Au pays des lentilles… d`eau

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Au pays des lentilles… d`eau
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P A Y S A G E S
Au pays des
lentilles… d’eau
Jean PEUCHAIRE
Ici, autour de l’eau dont l’homme s’est efforcé
de maîtriser la puissance et les écoulements,
s’est construit une terre singulière,
le Marais poitevin.
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conduire, à l’aide de digues, à gagner
des terres sur la mer et à les protéger
des eaux intérieures. Ainsi se constituèrent les marais desséchés. Plus à l’est,
les marais dits mouillés restaient soumis
aux crues, ils se remplissaient avec les
pluies et restituaient leurs eaux l’été.
C’est tout au fond de ces derniers
que s’étend le « Marais poitevin des
Deux-Sèvres », la fameuse Venise
verte, 7 000 hectares « d’un marais
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bocager, structuré par un dédale de
chemins d’eau et caractérisé par la
présence de boisements linéaires »1
qui en ont fait un paysage singulier.
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e Marais poitevin s’étale
amplement des portes de
Niort à la baie de l’Aiguillon,
soit quelque soixante-dix kilomètres de long pour une
surface de près de 100 000 hectares,
ce qui en fait la deuxième zone
humide de France. Ce vaste ensemble
se décompose en deux grandes entités
paysagères. À l’ouest les marais desséchés, 65 000 hectares, avec leurs prairies et leurs champs ouverts où la vue
se perd ; à l’est les marais mouillés,
35 000 hectares, avec leurs parcelles
closes de frênes têtards, peuplées de
prairies et de peupliers. On nomme
cette partie – depuis 1920 seulement –
la « Venise verte » à cause de ses
canaux peuplés de lentilles… vertes.
Un comble au pays des mojettes !
Il y a 8 000 ans la totalité du marais
était recouverte par la mer, seules
quelques îles calcaires émergeaient,
aujourd’hui toujours identifiables dans
le paysage plat. Progressivement, avec
l’apport de sédiments dû aux rivières et
à l’océan, le golfe se combla, devenant
vasière. Dès le néolithique, les hommes,
installés autour du golfe, exploitèrent
ses richesses. Les Gallo-romains firent
de même, une importante voie romaine
traversait la Sèvre à l’île de Magné. Puis
vinrent les abbayes et le début des
grands aménagements, qui s’amplifièrent avec le 12e siècle, et devaient
Paysage du marais : prairie, grands
peupliers et petits frênes (photo MG).
Pas toujours, comme ici, manœuvrés
à la pigouille, les batais transportent
aujourd’hui les touristes (photo MG).