Sandra Albrecht,Ville de Strasbourg

Transcription

Sandra Albrecht,Ville de Strasbourg
Témoignage et Entretien
Florence JACQUES
Chargée d’insertion et formation
Responsable du pôle emploi-formation
CIDFF (Centre d’information sur les droits des femmes et des familles, Drôme, Valence)
Après avoir travaillé après l’obtention de son baccalauréat, Florence a décidé de s’engager en
ébénisterie où elle a passé un CAP. Désormais elle travaille à la CIDFF pour la valorisation des
femmes.
Propos recueillis par B.michaux pour le projet SRAPI, le 15 novembre 2010
SRAPI :
Florence, selon vous, quels sont les freins relatif à l’intégration de la femme
dans le métier d’élagueur ?
Florence JACQUES
C’est avant tout une question de communication, de représentation. Il y a des métiers
sexués dans les termes : un maçon, une nourrice et nous n’avons pas le vocabulaire ou les
images qui permettent d’avoir une autre vision de ces métiers. C’est donc une question de
représentation. Dès l’enfance on catalogue des métiers par ce clivage homme-femme,
même dans les magazines de jouets pour enfants (les jouets garçon ne sont pas les
mêmes que ceux des filles). Les parents veulent que leur fille ressemble à une fille. Il faut
dépasser ce cliché où les femmes sont forcément féminines.
Dans la communication, il faut montrer que de vraies femmes sont présentes sur de tels
métiers, qu’elles aiment leurs métiers et comment sont-elles arrivées là. Pour le métier
d’élagueur, il faut, dès le plus jeune âge, arriver à parler du métier autrement que par
l’approche physique, masculine du métier. Il faut surtout casser les images systématiques
que le métier renvoie sur la vie privée : ce n’est pas parce qu’une femme exerce un métier
traditionnellement d’homme qu’elle n’est pas féminine ou qu’elle est forcément
homosexuelle et pareil situation pour les hommes qui exerce un métier à tendance
féminine.
SRAPI :
A travail égal, une femme peut-elle avoir les mêmes compétences qu’un
homme ?
FJ :
Il n’y a pas de différences entre homme et femme. Sur ce métier, il y a un référentiel, des
compétences, des connaissances. Si la formation apporte aux deux les mêmes
informations, il n’y a donc pas de différence.
Les différences physiques sont dues à des entrainements différents. Les généralités font
que les hommes s’investissent plus dans les sports (foot, judo) et vont plus se développer
plus physiquement qu’une fille ne l’aurait fait. Un garçon qui ne fait pas de sport aura une
masse musculaire et donc une force moins importante qu’une fille qui se sera entrainée.
Le muscle n’est pas la force : c’est l’entraînement qui compte.
De plus, au niveau des conditions de travail, nous arrivons à trouver de l’outillage conçu
pour les femmes, plus léger, ergonomique, ce qui rend le travail plus facile pour les
femmes mais également pour les hommes.
Finalement aucune contrainte physique ne peut être un frein pour exercer ce métier. Et
une femme qui exerce ce métier reste une femme avec toute sa féminité.
.
SRAPI :
Est-ce qu’une femme peut devenir plus performante qu’un homme sur ce
type de métier ?
FJ :
Pas besoin d’être une supère femme pour montrer que ses compétences sont identiques
à celles des hommes. Seulement une femme élagueuse compétente va avoir plus de
difficultés à s’imposer devant des clients, alors qu’un homme peut être nul et ses
qualifications ne sont pas remises en question. La femme doit donc plus communiquer
qu’un homme pour afficher ses références et ses compétences.
Une femme n’est pas forcément plus compétente qu’un homme. Elles sont pareils que les
hommes. Tout les deux peuvent avoir les mêmes compétences.
SRAPI :
Certaines femmes élagueuses pensent que certains travaux sont plus
facilités quand ils sont effectués par des femmes ?
FJ :
Pour avoir formé des hommes et des femmes en ébénisterie, l’enseignement doit
permettre à tous de réussir. Dans l’idée naturaliste, on s’attend à ce que la femme soit
douce, plus attentive à ce qu’elle fait, et bien, pas toujours. Ainsi des hommes ont su
développé ce potentiel là. Mais il est vrai que dans la société, on a tendance à développer
des qualités sur lesquelles on est attendu (travail doux, fin et réfléchi pour une femme).
SRAPI :
Pensez-vous qu’une femme qui a accès à ce type de travail va entrainer une
cohésion au sein de l’équipe ou au contraire une explosion ?
FJ :
Une femme parmi les hommes c’est compliqué. On considère que la femme vient prendre
le travail des hommes alors elle doit faire sa place. Les femmes n’ont pas le droit d’être
mauvaises sur des métiers traditionnellement d’hommes. Il est plus bénéfique d’intégrer
plusieurs femmes en même temps.
J’ai dernièrement visité un chantier en BTP, milieu d’hommes. Les jeunes hommes ont
reconnu qu’ils se parlaient moins mal entre eux quand une femme était présente. Ils n’ont
pas de problème avec cette présence, de plus, sur le chantier de maçonnerie, il y a des
machines qui facilitent le travail. L’accueil des femmes dans une entreprise tempère les
discussions.et donc crée plus une cohésion qu’une déstructuration. Avec des ouvriers plus
âgés, on observe des attitudes machistes. Visiblement, il y a une question de génération.
Mais sur ce chantier, il y a aussi un problème de représentation, non pas homme-femme,
mais en fonction de la nationalité des ouvriers : on va prétendre qu’une personne de telle
nationalité a plus de facilité sur telle machine.
SRAPI :
Est ce que le comportement/les conditions d’une femme constitue un frein ?
FJ :
Dans les comportements, je ne vois pas ce qui être différents entre homme et femmes ! Et
je ne sais pas ce que c’est qu’une condition de femme!
SRAPI :
Plutôt au sens de la grossesse, des caractéristiques et besoins
physiologiques…
FJ :
Je trouve que quand il s’agit d’une femme on s’éloigne vite des compétences
professionnelles pour s’attarder sur sa vie privée. Ce qui gêne le recruteur, ce n’est pas
l’arrêt de 4 semaines de fin de grossesse mais la possibilité qu’elle s’arrête 3 ans. Au
moment du recrutement, personne ne va se demander si un homme va prendre son
congé parental de 3 ans ou prendre son poste à temps partiel (ce qui permet de garder le
contact avec son métier et ses évolutions)! Ce genre de questions n’est posé qu’aux
femmes. Pourquoi ne demande-t-on pas aux hommes ? On interroge peu la vie privée des
hommes alors qu’on ne se gêne pas sur celle des femmes.
Quand aux problèmes physiologiques (d’envie naturelle), on pense que les femmes vont
s’en plaindre ou vont avoir beaucoup plus envie. Pourquoi cela ? Mais on n’interroge pas
les hommes, au final c’est un non-respect de l’homme !
SRAPI :
En résumé, il n’y a aucune contrainte pour qu’une femme ne puisse exercer
le métier d’élagueur ?
FJ :
Exactement. On peut atteindre une mixité dans ce métier. A ranger homme et femme sur
certaines catégories de métier, on dévalorise tout le monde.
Pour les femmes, arriver à ce métier c’est une vraie volonté de leur part. Quand on a choisi
un métier on est à sa place, avoir des responsabilités coule de source puisqu’on est bien
dans son métier et qu’on s’y investit. Elles ont choisi ce métier, elles ne prennent pas la
place aux hommes.
Pour initier ce choix d’orientation, il faut, dès le départ, rendre les gens curieux et
intéressés.