Le renforcement des capacités de maîtrise d`ouvrage des
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Le renforcement des capacités de maîtrise d’ouvrage des collectivités locales marocaines : la relation entre Nantes et Agadir Atelier n°21 Nour-Eddine BOUTAYEB, Wali, Directeur général des collectivités locales, Ministère de l’Intérieur du Royaume du Maroc ; Tarrik KABBAJ, Président de la commune urbaine d’Agadir ; Jacques VAN DE WALLE, Directeur du développement international à Nantes Métropole. L’atelier était animé par Serge LABORDERE, Attaché de coopération à l’Ambassade de France à Rabat. I. Principaux éléments du contexte dans lequel s’inscrit le projet (Nour-Eddine BOUTAYEB) Le Royaume du Maroc est engagé dans un processus vital de décentralisation de ses structures et de son appareil administratif. Le processus de décentralisation au MAROC a démarré au début des années soixante avec un premier découpage communal, une première loi électorale, une première charte communale, un président du conseil communal ordonnateur et un représentant de l’Etat qui détient les moyens d’exécution et une expérience provinciale relativement timide avec un président aux pouvoirs limités au fonctionnement de l’assemblée élue. La principale évolution dans ce système s’est manifestée en 1976 avec la réforme de la charte communale qui a renforcé les compétences de la commune notamment en matière de planification et de gestion des services publics et qui a permis à l’exécutif élu de recouvrer ses pouvoirs notamment en matière d’exécution des délibérations et de police administrative. La charte communale de 1976 a également consolidé les ressources financières de la commune ainsi que ses ressources humaines à travers le statut du fonctionnaire communal et a mis en place un régime expérimental pour la gestion des grandes villes notamment à Casablanca avec la commune urbaine de Casablanca. L’année 1997 a été marquée par l’avènement de la région en tant que premier niveau de décentralisation avec un conseil composé de représentants de communes, de provinces et préfectures, de chambres professionnelles et de collèges des salariés disposant d’attributions propres telle que la promotion de l’économie régionale et des attributions transférables telles que la santé, l’éducation et la formation du personnel des collectivités Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008 1 locales. L’exécutif régional est assuré par le gouverneur du chef lieu de la région avec le contre seining du président du conseil régional.En 2002, des ajustements sont faits ; certaines grandes villes sont réunifiées au sein d’une même entité, c’est le cas de Casablanca qui avait été morcelée. Est introduit le principe de la commune à arrondissements, pas encore intégralement opérationnel, par ailleurs. Ainsi, un amendement de la charte communale est en cours d’adoption qui améliorera leur gouvernance, en transférant en direction des présidents des communautés d’agglomération les compétences en matière de services en réseaux notamment. A l’heure actuelle, les préfets de région détiennent les pouvoirs exécutifs. Une nouvelle étape de la consolidation de la décentralisation consistera à élargir le pouvoir des régions. Le Maroc compte 1497 communes, dont 199 sont urbaines, avec un effectif global de 23 000 élus, contre 13 000 en 1976. Leurs financements sont en forte augmentation. Si les services publics des villes s’améliorent, des insuffisances persistent : déficit de la gouvernance locale, ressources faiblement mobilisées, inadaptation des profils en termes de ressources humaines, etc. En outre, l’effort de déconcentration est progressif mais ne suit pas le même rythme que celui de la décentralisation . Pour pallier ces difficultés, un plan d’action stratégique, le CAP 2009, a été élaboré, qui coïncide avec la tenue des élections locales. Il s’articule autour de quatre objectifs stratégiques majeurs : Un élu stratège consacré dans son rôle de définition des visions, de fixation de choix et d’orientation des interventions par le recours à la planification stratégique, la mobilisation des partenariats et la multiplication des opérations de coopération, ainsi que l’évaluation des performances ; Une administration locale performante aux ressources humaines appropriées, fondée sur une organisation efficiente et des financements à la mesure des ambitions affichées ; Un Etat accompagnateur qui réussit le passage de la tutelle à l’accompagnement et de l’action sectorielle à la contractualisation autour de projets intégrés, ce qui appelle évidement l’accélération du processus de déconcentration ; Et enfin, un cadre juridique adapté et favorable à la gestion optimale des affaires locales. Ainsi l’Etat et le législateur devront accompagner au mieux le corps élu et son administration locale afin d’inscrire l’action des collectivités locales dans la durée et la concertation, au travers notamment d’une planification pluriannuelle. L’administration locale s’attachera ainsi à se mettre au service des élus locaux tandis que l’Etat endossera un rôle d’appui technique, financier et législatif, notamment en assouplissant le cadre juridique qui freine l’initiative. Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008 2 Le volet formation devra également être amélioré. Ainsi un décret futur permettra aux régions d’en assurer la gestion de manière autonome. L’année 2009 sera en outre décrétée année des ressources humaines. En effet, les collectivités locales rencontrent des difficultés à mettre en forme leur feuille de route RH : environnement de travail, modalités de recrutement ou encore gestion des cadres de l’administration, corps le plus représenté dans les administrations locales. Par ailleurs, le volet financier devra lui aussi être perfectionné. Une loi fiscale votée il y a deux ans prévoit l’instauration de véritables administrations fiscales locales. Un projet de loi sur l’organisation des finances locales en cours d’examen au niveau de la Chambre des Représentants devrait, s’il est adopté, également faciliter le cadre de gestion des collectivités locales. En outre, une révision du code électoral permettra d’éliminer des conseils d’élus les formations politiques ayant recueilli moins de 6 % des votes afin de simplifier les prises de décision. Une liste locale réservée aux femmes sera également mise en œuvre qui permettra, si les partis se révèlent volontaristes sur ce point, une plus grande représentation des femmes dans les Conseils, l’objectif étant qu’elles représentent 12 % des élus, contre 0,6 % actuellement. Le plan d’action stratégique se déploie donc sous deux aspects : • sous la forme d’un chantier législatif et réglementaire ; • sous la forme d’une offre de services. « L’offre de services » est une démarche de l’Etat en direction des collectivités locales et qui consiste pour une problématique donnée de partager le diagnostic, de favoriser les échanges et de conceptualiser l’action ou les actions à entreprendre au préalable avant d’expérimenter chaque action sur des communes pilotes. La phase finale visera au déploiement généralisé à tout le territoire des expériences réussies. C’est ainsi que cette démarche a été appliquée pour le cas du transport urbain. Les transports urbains marocains enregistrent un lourd retard contrairement aux secteurs de l’assainissement, de l’eau et de l’électricité. Le diagnostic se résume ainsi: • Insuffisance du cadre institutionnel et absence de planification dans la plupart des grandes agglomérations (absence de Loi reglementant ce secteur et de Plans de Déplacements Urbains PDU) • Déficit en matière d’organisation et de gestion des transports publics (absence d’autorités de régulation,…); Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008 3 • Mauvaise exploitation du réseau de voirie et gestion inappropriée du trafic et du stationnement (absence de plan de circulation et de politique de stationnement) ; • Absence de mécanismes financement,..) de financement (absence de sources perennes de Les Transports Publics connaissent tout particulièrement les difficultés suivantes : • Déficit de l’offre et mauvaise qualité de service • Superposition du réseau des grands taxis au réseau de bus • Dysfonctionnement de la politique d’externalisation du service • Fragilité de l’équilibre financier des opérateurs • Absence d’outils de régulation entre modes Pour faire face à ces difficultés grandissantes dans le domaine des Déplacements Urbains, les autorités marocaines ont élaboré une stratégie nationale des déplacements urbains. Elle s’organise selon quatre axes : • • • • mise en place d’institutions gestionnaires des transports compétentes et efficaces ; mise en place de mécanismes de financements durables ; création d’une offre de transports publics efficaces ; amélioration notable de la régulation de la circulation et de la voirie. En attente de la mise en place de la Loi sur les DU qui obligera les Collectivités Locales de se doter des PDU, l’offre de service mise à disposition des collectivités locales propose : une mise à la disposition des villes sélectionnées un consultant pour d’une part élaborer un pré-diagnostic et préparer un cahier des charges pour la lancement de l’étude PDUet d’autre part assurer l’assistance à la maitrise d’ouvrage des villes concernées lors de l’élaboration de l’étude PDU. Une incitation financière : cofinancement des études PDU à hauteur de 50% et un préfinancement également à hauteur de 50%. Une offre de formation pour le renforcement des capacités des acteurs concernés par les DU ; une assistance à la maîtrise d’ouvrage via la coopération décentralisée essentiellement avec l’appui du PAD MAROC ; A ce jour, 7 villes bénéficient de cette initiative dont Agadir, Fès et Marrakech. A terme, il conviendrait de mettre en place des réseaux d’acteurs permettant la mise en place d’échanges de bonnes pratiques entre les villes. Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008 4 Il faut enfin préciser que le projet Agadir-Nantes a bénéficié de l’accompagnement du PAD Maroc. En conclusion, l’enjeu de la décentralisation est d’améliorer la qualité des services proposés aux citoyens afin d’améliorer la crédibilité des collectivités locales. La mise en œuvre du plan d’orientation stratégique et la coopération décentralisée contribueront à ce processus. II. L’appui de la France au processus de décentralisation marocain à travers PAD Maroc (Serge LABORDERE) L’esprit du PAD Maroc est de mobiliser les acteurs de la coopération française autour d’un projet cohérent visant à accompagner la consolidation du processus de décentralisation marocain. Il ne s’agit certainement pas de transposer le modèle français au Maroc même si ces deux pays possèdent une culture administrative proche. La genèse du projet en constitue une étape-clef. Il s’agit des Assises d’Agadir qui ont initié cette dynamique de coopération décentralisée franco-marocaine et ont suscité des attentes fortes en termes de résultats. En 2003, cette prise de contact s’est conclue sur la signature d’un partenariat entre les deux Etats en présence des Premiers ministres qui se sont attachés à rappeler la place centrale que devraient endosser les acteurs non étatiques de cette coopération décentralisée. Enfin en 2004 est signée la convention de financement du projet FSP PAD Maroc d’un montant de 11 millions d’euros sur 4 ans, de 2005 à 2009. Ce projet vise trois objectifs : • Améliorer le cadre des relations entre les services de l’Etat et les collectivités territoriales en accompagnant l’évolution des missions des services de l’Etat aux niveaux central et régional. • Adapter l’offre de formation destinée aux élus et aux cadres administratifs et techniques des collectivités locales en accompagnant la définition d’un schéma directeur de formation et la mise en place des maisons de l’élu. • Renforcer les capacités de maîtrise d’ouvrage des collectivités locales à travers la réalisation de projets élaborés et conduits en partenariat avec les collectivités locales française au moyen d’un dispositif expérimental d’appui appelé laboratoire des maîtrises d’ouvrages locales. Les projets soutenus arborent un haut niveau d’exigence technique. Ils sont définis et présentés en commun et organisés autour des compétences des collectivités locales Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008 5 partenaires. L’éducation et la santé, qui ne rentrent pas dans le cadre des compétences des collectivités n’en font pas partie. Ainsi, un guide des procédures a été élaboré qui développe la notion d’appel à projet. La sélection des projets retenus intervient au Maroc, et est réalisée par un comité mixte dans lequel la partie marocaine joue un rôle prépondérant. Ce choix respecte un objectif essentiel qui est de contribuer au renforcement des capacités de maîtrise d’ouvrage des collectivités marocaines. Enfin, PAD Maroc fera l’objet d’une évaluation qui permettra d’identifier le degré de pertinence du système de la coopération décentralisée, à l’occasion des deuxièmes assises de la coopération décentralisée franco-marocaine d’Agadir en février prochain. Il est déjà possible de déplorer la lenteur, la difficulté d’appréhension de circuits financiers inhérents à cette incontournable première phase d’appropriation. Néanmoins, les acquis sont désormais en place. Il convient enfin de préciser que sur la centaine de projets de coopération décentralisée engagée au Maroc, seule une quarantaine est effectivement en cours dont 12 éligibles au PAD. Par ailleurs, 80 % de ce fonds est d’ores et déjà engagé. Il s’est déployé sur 8 communes urbaines et 4 régions autour de problématiques aussi diverses que les transports urbains ou le développement de maisons des associations. III. La commune développement urbaine d’Agadir et les priorités de son La coopération entre Nantes Métropole et Agadir est ancienne, puisque ces villes sont jumelées depuis plus de 25 ans. Cette coopération a cependant pris un nouvel essor depuis quatre ans grâce aux bonnes relations développées avec Jean-Marc Ayrault et Camille Durand, ancien responsable des relations internationales. Les cadres administratifs de la ville de Nantes, en outre, ont su apporter des solutions concrètes et développer l’efficience de ceux de la ville d’Agadir. Ainsi, un tel système ne saurait fonctionner sans l’émergence d’une réelle synergie entre les élus et l’administration des deux villes partenaires. Par ailleurs, s’est développé depuis 2003 un réseau de maisons de quartier qui a permis le développement d’échanges fructueux entre les deux villes. Ainsi, l’objectif de ce projet a été de développer et de moderniser le réseau de déplacement urbain de la ville d’Agadir autour d’axes structurants comme le Bus Way ou la volonté de développer les sites propres, emblématiques de l’expertise de Nantes Métropoles en matière de transports publics. Ainsi un PDU du Grand Agadir a été élaboré, ville qui connaît un fort développement économique mais dont la population souffre de grandes difficultés à se déplacer. La priorité a donc consisté à faciliter le déplacement des habitants entre bassins d’emplois et bassins de vie, tout en favorisant une politique de développement durable et de qualité de vie. Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008 6 La ville d’Agadir souffre, du fait de son expansion rapide, de difficultés de circulation. De nombreux feux tricolores mal coordonnés et la construction de carrefours classiques ont entraîné le développement d’un certain nombre de points congestionnés où la circulation est terriblement ralentie. L’expertise de Nantes Métropole en la matière a permis d’apporter des solutions concrètes et rapides pour remédier à ce véritable fléau. Ainsi Agadir entend privilégier le Bus Way et la mobilité douce – bicyclette, piéton - afin de fluidifier et sécuriser la ville. Elle s’appuie sur l’assistance technique et financière de Nantes Métropole : à ce jour 5 cadres de la ville d’Agadir sont en formation à Nantes. En outre, la ville de Nantes a été pionnière dans le développement en France des carrefours giratoires. Agadir a su profiter de cette expérience : nombre de giratoires sont déjà construits, d’autres sont en cours de réalisation et ils impactent significativement le flux de circulation de la ville. Sur ce point, l’action des techniciens de Nantes a été remarquable de rapidité et d’efficacité. Ils disposent ainsi d’un logiciel spécial sur lequel le personnel d’Agadir a été formé qui permet, en fonction des flux de circulation, de dimensionner le carrefour giratoire. Par ailleurs, Agadir dispose encore d’un certain nombre d’espaces vides, sur lesquels sont développés des espaces verts ou des stades afin de promouvoir la qualité de vie comme finalité de son développement. IV. La stratégie de coopération internationale de la communauté urbaine de Nantes (Jacques VAN DE WALLE) Il convient de rappeler que la charte de la coopération décentralisée instaurée en 2004 par les élus vise avant tout à : • • agir sur des enjeux forts et partagés, en priorité sur les services urbains ; privilégier le partage de connaissances plutôt que les échanges matériels. Ainsi, il ne s’agit pas ici d’un transfert de fonds à destination d’une autre ville, mais bien d’un échange d’expériences qui circule dans les deux sens. Nantes Métropole, précurseur s’agissant notamment de la réintroduction des tramways (dès 1985) ou du développement du principe du Bus Way en France, se doit de favoriser les échanges et d’exercer son expérience sur d’autres grandes villes afin de maintenir un très haut niveau d’expertise. Ainsi, l’internationalisation du savoir-faire du spécialiste des carrefours giratoire nantais, lui permet de développer son expertise et d’encadrer et de former de jeunes ingénieurs à travers le monde. La limite de ce type de projet résiderait peut-être dans le fait qu’il repose en trop grande partie sur les techniciens alors que les politiques ont un rôle fondamental de promotion et de coopération à jouer. Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008 7 Conclusion (Serge LABORDERE) La clôture comptable du projet PAD Maroc interviendra le 12 décembre 2009. Néanmoins, les deuxièmes assises d’Agadir devraient déboucher sur une meilleure visibilité à long terme de la viabilité d’une telle entreprise et sur des solutions pour prolonger ce dispositif. Strasbourg, les 3 et 4 décembre 2008 8