FICHE 6.3.1 LE MOUVEMENT INTERNATIONAL DE LA CROIX

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FICHE 6.3.1 LE MOUVEMENT INTERNATIONAL DE LA CROIX
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DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE
FICHE 6.3.1 LE MOUVEMENT INTERNATIONAL DE LA CROIX-ROUGE
ET DU CROISSANT-ROUGE
Naissance et structure
1. Naissance de l’organisation humanitaire de la Croix-Rouge
En 1859, Henry Dunant (1828-1910), citoyen genevois et homme d’affaires, est le témoin des tragiques
conséquences de la bataille de Solferino (Italie - 24 juin 1859) où près de 40.000 victimes sont
abandonnées sur le champ de bataille. Il dénonce les horreurs de cette guerre dans un livre (Un
souvenir de Solferino, 1862) qui va éveiller les esprits. Il conclut son texte avec deux suggestions
visant à réduire les souffrances des victimes des combats :
• la constitution « dès le temps de paix, de sociétés de secours dont le but serait de faire donner des
soins aux blessés en temps de guerre » ;
• la formulation de « quelque principe international, conventionnel et sacré, qui servirait de base à
ces sociétés. »
En février 1863, il crée avec quatre de ses concitoyens, Gustave Moynier, le général Guillaume-Henri
Dufour, Louis Appia et Théodore Maunoir, le Comité international permanent de secours aux militaires
blessés. Ce « Comité des cinq », qui deviendra en 1875 le Comité international de la Croix-Rouge
(CICR), organise à Genève une conférence internationale (26-29 octobre 1863) à laquelle participent
des délégués officieux de 16 Etats, qui adoptent notamment les résolutions suivantes :
• création de Comités nationaux de secours pour concourir en temps de guerre au service de santé
des armées,
• affirmation de la neutralité des blessés et du personnel sanitaire,
• protection des Comités de secours et facilitation de l’exercice de leur mandat par les
gouvernements et
• adoption d’un signe distinctif commun pour le personnel sanitaire, soit « un brassard blanc avec une
croix rouge ».
Les premiers Comités de secours, futures Sociétés nationales de la Croix-Rouge (SN), se constituent
très rapidement : au Wurtemberg en décembre 1863, en Oldenbourg en janvier 1864, en Belgique le 4
février 1864, en Prusse le 6 février 18641, en Espagne le 2 mars 1864…
Du 8 au 22 août 1864 une conférence diplomatique internationale se réunit à Genève avec des délégués
plénipotentiaires de 16 Etats. Cette conférence adopte le 22 août 1864 la Convention de Genève pour
l’amélioration du sort des militaires blessés dans les armées en campagne. Elle est signée par 12
Etats. Ce traité multilatéral, ratifié par la suite par de nombreux Etats, pose les bases du droit
humanitaire contemporain. Ses principales caractéristiques sont :
• le principe de non-discrimination : « les militaires blessés ou malades seront soignés à quelque
nation qu’ils appartiennent »,
• la neutralité et la protection du personnel sanitaire, ainsi que du matériel et des équipements
sanitaires, signalés par l’emblème de la croix rouge sur fond blanc.
Sur la base des résolutions de la Conférence de 1863 et de la Convention de Genève de 1864
l’organisation humanitaire de la Croix-Rouge ainsi que l’œuvre conventionnelle, soit le droit
international humanitaire, se développèrent peu à peu. « Organisation mondiale d’une part, œuvre
conventionnelle d’autre part : aide humanitaire et protection juridique s’appellent l’une l’autre et se
soutiennent mutuellement.»2
A l’origine, l’idée de la Croix-Rouge avait été associée uniquement à la nécessité d’humaniser certaines
conséquences de la guerre. Mais l’idée de l’associer également à la paix a muri. C’est ainsi que l’article
25 du Pacte de la Société des Nations, signé le 28 juin 1919, consacre solennellement l’institution et
ses principes : « Les membres de la Société s’engagent à encourager et favoriser l’établissement et la
coopération des organisations volontaires nationales de la Croix-Rouge, dûment autorisées, qui ont
1
2
Les Sociétés d’Oldenbourg, Wurtemberg et Prusse ont été intégrées en 1921 à la Croix-Rouge allemande.
Hans HAUG, Postface d’Un souvenir de Solferino, CICR, 1990, p.130
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pour objet l’amélioration de la santé, la défense préventive contre la maladie et l’adoucissement de la
souffrance dans le monde. » Ce texte annonçait les développements prochains du Mouvement
international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.3
Entre-temps, la guerre avait montré la nécessité d'une étroite collaboration entre les Sociétés de la
Croix-Rouge qui, à travers leurs interventions humanitaires en faveur des prisonniers de guerre et des
combattants, avaient attiré des millions de volontaires et acquis un savoir-faire considérable. De plus,
ces ressources pouvaient être utilisées dans le domaine de la santé publique et en cas de catastrophes
naturelles. C’est ainsi que naquit le 5 mai 1919 la Ligue des Sociétés de la Croix-Rouge, rebaptisée
Ligue des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge en octobre 1983, puis Fédération
internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge en novembre 1991.
Aujourd’hui, le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge est le plus grand
réseau humanitaire au monde. Sa mission est d’alléger les souffrances humaines, de protéger la vie et
la santé et de faire respecter la dignité humaine, particulièrement dans les conflits armés et d’autres
situations d’urgence. Le Mouvement, qui est présent dans pratiquement tous les pays, est soutenu par
près de 97 millions de volontaires.
2. Structure du Mouvement
Le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge comprend les organisations
suivantes :
le Comité international de la Croix-Rouge (CICR),
la Fédération Internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR),
les Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (SN), au nombre de 189 à fin 2013.
Chacune de ces composantes a sa propre identité juridique et son propre rôle, mais elles sont toutes
unies par les sept Principes fondamentaux (voir fiche 6.3.4).
Le CICR et la FICR sont des institutions internationales et ont le statut d’observateur permanent auprès
des Nations unies. Aucune n’exerce d’autorité sur l’autre. Leurs activités sont complémentaires.
Le CICR a la mission exclusivement humanitaire de protéger la vie et la dignité des victimes de conflits
armés et d'autres situations de violence généralisée, et de leur porter assistance. Il dirige et coordonne
les activités internationales de secours du Mouvement dans les conflits armés et les situations de
troubles intérieurs. Il veille au respect du DIH par toutes les parties belligérantes. Fondé en 1863, le
CICR est à l’origine du Mouvement. (Voir fiche 6.3.2)
La FICR se consacre à inspirer, faciliter et promouvoir toutes les activités humanitaires déployées par
ses Sociétés nationales membres en faveur des personnes les plus vulnérables. Elle dirige et coordonne
les interventions de ses membres visant à porter assistance aux victimes de catastrophes naturelles ou
technologiques, aux réfugiés et aux personnes touchées par des situations d'urgence sanitaire en temps
de paix. Elle représente également les Sociétés nationales membres au niveau international. La FICR a
été fondée en 1919. (Voir fiche 6.3.3)
Les Sociétés nationales agissent en tant qu’auxiliaires des pouvoirs publics de leurs pays respectifs
dans le domaine humanitaire. Elles fournissent un éventail de services qui comprennent le secours en
cas de catastrophe et des programmes sociaux et sanitaires. Elles aident leur Gouvernement dans la
diffusion et la mise en œuvre du DIH. En temps de guerre, elles assistent la population civile touchée et
peuvent fournir un soutien aux services sanitaires des forces armées. (Voir fiche 6.3.3)
3. Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
La Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge réunit, en principe tous les
quatre ans, les représentants des Etats Parties aux Conventions de Genève, ceux des Sociétés
nationales reconnues, ainsi que du CICR et de la FICR. C’est la plus haute autorité délibérante du
Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
3
Henri COURSIER, «Que sais-je ? La Croix-Rouge internationale», Paris, Presses universitaires de France, 1959, p.36
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Conférence internationale
de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge
Etats parties aux
Conventions de Genève de 1949
Fédération internationale
des Sociétés de la CroixRouge et du CroissantRouge
Comité international
de la Croix-Rouge
Sociétés nationales de la
Croix-Rouge et du CroissantRouge
Mouvement international de la Croix-Rouge et du
Croissant-Rouge
Ces rencontres régulières entre le Mouvement et les gouvernements sont uniques dans le secteur
humanitaire. Elles reflètent l’histoire et les origines du CICR et des Sociétés de la Croix-Rouge et du
Croissant-Rouge, ainsi que l’importance essentielle du droit international humanitaire.
La Conférence internationale est avant tout un forum qui permet le dialogue apolitique entre les
représentants du Mouvement et les Etats. Y sont débattus les problèmes humanitaires d’intérêt
commun.
Il s’agit en premier lieu du développement du DIH. Tous les projets de révision des Conventions de
Genève, de même que certains projets de nouveaux traités de droit humanitaire ont été soumis à la
Conférence internationale. La représentation des Etats donne évidemment un poids particulier aux
prises de position et résolutions adoptées par la Conférence.
Elle est aussi un lieu de dialogue sur la mise en œuvre et le respect du droit humanitaire. Par ses
résolutions, elle a souvent pu exercer une pression efficace pour rétablir le respect du DIH et mettre un
terme aux violations qu'elle avait condamnées.
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La collaboration entre les institutions du Mouvement et les Etats est également abordée. Les débats
permettent de préciser, non seulement les services que les Etats sont en droit d’attendre de ces
institutions, en qualité d’auxiliaires des pouvoirs publics dans le domaine humanitaire, mais aussi de
l’appui que ces dernières peuvent attendre de leur gouvernement.
Enfin, en tant que «plus haute autorité délibérante », seule la Conférence internationale a qualité pour
adopter ou pour modifier les règles qui régissent le Mouvement. Avec la proclamation des Principes
fondamentaux de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge en 1965, et l’adoption des nouveaux statuts du
Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge en 1986, la Conférence a doté le
Mouvement d’une structure qui lui permet de se tourner résolument vers l’avenir.
Une Commission permanente composée de neuf membres organise les Conférences internationales. Cinq
de ses membres sont élus pendant la Conférence. Elle comprend aussi quatre membres de droit (deux
représentants du CICR et deux de la Fédération internationale), dont actuellement les présidents de ces
deux institutions.
4.
Accord de Séville
L'Accord de Séville de 1997 définit le cadre d'une coopération et d'un partenariat efficaces au sein
du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, en précisant les rôles respectifs
du CICR, de la Fédération et des SN dans leurs activités internationales de secours et de développement
où un secours rapide, cohérent et efficace est nécessaire pour répondre sur une grande échelle aux
besoins des victimes. Il a pour objectif le renforcement de la coopération au sein du Mouvement avec
une utilisation efficace des ressources et leur mobilisation rapide.
Cet accord ne couvre pas l’action autonome des SN sur leur propre territoire national (banques de sang,
services de santé communautaires, programmes d'aide sociale, etc.).
Concrètement et sans entrer dans les détails :
le CICR exerce la fonction d'institution directrice dans les situations de conflits armés
internationaux et non internationaux, de troubles intérieurs et de leurs suites directes. Dans ces
situations, le CICR assume la responsabilité pour la direction générale et la coordination des
opérations internationales de secours.
Dans les situations de catastrophes naturelles en temps de paix, la SN du pays affecté assure
l’assistance si elle estime en avoir les capacités et les moyens. Si tel n’est pas le cas et qu’elle
souhaite faire appel à l’assistance internationale du Mouvement, celle-ci sera coordonnée par la
FICR en tant qu’institution directrice.
Dans les deux contextes (en temps de paix et en temps de conflit armé), la SN peut cependant
assurer la coordination de la réception de l’assistance internationale sous réserve de l’accord du
CICR ou de la FICR selon les situations.
L’Accord de Séville a été complété en 2005 par des mesures supplémentaires visant à renforcer le rôle
de la SN hôte et à encourager la conclusion de Protocoles d’accord entre les composantes du
Mouvement concernant l’attribution des rôles et responsabilités lorsque plusieurs d’entre elles sont
actives dans un pays.
Bibliographie
Statuts et règlement du mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge,
http://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/statutes-movement-220506.htm
Accord de Séville, Revue internationale de la Croix-Rouge n°829, 1997
http://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/57jp4y.htm
François BRUGNION, Le CICR et la protection des victimes de la guerre, Genève, CICR, 1994
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DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE
Henri COURSIER, La Croix-Rouge internationale, PUF, 1959
André DURAND, Le CICR, Genève, CICR, 1981
Hans HAUG, Humanité pour tous, le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge,
Institut Henry Dunant, Berne, Haupt, 1993
Le CICR : sa mission et son action, Publication CICR, Genève, 2009
http://www.icrc.org/fre/resources/documents/publication/p0963.htm
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