La Fédération de Saône et Loire pour la Pêche - Burgy
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La Fédération de Saône et Loire pour la Pêche - Burgy
Julien Maupoux Chargé d'études Fédération de Saône-et-Loire pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique 123, rue de Barbentane, BP 99 71 000 Sennecé-les-Macon [email protected] Tel (ligne directe) : 03-85-23-83-05 Tel (portable) : 06-86-26-82-50 Nos sites Internet : - la Fédération : www.peche-saone-et-loire.fr - le Schéma Départemental de Vocation Piscicole et Halieutique : www.sdvp71.fr Madame la Commissaire enquêtrice, La Fédération de Saône-et-Loire pour la pêche et la protection du milieu aquatique a pu consulter en mairie le dossier soumis à enquête publique présenté par la société « SARL Grosne Terrassement » concernant le renouvellement et l’extension de l’autorisation d’exploiter une carrière sur le territoire des communes de Lugny et Burgy. Chargée de par la loi, de missions d’intérêt général, la fédération de pêche a le caractère d’un établissement d’utilité publique. Elle a pour objet notamment la protection des milieux aquatiques, la mise en valeur et la surveillance du domaine piscicole départemental. Elle est chargée notamment de donner un avis aux autorités compétentes sur tout aménagement ou mesure susceptible de porter atteinte à la qualité des milieux aquatiques, à leur peuplement piscicole et à la pratique de la pêche. La fédération peut enfin exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits constituant une infraction au titre III du livre IV du code de l’environnement et aux textes pris pour son application et portant un préjudice direct ou indirect aux intérêt collectifs qu’elle a pour objet de défendre. Le projet d’extension de la carrière présenté dans le dossier soumis à enquête publique est localisé dans le bassin versant du ruisseau de Burgy, un petit affluent de la Bourbonne. Ce cours d’eau est classé en première catégorie piscicole. Il possède toute les caractéristiques d’un ruisseau susceptible d’accueillir une population de truite fario, espèce protégée par l’arrêté ministériel du 8/12/1988. Parmi les incidences sur le milieu aquatique inhérentes à une carrière « à ciel ouvert », figure le risque d’entraînement des matières minérales fines dans les cours d’eau avec pour principales conséquences : - un risque d’augmentation de la turbidité de l’eau, pouvant entraîner la mortalité de truite fario au stade alevin (par colmatage des branchies), - un risque de colmatage du substrat du cours d’eau, pouvant entraîner la mortalité des œufs de truite fario présents dans le substrat ou pouvant empêcher la reproduction de la truite fario (qui ne s’effectue que sur un substrat composé de matériaux grossiers). Concernant le dossier soumis à enquête publique, j’ai été surpris de constater que ce risque n’a pas du tout été pris en compte par le pétitionnaire. Je m’interroge notamment sur le devenir des eaux de pluies ruisselant sur la carrière mise à nu. En effet, il est indiqué que « les eaux de ruissellement seront canalisées par des fossés périphériques pour être rejetées dans les fossés existants ». Or la localisation de ces fossés ne figure ni dans le dossier ni sur aucune carte. Le dossier ne mentionne pas si l’eau de ces fossés s’infiltrera ou si elle rejoindra gravitairement par ces fossés le ruisseau de Burgy. L’absence totale d’informations sur le devenir des eaux de ruissellement ne nous permet donc pas d’apprécier les incidences du projet sur le ruisseau de Burgy. L’évaluation des incidences est pourtant fondamentale pour ensuite de proposer la mise en place de mesures correctives ou compensatoires pertinentes. Concernant le risque d’entrainement de matières fines dans le cours d’eau, des solutions simples et peu couteuses existent comme la mise en place de bassins de décantation. Je m’interroge aussi sur un autre aspect du dossier : la compatibilité du projet avec le Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux du bassin Rhône-Méditerranée 2010-2015 (SDAGE). Ce document de planification pour l’eau et les milieux aquatiques est en effet entré en vigueur le 17 décembre 2009. Il fixe pour une période de 6 ans les orientations fondamentales d’une gestion équilibrée de la ressource en eau et intègre les obligations définies par la directive européenne sur l’eau, ainsi que les orientations du Grenelle de l’environnement pour un bon état des eaux d’ici 2015. Dans la pratique, le SDAGE formule des préconisations à destination des acteurs locaux du bassin. Il oblige les programmes et les décisions administratives à respecter les principes de gestion équilibrée, de protection ainsi que les objectifs fixés par la directive cadre sur l’eau de 2000. Je suis surpris que l’évaluation de la compatibilité du projet avec le SDAGE Rhône Méditerranée n’ait été abordée que par rapport à un seul aspect : l’absence de captage d’eau potable à proximité de la carrière. Le SDAGE aborde bien d’autres orientations en vue d’une gestion équilibrée de la ressource en eau. On peut notamment s’interroger sur la compatibilité du projet avec les orientations suivantes du SDAGE : - orientation fondamentale n°1 « Privilégier la prévention et les interventions à la source pour plus d’efficacité » et notamment la disposition 1-01 « Impliquer tous les acteurs concernés dans la mise en œuvre des principes qui sous-tendent une politique de prévention » : malgré le risque d’entraînement des matières minérales fines dans un cours d’eau, le projet ne prévoit pas « en prévention » la mise en place de bassins de décantation qui auraient pu limiter ce risque de pollution physique, - orientation fondamentale n°2 « concrétiser la mise en œuvre du principe de non dégradation des milieux aquatiques » et notamment la disposition 2-03 « Définir des mesures réductrices d'impact ou compensatoires à l'échelle appropriée et visant la préservation du fonctionnement des milieux aquatiques » et la disposition 2-04 « s'assurer de la compatibilité des projets avec le SDAGE au regard de leurs impacts à long terme sur les milieux aquatiques et la ressource en eau » : le dossier soumis à enquête publique n’a pas évalué sérieusement le risque de dégradation des milieux aquatiques, - orientation fondamentale n°5 « poursuivre les efforts de lutte contre les pollutions d'origine domestique et industrielle » et notamment la disposition 5A-05 « adapter les conditions de rejet pour préserver les milieux récepteurs particulièrement sensibles aux pollutions » : le projet ne prend pas en compte le risque de dégradation d’un petit cours d’eau de tête de bassin très sensible aux pollutions (débit très faible) et susceptible d’accueillir une espèce protégée, la truite fario. Je rappelle que l’objectif fixé par le SDAGE pour la masse d’eau « Bourbonne » est le bon état en 2015. Très clairement, le dossier proposé n’évalue que très partiellement la compatibilité du projet avec le SDAGE. En conclusion, le dossier soumis à enquête publique ne nous permet pas aujourd’hui à de juger des incidences du projet d’extension de la carrière sur la qualité du ruisseau de Burgy et sur son peuplement piscicole (composé certainement de truite fario, espèce dont l’habitat est protégé par l’arrêté ministériel du 8/12/1988). De même, il ne permettra pas à l’administration d’apprécier objectivement sa compatibilité avec le SDAGE. Dés lors, je me permets de vous faire part de mes inquiétudes quant aux répercussions de ce projet sur la qualité des milieux aquatiques du bassin de la Bourbonne, et consécutivement sur la pratique de la pêche. Je vous prie d’agréer, madame la Commissaire enquêtrice, l’expression de mes sentiment distingués. Le Président Georges Guyonnet.