af - fonctions lipschitziennes
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AF - FONCTIONS LIPSCHITZIENNES Définitions Soit (M, d) et (M ′ , d′ ) deux espaces métriques. Si k est un réel positif, on appelle application lipschitzienne de rapport k, une application de M dans M ′ qui est telle que, pour tout couple (x, y) de M 2 , on ait d′ (f (x), f (y)) ≤ k d(x, y) . On notera Lipk (M, M ′ ) l’ensemble des applications lipschitziennes de rapport k de M dans M ′ , et Lip(M, M ′ ) la réunion de ces ensembles lorsque k décrit R+ . On appellera fonction lipschitzienne un élément de cet espace. Si f est lipschitzienne, on posera D(f ) = sup x6=y d′ (f (x), f (y)) = inf{k ∈ R+ | ∀(x, y) ∈ M 2 , d′ (f (x), f (y)) ≤ k d(x, y)} . f (x, y) Par définition de f le nombre D(f ) est fini et c’est le plus petit réel k tel que f soit dans Lipk (M, M ′ ). Propriétés élémentaires 1) Si f est dans Lip(M, M ′ ), elle est uniformément continue sur M . 2) L’ensemble Lipk (M, M ′ ) est une famille de fonctions uniformément équicontinues sur M . 3) Si k ≤ k′ , l’ensemble Lipk (M, M ′ ) est inclus dans Lipk′ (M, M ′ ). 4) L’ensemble Lip(M, M ′ ) est la réunion des ensembles Lipkn (M, M ′ ), où (kn ) est une suite croissante de réels positifs de limite +∞. 5) Si B est une partie bornée de M , la famille {f (B) | f ∈ Lipk (M, M ′ )} est uniformément bornée dans M ′ , et l’on a, pour tout f de Lipk (M, M ′ ) diam(f (B)) ≤ k diam(B) . 6 ) Si f est dans Lip(M, M ′ ) et g dans Lip(M ′ , M ′′ ), alors g ◦ f est dans Lip(M, M ′′ ), et D(f ◦ g) ≤ D(f )D(g) . 7) Une fonction f est constante sur M si et seulement si f est lipschitzienne et D(f ) est nul. 1) et 2) Soit f lipschitzienne de rapport k > 0. Soit ε > 0, si d(x, y) < ε k alors d′ (f (x), f (y)) < ε , AF 2 et donc f est uniformément continue sur M , et l’ensemble Lipk (M, M ′ ) est une famille de fonctions uniformément équicontinues sur M . 3) Si k ≤ k′ , et si f est dans Lipk (M, M ′ ), on a, quels que soient (x, y) dans M 2 , d′ (f (x), f (y)) ≤ kd(x, y) ≤ k′ d(x, y) et f est aussi dans Lipk′ (M, M ′ ). 4) Si f est dans Lipk (M, M ′ ), il existe kn tel que kn ≥ k, alors, f est dans Lipkn (M, M ′ ), donc dans la réunion de ces ensembles. On en déduit l’inclusion [ [ Lipk (M, M ′ ) ⊂ Lipkn (M, M ′ ) , k∈R+ n∈N et comme l’inclusion inverse est toujours vraie, on a égalité. 5) Fixons y dans B, et soit f dans Lipk (M, M ′ ). Soit z dans f (B). Il existe x dans B tel que f (x) = z . Alors d′ (f (x), f (y)) ≤ kd(x, y) ≤ k diam(B) , et le membre de droite ne dépend pas de f . Donc la famille {f (B) | f ∈ Lipk (M, M ′ )} est uniformément bornée dans M ′ . De plus, comme k diam(B) majore toutes les distances entre deux éléments de f (B), on obtient diam(f (B)) ≤ k diam(B) . 6) Si f est dans Lip(M, M ′ ) et g dans Lip(M ′ , M ′′ ), alors d′′ (g ◦ f (x), g ◦ f (y)) ≤ D(g)d′ (f (x), f (y)) ≤ D(g)D(f )d(x, y) . Alors g ◦ f est dans Lip(M, M ′ ) et D(f ◦ g) ≤ D(f )D(g) . 7) Si f est constante, on a, quels que soient (x, y) dans M 2 , et k réel positif, d′ (f (x), f (y)) = 0 ≤ k d(x, y) et il en résulte que D(f ) est nul. Réciproquement, si D(f ) est nul, alors, quels que soient (x, y) dans M 2 , d′ (f (x), f (y)) ≤ 0 = D(f ) d(x, y) , et donc f (x) = f (y) . Il en résulte que f est constante. AF 3 Propriétés supplémentaires Supposons maintenant que (M ′ , d) soit un espace vectoriel normé E sur le corps K égal à R ou C. 1) L’ensemble Lip(M, E) est un sous-espace vectoriel de l’espace des fonctions uniformément continues sur M à valeurs dans E. 2) L’application D est une semi-norme sur Lip(M, E). 3) Pour tout réel positif k, l’ensemble Lipk (M, E) est une partie convexe de Lip(M, E). 4) Si f et g sont deux fonctions bornées de Lip(M, E), alors f g appartient à Lip(M, E). 1) et 2). Soit f et g dans Lip(M, E). On a, quels que soient (x, y) dans M 2 , k(f + g)(x) − (f + g)(y)k ≤ kf (x) − f (y)k + kg(x) − g(y)k ≤ D(f )d(x, y) + D(g)d(x, y) . Donc f + g est dans Lip(M, E) et D(f + g) ≤ D(f ) + D(g) . Si λ est dans K, on a aussi, quel que soit (x, y) dans M 2 , k(λf )(x) − (λf )(y)k = |λ| kf (x) − f (y)k ≤ |λ| D(d)d(x, y) . Donc λf est dans Lip(M, E) et D(λf ) ≤ |λ|D(f ) . Si λ est nul, on a D(λf ) = |λ|D(f ) = 0 . Si λ n’est pas nul, D(f ) = D ce qui donne 1 1 (λf ) ≤ D(λf ) , λ |λ| |λ|D(f ) ≤ D(λf ) . Finalement, on a bien D(λf ) = |λ|D(f ) . Donc D est une semi-norme sur Lip(M, E). Et on a vu que D(f ) est nulle si et seulement si f est constante. Ce n’est donc pas une norme. 3) Soit λ dans [ 0, 1 ] . Alors, si f et g sont dans Lipk (M, E), on a D(λf + (1 − λ)g) ≤ |λ|D(f ) + (1 − λ)D(g) ≤ |λ|k + (1 − λ)k = k . Donc λf + (1 − λ)g appartient à Lipk (M, E) qui est bien convexe. 4) On a k(f g)(x) − (f g)(y)k ≤ kf (x)k kg(x) − g(y)k + kg(y)k kf (x) − f (y)k . Donc k(f g)(x) − (f g)(y)k ≤ (kf k ∞ D(g) + kgk ∞ D(f ))d(x, y) . AF 4 Normes sur Lip(M, E) Proposition 1 Soit f dans Lip(M, E), et x0 , y0 dans M . On pose kf kLip = kf (x0 )k + D(f ) et kf k′Lip = kf (y0 )k + D(f ) . Alors i) On définit ainsi deux normes équivalentes sur Lip(M, E). ii) L’application D est continue de Lip(M, E) muni d’une de ces normes dans R. iii) L’ensemble Lipk (M, E) est une partie convexe fermée de Lip(M, E). i) Tout d’abord, pour tout x de M on a kf (x)k ≤ kf (x0 )k + kf (x) − f (x0 )k ≤ kf (x0 )k + D(f )d(x, x0 ) , et donc (1) kf (x)k ≤ (1 + d(x, x0 ))kf kLip . Alors kf (y0 )k ≤ (1 + d(y0 , x0 ))kf kLip . et l’on en déduit kf k′Lip ≤ (2 + d(y0 , x0 ))kf kLip . Puis, en permutant les rôles de x0 et y0 , kf kLip ≤ (2 + d(y0 , x0 ))kf k′Lip . Alors, en posant A = 2 + d(y0 , x0 ) on obtient immédiatement 1 kf kLip ≤ kf k′Lip ≤ A kf kLip , A ce qui montre que les deux normes sont équivalentes. ii) Puisque |D(f ) − D(g)| ≤ D(f − g) ≤ kf − gkLip , la continuité de D en résulte. iii) Alors Lipk (M, E) = D −1 ( [ 0, k ] ) est un ensemble fermé. AF 5 Proposition 2 i) La convergence au sens de la norme Lip entraîne la convergence uniforme sur les compacts de M . ii) Si M est compact, pour tout f de Lip(M, E), posons N (f ) = kf k ∞ + D(f ) . On obtient une norme sur Lip(M, E) équivalente à la norme Lip. i) Soit K un compact de M . Il résulte de la formule (1) que sup kf (x)k ≤ (1 + sup d(x, x0 ))kf kLip ≤ (1 + diam M )kf kLip . x∈K x∈K Donc la convergence au sens de la norme Lip entraîne la convergence uniforme sur K. ii) L’application N est la somme d’une norme et d’une semi-norme. C’est donc une norme. Si M est compact, la fonction f atteint son maximum en un point y, alors N (f ) = kf (y)k + D(f ) ≤ (2 + d(x0 , y))kf kLip ≤ (2 + diam M )kf kLip . Comme d’autre part kf kLip ≤ N (f ) , on a bien l’équivalence des deux normes. Remarque : la convergence uniforme n’entraîne pas la convergence pour la norme Lip comme le montre l’exemple suivant. Soit M = R+ . Prenons x0 = 0. Pour x positif, on pose fn (x) = inf(nx, 1/n) . On a de manière évidente kfn k ∞ = 1 , n par contre kfn kLip = D(fn ) = n . La suite fn converge uniformément vers 0 pour la norme infinie, mais pas pour la norme Lip. Théorème 1 Si E est un espace de Banach, l’espace Lip(M, E) est complet pour la norme Lip. Soit (fn ) une suite de Cauchy de Lip(M, E). D’après la formule (1), on a kfn (x) − fm (x)k ≤ (d(x, x0 ) + 1)kfn − fm kLip . AF 6 Il en résulte que, pour x dans M , la suite (fn (x)) est une suite de Cauchy de E qui est complet. Elle converge donc vers un élément de E noté f (x). Soit x et y dans M . On a k(fn − fm )(x) − (fn − fm )(y)k ≤ D(fn − fm ) d(x, y) ≤ kfn − fm kLip d(x, y) . Il existe N , tel que, si n et m sont plus grands que N , on ait kfn − fm kLip ≤ ε . Alors, dans ces conditions, k(fn − fm )(x) − (fn − fm )(y)k ≤ ε d(x, y) . Faisons tendre m vers l’infini dans l’inégalité précédente. Pour n supérieur à N on obtient k(fn − f )(x) − (fn − f )(y)k ≤ ε d(x, y) . Ceci prouve que fn − f appartient à Lip(M, E), et comme fn appartient à cet espace vectoriel, il en sera de même de f . Enfin, l’inégalité ci-dessus s’écrit encore D(fn − f ) ≤ ε et montre que la suite (fn ) converge vers f pour la semi-norme D. Comme de plus la suite (fn (x0 )) converge vers f (x0 ), il en résultera que la suite (fn ) converge vers f pour la norme Lip. Donc l’espace vectoriel Lip(M, E) est complet. Proposition 3 Soit (fn )n≥0 une suite de fonctions de Lip(M, E), où E est un espace de Banach. On suppose que (i) il existe un point x0 de M tel que la série de terme général fn (x0 ) converge, (ii) pour tout n, la fonction fn est lipschitzienne de rapport kn et la série de terme général kn converge. Alors la série de fonctions de terme général fn converge uniformément sur tout compact de M vers ∞ X kn . une fonction f lipschitzienne de rapport n=0 D’après les hypothèses, on a kfn kLip ≤ |fn (x0 )| + kn , et donc la série de terme général fn converge normalement pour la norme Lip. Or l’espace Lip(M, E) est complet pour la norme Lip, puisque E est complet. Donc la série de terme général fn converge, et sa somme est une fonction lipschitzienne. De plus cette convergence implique la convergence uniforme sur les compacts de M . AF 7 Par ailleurs, pour tout n entier, et tout couple (x, y) de M 2 , on a kfn (x) − fn (y)k ≤ kn d(x, y) . On en déduit, pour tout entier naturel N , N N X X fn (y) ≤ fn (x) − n=0 n=0 N X kn ! d(x, y) , kn ! d(x, y) , n=0 et par passage à la limite ∞ ∞ X X fn (y) ≤ fn (x) − n=0 n=0 ∞ X n=0 ce qui montre que la somme de la série est lipschitzienne de rapport ∞ X kn . n=0 Remarque : l’exemple de la suite de fonctions de R dans R définies par fn (x) = 1 + x , n2 montre que la condition (ii) est insuffisante pour assurer la convergence de la série. Applications lipschitziennes différentiables Théorème 2 Soit f une application différentiable d’un ouvert convexe U d’un espace normé F dans un espace normé réel E. La fonction f appartient à Lip(U, E) si et seulement si f ′ est bornée sur U , et alors D(f ) = sup kf ′ (x)k . x∈U Dans ce qui suit les normes sur E et F seront notées de la même manière. Si f ′ est bornée sur U , il résulte du théorème des accroissements finis que, quels que soient x et y dans U , on a kf (x) − f (y)k ≤ sup kf ′ (z)k kx − yk , z∈U ce qui montre que f est lipschitzienne et que D(f ) ≤ sup kf ′ (z)k . z∈U Réciproquement, supposons f lipschitzienne sur U . Comme f est différentiable, on a f (x + h) = f (x) + f ′ (x)(h) + g(h) AF 8 avec kg(h)k = 0. h→0 khk lim On a alors kf ′ (x)(h)k ≤ kf (x + h) − f (x)k + kg(h)k . Pour tout ε > 0, il existe η > 0 tel que khk ≤ η entraîne kg(h)k ≤ εkhk . Alors, dans ces conditions, kf ′ (x)(h)k ≤ (D(f ) + ε)khk . Soit t dans F . Il existe un entier n tel que kt/nk ≤ η . Donc kf ′ (x)(t)k ≤ kf ′ (x)(n(t/n))k = nkf ′ (x)(t/n)k ≤ n(D(f ) + ε)kt/nk . Il en résulte que pour tout x de U , et tout t de F , on a kf ′ (x)(t)k ≤ (D(f ) + ε)ktk , et donc kf ′ (x)k ≤ D(f ) + ε . Alors sup kf ′ (x)k ≤ D(f ) + ε . x∈U Comme ce résultat a lieu pour tout ε > 0, on obtient finalement que sup kf ′ (x)k ≤ D(f ) , x∈U ce qui, avec l’inégalité inverse, prouve l’égalité. Recollement des applications lipschitziennes Proposition 4 Soit f une fonction définie sur R. Soit I un ensemble d’indices dénombrable ou fini, et {ai | i ∈ I} un sous-ensemble de R ordonné en croissant. On suppose que i) Pour tout i ∈ I, la restriction fi de f à Ji = [ ai , ai+1 ] ∩ R est lipschitzienne. ii) L’ensemble {D(fi ) | i ∈ I} est majoré. Alors f appartient à Lip(R, M ′ ), et D(f ) = sup D(fi ) . i∈I AF 9 Soit x dans Jp et y dans Jq , avec p < q. On a donc ap ≤ x ≤ ap+1 < · · · < aq ≤ y ≤ aq+1 . Alors ′ ′ d (f (x), f (y)) ≤ d (f (x), f (ap+1 )) + q−1 X d′ (f (aj ) − f (aj+1 )) + d′ (f (aq )), f (y)) . j=p+1 Et comme f est lipschitzienne dans Ji , on a d′ (f (x), f (y)) ≤ D(fp )|x − ap+1 | + q−1 X D(fj )|aj − aj+1 | + D(fq )|aq − y| . j=p+1 Et en majorant les nombre D(fi ) par leur borne supérieure, q−1 X |aj − aj+1 | + |aq − y| . d′ (f (x), f (y)) ≤ sup D(fi ) |x − ap+1 | + i∈I j=p+1 Mais en raison de la croissance de la famille {aj | i ∈ I}, on obtient |x − ap+1 | + q−1 X |aj − aj+1 | + |aq − y| = y − x . j=p+1 Il en résulte que d′ (f (x), f (y)) ≤ sup D(fi ) |x − y| . i∈I Donc f est lipschitzienne, et D(f ) ≤ sup D(fi ) . i∈I Soit ε > 0. Il existe un entier r tel que sup D(fi ) − i∈I Puisque D(fr ) est la borne supérieure des rapports ε ≤ D(fr ) . 2 d′ (fr (x), fr (y)) lorsque x et y décrivent Jr , il existe |x − y| x et y dans Jr tels que D(fr ) − d′ (fr (x), fr (y)) d′ (f (x), f (y)) ε ≤ = ≤ D(f ) . 2 |x − y| |x − y| Alors sup D(fi ) − ε ≤ D(f ) . i∈I Et puisque cette inégalité a lieu pour tout ε > 0, on en déduit sup D(fi ) ≤ D(f ) , i∈I AF 10 ce qui avec l’inégalité inverse, donne l’égalité. Remarque : Les deux dernières propositions permettent de construire de façon simple beaucoup de fonctions de Lip(R, R). On a par exemple : Corollaire 1 Toute fonction continûment dérivable par morceaux, continue sur R, dont la dérivée est bornée est lipschitzienne. Le nombre de morceaux peut même être dénombrable. Fonction lipschitzienne sur un compact Proposition 5 sur K. Soit K un compact de R. Toute fonction de Lip(K, M ′ ) est à variations bornées Soit (ai )1≤i≤n une suite finie croissante de K, alors n−1 X i=1 d′ (f (ai ), f (ai+1 )) ≤ n−1 X D(f )|ai − ai+1 | = D(f )|a1 − an | ≤ D(f ) diam K . i=1 Régularisée lipschitzienne On considère dans ce paragraphe, des fonctions lipschitziennes à valeurs réelles. Proposition 6 Soit (fi )i∈I une famille de fonctions de Lip(M, R) telle que l’ensemble {D(fi ) | i ∈ I} soit majoré. i) S’il existe x0 dans M tel que l’ensemble {fi (x0 ) | i ∈ I} soit majoré, alors, pour tout x de M l’ensemble {fi (x) | i ∈ I} est majoré, la fonction sup fi appartient à Lip(M, R), et l’on a i∈I D(sup fi ) ≤ sup D(fi ) . i∈I i∈I ii) S’il existe x0 dans M tel que l’ensemble {fi (x0 ) | i ∈ I} soit minoré, alors, pour tout x de M l’ensemble {fi (x) | i ∈ I} est minoré, la fonction inf fi appartient à Lip(M, R), et l’on a i∈I D(inf fi ) ≤ inf D(fi ) . i∈I i∈I i) On a, pour tout i de I et tout x de M fi (x) ≤ fi (x0 ) + D(fi )d(x, x0 ) ≤ sup{fi (x0 ) | i ∈ I} + d(x, x0 ) sup Di . i∈I AF 11 Il en résulte que l’ensemble {fi (x) | i ∈ I} est borné. Alors, pour tout i de I et tout couple (x, y) de M , on a fi (x) ≤ fi (y) + D(fi )d(x, y) ≤ sup fi (y) + d(x, y) sup Di , i∈I i∈I d’où l’on déduit sup fi (x) ≤ sup fi (y) + d(x, y) sup Di , i∈I i∈I i∈I puis, en échangeant les rôles de x et de y, sup fi (y) ≤ sup fi (x) + d(x, y) sup Di , i∈I i∈I i∈I ce qui donne finalement | sup fi (x) − sup fi (y)| ≤ d(x, y) sup Di , i∈I i∈I i∈I d’où le résultat. ii) On applique le résultat précédent aux fonctions −fi , puisque inf fi = − sup(−fi ) . i∈I i∈I Remarques 1) La condition que l’ensemble {D(fi ) | i ∈ I} soit majoré est importante. Pour tout n entier naturel, soit fn définie sur R par fn (x) = inf(n2 , x2 ) qui est dans Lip(R, R) d’après le corollaire 1, on a sup fn (x) = x2 , n∈N et la fonction x 7→ x2 n’est pas lipschitzienne puisque sa dérivée n’est pas bornée. 2) On n’a pas nécessairement l’égalité D(sup fi ) = sup D(fi ) . i∈I i∈I Pour tout n entier naturel, soit la fonction fn définie par si x ≤ −n 0 fn (x) = x + n si − n ≤ x ≤ −n + 1 1 si x ≥ −n + 1 cette fonction est encore lipschitzienne et D(fn ) vaut 1. Par contre sup fn = 1 et donc D(sup fn ) est nul. n∈N n∈N AF 12 Corollaire 2 Soit f lipschitzienne réelle. Il en est de même des fonctions f + , f − et |f |. De plus D(f ) majore les trois nombres D(f + ), D(f − ), D(|f |). Proposition 7 Soit f une fonction numérique définie sur une partie A non vide de M à valeurs réelles. On suppose qu’il existe g dans Lipk (M, R) telle que g minore f sur A. Pour tout x de M on pose fA,k (x) = inf (f (y) + kd(x, y)) . y∈A i) La fonction fA,k appartient Lipk (M, R) et minore f sur A. ii) Soit B une partie de M contenant A. Si h appartient à Lipk (B, R), et si h minore f sur A, alors h minore fA,k sur B. iii) Si f est dans Lipk (A, R), les fonctions f et fA,k coïncident sur A. i) et ii) Soit h dans Lipk (B, R) et x dans B. Si h minore f sur A, on a, pour tout y de A, h(x) ≤ h(y) + kd(x, y) ≤ f (y) + kd(x, y) . Il en résulte que h(x) ≤ inf (f (y) + kd(x, y)) = fA,k (x) . y∈A Comme, par hypothèse, il existe une minorante lipschitzienne g sur M tout entier, en prenant h = g, on en déduit g(x) ≤ fA,k (x) , ce qui prouve que fA,k existe dans M tout entier et on a ii). Posons, si x est dans A et y dans M , gy (x) = f (y) + kd(x, y) . Quels que soient x et z dans M , on a |gy (x) − gy (z)| = k|d(x, y) − d(z, y)| ≤ kd(x, z) , donc gy est dans Lipk (M, R). Mais alors la fonction fA,k = inf gy y∈A est aussi dans Lipk (M, R) d’après la proposition 6. iii) Si f est dans Lipk (A, R), en prenant B = A et h = f dans ii) on trouve, sur A, l’inégalité f ≤ fA,k . Mais, comme l’inégalité inverse est vraie, on a l’égalité. Donc f et fA,k coïncident sur A. AF 13 Nous allons en déduire deux résultats. Proposition 8 Soit x1 , . . . , xn , des points distincts de M , et (c1 , . . . , cn ) des nombres réels (resp. complexes). Il existe une fonction f dans Lip(M, R) (resp. Lip(M, C), telle que, pour p compris entre 1 et n, on ait f (xp ) = cp . Montrons ce résultat dans le cas réel tout d’abord. Soit A = {x1 , . . . , xn } , et soit f définie sur A par ∀p ∈ {1, . . . , n} f (xp ) = cp . On a k = sup p6=j |f (xp ) − f (xj )| = D(f ) < +∞ . d(xp , xj ) Donc f est dans Lipk (A, R), et fA,k est une fonction lipschitzienne qui prolonge f à M et coïncide avec f sur A. Elle répond donc à la question. Dans le cas complexe, il suffit d’appliquer le résultat précédent aux parties réelles et imaginaires des nombres cp . On trouve deux fonctions f1 et f2 de Lip(M, R) telles que, pour tout p compris entre 1 et n, on ait f (xp ) = Re cp et fx (xp ) = Im cp . Alors f1 + if2 est dans Lip(M, C) et vérifie la condition voulue. Pour établir le deuxième résultat annoncé, démontrons tout d’abord ce lemme : Lemme Soit f semi-continue inférieurement positive, et x0 un point de M tel que f (x0 ) soit strictement positif. Alors, pour tout ε tel que 0 < ε < f (x0 ) il existe h lipschitzienne telle que i) h(x0 ) = f (x0 ) − ε ii) 0≤h≤f. D’après la semi-continuité de f , il existe η > 0 tel que d(x0 , y) < η AF 14 implique f (y) > f (x0 ) − ε . Soit U = B(x0 , η) , et, pour tout x dans M , posons ϕ(x) = (f (x0 ) − ε) d(x, M \ U ) d(x, M \ U ) + d(x, x0 ) . On a ϕ(x0 ) = f (x0 ) − ε > 0 . La fonction ϕ est nulle en dehors de U et c’est une fonction continue sur M . Si x n’est pas dans U , on a ϕ(x) = 0 ≤ f (x) et si x est dans U , 0 ≤ ϕ(x) ≤ f (x0 ) − ε < f (x) . Donc 0≤ϕ≤f. Posons alors k= f (x0 ) − ε η et h = ϕM,k . On a 0 ≤ h ≤ ϕ, d’où 0≤h≤f, et h est lipschitzienne de rapport k sur M . Par ailleurs h(x0 ) = inf T (x) x∈M où T (x) = ϕ(x) + kd(x, x0 ) = ϕ(x0 ) + d(x, x0 )ϕ(x0 ) 1 1 − η d(x, M \ U ) + d(x, x0 ) Si y est dans M \ U , on a η ≤ d(x0 , y) ≤ d(x0 , x) + d(x, y) , ce qui implique η ≤ d(x0 , x) + d(x, M \ U ) . Il en résulte que T (x) ≥ ϕ(x0 ) , . AF 15 et l’égalité est obtenue pour x = x0 . On a donc h(x0 ) = ϕ(x0 ) = f (x0 ) − ε . La fonction h répond aux conditions désirées. Théorème 3 Soit f définie sur M à valeurs réelles possédant une minorante lipschitzienne de rapport k sur M , alors la fonction fek = fM,k existe et c’est la plus grande fonction lipschitzienne de rapport k sur M inférieure à f . Si f est positive, alors fek existe et est positive. Si de plus f est semi-continue inférieurement, les fonctions f et fek ont les mêmes zéros. La première partie résulte immédiatement de la proposition 7 en prenant M = A = B. D’autre part, si f est positive, la fonction constante nulle est une minorante lipschitzienne de rapport k de f et minore aussi fek . Comme 0 ≤ fek ≤ f l’ensemble des zéros de f est inclus dans l’ensemble des zéros de fek . Supposons maintenant que f est s.c.i. Soit x0 dans M tel que f (x0 ) soit strictement positif, et ε tel que 0 < ε < f (x0 ) . Le lemme précédent assure l’existence d’une fonction h lipschitzienne inférieure à f et telle que h(x0 ) = f (x0 ) − ε > 0 . Posons g= h inf(1, k/D(h)) h si D(h) 6= 0 . si D(h) = 0 La fonction g est inférieure à h donc à f , et elle est lipschitzienne de rapport k. Il en résulte qu’elle est inférieure à fek . Donc 0 < g(x0 ) ≤ fek (x0 ) . et h(x0 ), donc g(x0 ) puis fek (x0 ) sont strictement positifs. On en déduit que si fek (x0 ) est nul, alors f (x0 ) est nul. L’ensemble des zéros de fek est inclus dans l’ensemble des zéros de f . Il en résulte que ces deux ensembles sont égaux. Les deux fonctions auront les mêmes zéros. AF 16 Proposition 9 L’application qui à une fonction réelle f définie sur M associe fek est concave croissante. De manière précise : 1) Si gek existe, et si g ≤ f , alors fek existe et gk ≤ fek . e 2) Si fek et e gk existent, et si λ appartient à [ 0, 1 ] , alors (λf + (1 − λ)g)ek existe et λfek + (1 − λ)e gk ≤ (λf + (1 − λ)g)ek . 1) Si g minore f , on a gek ≤ g ≤ f . Donc e gk est une minorante lipschitzienne de rapport k de f et minore fek . 2) Soit λ dans [ 0, 1 ] . On a alors λfek + (1 − λ)e gk ≤ λf + (1 − λ)g . Mais puisque Lipk (M, R) est convexe, la fonction λfek + (1 − λ)e gk appartient à Lipk (M, R) et minore λf + (1 − λ)g. Elle minore donc (λf + (1 − λ)g)ek . Remarques 1) Soit f définie sur M à valeurs réelles, et A une partie de M telle que f /A soit dans Lipk (A, R). Il est faux en général que fek /A = f /A . Exemple : soit f définie sur R par 0 f (x) = 2x 1 Il est facile de de voir que fe1 est définie par 0 fe1 (x) = x 1 si x ≤ 0 si 0 ≤ x ≤ 1/2 . si x ≥ 1/2 si x ≤ 0 si 0 ≤ x ≤ 1 . si x ≥ 1 Or, si A est le segment [ 1/2, 1 ] , la fonction f /A appartient à Lip1 (A, R) et ne coïncide pas avec fe1 sur ce segment. 2) On ne peut pas affirmer non plus que D(fk ) vaut k. En effet, si f est lipschitzienne de rapport strictement inférieur à k, elle coïncide avec fek et donc D(fk ) est strictement plus petit que k. AF 17 Théorème 4 Soit f une fonction s.c.i. possédant une minorante lipschitzienne g. Alors f est l’enveloppe supérieure des ses minorantes lipschitziennes, ou encore f = sup fk . k>0 Supposons tout d’abord que f est positive, et soit x0 dans M . Ou bien f (x0 ) est nul, et dans ce cas fek (x0 ) est nul pour tout k d’après le théorème 3, donc f (x0 ) = sup fek (x0 ) , ou bien f (x0 ) n’est pas nul. Soit alors ε tel que 0 < ε < f (x0 ) . D’après le lemme, il existe h lipschitzienne, telle que 0≤h≤f et h(x0 ) = f (x0 ) − ε . Il en résulte que sup h(x0 ) ≥ f (x0 ) − ε . h∈Lip(M,R) ; h≤f Comme cette inégalité a lieu pour tout ε, on en déduit que sup h(x0 ) ≥ f (x0 ) . h∈Lip(M,R) ; h≤f L’inégalité inverse étant vraie, on a donc égalité. Si maintenant g est s.c.i. et possède une minorante lipschitzienne g, la fonction f − g est s.c.i. positive, et donc f − g = sup(f − g)ek , k soit f = g + sup(f − g)ek . k Donc f est un sup de fonctions lipschitziennes inférieures à f ce qui donne le résultat. Exemple Soit f définie sur [ −1, 1 ] par f (x) = Alors p 1 − x2 . fek (x) = inf(f (x), k(1 − |x|) . AF 18 Appelons provisoirement gk (x) le membre de droite de cette dernière égalité. Si k > 1, la solution positive de l’équation f (x) = k(1 − |x|) vaut k2 − 1 . k2 + 1 xk = Si 0 < k < 1, nous poserons xk = 0 . La fonction gk est lipschitzienne de rapport k d’après le principe de recollement. En effet, elle est lipschitzienne de rapport k sur [ −1, −xk ] ∪ [ xk , 1 ] . D’autre part, si k > 1, on a sur [ −xk , xk ] , puisque f est concave On a alors |f ′ (x)| ≤ |f ′ (xk )| = q avec, si k > 1 et |x| ≤ xk et, si |x| = 1, xk 1 − x2k = xk k2 − 1 k 1 = = − < k. k(1 − xk ) 2k 2 2k 0 ≤ gk ≤ fek ≤ f , gk = fek = f , 0 = gk (x) = f (x) . Soit alors x tel que xk ≤ |x| ≤ 1 . Posons x0 = x . |x| On a |fek (x) − fek (x0 )| = fek (x) ≥ gk (x) = |gk (x) − gk (x0 )| = k|x − x0 | , et comme fek est lipschitzienne de rapport k, on a On a donc égalité, ce qui implique Donc |fek (x) − fek (x0 )| ≤ k|x − x0 | . fek (x) = k|x − x0 | = k(1 − |x|) . gk = fek . AF 19 Méthode des approximations successives Théorème 5 Soit (M, d) un espace métrique complet et k dans l’intervalle ] 0, 1 [ . Soit f dans Lipk (M, M ). Il existe t unique dans M tel que i) f (t) = t ii) Pour tout x0 dans M , la suite (xn )n≥0 définie par xn = f n (x0 ) converge vers t, et d(t, xn ) ≤ kn d(x0 , x1 ) . 1−k Pour tout entier n ≥ 2 on a d(xn , xn−1 ) = d(f (xn−1 ), f (xn−2 )) ≤ kd(xn−1 , xn−2 ) . On en déduit par récurrence, que, pour tout n ≥ 1, on a d(xn , xn−1 ) ≤ kn−1 d(x1 , x0 ) . Alors, quels que soient les entiers naturels n et p, on obtient d(xn+p , xn ) ≤ d(xn+p , xn+p−1 ) + · · · + d(xn+1 , xn ) ≤ (kn+p−1 + · · · + kn )d(x1 , x0 ) En sommant les termes de la suite géométrique, on trouve d(xn+p , xn ) ≤ kn 1 − kp kn d(x0 , x1 ) ≤ d(x0 , x1 ) . 1−k 1−k Puisque k est strictement plus petit que 1, la suite (kn ) converge vers 0, et la suite (xn ) est une suite de Cauchy de M . Elle converge donc vers un élément t de M . En faisant tendre p vers l’infini dans l’inégalité précédente, on obtient kn d(x0 , x1 ) . d(t, xn ) ≤ 1−k On a aussi d(xn+1 , xn ) ≤ kn d(x0 , x1 ) , 1−k d(f (xn ), xn ) ≤ kn d(x0 , x1 ) , 1−k que l’on peut écrire et en faisant tendre n vers l’infini, on en déduit, puisque f est continue, d(f (t), t) ≤ 0 , AF 20 et donc que f (t) = t . Enfin, si t′ est une autre solution de l’équation f (x) = x on a d(t, t′ ) = d(f (t), f (t′ )) ≤ kd(t, t′ ) , ce qui implique l’égalité de t et t′ . Proposition 10 Soit E un espace de Banach, et f dans Lipk (E, E), où 0 < k < 1. Alors la suite (f n ) converge vers une constante dans l’espace Lip(E, E) muni de la norme Lip. Soit t le point fixe obtenu dans le théorème précédent, que l’on confond avec la fonction constante égale à t. On a kfn − tk Lip = kf n (x0 ) − f n (t)k + D(f n − t) . Mais kf n (x0 ) − f n (t)k ≤ kn kx0 − tk , et D(f n − t) = D(f n ) ≤ D(f )n ≤ kn . Il en résulte que kfn − tk Lip ≤ (1 + kx0 − tk)kn , ce qui montre que (f n ) converge vers t pour la norme Lip. Proposition 11 Soit (M, d) un espace métrique complet et k dans l’intervalle ] 0, 1 [ . Soit f telle que f n appartienne à Lipk (M, M ). Il existe t unique dans M tel que i) f (t) = t ii) Pour tout x0 dans M , la suite (xn )n≥0 définie par xn = f n (x0 ) converge vers t. En appliquant le théorème 5 à f n , il existe t unique dans M tel que f n (t) = t . Alors f n (f (t)) = f n+1 (t) = f (f n (t)) = f (t) . AF 21 Donc f (t) est aussi un point fixe de f n et par unicité f (t) = t . Si t est un point fixe de f , c’est aussi un point fixe de f n , donc il est unique. Pour tout x de M , la suite (f n (x)) converge vers t. Si l’on applique ceci à f i (x0 ), pour i compris entre 0 et n − 1, les suites (f n+i (x0 )) convergent vers t. Mais la réunion de ces suites est la suite (f n (x0 )) qui converge donc elle aussi vers t.