L`impact des technologies de l`information sur les structures de
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L`impact des technologies de l`information sur les structures de
Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management L’impact des technologies de l’information sur les structures de gestion des achats : des leçons pour la gestion de la chaîne logistique Jean NOLLET Professeur titulaire, titulaire de la Chaire de gestion des approvisionnements, HEC Montréal [email protected] Martin BEAULIEU Professionnel de recherche, HEC Montréal [email protected] Le déploiement d’une chaîne logistique performante exige une adéquation appropriée avec les structures organisationnelles. Le domaine des achats a justement produit des études sur le sujet qui peuvent inspirer les réflexions des gestionnaires de la chaîne logistique. Souvent, les études dans ce dernier domaine tendent à classifier les structures comme étant centralisées ou décentralisées. Cependant, la réalité est plus complexe. D’abord, entre ces deux options extrêmes, il existe une variété de structures hybrides. Ensuite, d’autres dimensions doivent être intégrées à la configuration d’une structure, notamment la formalisation et la spécialisation. Par ailleurs, les technologies de l’information (TI) peuvent contribuer au déploiement de structures plus complexes. Leur apport a été étudié dans une multitude de contextes, mais très peu dans le domaine de la gestion des achats. Une étude de cas retraçant une expérience de mise en œuvre d’une structure de gestion des achats dans une société internationale de services financiers permet de dégager des observations intéressantes à ce sujet. Les résultats de cette étude indiquent que dans ce cas : 1) la structure est nettement le fruit d’une stratégie délibérée permettant de rehausser la contribution de la fonction achats ; 2) les TI facilitent un découpage entre les décisions d’exécution et les décisions de contrôle, ce qui peut favoriser simultanément la centralisation et la décentralisation de la structure ; 3) avec l’apport des TI, la centralisation d’une activité ne signifie pas nécessairement sa déconnection de la base opérationnelle ; 4) les TI renforcent le formalisme de l’organisation. Nos travaux indiquent aux gestionnaires des achats et de la logistique qu’au-delà des schémas traditionnellement analysés, ils peuvent maintenant envisager de nouvelles structures qui leur permettront de tenir compte des objectifs à atteindre, tout en visant une plus grande efficacité. Introduction La structure organisationnelle est une dimension majeure dans l’articulation d’une entre- prise. D’ailleurs, cette dimension est d’un intérêt tel dans le milieu académique que depuis une trentaine d’années des revues de littérature sont réalisées périodiquement (voir entre Vol. 18 – N°1, 2010 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:12 3 3 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management autres les travaux de Dalton et al., 1980 ; Fassoula, 2006 ; James et Jones, 1976 ; Kimberly, 1976). Aussi, chacune des grandes fonctions d’une entreprise a fait l’objet d’études spécifiques sur ce sujet, à titre d’exemple, celles de : Tannenbaum et Dupuree-Bruno (1994) en gestion des ressources humaines ; Nonaka et Nicosia (1979) en marketing ; Johne et Snelson (1988) pour le développement de produits ; Chen (2007) pour les technologies de l’information; Nahm et al. (2003) en gestion de la production. Naturellement, de telles études ont également été menées en gestion de la chaîne logistique (supply chain management) ; justement, Dornier et Fender (2001), Kim (2007) et Samii (2001) indiquaient que la structure organisationnelle y joue un rôle majeur dans la performance logistique. Cependant, dans le domaine de la logistique, ce sont habituellement les mêmes cinq modèles de structure qui sont étudiés (Kim, 2007; Tixier et al., 1998) : la structure décentralisée sans orientation en logistique (non supply chain management-oriented organization), la structure fonctionnelle, la structure matricielle, la structure conseil et la structure intégrée. Ces structures sont relativement génériques, mais nous sommes d’avis que la réalité en offre une plus grande variété. Justement, les technologies de l’information (TI) peuvent libérer les gestionnaires des schémas organisationnels classiques, ouvrant ainsi la porte à d’autres configurations. La gestion des achats nous apparaît comme un domaine d’étude approprié pour saisir l’apport des technologies de l’information sur la variété des structures pouvant s’offrir à la gestion de la chaîne logistique. D’abord, la gestion des achats est une composante majeure du succès de la chaîne logistique, mais surtout la nature des structures organisationnelles y est une thématique importante de recherche depuis plus de 40 ans. De plus, les gestionnaires en chaîne logistique peuvent en tirer des enseignements intéressants. Par exemple, les enquêtes tendent à démontrer que la majorité des organisations adoptent une structure hybride de gestion des achats, conciliant ainsi simultanément les avantages d’une structure centralisée et ceux d’une structure décentralisée. Cependant, une structure hybride n’est pas clairement définie, puisqu’elle renvoie à une multitude de possibilités, soit toutes les combinaisons entre la centralisation et la décentralisation. À ce jour, plusieurs enquêtes intégrant les technologies de l’information (TI) à la gestion 4 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:12 des achats ou de la logistique ont cherché à mesurer l’impact de cette variable sur la nature des relations avec les fournisseurs (par exemple, voir l’étude de Boulay et de Faultrier, 2005). Cependant, comme le soulignent Cuganesan et Lee (2006), l’influence des TI sur la gestion des achats ne se limite pas aux échanges inter-organisationnels, mais comprend aussi ceux ayant un caractère intra-organisationnel. En fait, à l’exception de l’étude de Johnson et Leenders (2004) qui évoquait les technologies de l’information, nous n’avons pas retrouvé d’analyse ciblant spécifiquement l’apport des TI sur les structures de gestion des achats. Bien que notre recherche porte principalement sur la fonction de gestion des achats, nous sommes d’avis que, pour les raisons mentionnées un peu plus haut, les observations que nous mettrons en valeur pourront être également utiles dans la définition d’une structure organisationnelle de gestion de la chaîne logistique. Notre étude démarre par une recension des écrits qui offre un portrait des courants de recherche dans le domaine des structures de gestion des achats et de la logistique, ainsi que des impacts des TI sur les structures organisationnelles en général. Par la suite, en recourant à une étude de cas portant sur la révision des structures de gestion des achats d’une grande société internationale du secteur des services financiers, cet article permet d’analyser le sens de la relation entre les TI et la structure organisationnelle. En adoptant les paramètres d’analyse de Stanley (1993), soit la centralisation, la formalisation et la spécialisation, l’article étudie l’impact des TI sur ces paramètres. Ces derniers permettent d’enrichir l’analyse ultérieure du cas qui verra aussi à formuler des observations plus spécifiques à la gestion de la chaîne logistique. Recension des écrits Pour beaucoup d’organisations, la gestion des achats est la fonction autour de laquelle s’articule la gestion de la chaîne logistique (Andersen et Rask, 2003 ; Chandra et Kumar, 2000 ; Durand et de Faultrier, 2007 ; Fung, 1999). Pour lui permettre de bien jouer ce rôle, la fonction achats doit dépasser sa focalisation historique sur la réduction des prix pour rechercher des sources d’approvisionnement répondant mieux aux besoins de l’organisation (Fung, 1999). Dans ce contexte, l’adoption d’une perspective plus stratégique est essentielle, tel que souligné tant récemment (Durand et de Faultrier, 2007), que depuis Vol. 18 – N°1, 2010 4 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management plusieurs années (Spekman et al., 1994). Ce passage vers une orientation plus stratégique, qui prendrait en compte des enjeux de la chaîne logistique, exige une adaptation des structures du service des achats (Leenders et al., 1994). L’atteinte d’un niveau stratégique d’un service des achats s’inscrit d’ailleurs dans une démarche évolutive. Par exemple, Keough (1993) identifie cinq niveaux de maturité d’un service des achats. Le niveau inférieur se caractérise par une intervention très opérationnelle des acheteurs où la structure est décentralisée (ce que Keough nomme serve the factory). Le second niveau voit la constitution d’un service des achats (lowest unit cost) qui effectue des analyses de coûts. Le troisième niveau est celui des achats coordonnés où la centralisation des achats est plus poussée. Le quatrième niveau se caractérise par une structure transfonctionnelle (cross-functional purchasing) où il y a des travaux faits en équipes pour solutionner des problèmes liés aux achats. Enfin, le dernier niveau est celui d’une structure de classe mondiale (world-class supply management). Un tel modèle aide les organisations à se positionner, mais également à déterminer la direction à prendre pour apporter les changements stratégiques requis (Dubois et Wynstra, 2005). Cette évolution de la stratégie impliquera inévitablement une transformation de la structure organisationnelle. Le concept de structure organisationnelle est un thème de recherche majeur dans le domaine de la gestion des achats. Dès 1968, Fearon étudiait les structures de cette fonction en retraçant des citations remontant au début du 20e siècle. Depuis, il y a eu une première vague de travaux qui ont décrit des structures de gestion des achats par l’ampleur des responsabilités de cette fonction, le niveau hiérarchique ou le service auquel est rattaché la fonction achats (Cavinato, 1992 ; Farmer, 1981 ; Zemansky, 1970; Zenz, 1981). Naturellement, des enquêtes empiriques ont émergé à la suite de ces premiers travaux. Depuis la fin des années 1980, aux États-Unis, le Center for Advanced Purchasing Studies (CAPS) mène périodiquement des sondages sur la nature des structures de gestion des achats (Fearon, 1988 ; Johnson et al., 1998, 2006). Cependant, une attention particulière est accordée à la dimension de centralisation/décentralisation. Cette dimension réfère à la concentration ou à la dispersion du processus décisionnel (Dewett et Jones, 2001; Kim, 2007). Pour Kim (2007), la centralisation impliquerait que les décisions seraient prises par un cadre supérieur qui se trouve près de la haute direction (Kim, 2007). Kirkwood et al. (2005) identifient trois niveaux de décision : 1) la définition des politiques, des orientations et des objectifs stratégiques, 2) la configuration des processus et le choix des moyens et 3) l’exécution au quotidien. Les deux premiers niveaux ont un caractère stratégique par l’impact à long terme qu’ils auront sur l’organisation, alors que le dernier niveau renvoie à des décisions opérationnelles. Le fait que la fonction de gestion des achats soit à l’interface entre les besoins des requérants internes et l’offre des marchés fournisseurs externes (Fung, 1999) explique que les chercheurs étudient fréquemment la dimension de centralisation. En effet, c’est dans ce contexte que le concept de centralisation/décentralisation prend toute son importance : la centralisation afin d’établir un rapport de force favorable avec les fournisseurs potentiels (Carter et Carter, 2007; Dubois et Wynstra, 2005) et la décentralisation afin de bien saisir les besoins des requérants (Fearon, 1988). Carter et Carter (2007) ajoutent qu’une fois les bénéfices de la centralisation obtenus, l’organisation peut souhaiter une décentralisation pour que les achats soient effectués au niveau des unités administratives afin de gagner en réactivité. Justement, Krishnamurthy et Yauch (2007) indiquent que la décentralisation serait une option à privilégier pour une organisation qui souhaite mettre en œuvre un système lean, la décentralisation offrant plus de souplesse. Dubois et Wynstra (2005) vont dans le même sens lorsqu’ils affirment que la décentralisation est une réponse au contexte d’affaires turbulent et incertain. Cependant, en retenant cette formule, il y a alors un danger de perdre les bénéfices de la standardisation (Carter et Carter, 2007). La perception qu’ont les dirigeants de l’organisation quant aux avantages et inconvénients de l’une et l’autre des deux grandes options peut expliquer le mouvement de balancier entre une structure centralisée et décentralisée (Tchokogué et Nollet, 1998). En matière de gestion des achats, tant les premières enquêtes de Fearon (1988) que les plus récentes de Johnson et al. (2006) démontrent qu’une majorité d’organisations tendent à retenir une structure hybride. Naturellement, les organisations ne sont pas statiques. Des chercheurs ont souhaité comprendre les facteurs expliquant le passage d’une forme centralisée/décentralisée à une autre forme (voir Vol. 18 – N°1, 2010 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:12 5 5 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management par exemple Johnson et Leenders, 2004 ; Tchokogué et Nollet, 1998). Cependant, dans ces analyses, l’apport des technologies de l’information (TI) est à peine évoqué. Baglieri et al. (2007), Banerjee et Sriram (1995), ainsi que Boulay et de Faultrier (2005) traitent de l’impact des TI, mais principalement en fonction des rapports qui s’établissent avec les acteurs externes de la chaîne logistique. Ces études s’intéressent surtout aux changements pouvant survenir dans la relation entre un acheteur et ses fournisseurs à la suite de l’implantation des TI, mais sans observer les transformations à l’interne. Garrido Samaniego et al. (2006) identifient pour leur part les facteurs expliquant le déploiement de certaines technologies facilitant les processus d’achat et, encore une fois, l’impact des structures internes n’est pas pris en compte. Ces observations nous ramènent aux propos de Cuganesan et Lee (2006) qui constataient le peu d’analyses traitant des impacts des TI sur les réseaux internes de l’organisation des achats. Ce constat pour le domaine des achats peut sembler étonnant, puisque l’impact des TI sur les structures organisationnelles a fait l’objet de multiples travaux (Heintze et Bretschneider, 2000). D’ailleurs, Lau et al. (2001) indiquent que les structures organisationnelles se développent pour générer et traiter de l’information. Par leur capacité de traitement, les TI améliorent la coordination et la communication à l’intérieur de la firme (Hitt et Brynjolfsson, 1997), ouvrant la porte à de nouvelles structures organisationnelles qui auraient été inimaginables auparavant sans ces technologies. Il y a déjà plusieurs années, Foster et Flynn (1984) évoquaient la même idée. Naturellement, la dimension de centralisation a fait l’objet d’analyses nombreuses. Cependant, ces études ne dégagent pas de véritable consensus à savoir si les TI favorisent la concentration ou la dispersion du processus décisionnel (Dewett et Jones, 2001 ; Wang, 2001). Les propos de Nault (1998) offrent cette explication : la centralisation et la décentralisation poursuivraient des objectifs distincts, la centralisation favorisant le respect et la continuité des règles organisationnelles, alors que la décentralisation encouragerait les innovations, ou comme nous le disions plus tôt une plus grande souplesse de réaction face aux mutations de l’environnement d’affaires. Toutefois, Bloomfield et Coombs (1992) ainsi que Wang (2001) nuancent le fait que la centralisation viserait à contrer la possibilité de dispersion du processus de décision. Ces 6 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:12 chercheurs soulignent que les décisions (stratégiques et opérationnelles) exercées par des gestionnaires et le contrôle de ces mêmes décisions constituent deux considérations distinctes. Justement, Lau et al. (2001) estiment que les TI peuvent favoriser une décentralisation des décisions, mais parallèlement mener à une centralisation du contrôle. Par ailleurs, Dalton et al. (1980) ajoutent deux autres dimensions à la configuration d’une structure organisationnelle : la spécialisation et la formalisation. La spécialisation réfère au nombre de différentes spécialités ou des types d’emplois dans une organisation. La formalisation est le développement de routines afin de répondre à des problèmes récurrents; elle permet de formuler explicitement les rôles et leurs relations. Elle normalise également les tâches, les politiques et les procédures et cela, indépendamment des individus. Ces deux dernières dimensions peuvent, elles aussi, être remodelées par les TI. Justement, Dewett et Jones (2001) constatent que la spécialisation peut mener à une multiplication des sous-unités administratives qui répondront à des problèmes très pointus, mais avec le danger de perdre de vue la performance globale du système. Les TI peuvent atténuer cet effet d’isolement administratif, en rendant plus aisément accessibles aux différents spécialistes des informations qui leur permettent de situer leurs actions dans le contexte général de leur organisation. Les spécialistes peuvent ainsi avoir une rétroaction plus rapide sur les impacts de leurs décisions sur les autres composantes de l’organisation. Dewett et Jones (2001) avaient aussi précisé que les TI favorisaient la formalisation en enregistrant des données sur les événements se déroulant dans les organisations, facilitant ainsi le contrôle des comportements. À l’inverse, Lau et al. (2001) croient que les TI réduisent la formalisation en laissant plus de liberté aux individus, ce qui aide à briser les anciennes règles organisationnelles et à créer de nouveaux environnements de travail. De la recension des écrits, nous dégageons quelques constats utiles pour cette recherche. Les études dans le domaine des structures organisationnelles encadrant la gestion des achats sont abondantes. Ces études accordent une grande attention à la dimension de centralisation/décentralisation. Entre ces deux options, la réalité s’avère souvent différente, puisque de nombreuses organisations adoptent des structures hybrides. L’apport des technologies de l’information pourrait expli- Vol. 18 – N°1, 2010 6 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management quer l’engouement pour des structures plus complexes et plus novatrices, mais cette avenue n’a pas fait l’objet de recherche spécifique dans le domaine de la gestion des achats. Enfin, l’étude des structures devrait s’attarder à d’autres dimensions (spécialisation et formalisation) (Stanley, 1993 ; Kim, 2007) afin de mieux tenir compte de la complexité du terrain. Dans ce contexte, cet article poursuit deux objectifs qui prennent la forme de deux questions pour cette recherche exploratoire : 1. Quel est le sens de la relation entre la configuration de la structure organisationnelle et les choix de technologies de l’information ? Autrement dit, les technologies utilisées par une organisation ouvrent-elles de nouvelles possibilités quant aux structures organisationnelles ou, à l’inverse, les choix de structure se reflètent-ils dans les choix de TI ? 2. Comment les technologies de l’information modifient-elles les trois paramètres (centralisation, formalisation et spécialisation) des structures en gestion des achats ? Méthodologie Compte tenu de l’état des connaissances sur ce sujet et des deux questions de recherche, une étude de cas exploratoire est une méthodologie appropriée (McCutcheon et Meredith, 1993 ; Voss et al., 2002). Aussi, un seul cas est alors suffisant, compte tenu du caractère de la recherche (Yin, 1994). À cet effet, nous adoptons la même stratégie de collecte de données que celle retenue par Krishnamurthy et Yauch (2007) qui analysent, entre autres, la structure organisationnelle d’une entreprise qui déploie une chaîne logistique agile. Précisons que la sélection du site analysé relève d’une approche opportuniste, puisqu’en étudiant une entreprise, nous avons constaté la présence du phénomène, soit l’interaction étroite et en plusieurs vagues d’une structure complexe de gestion des achats et de TI, le tout révélant un potentiel de recherche intéressant. L’étude de cas offre justement cette flexibilité permettant de capturer des phénomènes contemporains (Seuring, 2008). Bien que la tendance récente soit au recours à des études de cas multiples, nous croyons qu’un cas approfondi présente un intérêt évident dans une situation comme celle-ci. À cet effet, nous reprenons les propos de Dubois et Araujo (2007, p. 173) : “We regard strong exemplars as both necessary for the development of a discipline as well as providing templates against which different theoretical and methodological positions may sharpen their differences.” La firme étudiée est une grande entreprise internationale du secteur financier, œuvrant dans plus d’une quinzaine de pays. Les informations présentées ici proviennent d’entrevues réalisées auprès de cadres de la gestion des achats d’une filiale nord-américaine de cette entreprise. Ces entrevues, totalisant plusieurs heures, ont permis d’avoir une vue d’ensemble de la démarche de réorganisation des activités d’achat de cette filiale. Les entrevues ont été codées et analysées selon le système de matrice suggéré par Huberman et Miles (1991). Cette stratégie a été appliquée avec succès dans les études de Nollet et Beaulieu (2003, 2005). Par ailleurs, les renseignements amassés lors des entretiens ont été complétés par la consultation d’artefacts : articles de presse, livres, documents internes, etc. D’ailleurs, la diversité des sources et des personnes interviewées enrichit la compréhension du phénomène et évite de réinterpréter des événements à partir d’un seul point de vue (Voss et al., 2002). Précisons que nous avons préservé l’anonymat de l’entreprise afin de ne pas divulguer des informations qu’elle pourrait juger sensibles. Par conséquent, nous n’avons pas présenté les dates exactes de tous les événements afin de limiter la capacité du lecteur à retracer l’entreprise étudiée. Par ailleurs, les délais entre les événements sont relativement exacts. Nous soutenons que ce choix n’entrave ni les objectifs poursuivis par l’étude, ni la qualité des analyses qui en découlent. Étude de cas de la société XYZ La présentation de cette étude de cas s’articule autour de trois volets. D’abord, nous présentons la gestion des achats à la fin des années 1990 dans la firme XYZ. Ensuite, nous décrivons ce que nous appelons « l’encadrement global » de la gestion des achats, soit les interactions entre le groupe d’achat situé au siège social et les services des achats dans les différentes filiales. Par la suite, nous dépeignons l’encadrement local, soit les relations entre le service des achats dans une filiale et les relations avec les services requérants. La situation initiale Vers l’année 2000, la haute direction de l’entreprise XYZ avait réalisé que les possibilités Vol. 18 – N°1, 2010 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:12 7 7 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management de croissance demeuraient limitées, malgré l’expansion économique de la décennie précédente. Donc, si elle souhaitait maintenir des rendements intéressants pour ses actionnaires, elle devait chercher à contrôler davantage les coûts, dont naturellement les achats. Malgré que l’entreprise soit une firme internationale avec un chiffre d’affaires de plusieurs milliards de dollars, la gestion des achats était beaucoup moins développée qu’on ne serait porté à le croire sur la base de la taille. Les différentes divisions poursuivaient leurs propres pratiques de gestion. À l’intérieur d’une même filiale, il pouvait y avoir une diversité de pratiques entre les différents services. Ceci faisait en sorte qu’une même filiale pouvait communiquer par différents moyens avec un même fournisseur dépendamment du service qui lançait une commande. Un fournisseur pouvait recevoir des requêtes par télécopieur, par courriel ou même par la poste. Souvent aussi, ces requêtes comportaient des clauses différentes. Dans ce contexte, il n’y avait pas vraiment de politique de gestion des achats, le tout étant très souvent laissé à la discrétion des services. Les rares acheteurs que l’on retrouvait dans l’entreprise intervenaient à des degrés divers dans le processus d’achat selon la nature des contrats et des requérants. Dans certains cas, le fournisseur aidait le requérant, qui n’avait souvent pas d’expertise en matière de gestion des achats, à préciser ses spécifications. Enfin, il n’y avait aucune consolidation des besoins similaires entre les différentes filiales de XYZ. Selon les critères de la grille de Keough (1993), la structure de gestion des achats de XYZ était donc très embryonnaire, vu l’absence de politique d’achats et de procédures Figure 1 : Chronologie de la mise en œuvre de la structure des achats dans la société XYZ normalisées, de même que la décentralisation très prononcée qui menait à des interventions variables des acheteurs alors en poste. Outre les coûts de ces façons de faire (absence de consolidation pouvant générer des économies et mauvaise utilisation des ressources qui, de plus, n’étaient pas des professionnels en achats), des cadres constatèrent que l’entreprise était peu protégée en cas de litige avec ses fournisseurs. L’encadrement global Suite au diagnostic sur le contrôle des coûts, la haute direction de l’entreprise déploya différentes mesures tant au niveau du siège social qu’à celui des filiales. La figure 1 présente les principaux changements chronologiquement. Comme première mesure, la haute direction constitua un Groupe Achat dirigé par un vice-président. Ce service fut doté d’une équipe et il était localisé au siège social international de la société. Ce Groupe s’appuyait aussi sur un réseau d’achat local centralisé dans les filiales qui serait déployé dans les mois suivant la création du Groupe Achat. Une des premières mesures prises par le Groupe Achat avait été de produire un document décrivant les tâches de chaque poste associé à la gestion des achats, mais aussi les procédures et les mesures de contrôle existantes. Ceci visait à permettre une uniformisation des façons de faire pour chacune des filiales de la société. Pour soutenir cet effort de normalisation, un Bureau d’orientation stratégique (BOS) avait été mis sur pied. Ce dernier réunissait les responsables des services des achats de chacune des filiales et voyait au développement d’une base de données centralisée sur les contrats signés localement et au suivi des économies réalisées. Il a également vu à la sélection des logiciels de gestion des achats qui seraient déployés dans les filiales : le système Ariba Buyer pour le lancement des commandes des requérants vers les fournisseurs pour les articles courants et le système PeopleSoft Purchasing pour le paiement électronique aux fournisseurs. Les discussions au niveau du BOS visaient aussi à identifier des mandats qui pourraient être négociés globalement par les gestionnaires du Groupe Achat du siège social. Cependant, la base de données centralisée pourrait permettre de déterminer la filiale la plus performante dans la négociation de dossier. À terme, cette filiale pourrait obtenir le mandat de conclure un contrat pour toutes les unités à travers le monde. Cette comparaison entre les filiales serait d’autant facilitée que les proces- 8 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:13 Vol. 18 – N°1, 2010 8 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management sus seraient normalisés. Ainsi, une filiale se démarquerait parce qu’elle aurait su développer une connaissance étroite du marché fournisseur et une approche lui permettant de générer des gains supérieurs. Pour ces raisons, le service des achats de cette filiale deviendrait alors en quelque sorte une référence mondiale pour les autres sites de l’entreprise. L’objectif à long terme n’était pas de répartir tous les dossiers d’achat entre les services des achats, car des achats locaux allaient demeurer, ne serait-ce que parce que les offres régionales étaient plus compétitives ou parce qu’il n’existait aucun fournisseur en mesure de répondre à tous les marchés simultanément. Cependant, la base de données centralisée permettrait de contrôler les résultats des négociations faites dans les filiales. Par exemple, si l’une d’elles décidait de se soustraire à un contrat global, elle aurait alors à démontrer le bien-fondé de cette décision par un meilleur résultat lors des négociations. L’encadrement local Pour illustrer ce second niveau d’encadrement, nous utilisons la situation d’une filiale nord-américaine. Les achats ont été attribués spécifiquement à une Direction. Les acheteurs, jusqu’alors dispersés dans différents services, furent rapatriés sous cette Direction. Au fil des ans, des acheteurs qualifiés furent embauchés. Ces individus présentaient des profils variés d’expérience professionnelle et de formation académique, ce qui permettait à la Direction de disposer de compétences diversifiées pouvant être allouées selon la complexité des dossiers à gérer. Par la suite, il avait été prévu que la définition des processus par le Groupe d’Achat amènerait le service des achats de chacune des filiales à veiller à la négociation et à la résolution des litiges avec les fournisseurs, alors que les services requérants se chargeraient des tâches plus opérationnelles, soit le lancement des commandes par l’entremise du progiciel Ariba Buyer. Les services requérants verraient au suivi du service avec des fournisseurs. Une fois la négociation conclue, le contrat serait signé par deux responsables locaux : un du service des achats et un du service demandeur. Cette procédure permettrait ainsi d’éviter un isolement entre les acheteurs et les requérants. Pour cette filiale nord-américaine, la mise en œuvre de ce découpage n’avait pas été spontanée, ayant consisté en une démarche sur plusieurs mois quant à la réappropriation à l’intérieur du service des achats des contrats signés avec des fournisseurs par les différentes unités administratives. La présence du système Ariba Buyer à l’intérieur de la filiale visait à uniformiser les approches de transmission des commandes aux fournisseurs. Pour la filiale nord-américaine étudiée, le transfert vers ce système d’information ne s’effectua pas sans heurts. Il fut nécessaire de créer des catalogues électroniques des différents articles afin que les requérants puissent les repérer facilement dans le système. Les articles furent regroupés en une trentaine de familles constituant autant de catalogues. L’objectif était d’implanter au minimum deux douzaines de catalogues sur une période de deux ans. Outre la constitution des catalogues, la détermination des seuils monétaires à partir desquels une commande pourrait être lancée sans exiger l’autorisation d’un supérieur hiérarchique fut nécessaire. Cet exercice exigea des discussions sur plusieurs mois avec les différents services requérants. Le système PeopleSoft Purchasing était vu comme un outil de contrôle supplémentaire afin de s’assurer que les achats traités manuellement seraient réalisés auprès de fournisseurs mis sous contrat. Pour assurer ce rôle de contrôle, à terme, une entente administrative serait conclue entre le service des achats et le service des comptes à payer afin d’empêcher le paiement de toute facture qui ne serait pas adressée à un fournisseur sous contrat avec cette filiale. Cette mesure découragerait les requérants d’opter pour d’autres fournisseurs que ceux sous contrats cadres. Analyse du cas Dès le départ, le cas est une illustration du concept de maturité d’une fonction de gestion des achats. Selon la grille de Keough (1993), la société XYZ est passée d’une structure de premier niveau où la gestion des achats était très décentralisée, à une gestion des achats de troisième niveau, car il y a maintenant une structure centralisée. Il y a également des comités d’achats (dans ce cas-ci le BOS), la construction d’une base de données de gestion des achats et le développement de politiques corporatives. Nous ne pouvons naturellement pas attribuer ce déplacement uniquement à l’apport des TI, car la volonté de la haute direction de se doter d’un service des achats appliquant des pratiques de gestion largement reconnues avait été un facteur déterminant. Par ailleurs, cette Vol. 18 – N°1, 2010 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:13 9 9 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management volonté a créé une impulsion, mais il était nécessaire d’obtenir une adhésion de l’organisation au changement, par exemple, par le biais du système à double signature. L’existence de plusieurs facteurs d’impulsion va dans le sens des travaux de Tchokogué et Nollet (1998), ainsi que ceux de Johnson et Leenders (2004) qui avaient déjà identifié plusieurs des facteurs expliquant l’évolution d’un service des achats. Notre analyse vise à cerner comment les TI ont soutenu ces efforts de reconfiguration de la gestion des achats, mais aussi comment les TI peuvent aider à dégager de nouvelles configurations organisationnelles sortant de l’ornière centralisation ou décentralisation. À partir de la grille de Keough (1993), on réalise que la progression d’un service en termes de maturité peut prendre plusieurs années, ce qui est normal, puisque cette évolution s’accompagne de plusieurs changements (définition de politiques et procédures, embauche de personnel, etc.). Dans ce cas-ci, les dirigeants de la société XYZ ont initié des changements à la structure organisationnelle entre autres par le développement d’un service des achats davantage centralisé. C’est à l’intérieur de ces nouvelles structures que les gestionnaires responsables des achats ont décidé, conjointement à l’intérieur du BOS, des technologies qui soutiendraient leurs actions. Bien que tous les chercheurs ne s’accordent pas sur ce point (Boschken, 1990 ; Krishnamurthy et Yauch, 2007), en soi, ce résultat rejoint la vision classique de Chandler (1962) voulant que la structure découle de la stratégie. Dans ce contexte-ci, les technologies d’information deviennent donc un outil pour concrétiser la stratégie (enabler) et, dans le cas de la société XYZ, une façon de gérer plus efficacement les achats. Dans le cas de l’encadrement local, il est toutefois intéressant de noter le délai de deux ans entre le moment où la structure de gestion des achats fut mise sur pied et le moment où les technologies d’information furent déployées. Bien que notre étude ne s’attarde pas à l’analyse de la durée des différentes étapes, ce délai fut jugé long par quelques-uns des gestionnaires en place. En fait, ces derniers avaient sous-estimé l’impact des facteurs autres que la technologie qui peuvent avoir une incidence sur la structuration d’un service des achats. Par ailleurs, notre deuxième question de recherche vise à mesurer l’impact des TI sur les grands paramètres d’une structure organisationnelle. Pour répondre à cette question de recherche, nous avons déjà précisé que notre analyse adoptait les trois dimensions d’une structure organisationnelle, qui sont par ailleurs souvent reconnues comme les plus importantes (Dalton et al., 1980) : centralisation, formalisation et spécialisation. Stanley (1993) avait retenu ces mêmes dimensions pour étudier la performance des structures de gestion des achats. Plus récemment, Kim (2007) avait traité lui aussi sensiblement des mêmes variables pour analyser les configurations organisationnelles de la gestion de la chaîne logistique. Le tableau 1 présente les grandes conclusions de nos observations, détaillées dans les prochaines sections. La centralisation Le cas fait nettement ressortir le caractère multiforme de cette première dimension, alors que l’on retrouve différents niveaux de centralisation. Il tend à supporter les propos de Foster et Flynn (1984) qui concluaient que grâce aux TI, les gestionnaires n’avaient plus à limiter leur choix de structure organisationnelle entre les deux options traditionnelles de centralisation et décentralisation, de nouvel- Tableau 1 : Impacts des TI sur trois des dimensions des structures organisationnelles Centralisation - Les TI permettent de scinder les décisions d’exécution et celles de contrôle. - Les décisions d’exécution peuvent êtres mieux réparties entre les différents paliers (opérationnels, direction locale, direction générale) et éclatées dans différentes zones géographiques. - Cette répartition est possible et préserve la cohérence d’action de l’organisation, car les TI peuvent centraliser le contrôle. Formalisation - Les TI renforcent le formalisme, car un contrôle plus étroit assure le respect des règles organisationnelles. - Ce formalisme est rendu possible par la centralisation des décisions d’acquisition des TI, ce qui assure une normalisation des systèmes d’information et permet d’éviter la multiplication des pratiques. Spécialisation - Les TI renforcent quelque peu la spécialisation, car les décideurs peuvent se concentrer sur les décisions d’exécution ou de contrôle, puisque les TI permettent de scinder les deux volets. 10 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:13 Vol. 18 – N°1, 2010 10 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management les possibilités s’ouvrant à eux. La recherche de nouvelles options semble nécessaire puisque dans l’environnement d’affaires turbulent des dernières années, une organisation a intérêt à tirer profit des bénéfices de la centralisation (le contrôle des coûts) et de la décentralisation (vitesse de réaction) (Dubois et Wynstra, 2005). En reprenant les propos de Kirkwood et al. (2005), le cas dégage deux niveaux de centralisation, un premier qui est global pour l’ensemble de l’entreprise et un second, local (figure 2). La centralisation globale s’articule autour du Groupe Achat du siège social ou encore, par l’entremise du BOS, qui définit les tâches, les processus et les solutions technologiques qui seront adoptés par les unités locales. En soi, ces choix concordent avec les deux premiers niveaux de décisions identifiés par Kirkwood et al. (2005), la définition des politiques, des orientations et des objectifs stratégiques, ainsi que la configuration des processus et le choix des moyens. Comme nous le verrons, la centralisation de ces décisions renforce les deux autres dimensions organisationnelles (formalisation et spécialisation), ce qui rejoint les observations de Stanley (1993). Le second niveau de centralisation est local, la négociation des contrats étant faite par un service unique. Parallèlement, il y a une décentralisation des activités de lancement des commandes et de suivi auprès des services requérants. L’opérationnalisation quotidienne est scindée entre une unité administrative centralisée et des services décentralisés. Toutefois, même cette dernière affirmation doit être nuancée. En effet, le Groupe Achat ou le BOS peuvent négocier des contrats pour l’ensemble des filiales de l’entreprise. Donc, une part des opérations quotidiennes peut être réalisée au niveau d’une unité centrale globale. Cette répartition des responsabilités de gestion des achats entre différents niveaux administratifs est rendue possible grâce aux TI, car cette répartition ne doit pas conduire à des actions désordonnées où chaque palier prendrait des décisions isolées sans se soucier des impacts aux autres niveaux de l’organisation. Les systèmes comme Ariba Buyer, Peoplesoft Purchasing ou la base de données centralisée des contrats du BOS sont des outils technologiques permettant de contrôler les décisions prises par différents acteurs. De tels bénéfices avaient été mis en évidence par Boulianne (2005) lorsqu’il traitait des cartes d’approvisionnement (p-cards) comme outils de con- Figure 2 : Les niveaux de centralisation des achats chez XYZ trôle. En soi, ce cas illustre les propos de Lau et al. (2001) qui précisaient que les TI permettaient une décentralisation de la prise de décisions et une centralisation du contrôle. Précisons toutefois que dans le cas de la société XYZ, les décisions décentralisées ont un caractère très opérationnel. Par ailleurs, l’expérience de la société XYZ permet d’apporter une autre nuance à la notion de centralisation. Cette dernière est souvent associée à l’idée qu’un service des achats soit localisé au siège social (Kim, 2007) et, par conséquent, éloigné physiquement des services requérants. Vu que la décentralisation évoque le contraire, les acheteurs sont dans ce second cas mieux à même de saisir différentes nuances associées à l’utilisation d’un article (saisonnalité, problèmes de qualité, enjeu de formation, etc.), considérations qui pourront être intégrées lors des discussions avec les fournisseurs. Mais la proximité peut aussi l’être avec les sources d’approvisionnement, ce qui permet alors aux acheteurs de mieux saisir l’évolution du marché fournisseur et ainsi d’adapter les stratégies d’achat en conséquence. À cet effet, le cas XYZ met en évidence une centralisation de certains mandats de négociation, parallèlement à une déconcentration où certains de ces mandats globaux sont gérés par des services locaux des achats. Huguet (2003) décrit ce concept de déconcentration, soit une localisation physique des acheteurs près des requérants au lieu de les localiser dans un seul site. Il y a donc une différence entre l’unité qui prend une décision et sa localisation géographique. Ainsi, certains dossiers peuvent être centralisés entre les mains d’un acheteur sans qu’il ne soit localisé au siège social. Les TI permettent donc de profiter simultanément des bénéfices de la centralisation et de la décentralisation. Vol. 18 – N°1, 2010 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:14 11 11 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management La formalisation Comme nous l’avons évoqué précédemment, la formalisation est une seconde dimension fortement mise en évidence à l’intérieur du cas; après tout, il y a eu une normalisation des descriptions de tâches, des indicateurs de performance et des logiciels de gestion. Dewett et Jones (2001) avaient précisé que les TI favorisaient la formalisation en enregistrant des données sur les événements se déroulant dans les organisations, ce qui facilitait le contrôle des comportements, rendant ainsi plus aisé le respect des règles organisationnelles et l’identification des comportements déviants. À la société XYZ, le déploiement des logiciels de gestion des achats va dans le sens des observations recensées dans les écrits : il renforce la formalisation des processus d’achat au niveau local en diminuant les occasions pour les requérants de retenir un fournisseur qui n’est pas lié par un contrat cadre. De plus, les logiciels imposent des procédures de travail, balisant donc ainsi les pratiques et accentuant la formalisation. La formalisation du choix de logiciels peut également être associée à un effort d’intégration. Giachetti (2004) avait relevé que l’intégration des systèmes était l’un des défis les plus significatifs des entreprises, puisque le fractionnement de l’organisation en de multiples sous-unités possédant leur propre système d’information pouvait complexifier les efforts de coordination. En centralisant le choix des logiciels de gestion des achats et des indicateurs de performance, la haute direction de XYZ facilite les comparaisons entre les différentes filiales, ce qui permet d’identifier les acteurs les plus performants dans certains domaines, facilitant du même coup la spécialisation des dossiers. La spécialisation Bien que la réorganisation des activités d’achat de la société XYZ se déroule à des vitesses variables selon les filiales et que le rôle du BOS se raffinera au cours des prochaines années, il demeure que l’approche utilisée vise une division du travail, afin que l’exécution des principales tâches de gestion des achats soit confiée à des experts dans le domaine, retirant donc des mains des requérants la réalisation de la grande majorité des activités liées aux achats. À l’intérieur des services des achats des différentes filiales, il existe aussi une certaine forme de spécialisation, car les acheteurs sont 12 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:14 en charge de dossiers spécifiques. On constate également une spécialisation globale, car certaines filiales se verraient attribuer la gestion de mandats pour l’ensemble du groupe et cela, sur la base de leur performance antérieure. Donc, les mécanismes de contrôle des TI peuvent prévenir des problèmes ou des comportements déviants. La nature préventive de ces contrôles évite les investissements dans des mesures correctives (Boulianne, 2005). Dans ce contexte, les acheteurs peuvent concentrer leurs efforts sur la gestion des achats et éviter d’être des auditeurs internes des comportements d’achat des requérants. Synthèse des observations et impacts sur la chaîne logistique Les conclusions que nous venons de formuler sont-elles similaires pour la gestion de la chaîne logistique ? Pour répondre à cette question, il nous semble pertinent de relater l’expérience de la société IBM au niveau des structures des achats et de la logistique. En 2002, Sam Palmisano prend la direction d’IBM et il souhaite que l’entreprise soit davantage orientée sur la demande. Une des solutions à cette stratégie a été de constituer une vice-présidence exécutive en supply chain qui regroupait entre autres les activités de logistique, de production, de gestion des commandes (order fulfillment) et de gestion des achats (Radjou, 2005). Ce mouvement de centralisation était le point culminant d’initiatives prises dans d’autres fonctions. Ainsi, au milieu des années 1990, un effort important de réorganisation de la fonction « achats » avait mené à une centralisation de cette dernière et à un déploiement de différentes solutions technologiques. Quelques années plus tard, la fonction logistique connut le même processus de centralisation (Anonyme, 2006). Par le fait même, nous voyons bien que lorsque les fonctions « achats » et « logistique » sont distinctes, elles ne sont pas nécessairement centralisées ou décentralisées au même moment. Ceci rend d’autant plus pertinents nos propos relatifs quant à la maturité d’un service et au fait que le domaine de la logistique puisse s’appuyer sur des leçons vécues en achats. À l’intérieur d’un service intégré de gestion de la chaîne logistique, il y aura des fonctions spécialisées (achat, production, distribution) qui vont émerger. Le fait que les principales fonctions de la chaîne logistique soient regroupées sous une seule entité administrative n’offre aucune garantie d’une plus grande efficacité, chacune des fonctions pouvant agir Vol. 18 – N°1, 2010 12 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management dans son meilleur intérêt au détriment d’une finalité d’ensemble (Dewitt et Jones, 2001). Cependant, nous sommes d’avis que la dimension de spécialisation prend une plus grande importance dans le cas des structures de la chaîne logistique. Hitt et Brynjolfsson (1997) avaient déjà précisé que les TI améliorent la coordination et la communication à l’intérieur de la firme. Les gestionnaires d’IBM ne se sont pas contentés de ce rôle traditionnel des TI. Ils ont reconnu les dangers de la spécialisation. Ils croient que IBM a pu éviter un tel piège en développant une série d’indicateurs de performance qui étaient communs à chacune des fonctions (Anonyme, 2006). Ces indicateurs communs étaient liés aux paramètres stratégiques de l’entreprise, entre autres à la satisfaction des clients et aux économies (Radjou, 2005). Conclusion Selon Wang (2001), les technologies de l’information jouent un rôle considérable en appuyant une structure organisationnelle pour qu’elle puisse traiter efficacement une masse de données. Le cas étudié supporte justement ce point de vue en mettant en plus l’accent sur le fait que les TI soutiennent la mise en œuvre de la stratégie d’achat. En soi, cette constatation offre une réponse à notre première question de recherche. Il demeure qu’au cours des dernières décennies, ce rôle des TI s’est accentué entre autres grâce à l’accélération des innovations technologiques, mais également à une utilisation plus éclairée du potentiel des TI. Notre étude portait aussi sur les impacts des décisions associés au déploiement des systèmes d’information sur les trois dimensions de la configuration organisationnelle des achats. En retenant une organisation qui réorganise ses activités d’achat, nous avons été à même d’étudier les impacts des décisions reliées aux systèmes d’information sur trois des dimensions les plus importantes de la configuration organisationnelle des achats (Stanley, 1993). Notre propos, à l’exemple de ceux de Bloomfield et Coombs (1992), de Lau et al. (2001) ainsi que de Wang (2001), met en évidence que la centralisation/décentralisation implique deux grands processus : l’exécution, soit la prise de décisions stratégiques ou opérationnelles et le contrôle, afin de prévenir ou corriger des actions déficientes. Tyndall et al. (1998) suggéraient de scinder les achats entre les activités opérationnelles et celles stratégiques. Ce que notre étude tend à démontrer est que cette réflexion devrait se faire entre les activités d’exécution et celles de contrôle. Les TI favorisent se type de découpage. Dans ce contexte, la formalisation devient importante puisqu’elle conduira à une question majeure : quelles sont les règles organisationnelles qui devront être respectées (et contrôlées)? Notre cas réaffirme l’importance de ces aspects tout en démontrant que la structure de gestion des achats ne se limite pas à la seule dimension de centralisation/décentralisation. À cet effet, notre description de l’expérience d’IBM illustre que le contrôle est une dimension d’un intérêt majeur dans la mise en œuvre d’un service intégré de gestion la chaîne logistique qui se composera inévitablement de plusieurs unités administratives spécialisées. Nos observations peuvent être reliées à celles de Kim (2007), qui souligne qu’une formalisation et une centralisation d’un service de gestion de la chaîne logistique peut freiner les efforts d’intégration de la chaîne logistique avec les fournisseurs et les clients externes. L’auteur convient qu’une formalisation et une centralisation plus poussées sont nécessaires pour parvenir à une intégration interne, mais qu’accentuer ces caractéristiques peut devenir contreproductif avec les partenaires d’affaires externes. Nous croyons que l’expérience de XYZ illustre qu’il est possible d’éviter les excès identifiés par Kim (2007). Une forme d’autonomie pourrait être accordée aux acteurs à l’interface avec les partenaires externes, une autonomie leur permettant de réagir rapidement aux demandes ou aux changements de l’environnement. Les technologies de l’information pourraient assurer un contrôle centralisé, assurant ainsi une cohérence globale aux actions de l’entreprise. Naturellement, l’étude est basée sur un seul cas. Par exemple, malgré l’analyse faite pour cette situation, cette situation s’ajoute aux autres déjà connues et supportant la thèse que la structure est la résultante d’une stratégie. Aussi, des enquêtes futures pourraient reproduire la présente analyse afin de valider les conclusions auxquelles nous en sommes arrivés. De nouvelles études pourraient également analyser plus spécifiquement les structures de la chaîne logistique. En terminant, nous ne voulons pas donner l’impression de surestimer le rôle des TI dans le déploiement d’une structure de gestion des achats. Comme le soulignent Buttermann et al. (2008), il demeure que les TI constituent l’une des variables permettant au gestionnaire de maintenir l’équilibre entre les différentes Vol. 18 – N°1, 2010 Vol18_N1_2010.prn Vol18_N1_2010 lundi 9 aoßt 2010 11:50:14 13 13 Profil couleur : DØsactivØ Composite 150 lpp 45 degrØs Logistique & Management forces d’impulsion de l’organisation. Cependant, tant le fait d’accorder une importance excessive que trop restreinte à l’une de ces variables peut avoir des conséquences graves sur la capacité d’une organisation à réaliser une performance supérieure. Par ailleurs, ce cas a mis en lumière la recherche d’une contribution appropriée des TI au succès du service des achats d’une grande organisation. Une réflexion similaire doit être réalisée quant aux structures de gestion de la chaîne logistique de l’entreprise, car les différentes tensions s’exerçant (contrôle vs autonomie, besoins locaux vs économie d’échelle) sont présentes dans toute la chaîne et les TI pourraient permettre de réaliser un juste équilibre. Bibliographie Andersen P.H., Rask M. (2003), Supply chain management: New organisational practices for changing procurement realities, Journal of Purchasing & Supply Management, Vol. 9, N° 2, pp. 83-95. Anonyme. (2006), IBM reinvents the supply chain for the era of global enterprise, World Trade, Vol. 19, N° 5, pp. 20-28. Baglieri E., Secchi R., Croom S. (2007), Exploring the impact of a supplier portal on the buyer-supplier relationship: The case of Ferrari Auto, Industrial Marketing Management, Vol. 36, N° 7, pp.1010-1017. Banerjee S., Sriram V. 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