MAMMITES: LA MALADIE ET SA TRANSMISSION

Transcription

MAMMITES: LA MALADIE ET SA TRANSMISSION
Institut Babcock pour la Recherche
et le Développement International
du Secteur Laitier
Essentiels
Laitiers
Université du Wisconsin à Madison
MAMMITES: LA MALADIE ET SA
TRANSMISSION
Michel A. Wattiaux
Institut Babcock
QU’EST-CE QUE LA MAMMITE?
La mammite, ou inflammation de la
glande mammaire, est la maladie la plus
répandue et la plus coûteuse qui afflige les
vaches laitières à travers le monde. Les
mammites peuvent être provoquées par
une blessure physique, mais la cause la plus
fréquente est l’invasion de la glande
mammaire par des bactéries ou d’autres
micro-organismes
(des
champignons,
moisissures, et peut-être des virus).
Mammites cliniques et subcliniques
Dans le cas de mammite clinique, le
quartier infecté est souvent gonflé,
douloureux au toucher et le lait est d’une
constitution visiblement anormale.
En
fonction de la sévérité de la mammite, le
lait est en partie coagulé, il contient des
“flocons” ou des “caillots; il contient parfois
du sang ou il est parfois entièrement
décoloré à cause de la séparation des
caséines du sérum. Dans les cas sévères de
mammites (mammite aiguë), la vache
montre des signes d’une réaction
généralisée: fièvre, rythme cardiaque élevé,
perte d’appétit et réduction précipitée de la
production laitière.
D’autre part, la mammite subclinique est
pratiquement “invisible” et est donc
difficile à détecter. La vache apparaît en
bonne santé; le pis et le lait apparaîssent
normal. Le seul signe d’infection est la
présence dans le lait d’un nombre élevé de
micro-organismes et de cellules blanches
du sang (cellules somatiques) qui
combattent les infections.
La perte de lait et de revenus due aux
mammites cliniques est facile à déterminer:
la production laitière chute fortement et le
lait des vaches traitées avec des
antibiotiques
ne
peut
pas
être
commercialisé pendant trois ou quatre
jours. Cependant, les pertes associées avec
les mammites subcliniques sont bien plus
graves parce que:
• La réduction de production persiste
longtemps et sabote les résultats de
lactation des vaches infectées;
• La grande majorité des mammites sont
subcliniques (en moyenne, pour
chaque mammite clinique, il y a 20 à
40 mammites subcliniques).
Le contrôle des mammites subcliniques
est tout aussi (sinon plus) important que le
traitement des cas cliniques parce que:
• Les vaches infectíes sont des réservoirs
d’organismes qui peuvent provoquer
de nouvelles infections chez d’autres
vaches;
• La plupart des mammites cliniques
démarrent de manière subclinique;
ainsi, le contrôle des mammites
subcliniques est le meilleur moyen de
contrôler les mammites cliniques.
Essentiels Laitiers: Lactation et Récolte du LaitMammites: La Maladie et sa Transmission
De plus, l’impact des mammites va bien
au-delà de la barrière de la ferme.
La
composition du lait change et sa qualité est
réduite. Le lait devient plus pauvre en
calcium, phosphore, protéines et matières
grasses, mais plus riche en sodium et
chlore. De plus, les antibiotiques utilisés
pour le traitement des mammites peuvent
avoir des effets secondaires néfastes. La
présence de residus d’antibioliques dans le
lait:
• Interfère avec la fabrication des
produits laitiers fermentés (fromage,
yoghourts);
• Donne une saveur indésirable aux
produits laitiers;
• Peut provoquer des problèmes de
santé (allergies) chez certains
consommateurs.
mamelle lorsque l’air entre à grande vitesse
dans l’unité de traite (“sifflement de la
machine”). De l’air indésirable entre aussi
dans l’unité de traite lorsque celle-ci est
détachée du pis sans que la valve qui
interrompt l’accès du vide ait été fermée au
préalable. Après la traite, le canal de la
mamelle reste dilaté pendant une heure ou
deux; cependant, le canal d’une mamelle
endommagée ou blessée peut rester
partiellement ouvert en permanence. Les
organismes de l’environnement qui vivent
dans les matières fécales, dans la litière
(sciure de bois, paille, etc.) ou ceux qui se
trouvent sur la peau de la mamelle peuvent
envahir un canal ouvert.
Inflammation de la zone colonisée
Ca
p
illa
ire
sa
n
Certaines bactéries peuvent progresser
vers l’intérieur du pis en s’attachant et
DEVELOPPEMENT DE LA MALADIE
colonisant de nouveaux tissus; d’autres
bactéries vivent dans le lait et prennent à
L’infection commence par la pénétration
profit les mouvements de la vache pour se
de micro-organismes dans le canal de la
mouvoir.
Les bactéries endommagent
mamelle et leur multiplication dans la
d’abord le tissu des grands canaux
glande mammaire.
lactifères. Les bactéries peuvent rencontrer
Invasion de la mamelle
des leucocytes (cellules blanches du sang)
La mamelle même est la première ligne
qui se trouvent naturellement dans le lait.
de défense contre la
Ces cellules sont la
2-Cellules blanches
pénétration
des
deuxième ligne de
détruisent les bactéries
bactéries dans le pis.
défense de la vache.
3-Atrophie (perte)
Normalement,
le
Elles
peuvent
des alvéoles
sphincter ferme le
engouffrer les bactéries
Bactéries
Cellules
envahissantes
canal lorsque la vache
et
les
détruire.
endommagées
n’est
pas
traite. 1-Defense structurelle de la mamelle
Pendant ce processus,
L’invasion
de
la
les leucocytes libèrent
Cellules
Leucocytes
sécrétrices
mamelle se produit le dans le lait
des substances qui
intactes
plus souvent pendant Epithélium
le
A provoquent
impénétrable
la
traite.
Les
de
Bacmouvement
Longueur
et
organismes
présents diamètre du
nombreux
autres
dans le lait ou à canal
leucocytes du sang
l’extrémité
de
la Muscle
vers le site d’infection.
(sphincter)
Bactéries qui
mamelle peuvent être Bouchon de
Si les bactéries ne sont
traversent les
Bactéries sur parois des canaux pas
projetés dans le canal kératine
entièrement
une plaie
lactifères
et la citerne de la
détruites,
elles
Figure 1: Développement des mammites et
mécanismes de défense de la vache.
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continuent à se multiplier et commencent à
infecter des canaux lactifères plus petits
(Figure 1A). Les cellules sécrétrices qui
sont endommagées par les toxines et
d’autres irritants libèrent des substances
qui augmentent la perméabilité des
vaisseaux sanguins (Figure 1B).
De
nouveaux leucocytes arrivent au site
d’infection. Ils entrent dans l’alvéole en
grand nombre en se “faufilant” entre les
cellules endommagées du tissu alvéolaire
(Figure 1C).
Du sérum sanguin, des
minéraux et des facteurs de coagulation se
répandent ainsi dans cette zone infectée. Le
lait coagulé peut obstruer le canal lactifère
et ainsi isoler la région infectée.
Destruction du tissu alvéolaire
TRANSMISSION DES DIFFERENTS
TYPES D’ORGANISMES
Avant d’essayer de contrôler la mammite,
il faut considérer l’origine et le mode de
transmission des micro-organismes qui la
provoquent. L’environnement (matières
fécales, litière, la peau de l’animal, etc.)
abrite de nombreux organismes qui
peuvent provoquer la mammite. L’hygiène
générale
des
vaches
et
de
leur
environnement immédiat ainsi que de
bonnes pratiques, spécialement lors de la
traite, sont des moyens simples et efficaces
pour contrôler la transmission des
mammites.
Streptocoque agalactiae
Le Streptocoque agalactiae est l’organisme le
plus souvent responsable des mammites
subcliniques, mais provoque rarement les
mammites aiguës.
Cet organisme vit
uniquement dans le pis de la vache et ne
survit que quelques minutes à l’air libre.
Souvent, il se propage d’une vache à l’autre
pendant la traite, par l’intermédiaire d’une
contamination de la machine à traire, des
mains du trayeur, ou du tissu utilisé pour
nettoyer le pis (Figure 2). Le Streptocoque
agalactiae peut être éradiqué d’un élevage
grâce à un traitement approprié des vaches
et une bonne hygiène de traite. Cependant,
cet organisme peut facilement “recoloniser”
Parfois, les micro-organismes sont
détruits rapidement et l’infection disparaît.
Dans ce cas, les canaux bloqués par les
caillots de lait s’ouvrent et la composition
du lait redevient normale en quelques
jours. Cependant, si l’infection persiste et
les canaux restent bloqués, le lait à
l’intérieur des alvéoles y augmente la
pression, les cellules sécrétrices perdent
leur capacité de synthèse et les alvéoles
commencent à s’atrophier (Figure 1D). Des
substances libérées par les leucocytes
provoquent la destruction des structures
alvéolaires, qui sont remplacées par des
cicatrices (tissu connectif—Figure 1E
et F). La destruction des cellules
sécrétrices est, en fait, la troisième
Vache saine
ligne de défense pour contrôler
l’infection.
Donc, la progression de la maladie
A la traite
Entre les
est associée avec une augmentation
traites
du nombre de cellules somatiques
dans le lait et une réduction (permaEnvironnement:
Entrée d'air
nente) de la production laitière.
- Matières fécales dans l'unité
Quartier infecté
ou plaie à la
mamelle
Tissu, éponge
de nettoyage
Mains
- Litière
contaminée
- Sol
- Eau
Figure 2: Les voies de transmission des mammites
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Tableau 1: Sources (des plus communes aux plus rares) et mode de
transmission des micro-organismes qui provoquent les mammites
éradiqués
d’un
élevage parce qu’ils
font
partie
de
Pourcent des
Source
principale
l’environnement
Type de bactérie infections
Mode de transmission
Streptocoque
> 40%
Pis infecté
De quartier à quartier et de
normal des vaches.
agalactiae
vache à vache pendant la traite1 Le
nombre
Staphylocoque
30 - 40%
Pis infecté,
De quartier à quartier et de
d’infections
aureus
mamelle blessée vache à vache pendant la traite1
provoquées par ces
Streptocoques de
5 - 10%
Matières fécales, De l’environnement à la vache
2
bactéries
tend
à
l’environnement
sciure de bois, etc
3
Coliforme
<1%
Matières fécales De l’environnement à la vache
augmenter
lorsque
1 Voir Figure 2 pour plus de détails.
les
conditions
2 Streptocoque uberis et Streptocoque dysgalactiae
(hygiéniques
ou
3 Escherichia coli, Enterobactère aerogenes, Klebsillia pneumoniae
climatiques)
un élevage si un animal infecté y est
favorisent leur croissance, par exemple
introduit (après son achat sur le marché,
pendant les mois chauds et humides.
par exemple).
Le Streptocoque uberis et le Streptocoque
dysgalactiae sont aussi responsables de nomStaphylocoque aureus
breuses mammites qui se produisent en
Le Staphylocoque aureus vit à l’extérieur du
début et en fin de la période de tarissement.
pis, à la surface des mamelles, et provoque
En plus de ces deux espèces bactériennes, il
de nombreuses mammites cliniques et
y a de nombreux autres streptocoques dans
subcliniques. L’organisme se répand coml’environnement (Strep. bovis, Strep. fecalis)
me le Streptocoque agalactiae (Figure 2).
qui peuvent provoquer les mammites.
L’infection tend à provoquer l’apparition
Bactéries coliformes
de nombreuses cicatrices qui peuvent
envelopper l’organisme dans des “poches
Les bactéries coliformes se trouvent dans
d’infections” qui sont inaccessibles aux
le sol et dans l’intestin des animaux. Elles
antibiotiques. Périodiquement, ces poches
se multiplient dans le fumier et sur les
peuvent s’ouvrir et libérer des organismes
litières contaminées par des matières
qui se répandent dans d’autres parties du
fécales. Les coliformes provoquent des
pis.
mammites seulement si une particule
contaminée vient en contact avec une
Streptocoque uberis et Streptocoque
mamelle dont le canal est ouvert. Condysgalactiae
trairement
aux
bactéries
décrites
Ces organismes se trouvent dans les
précédemment, les coliformes ne peuvent
matériaux organiques utilisés comme litière
pas s’attacher au tissu mammaire, mais se
(la paille et la sciure de bois, par exemple)
multiplient dans le lait rapidement et y
et dans le sol et l’eau contaminés par des
libèrent des toxines qui sont absorbées dans
matières fécales.
Ils peuvent aussi se
le courant sanguin. Les coliformes peuvent
trouver sur la peau de la vache (les
donc provoquer des mammites cliniques
mamelles et l’abdomen) et dans le système
aiguës. La température de la vache peut
reproducteur. Ces deux organismes sont en
monter audelà de 40°C et le quartier infecté
général transmis de l’environnement aux
devient gonflé et sensible au toucher. Les
mamelles entre deux traites, mais le
mécanismes de défense de la vache peuvent
transfert peut aussi se produire à la traite.
éliminer les bactéries du pis, mais les toxCes organismes ne peuvent pas être
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ines restent dans le courant sanguin et la
vache peut en mourir. Les vaches qui ne
sont pas infectées par d’autres microorganismes (Streptocoque agalactiae et Staphylocoque aureus) semblent plus susceptibles
aux coliformes que celles qui le sont.
L'Institut Babcock, L'Université du Wisconsin
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