en PDF - Consistoire de Paris

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La paracha de la semaine est la section hebdomadaire de la Torah, lue rituellement chaque Chabbat, dans toutes les synagogues à travers le monde
à la mémoire du regretté Grand Rabbin de Paris David Messas (zatsal)
PARACHAT BO
Grand rabbin de Paris Michel Gugenheim *
Tout d’abord, un grand merci à Rav Ariel pour son extraordinaire initiative, sans précédent, où tour à tour
vingt-six orateurs viennent traiter une paracha de la Torah. Cette expérience nouvelle, exceptionnelle,
dédiée à Rav David, est une idée géniale pour l’élévation de son âme, et ce, surtout pendant l’année de
deuil.
La paracha Bo est la troisième paracha du second livre de la Torah, l’Exode. Cette paracha est placée sous
le signe de la délivrance. Les trois dernières plaies abattues sur l’Egypte y sont décrites.
La dernière plaie, la mort des premiers-nés fit capituler le Pharaon et permit aux enfants d’Israël de
retrouver leur liberté.
Quelle est la raison d’être de ces plaies ? D.ieu aurait pu libérer les enfants d’Israël sans ces dix plaies. Quel
était donc le but recherché par l’Eternel à travers ce processus ?
Concernant cette question classique, je voudrais partager avec vous le commentaire de Rabbi Chimchon
Raphaël Hirsh, grand maître rationaliste de Francfort. Le Rav Hirsh explique que les dix plaies forment un
processus se découpant en trois séries de trois plaies, puis d’une dernière.
Chaque série de plaies se réfère à un aspect des maux infligés par les égyptiens à Israël, qu’ils devaient à
leur tour subir afin qu’ils prennent conscience de ce qu’ils avaient fait subir aux autres.
Les trois facettes de cette souffrance sont les suivantes.
La première, l’exil ; c'est-à-dire le fait de se sentir étranger dans le pays où l’on réside, le fait de se sentir
comme un paria de la société.
La seconde, l’état de servitude, l’esclavage.
Enfin la troisième, la souffrance physique et morale ; les sévices qui étaient infligés au quotidien à Israël.
Dans chaque série, les plaies suivent la même articulation. Remarquons qu’elles s’abattent de façon de plus
en plus accentuée, de plus en plus intense sur les égyptiens.
La dernière plaie récapitule les 9 premières.
Selon ce schéma, la neuvième plaie, la makat hachekh, l’obscurité, constituerait pour les égyptiens la plaie
qui leur a occasionné la plus grande souffrance sur le plan physique et moral.
Lorsque Moché leva les mains au ciel, une obscurité s’installa en Egypte pendant trois jours, puis « On ne se
voyait plus les uns les autres et on ne pouvait plus bouger de son siège, durant trois jours. »
Or, il semble que la souffrance de ne rien voir est de moindre intensité que celle occasionnée par la soif
due à la plaie du sang ou encore au regard de la douleur occasionnée par la plaie des ulcères ? Pourquoi,
selon le schéma précédent, cette plaie est qualifiée de plus lourde que les autres ?
D’après le midrach, la plaie de l’obscurité n’était pas uniquement un moment où la lumière était absente.
L’obscurité liée à cette plaie était palpable. Elle avait même, enseigne un midrach, « l’épaisseur de la
taille d’un dinar, d’une pièce de monnaie ».
D’autres commentateurs proposent une explication très audacieuse. Lors de cette plaie, le soleil brillait,
mais une membrane de la taille de l’épaisseur d’une pièce de monnaie poussa dans les yeux des égyptiens.
Par conséquent, ils ne se voyaient pas. Ils en furent tellement terrorisés qu’ils ne purent plus bouger. En
fait, une telle obscurité représenta la pire des souffrances, car l’obscurité physique avait engendré une
obscurité morale. Cette obscurité morale a un nom : la solitude.
© Consistoire de Paris
Les égyptiens, dans l’incapacité de se voir les uns les autres. Ils se sentirent alors terriblement seuls. Ils ne
purent bouger, car ils étaient anéantis par la solitude. Ne pouvant plus bouger, ils tombèrent dans un
véritable état dépressif. Derrière cette plaie, la Torah souligne les méfaits de la solitude et stigmatise les
comportements engendrant la solitude.
On ne se voyait plus les uns les autres
Lorsqu’on refuse de regarder l’autre, lorsque l’on pratique le repli égocentrique, on installe une double
solitude. En effet, la personne que l’on isole se sent seule, mais aussi on se sent soi-même extrêmement
seul.
On ne pouvait plus bouger de son siège, durant trois jours.
Lorsqu’on ne réagit pas face à la détresse, au désarroi, aux besoins de l’autre, on crée une solitude
gravissime, condamnée à travers la plaie de l’obscurité.
Dans cette perspective, la fin du verset devient plus claire : La lumière brillait dans toutes les habitations
des enfants d’Israël.
Le peuple d’Israël est immunisé contre la solitude. Il a ancré au plus profond de lui-même, le sens de la
solidarité. Lorsqu’un juif se sent seul, il se rend à la synagogue, il prie, il assiste à un cours de Torah, et
prend ainsi un bain de convivialité .Il se trouve immédiatement entouré de tous ses frères.
« Ner léragli dévaréKha véor lintivati »
Ta parole est comme une lumière qui éclaire le chemin. « Ner mitsva vétora or »
La mitsva est comparée à une lampe et la Torah à une lumière. La lumière, antithèse de la solitude, est ici
imagée par la Torah dont la pratique des mitsvot représente une immense barrière contre la solitude.
Le mot mitsva a la même racine que « tsavta », qui signifie le lien. Chaque mitsva représente le trait
d’union entre l’homme et D.ieu ou entre l’homme et son prochain.
Dans chacune de nos bénédictions nous disons : Acher kidéchanou bémitsvotav vétsivanou, qui NOUS a
sanctifié par ses préceptes et qui NOUS ordonné… On est tous soumis aux mêmes mitsvot. En pratiquant les
mitsvot, nous nous sentons liés à D.ieu ainsi qu’à tous nos autres coreligionnaires. Par conséquent, les juifs
ne sont jamais seuls, car la lumière nous accompagne toujours.
Cette leçon est dédiée à la mémoire du Grand Rabbin Rabbi David, véritable lumière, dans le sens évoqué
plus haut. Ainsi, un nombre considérable de personnes de tout horizon, d’importantes personnalités juives
et non juives qui l’ont connu et que je rencontre depuis mon élection au grand rabbinat de Paris, furent
toutes impressionnées, aussi bien par la chaleur humaine qu’il dégageait, par sa capacité à créer un
contact, une chaleur, valeurs spécifiquement juives.
Je souhaite à ses enfants de perpétuer ces qualités, de faire régner autour d’eux cette immense chaleur
humaine qui est le cachet et l’image de marque du judaïsme.
GRAND RABBIN MICHEL GUGENHEIM
Né à Paris le 20 Mars 1950, le Grand Rabbin Michel Gugenheim est le fils de l’illustre grand Rabbin Ernest Gugenheim, directeur du
Séminaire Israélite de France. A l’issue de sa scolarité à l’Ecole Yavné, le Grand Rabbin Gugenheim étudie pendant six ans dans la
célèbre Yéchiva Beer Yaakov, dirigée par le Rav Shmouel Moché Shapira et par le Rav Wolbe.
Après son mariage, il il étudie une année dans la Yéchiva Collel de Brisk dirigée par le Rav Yoché Ber Soloveitchik. Rav Itshac Hutner,
auteur du célèbre Pahad Itshac, fonde un Collel en Israël que le rav Gugenheim intègre et qui devient l’un de ses plus proches
disciples.
Le père du Rav Gugenheim tombe gravement malade en 1976, ce qui l’oblige à rentrer en France. Il reste à ses côtés jusqu’à son
décès en mars 1977. Il le remplace alors comme enseignant de Talmud sous la direction du Grand Rabbin Emmanuel Chouchena
Zatsal. Lors du décès du Rav Tchaskala Av Beth Din de Paris, le Grand Rabbin Rahamim Naouri, devenu Av Beth Din, nomme le
jeune Rav Gugenheim, membre du Beth Din de Paris aux côtés du Rav Chouchena et du Ha’ham Dahan.
ème
Le Grand Rabbin Gugenheim s’installe dans le 19
de Paris et devient naturellement le Rabbin de la communauté Michkenot Israël.
Il est nommé Directeur du Séminaire Israélite de France lors du départ de Rav Chouchena en Israël.
Il est l’auteur de plusieurs ouvrages de premiers plans sur le judaïsme. Il est un spécialiste de la cacherout reconnu mondialement. Il
est responsable du service des divorces au Beth Din de Paris. Lors du décès soudain du Grand Rabbin de Paris en novembre 2011, il
assure avec le Grand Rabbin Goldmann l’intérim à cette fonction. Il est élu, en mars 2012, au poste de Grand Rabbin de Paris pour
succéder au Grand Rabbin Messas zatsal.
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