HISTOIRES SANS PAROLES L`ARTOTHEQUE DE SAINT
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HISTOIRES SANS PAROLES L`ARTOTHEQUE DE SAINT
HISTOIRES SANS PAROLES L’ARTOTHEQUE DE SAINT-FONS A LA MEDIATHEQUE DE FEYZIN Du 3 septembre au 1er octobre Vernissage le 3 septembre à 10h30 (Médiathèque Feyzin) Parcours commenté vendredi 9 septembre à 18h30 PRESENTATION : L’artothèque du CAP de Saint-Fons rend visite à ses voisins de Feyzin avec une exposition extraite de sa collection. Proches de l’imagerie populaire (bande dessinée, illustration de jadis et d’aujourd’hui), les œuvres racontent ou amorcent une profusion d’histoires. La fable, le conte ou l’allégorie sont au rendez-vous, accompagnés d’une étrangeté, parfois même d’une cruauté, indissociables de toute bonne légende. A l’aide de son seul vocabulaire plastique, l’artiste confère de la grandeur au minuscule et parvient même à conjuguer une esthétique de la miniature à celle de la profusion, voire de la saturation : le tableau devient une parcelle grouillant d’histoires enchevêtrées Avec : Jean-Charles Blais, Philippe Favier, Pauline Fondevila, Joël Hubaut, Gérard Garouste, Pierre-Nicolas Ledoux, Anne Pétrequin, Philippe Ramette, Barthélémy Toguo, etc. JEAN-CHARLES BLAIS Né en 1956 à Nantes. Vit et travaille à Paris) - La Course, 1986, lithographie. - Le Fumeur au sac, 1986, lithographie. - Les Mains, 1986. Série de 3 lithographies Le travail de Jean-Charles Blais est intimement lié à la représentation de la figure. Ses œuvres présentes dans l’artothèque de Saint-Fons relèvent de la première manière du peintre, celle qui l’a rattaché au mouvement de la Figuration libre des années 80 : à l’époque, il esquissait à la peinture de grands et gros personnages en mouvement, voire en fuite, sur des matériaux de récupération, en particulier sur des affiches récupérées dans l’espace public. Les aspérités et les déchirures de ces supports guidaient la composition. Pas de portrait ici, les visages étant toujours dissimulés, pas de personnages, des silhouettes plutôt, qui deviendront de plus en plus abstraites au fil du temps. Dans les œuvres de l’artothèque, l’artiste passe des dimensions imposantes de l’affiche de 12 m² à de petits formats carrés. Sa série des mains, par leurs proportions mêmes, n’en garde pas moins une certaine monumentalité. La force du travail de Blais réside dans la puissance de la composition conférant à ses figures un élan comme si elles voulaient se libérer du cadre. PHILIPPE FAVIER Né en 1952 à Saint-Etienne. Vit et travaille à Veaunes. Adieu Berthe, 1985, eau-forte. Quel que soit le format et la nature de ses supports (boîte de sardine, verre, papier, livre, etc.), Philippe Favier est un artiste de la miniature. Lui-même se définit « comme un dessinateur plus qu’un peintre. «Au « mou du pinceau », l’artiste préfère « le contact du crayon ou de la plume sur le papier, de la pointe sur le métal ou sur le verre ». On comprendra donc aisément combien il a pu exceller dans la gravure sur métal (même sur une boîte de sardine !). Il s’inspire autant de l’illustration populaire, de l’orfèvrerie artisanale que de l’histoire de la peinture et de la gravure anciennes (danses macabres du XVIIe, gravures de Jacques Callot et de Goya, ornements maniéristes, etc). Il mélange peinture de genre, nature morte et Vanités. Favier pose un regard d’entomologiste sur le monde pour, au delà de la virtuosité technique de son travail, créer un univers souvent sombre malgré une apparence de légèreté, mais grouillant d’inventivité et de fantaisie, de lieux et de créatures imaginaires. PAULINE FONDEVILA ( Née en 1972 au Havre. Vit et travaille en Argentine. - Casino Lights (série "Las Noches de calor").- 2006, dessin (pièce unique) au feutre et encres de couleur sur papier. - Gasol de mivida (série "Las Noches de calor"), 2006, dessin (pièce unique) au feutre et encres de couleur sur papier. Pauline Fondevila assume pleinement l’influence de la bande dessinée (par exemple le cultissime Little Nemo in Slumberland de Winsor McCay, paru en 1905) dont elle retient la dimension narrative sans pourtant dérouler son histoire de façon linéaire. « Mes dessins, nous dit l’artiste, [sont comme] une cartographie toujours en mouvement, où adviennent des rencontres, des regroupements et des collisions. Mon travail est celui d'un chercheur, je produis au fil de mes séries une encyclopédie dessinée, expérimentale et multiforme (...) ». Les personnages solitaires qui parcourent ses œuvres s’inspirent de ses amis et des créateurs (artistes, musiciens) ayant nourri son œuvre, qui l’accompagnent au quotidien. Ses dessins, très autobiographiques, s’apparentent à un journal intime, comme le suggère le petit personnage féminin, double de l’artiste, mais aussi à la technique musicale du sample lui permettant de télescoper toutes ses références (musicales, littéraires et artistiques). GERARD GAROUSTE Né en 1946 à Paris. Vit et travaille à Marcilly-sur-Eure Saynettes indiennes n° 1, 1994. Gravure à l'eau-forte et à la pointe sèche sur papier de Chine. Cet artiste, à la reconnaissance internationale, a plus d’une corde à son arc : peintre, sculpteur, scénographe, il a aussi réalisé de nombreuses commandes publiques (Palais de l’Elysée, Bibliothèque Nationale). Sa peinture est figurative et allégorique, et lui aussi a souvent été apparenté à la Figuration libre des années 80. Ses œuvres se jouent ouvertement des mythes et s’inspirent des grands textes fondateurs tels la Bible, La Divine Comédie de Dante, Pantagruel de Rabelais ou Don Quichotte. C’est son goût pour ces grands classiques qui l’a amené à travailler la gravure, traditionnellement associée au texte. Pour lui, le trait incisif et précis de la gravure sur métal reste proche du signe et du mot. Les petits formats induits par cette technique se prêtent à un regard rapproché et introspectif, proche de la lecture. Ici, la découpe des plaques et les formes qui en résultent s’inspirent du textile, des étendards et des « indiennes », ces tapisseries peintes courantes au Moyen Age et au XVIIe siècle En 1979, Garouste a fondé La Source, une association d’action éducative et sociale d’aide aux enfants par l’art. Joël HUBAUT Né en 1947 à Amiens. Vit et travaille à Réville (Calvados) Le Lapin Malevitch 1993 ; Sérigraphie en trois couleurs sur carton blanc. Tout l’œuvre de Joël Hubaut s’élabore sous le signe de la prolifération. Issu des divers mouvements et cultures des années 70 (Fluxus, happening, graffiti, poésie sonore, rock), cet artiste du multimédia et du mixage avant la lettre construit des installations mêlant indifféremment dessin, peinture, jeux de langage, objets, vidéos et son. Il a même fondé le groupe de rock « Les tétines noires » ! La terminologie dont il use pour se définir – « pestmoderne », « écriture épidémik » - dénote son goût pour les jeux de mot et le principe d’association qui président à son élaboration. L’humour subversif et la dérision ne doivent pas cacher toute la complexité d’un travail qui s’est toujours situé en marge des courants artistiques tout en les devançant. L’œuvre présentée ici est à elle seule un résumé des principes de base de son travail : la contamination et la prolifération sont symbolisées par le lapin, tandis que le « toujours plus » est symbolisé par le signe de la croix. Cette croix est tout à la fois le motif privilégié de l’artiste russe Malevitch, mais aussi le symbole mathématique du « plus ». Véritable cosmogonie personnelle de l’artiste, toutes ses influences, ses idées, ses préoccupations y sont déposées et mises en relation avec celles du monde moderne. L’artiste nous encourage à nous perdre avec délectation dans ce labyrinthe. P. NICOLAS LEDOUX Né en 1968 à Strasbourg. Vit et travaille à Paris Sans titre, 2007. Sérigraphie en noir et argent sur papier. Tirage n° 18/90. P.- Nicolas Ledoux excelle dans toutes sortes d’activités graphiques, mais également dans le mixage des genres et des techniques, vidéo, sculpture et musique (il est DJ à ses heures). Il collabore volontiers avec d’autres artistes (dans le collectif UltralabTM ou, plus récemment, avec Damien Béguet et Ludovic Chemarin). Dans la lignée d’un Joël Hubaut par exemple, ses dessins relève d’une esthétique de la profusion et de la citation. Les jeux de langages y prolifèrent («Au delà du tacle ») ; le mot y devient un objet à part entière. Le monde de l’art est souvent le sujet de son travail et il en propose ici une allégorie critique. Dans cette sérigraphie, l’artiste revisite et désacralise l’histoire de l’art contemporain en le passant par le filtre et les fantaisies de la culture populaire (bande dessinée, comics, culture rock). Dans un même bateau, il réunit grandes figures et grandes œuvres de la modernité avec les artistes les plus en vue du moment (Marcel Duchamp, Bruno Peinado, Gregor Schneider ou Jonathan Meese), qu’il situe à proximité des hauts lieux de l’art moderne (MOMA de New York, CNAP de Paris). C’est un véritable Panthéon que nous propose ici cette œuvre ambivalente, entre dérision critique et hommage fasciné, entre gravité des idée et légèreté du traitement plastique, entre hermétisme du monde qu’il décrit et accessibilité, voire séduction, de l’esthétique de son dessin. FRANÇOIS MARTIN . Né en 1945 à Paris. Vit et travaille à Paris Mozart, le nègre et la dame III, triptyque, 1985.3 estampes lithographies. François Martin est avant tout peintre, un peintre de la figure et un peintre sur papier. La lithographie qu’il a ici utilisée est donc une technique tout à fait appropriée en ce qu’elle lui permet de dessiner directement sur la pierre au pinceau. Comme tous ses autres travaux, la suite Mozart, la Dame et le Nègre appartient à une série. Qu’il s’agisse d’objets comme à ses débuts, d’animaux ou de personnages, procéder par série lui permet « d’épuiser » un sujet pour gagner en picturalité. Dans Mozart, la Dame et le Nègre, l’artiste laisse le sujet inachevé, supplanté qu’il est par une couleur faisant disparaître l’image iconique. François Martin mène depuis longtemps une réflexion sur la peinture, de concert avec le philosophe Jean-Luc Nancy. GERARD PASCUAL Né en 1946 à Alger. Vit et travaille à Saint-Etienne Ange et flèche, 1988. Gravure sur bois (couleur rouge) puis l'eau-forte et pointesèche. Tirage n° 1/5. L’univers de Gérard Pascual est celui des mythes et des légendes qu’il puise aussi bien dans l’histoire de l’art que dans l’imagerie populaire (bande dessinée, image d’épinal). Pascual ne craint pas la citation et la référence et c’est un des grands thèmes iconographiques de l’histoire de la peinture, l’histoire de Saint-Sébastien, qui a inspiré les œuvres présentées ici. Il ne craint pas non plus le symbolisme comme en témoigne la croix découpé dans la plaque de métal qui s’appose entre l’image et le cadre : celle-ci redouble le caractère sacré de la représentation, mais le martyr du saint évoqué n’est pas non plus sans rappeler les nombreuses épingles que l’artiste utilisait à cette époque pour présenter son travail détaché du mur, flottant. Pour exprimer son univers, il a choisi celui intime, secret et concentré de la miniature. Il aime également brouiller ou perturber la vision grâce à des dispositifs de visée, des jeux de transparence, de flou ou de miroirs. Ici, il redouble l’effort que réclame la miniature en y rajoutant cette découpe en croix qui empêche partiellement la vision, crée un vide entre l’image et le regard, instaure un véritable jeu de cache-cache entre l’œuvre et nous. ANNE PETREQUIN Née en 1952 à Paris. Vit et travaille à Lyon Antre et sort, 1986. Gravure à la pointe sèche et roulette. L’œuvre d’Anne Pétrequin se partage entre la pratique de la gravure, du dessin, et la collecte et la mise en espace d’étiquettes de vêtement lui permettant de travailler aussi bien le mot que la métaphore textile. Quoi qu’il en soit, son univers est bien celui du minuscule. Ici, elle évoque celui, fantastique, des contes et des légendes : deux créatures chimériques se tiennent de part et d’autre d’une caverne, dont on ne sait si elles en « entrent » ou « sortent ». Ces figures épousent un cercle, une composition que l’artiste privilégie tout particulièrement, directement issue du tondo de la Renaissance. La caverne, située au milieu du tableau dans l’axe du regard, est bien l’élément principal de la composition, celui qui va happer l’œil, l’entraîner dans une obscure profondeur. Pour suggérer cette concavité, l’artiste a mis en relief l’entrée de la grotte. Le travail d’Anne Pétrequin conjugue gravité et légèreté, minutie et fantaisie. PHILIPPE RAMETTE Né en 1961 à Auxerre. Vit et travaille à Paris - Objet onirique,1998, dessin (pièce unique) à l'encre sur papier. - Piercing, 1998, dessin (pièce unique) à l'encre sur papier. Dès ses premières œuvres, Philippe Ramette construit des objets « à réflexion », prothèses prolongeant le corps qu’il peut mettre potentiellement en danger (Fauteuil à voyager dans le temps en 1991, Potence préventive pour dictateur potentiel en 1993, Prothèse à Dignité et Prothèse à Humilité en 1992). L’humour critique et la bizarrerie surréalistes ne sont pas loin mais également toute l’histoire de la performance. Bien que se considérant toujours comme un sculpteur, il est plus récemment passé à la photographie qui lui permet d’expérimenter directement ses objets en se mettant lui-même en scène. Dans ses derniers travaux, l’artiste se met à l’épreuve du monde en testant les principes de l’apesanteur dans un paysage tantôt naturel, tantôt urbain ou sous-marin. La relation privilégiée - et quasi romantique - qu’il entretient avec un paysage souvent vertigineux est également perceptible dans les dessins présentés ici. A l’époque de leur réalisation (les années 90), ces dessins proposaient des projets réalisés ou non. A présent toutes ses photographies donnent lieu à une série de dessins préparatoires. Mais leur degré de finition en fait toujours des œuvres à part entière. Sigurdur Arni SIGURDSON Né en 1963 à Akureyri (Islande). Vit et travaille à Reykjavik (Islande) Corrections (1 à 6), 1993, phototypie sur papier phototype 170 g. Dans les peintures (figuratives ou abstraites), les dessins et les multiples de Sigurdur Arni Sigurdson, le motif garde souvent l’apparence d’un archétype faussement naïf ou fragmentaire. Cette première impression est ici renforcée par l’utilisation de vieilles cartes postales ou photographies en noir et blanc conférant un air de désuétude aux œuvres. L’artiste a pourtant entrepris de troubler ces images d’un autre temps en les complétant ou en les prolongeant de motifs paradoxaux et d’indications contradictoires : le jet d’eau de Genève devient celui d’une baleine, c’est à la pétanque que joue cette femme élégante, les ombres de deux personnages côte à côte vont dans des directions opposées, etc. Ces incohérences facétieuses sèment le doute dans l’esprit du spectateur quant à la véracité ou la probabilité de ce qu’il voit, quant au caractère illusionniste de la peinture. Les jeux d’ombres renforcent le caractère fantomatique de ces images anciennes. L’artiste en profite d’ailleurs pour déployer ses motifs préférés : la boule, le trou et l’ombre, autant de « sujets » bien peu picturaux a priori mais, pour cette raison même, autant de défis lancés à la représentation ! Barthélémy TOGUO Né en 1967 à M’balmayo, Cameroun. Vit et travaille à Paris, Abidjan, Düsseldorf. Das Bett (1 à 3), 1995, dessin sur papier recyclé.. Cet artiste d’origine camerounaise aborde aussi bien la sculpture, le dessin, la photographie que la performance. Il mêle ses expériences personnelles et quotidiennes de la société occidentale aux croyances, aux images et aux références culturelles liées à son lieu d’origine, la région des grandes forêts équatoriales. Il reste ainsi proche des légendes africaines, de leurs réminiscences et de la tradition de l’oralité qu’il utilise comme des points d’ancrage et qui lui permettent de jeter un regard étonné, parfois choqué et souvent critique, sur ce qu’il découvre en occident. Ses critiques s’expriment tout particulièrement dans les performances provocatrices qu’il joue régulièrement aux postes de frontières. Il a aussi choisi comme repère un élément très puissant de sa culture, l’arbre, qui représente pour lui une source d’identification, mais qui n’est pas à présent sans renvoyer aux problèmes écologiques les plus actuels.