout
opinions de ces peuples
:
ils
et
il
représente
qui n'est plus
cela est
conforme aux
croyoient que les fan-
tômes commandoient aux éléments, mais
qu'ils n'a-
Toient plus de force pour combattre.
Plusieurs écrivains avant
le
voici
de
moi s'étoient essayés dans
genre A'Ossian. Leurs fragments sont connus.
un qui l'est aussi, mais
l'être
Ossian
;
davantage. Le sujet n'en est point pris dans
mais l'auteur ,
le
citoyen Coupigni , s'est
emparé avec beaucoup de discernement de
et
En
qui, selon moi, mérite
de ses tours
les
plus familiers.
ses
images
FRAGMENT DU CHANT D'ARMIN.
ouRQUoi me
I
réveiller, ô souffle
Vainement tu me
Je verse
les trésors
Relevé vers
De ces
Qui
dis
:
Sur
du printemps?
épuisée
ta tige
d'une fraîche rosée;
le ciel tes
rameaux languissants.
rocs suspendus déjà descend l'orage
doit frapper
Des tempêtes
ma
déjà
mon
tête et sécher
Ses rugissements sourds ébranlent
Quelque jour sur
feuillage.
gronde l'avant-coureur
les
;
montagnes.
ces Lords viendra le voyageur,
Et pensif, inquiet, parcourant ces campagnes,
cherchera
II
le lis
dont son œil enchanté
Admiroit autrefois
Il
l'éclat et la
beauté
:
n'y trouvera plus qu'une fleur pâlissante,
Sous des vents ennemis abattue
O vous, amis des morts,
Quand
le voile
Lorsque
le
et
mourante.
creusez-leur
un tombeau
des nuits couvrira ce coteau.
vent du nord courbera
Assise sur les vents,
mon Ombre
la
bruyère.
soh taire.
Par d'amers souvenirs rappelant ses douleurs.
Aux
guerriers attendris demandera des pleurs
:
Tranquille dans sa grotte, au milieu des ténèbres,
iae
chasseur
,
éveillé
par mes plaintes funèbres,
!
FRAGMENT
À
la
sombre
Soudain rassemblera
En
ses
dogues haletants
;
vain les noirs frimas pèseront sur sa tête,
Je
le verrai
Et
le
franchir et les ravins profonds.
écumant
fleuve
dun
Sous Tabri
Il
2(
quelques feux mourants,
clarté de
,
entendra des morts
Mêler leurs
Mais
les
le
les
cris plaintifs à la
la
nuit qui
le
brille enfin
Tremble
voix des torrents.
la
plaine.
cache à nos traits,
;
sa
et se réfléchit
lumière incertaine
dans
la
source prochaine.
vain l'ombre au chasseur ramené
Armin
ne connoît plus que
Je vais m'asseoir
Quand
Quand
;
tempête.
la
fantômes errants
cerf rapide a quitté les forêts.
La lune
En
cime des monts
ombres déjà descendent dans
Rassuré par
Déjà
et la
rocher, seul avec
ici
dans
ma
la
le
repos:
paix des tombeaux.
douleur profonde:
l'aurore viendra rendre le jour au
l'étoile
Je pleurerai
Le temps
du
ma
et la
fille, et les
ma
gloire.
mon
bras.
jours de
douleur ont affoibU
Vous que jadis Armin
De mes
monde;
soir brillera sur les eaux,
instruisit
aux combats.
exploits passés conservez la
mémoire ;
mon tombeau l'hymne de la victoire.
chantez aussi: mon cœur, à vos accents,
Chantez sur
Bardes,
Du
Je
malheur
et des
ans ne ressent plus l'outrage.
les revois ces jours,
où, brûlant de cowrage.
Je chassois devant moi mes ennemis sanglants
DU CHANT D'ARMIN.
464
Ils
fuyoient éperdus,
ou tomboient
L'Océan en fureur, soulevé par
De
flots
expirants;
l'orage.
moins turbulents tourmente le
rivage.
J'étois puissant alors; je suis foible aujourd'hui;
Le
trait le
plus léger pesé à
Des roseaux du désert
ma main
la tête
tremblante ;
obéissante
celle à'Arnun a besoin d'un appui.
Vos accords cependant consolent mon ennui.
Moins que
Chantez, Bardes , chantez
FIN.
!

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