Mise en conformité du régime mère-fille et de la taxe de 3% sur les

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Mise en conformité du régime mère-fille et de la taxe de 3% sur les
Mise en conformité du régime mère-fille et de la taxe de 3% sur les revenus distribués,
création d'une contribution supplémentaire à la C3S, instauration d'un contrôle spécifique aux
demandes de remboursement de crédits de TVA... Zoom sur quelques mesures du projet de loi
de finances rectificative pour 2016, examiné en séance à l'Assemblée nationale début
décembre.
Le projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2016 a été déposé à l'Assemblée
nationale.
Mise en conformité du régime mère-fille
Exclusion des titres sans droits de vote
Suite aux décisions rendues par le Conseil constitutionnel en février et juillet 2016, jugeant
contraire à la Constitution le fait que les titres sans droits de vote soient exclus du régime des
sociétés mères, le projet procède à une mise en conformité des textes fiscaux. Tout d’abord, il
supprime la référence aux titres auxquels ne sont pas attachés de droits de vote de l’article 145
du CGI qui énonce leur exclusion du régime fiscal des sociétés mères (CGI, art. 145, 6, c).
En conséquence, le projet de loi ajuste le régime des titres de participation : il propose que la
qualification de titre de participation pour l’exonération des plus-values à long terme ne
s’applique aux titres ouvrant droit au régime mère-fille que si la société mère détient au moins
5 % des droits de vote dans sa filiale (CGI, art. 39, 1, 5° et CGI, art. 219, I, a quinquies). Cette
mesure s'appliquerait aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017.
Remarque : le PLFR intègre également la position retenue par l’administration fiscale
concernant les titres détenus dans un patrimoine fiduciaire : ils ne pourraient être pris en
compte pour l’appréciation du seuil de détention de 5 % de la société mère dans la filiale
qu’à condition que le constituant conserve l’exercice des droits de vote attachés aux titres
transférés dans le patrimoine fiduciaire.
Participations détenues dans des sociétés établies dans des ETNC
Le régime des titres exclus du bénéfice du long terme serait mis en conformité : en principe,
le régime du court terme s’applique aux plus-values réalisées à l’occasion de la cession de
titres de sociétés établies dans un État ou territoire non coopératif (ETNC) au sens de l’article
238-0 A du CGI (CGI, art. 39 duodecies, 2, c). En janvier 2015, le Conseil constitutionnel a
déclaré cette exclusion conforme à la Constitution tout en émettant une réserve
d’interprétation : le contribuable doit pouvoir apporter la preuve que la prise de participation
dans une société située dans un ETNC n’a ni pour objet ni pour effet de permettre, dans un but
de fraude fiscale, la localisation de bénéfices dans un tel État ou territoire. L’administration
fiscale exige à ce titre que la société mère puisse prouver par tous moyens que la prise de
participation correspond à des opérations réelles. Le PLFR intègre ces exigences dans le code
général des impôts. Cette mesure s'appliquerait aux exercices ouverts à compter du 1er janvier
2017.
Régime des titres au porteur
Le projet profite de ces mises en conformité pour préciser les établissements dans lesquels les
comptes des titres de participation doivent être tenus pour que les sociétés mères bénéficient
du régime de faveur.
Remarque : il s’agirait :
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des intermédiaires habilités aux activités de tenue de compte-conservation
d’instruments financiers (C. mon. fin, art. L. 542-1) ;
des établissements de crédit habilités à exercer l’activité de conservation et
administration de valeurs mobilières dans l’Union européenne ;
des intermédiaires habilités à exercer les activités de tenue de compte-conservation
situés dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention
d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.
Cette mesure s'appliquerait aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017 (PLFR 2016,
art. 30).
Mise en conformité de la contribution de 3 %
Le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution l’exonération de contribution
de 3 % dont bénéficient les distributions réalisées entre sociétés membres d’un groupe intégré
(voir notre brève). En conséquence, le projet étend le champ d’application de l’exonération de
contribution de 3 % aux distributions effectuées dans des sociétés soumises à un impôt
équivalent à l’IS dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État ayant
conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la
fraude et l’évasion fiscales. Les conditions de détention devraient pour cela être respectées : le
capital de la société mère ne devrait pas être détenu à au moins 95 % par une autre personne
morale soumise à l’IS. Le capital des filiales devrait, quant à lui, être détenu à au moins 95 %
par la société mère. Les groupes intégrés en vertu des articles 223 A et 223 A bis du CGI
demeureraient exonérés de contribution de 3 %. Les conditions de détention et d’intégration
s’apprécieraient à la date de la mise en paiement des montants distribués. En revanche, les
montants distribués dans des sociétés établies dans des États ou territoires non coopératifs
(ETNC) resteraient soumis à la contribution, sauf si la société mère établissait que les
opérations réalisées dans cet État étaient réelles et n’avaient ni pour objet ni pour effet de
permettre la localisation de bénéfices dans cet État dans un but de fraude fiscale. Cette mesure
s’appliquerait aux montants distribués dont la mise en paiement interviendrait à compter du
1er janvier 2017 (PLFR 2016, art. 31).
Réforme des modalités de recouvrement de la C3S
Pour des raisons de neutralité budgétaire, le projet compense l’extension de l’exonération de
contribution de 3 % par une réforme des modalités de recouvrement de la contribution sociale
de solidarité des sociétés (C3S). De plus, le gouvernement souhaite réduire le décalage entre
l’année de réalisation du chiffre d’affaires sur lequel la C3S est assise et la date de perception
de cette recette par la sécurité sociale.
À cette fin, une contribution supplémentaire à la C3S serait instituée au taux de 0,04 %,
assise, recouvrée et contrôlée dans les mêmes conditions que la C3S. Elle serait due par les
entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard € et serait assise sur le
chiffre d’affaires réalisé l’année au titre de laquelle cette contribution supplémentaire serait
due.
De plus, le redevable de la contribution supplémentaire devrait verser un acompte égal à 90 %
du montant de cette contribution au plus tard le 15 décembre de l’année au titre de laquelle
cette contribution serait due.
Remarque : si le montant de l’acompte était supérieur au montant de la contribution due,
l’excédent serait restitué dans les 30 jours à compter de la date de déclaration du solde. Une
majoration de 5 % serait appliquée en cas de versement d’acompte insuffisant.
Le montant de la contribution supplémentaire s’imputerait sur le montant de C3S dû par la
société. Cette mesure entrerait en vigueur à compter du 1er janvier 2017 (PLFR 2016, art. 34).
Remarque : la C3S et sa contribution supplémentaire seraient ajoutées à la liste des charges
déductibles de l’article 39 du CGI. Bien que la C3S et sa contribution additionnelle devaient
être supprimées définitivement en 2017 (pour faire suite aux abattements d’assiette décidés en
2015 et 2016), leur existence ne serait pour l’instant pas remise en cause.
Deux nouveaux contrôles sur place
Contrôle spécifique aux demandes de remboursement de crédits de TVA
La TVA déductible dont l'imputation n'a pas pu être opérée peut faire l'objet, sur demande,
d'un remboursement (CGI, art. 271, IV). Le projet prévoit l'institution d'un contrôle propre à
de telles demandes, réalisé sur place dans l'entreprise.
Il concernerait les demandes de remboursement de crédits de TVA déposées à compter du 1er
janvier 2017.
Après l'envoi d'un avis d'instruction sur place, l'agent pourrait se rendre dans l'entreprise pour
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procéder à des constats matériels et,
consulter les livres ou documents comptables dont la présentation est prévue par le
code général des impôts ainsi que toutes les pièces justificatives afférentes à la
demande.
Remarque : cantonné aux éléments concourant au remboursement de crédits de TVA, ce
contrôle ne constituerait pas une vérification de comptabilité.
L'administration devrait rendre sa décision (remboursement ou rejet, partiel ou total, de la
demande) dans un délai de :
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60 jours à compter de la première intervention sur place ;
dans tous les cas, 4 mois à compter de la notification au contribuable de l'avis
d'instruction.
L'impossibilité pour l'administration de procéder aux constats matériels ou consulter sur place
les documents et pièces justificatives du fait du contribuable, constituerait un motif de rejet de
la demande de remboursement pour défaut de justification.
En l'absence de décision de l'administration dans les délais impartis, il serait fait droit à la
demande (PLFR 2016, art. 14).
Contrôle spécifique dans les organismes bénéficiaires de dons
Une procédure spécifique de contrôle serait instituée dans les organismes bénéficiaires de
dons et versements ouvrant droit à réduction d’impôt pour le donateur. Son objectif serait de
s’assurer de la correspondance entre :
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le montant porté sur reçu ou l’attestation délivré au contribuable et,
la somme effectivement perçue par l’organisme.
Seraient concernés tous les organismes bénéficiaires de dons ou versements permettant aux
contribuables de bénéficier de la réduction :
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d’impôt sur le revenu pour dons et subventions à des œuvres ou organismes d’intérêt
général (CGI, art. 200),
d’ISF au titre des dons à certains organismes (CGI, art. 885-0 V bis A) ou,
d’impôt pour mécénat d’entreprise (CGI, art. 238 bis).
Le contrôle aurait lieu sur place. L’organisme contrôlé aurait l’obligation, d'une part, de
présenter les documents et pièces de toute nature permettant à l’administration de réaliser son
contrôle et, d'autre part, de conserver ces documents pendant 6 ans à compter de la date à
laquelle ils ont été établis.
Cette disposition s’appliquerait aux dons et versements effectués à compter du 1er janvier
2017 et les premiers contrôles auraient lieu à compter du 1er janvier 2018 (PLFR 2016, art. 14,
I, 2° et 3° et II, B et C).
Remarque : les opérations ne constitueraient pas une vérification de comptabilité mais les
garanties prévues pour les contribuables vérifiés leur seraient rendues applicables par décret
en Conseil d’État.
Comptabilités dématérialisées
Nouvel examen de comptabilité à distance
Les agents de l’administration pourraient examiner sans se rendre sur place les documents
comptables des entreprises tenues à une comptabilité dématérialisée. Le contrôle s’effectuerait
donc depuis les locaux de l’administration (lire notre article).
Encadrement de la procédure
Lorsque le contribuable choisit d’effectuer lui-même les traitements informatiques nécessaires
à la vérification (LPF, art. L. 47 A, II, b)), ce dernier devrait, à la demande de
l’administration, mettre à disposition dans les 15 jours les copies des documents et traitements
soumis au contrôle selon des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget.
L’administration pourrait alors effectuer sur ces copies tout traitement informatique
nécessaire. Dans ce cas, elle informerait le contribuable du résultat des traitements au plus
tard lors de l’envoi de la proposition de rectification.
Remarque : rappelons qu’à l’heure actuelle, le contribuable peut, au choix, laisser le
vérificateur effectuer les traitements sur place ou les effectuer lui-même ou encore remettre
une copie des documents soumis à contrôle (LPF, art. L. 47 A, II).
Le défaut de présentation de ces documents ou de remise des copies serait passible :
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d’une amende de 5 000 € ou,
d’une majoration de 10 % des droits mis à la charge du contribuable en cas de
rectification et si le montant en est plus élevé.
Enfin, en cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité, la limitation à
6 mois de la durée de vérification sur place serait suspendue jusqu’à la remise de la copie des
FEC.
Cette mesure s’appliquerait aux contrôles dont les avis de vérification seraient adressés à
compter du 1er janvier 2017 (PLFR 2016, art. 13).
Simplification du droit de visite
Dans le cadre d’une demande de droit de visite, lorsque les lieux à visiter sont situés dans le
ressort de plusieurs juridictions, une ordonnance unique pourrait être délivrée par l’un des
juges des libertés et de la détention (JLD).
Par ailleurs, si au cours de la visite, les agents découvraient des éléments révélant l’existence
de nouveaux lieux à visiter, ces derniers pourraient, en cas d’urgence, obtenir une autorisation
par le JLD de procéder immédiatement à la visite de ces lieux aux fins de saisine des pièces et
documents.
Par mesure de simplification, le juge désignerait le chef du service (et non plus directement
l’officier) qui devrait nommer l’officier de police judiciaire chargé d’assister aux opérations et
de le tenir informé de leur déroulement.
Enfin, dès lors que les opérations ont lieu en dehors du ressort de son TGI, le juge délivrerait
une commission rogatoire au JLD dans le ressort duquel s’effectue la visite aux fins de
contrôle des visites et saisies. L’ordonnance d’autorisation pourrait, quant à elle, faire l’objet
d’un appel devant le premier président de la cour d’appel dans le ressort de laquelle le juge a
autorisé la mesure (PLFR 2016, art. 15).
Aménagement des sanctions applicables
Renforcement des sanctions pour avoirs non-déclarés à l’étranger
Suite à la censure par le Conseil constitutionnel de l’amende proportionnelle de 5 % du solde
créditeur du ou des comptes non déclarés lorsque ce solde est au moins égal à 50 000 €, les
dispositifs de sanction en cas de non-déclaration de comptes bancaires, de contrats
d’assurance-vie ou de trusts seraient modifiés.
Les amendes proportionnelles seraient ainsi remplacées par un régime unique de majoration
de 80 % des droits dus en cas de rectification du fait de sommes figurant sur ces comptes, sans
pouvoir être inférieure au montant de l’amende forfaitaire. Toutefois, l’application de la
majoration de 80 % exclurait l’application de toute autre majoration ou amende forfaitaire.
L’amende forfaitaire resterait tout de même applicable en cas de non-déclaration d’un compte
bancaire, d’un contrat d’assurance-vie ou d’un trust lorsque les avoirs et revenus afférents ont
été déclarés (IR, ISF, DMTG).
Enfin, cette majoration ne s’appliquerait pas en cas d’absence de réponse aux demandes
d’informations ou de justifications de l’administration sur des avoirs figurant sur des comptes
étrangers. Dans ce cas, le taux le plus élevé du barème des droits de mutation à titre gratuit
s’appliquerait (60 %) (PLFR 2016, art. 32).
Sécurisation des pénalités fiscales
La majoration de 10 % pour retard de paiement des impôts serait applicable que les créances
soient recouvrées par voie d’avis de mise en recouvrement ou par voie de rôle à compter du
1er janvier 2017.
En matière d’IR, le cumul de deux majorations de 10 % (l’une générale et l’autre spécifique à
l’IR) pour dépôt tardif des déclarations dans les 30 jours d’une mise en demeure serait
simplifié. Ainsi, en cas de dépôt tardif spontané, une majoration spécifique de 10 %
s’appliquerait, portée à 20 % en cas de dépôt tardif effectué dans les 30 jours d’une mise en
demeure. La majoration de 10 % de droit commun ne s’appliquerait pas dans ce cas.
Par ailleurs, afin de tirer les conséquences d’une décision du Conseil d’État (CE, 26 janv.
2016, n° 377902), la majoration spécifique s’appliquerait à tous les cas de défaut ou de retard
de déclaration et non plus seulement à des impositions supplémentaires (PLFR 2016, art. 17).