Amenzu n°16 : Janvier 2004 - ACBB

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Amenzu n°16 : Janvier 2004 - ACBB
A m e n z u
Numéro
16
Bulletin de l’Association Culturelle des Berbères de Bretagne
DEC 2003 – JANV 04
EDITORIAL
SOMMAIRE
A l’occasion de la nouvelle année, toute l’équipe d’Amenzu ainsi que tous les
membres de l’association présentent leurs meilleurs vœux à tous nos
lecteurs et à tous ceux qui s’intéressent de près ou de loin à notre culture,
à notre histoire et à notre langue. Nous espérons que vous serez de plus en
plus nombreux à nous lire, nous contacter et nous rejoindre. Ce journal est
ouvert à tous les échanges inter - culturels fondés sur la recherche de la
connaissance des cultures et sur le rapprochement entre elles.
La sortie de ce numéro 16 coïncide avec la célébration du nouvel an berbère
(voir programme en page 6).
Beaucoup de questions agitent la société, la laïcité en est un des plus
vigoureux. Si nous continuerons à condamner énergiquement toutes les
discriminations, quelle que soit leur nature, et toute forme de
stigmatisation, nous ne pouvons en revanche reprendre les arguments de
certains qui, sous couvert de libertés individuelles, tentent d’introduire
insidieusement et progressivement des croyances collectives qui, de notre
point de vue, doivent concerner la sphère privée. Cela étant dit, le débat
n’ayant pas eu lieu au sein de l’association, la position quant à la nécessité
d’une loi ne peut être exprimé ici. Nous y reviendrons certainement dans le
prochain numéro.
Cependant, nous croyons beaucoup aux vertus du dialogue et aux valeurs de
liberté et d’émancipation, d’égalité dont l’école est porteuse et que les
projets et programmes politiques n’ont pas su incarner et mettre en œuvre
concrètement dans les cités.
Cette année sera aussi celle des Assises des Berbères de France qui auront
lieu pour la première fois en France en mai prochain. Nous reviendrons sur
les objectifs de cette initiative.
Ce sera également l’année des élections présidentielles en Algérie en avril.
Nous ne pouvons ne pas exprimer notre point de vue sur cette échéance
importante qui doit être celle de la véritable rupture avec le système
autoritaire en place, rejeté malgré le cynisme et la morgue (qui leur
servent de masque) et les appuis intolérables des pays occidentaux.
Nous suivons toujours avec beaucoup d’intérêt l’évolution du mouvement
citoyen de Kabylie et sa détermination à faire aboutir sa plate-forme
malgré de nombreuses tentatives de le disqualifier et de le diviser.
Bonne année !
Assegwas Amegaz !
Bloavez Mat !
Le bureau de l’ACBB
Programme
Yennayer
p1
Débat : autonomie p 2
Débat : Bribes de p 3
l’exception kabyle
Quel avenir pour le p 3
Mouvement citoyen
Poésie : Qui tire
les ficelles ?
p4
Publications
p 4
Humeur
p 5
Témoignage
p 6
Mon parcours d’instituteur
.
A.
C.
B.
B.
MJC La Paillette
Rue Pré de Bris35 000 RENNES
________________
Tel : 02 99 59 88 88
Fax : 02 9959 88 89
[email protected]
Responsable du Bulletin
Khaled DRIDER
Ont collaboré à ce numéro :
H. Ait Seddik, M. Ammi,
A. Benoufella, K. Drider,
E. Jouzel, B. Kaci Chaouch,
C. Kadi, K. Kahlal,
G. Lambert, N. Logeais,
N. Ould Slimane
Amenzu 16– Janvier 2004 – page 1
DEBAT
DEBAT
DEBAT
Kabylie : AUTONOMIE, AUTONOMIE : « Est-ce bien le moment ? »
Dans Amenzu n° 15, mon ami Hocine affirme : « Lutter pour une Kabylie autonome dans un régime dictatorial
est irréaliste ». Donc «ce n’est pas le moment » (remarque oh combien rétorquée au combat pour Tamazight !,
la priorité étant le combat pour la démocratie).
Cette remarque amène plusieurs réflexions, tant politiques qu’historiques.
Si l’on admet que dans un Etat où
existe une diversité linguistique,
culturelle, voire nationale, seule une
organisation fédérale des pouvoirs
politiques
garantissant
des
autonomies (qui peuvent être de
définitions variées) peut garantir
cette diversité, la question est :
quand le combat pour ces
autonomies doit-il être engagé ?
Si l’on reconnaît que des droits
humains ne s’arrêtent pas aux
libertés individuelles et collectives
de nature politique et sociale mais
englobent
aussi
les
droits
linguistiques et culturels, on
reconnaît de fait que ce combat fait
partie de la lutte pour la démocratie
et ne peut en être dissocié.
Un régime dictatorial comme le
régime algérien peut-il reconnaître
le droit à d’autonomie ? Non dans
le principe puisqu’il ne reconnaît
aucun droit ! de même qu’il ne peut
reconnaître le liberté de la presse (et
pourtant elle a été arrachée), ni
reconnaître la diversité culturelle
puisque la République est « arabomusulmane ( et pourtant Bouteflika
a dû décréter Tamazight langue
nationale).Alors l’autonomie…
Un régime démocratique comme la
France peut-il reconnaître un statut
d’autonomie aux régions qui le
souhaiteraient ? En principe
oui puisque la liberté d’expression
existe ! Et pourtant la République
française a failli tuer toutes ses
langues régionales et est le seul pays
d’Europe (avec la Grèce) à refuser
de signer la charte des langues
minoritaires au nom de la
République (pourtant démocratique)
« une et indivisible ». Alors
l’autonomie….
En confrontant ces 2 exemples on
s’aperçoit que le problème est plus
complexe qu’il n’y paraît. Voilà 2
Etats, démocratiques ou pas mais
bâtis sur le modèle centralisé pour
lequel toute idée d’autonomie
apparaît comme une remise en cause
de la sacro-sainte unité nationale. Il
faut bien casser les tabous.
Mais que nous dit l’histoire ?
Reprenons l’exemple d’Hocine :
l’Espagne :
En Espagne la défense des libertés
locales appelées « fueros »
est
une vieille tradition (« l’arbre de
Guernica » au pays basque est
du XV° siècle !) ; fueros gagnées
et perdues à travers les siècles
mais toujours revendiquées.
Le mouvement autonomiste
catalan date des années 1830. Il
joue un rôle important dans les
luttes démocratiques, obtient le
statut d’autonomie en 1932, le
perd en 1939 (et c’est la
Catalogne qui sera le dernier
réduit des Républicains jusqu’en
mars 1939) le regagne en 1978.
Le combat pour l’autonomie n’a
donc pas commencé après la
mort de Franco, il a été de toutes
les luttes démocratiques mais a
abouti après la mort de Franco
parce qu’il avait été préparé par
des décennies de luttes, avait
emporté
depuis
longtemps
l’adhésion du peuple et donc
rendu
ainsi le projet, dans
certaines
conditions
« réalisable ». Au pays basque,
le Parti Nationaliste (PNVautonomiste) est crée en 1895 lui,
il obtient l’autonomie pendant la
guerre civile en
1937 ; ses
combattants anti-franquistes (les
gutaris) doivent s’exiler dans le
Bordelais, s’engagent dans la
résistance anti- nazie sous les
couleurs du drapeau basque.
L’idée d’autonomie est cultivée
avec ferveur dans la clandestinité
sous le franquisme. Le pays
basque recouvre son autonomie
en 1978. Ricardo Montserrat, le
dramaturge
catalan malouin
affirme :
« les
résistances
basques et catalanes ont
puissamment
contribué
au
retour de la démocratie en
Espagne » et ajoute cette très
belle phrase : « Langue et
histoire font qu’on n’est pas nus
devant le bourreau »
Lutte pour l’autonomie et lutte
pour la démocratie ont donc été
inséparables et complémentaires
dans ces 2 pays.
Alors revenons à la Kabylie :
fallait-il lancer le débat sur
l’autonomie en juin 2001 ?
Certainement puisqu’il faut bien
commencer par briser un tabou si
on estime que ce projet est
justifié ? Etait-ce opportun ? sans
doute parce que les Kabyles se
sont emparés du débat.
Ce
combat est-il dissociable du
combat pour la démocratie ?
Certainement pas. Un projet
d’autonomie n’est jamais un but
en soi mais un moyen pour
gagner des libertés. Comment
doit-il être mené ? C’est aux
Kabyles de répondre.
Nicole Logeais
Juillet 2003
2
DEBAT
DEBAT
Bribes de l’exception kabyle
DEBAT
Quel avenir pour le mouvement citoyen ?
par Karim Kahlal
par Hocine Ait Seddik
Les berbères luttent depuis des décennies pour
revendiquer leur exception culturelle qui s’étend audelà des frontières algériennes et voilà qu’aujourd’hui
on change de cap pour revendiquer l’exception
kabyle !
Est-ce
cantonnement
un
repli
géographique,
un
identitaire, une concentration de
bonne volonté à la Prussienne en attendant l’empire
Depuis l’offre de dialogue initiée par le premier
ministre Ouyahia, le Mouvement Citoyen de
Kabylie est divisé en deux tendances :
- Les dialoguistes : qui veulent entamer le
dialogue avec le premier ministre, même s’ils
ont
posé
libération
ou le pire ?
• Selon le site du MAK tout est prêt, un statut, des
objectifs, une organisation, un projet de référendum
sur l’autonomie de la Kabylie… Quand je pense qu’il
des
préalables
des
détenus,
(en
particulier :
cessation
des
poursuites judiciaires, départ des indus élus)
pour aller vers la mise en forme de la plate
forme d’El Kseur.
a fallu des années et des années pour élaborer un
manuel de langue berbère…bref là n’est pas le sujet.
Je ne vous le cache pas, ce référendum me pose un
vrai souci, à qui dois-je demander ma carte de vote
au consulat à Nantes ? Où faut-il écrire (encore !) au
webmestre du site ? Et puis ai-je le droit de voter ?
Je n’ai jamais passé plus de 3 mois en Kabylie donc
ne suis pas résident, je suis natif d’une ville du centre
du pays enfin de l’actuelle Algérie ! Où j’ai toujours
exercé ma « berbérité »
pardon. ma « kabylité »,
avec la ferme conviction que j’étais sur la terre de
- Les non dialoguistes : qui pensent qu’aller au
dialogue actuellement c’est jouer le jeu du
pouvoir qui veut dynamiter le mouvement
citoyen et neutraliser la Kabylie dans la
perspective
des
élections
présidentielles
prochaines et que l’offre de dialogue n’est
qu’une manœuvre politique pour diviser les
archs.
L’acceptation récente par le premier ministre
des préalables de l’aile dialoguiste dans le
cadre du dialogue n’est pour certains qu’une
mes ancêtres !
Je suis perplexe, ma géographie a pris un coup, je
manœuvre de plus.
mélange Bismarck et BisMAK, Tizi s’éloigne de
Boghari, un autre monde ! Une consolation quand
même,
ma
sœur
m’a
promis
un
certificat
d’hébergement dès l’installation du gouvernement
Pour l’heure la division du mouvement citoyen,
en particulier au sein de la CADIC (mouvement
citoyen de la wilaya de Tizi Ouzou) pose la
question de l’avenir de ce mouvement et de la
provisoire. Elle habite Bouira elle !
plate forme d’El Kseur.
Assegwas Ameggaz !
K. K
H. A S
(nov. 2003)
(nov. 2003)
Assegwas Amegaz !
Assegwas Amegaz !
Amenzu 16– Janvier 2004 – page 3
POESIE :
Qui
tire
les
ficelles ?
Abderrahmane Lounès :
Poète à coup coups de poing
et à coups de pied
Algérie,
terre des ancêtres et des aïeux
Chacun de nous en ton sein veut juste vivre heureux.
Ils disent que c’est la foi en Dieu qui nous sépare et nous
déchire
Est-il un Dieu qui, à ses adorateurs, conseille le pire ?
Faut-il avoir foi en une foi qui durcit les cœurs ?
Prône la haine et la terreur ?
Algérie, terre des aïeux et des ancêtres
Toutes les femmes ont le droit d’y être
Vêtues comme elles l’entendent
Sans qu’on les batte ni les pende !
Nous ne pouvons ni fermer les yeux ni nous taire
Car il nous est douloureux, loin de vous frères,
Sœurs, pères, mères, voisins et amis d’enfance
De vivre, ici ou là-bas, en toute insouciance
Qui tire
les ficelles ?
Sommes-nous de marbre, de plomb ou de cire ?
Qui tire les ficelles des mains qui tirent ?
Qui nourrit encore ces chefs repus ?
Qui arme encore ces mains qui tuent ?
Algérie, à toute critique tu es rétive
Et tu souffres d’une fierté quasi-maladive
Tu ne veux pas que l’on dise tes malheurs
Et en silence, en larmes et en sang tu pleure.
Comment, alors, sans te blesser, avec un tant soit peu de décence ?
Décrire, et de si loin, toute sa souffrance ?
Du sud ou du Nord, arabes ou berbères,
Dans ce pays et depuis bien longtemps,
Ballottés par Blanc bonnet puis par Bonnet blanc,
Nous vivons tous la même galère.
Poètes et écrivains ont
souvent payé de leur vie
ou de leur liberté des
textes
jugés
dangereux.
Les
mots
sont
chargés
d'une
telle
puissance
qu'ils apparaissent comme
des armes mais les armes
ne
pourront
jamais
emprisonner ou tuer les
mots...Nous
sommes
trop
souvent témoins d'actes de
barbarie, mais, la liberté
et la vie sont les seules
valeurs
qui
paraissent
sacrées...
ABDERRAHMANE
LOUNES...
s’exprime par ses "poèmes
à coups de poing et à
coups de pied", pas besoin
de faire une analyse pour
comprendre,
les
mots
parlent
d'eux-mêmes
et
nous
dévoilent
sans
retenue les préoccupations
de Lounès.
Le poète ne se limite pas
à la satire et
à
la
dénonciation,
il
parle
aussi
très
bien
de
l'amour...
Cette force explosive avec
laquelle
il
crie
son
désarroi, sa colère, sa
tendresse
pour
exprimer
les sentiments les plus
beaux comme l'amour
K. Kahlal
Arezki
Benoufella
Nov. 2003
Rennes, nov. 2003
!
4
Humeur : La démocratie ou le ventre ?
La démocratie, à entendre un
certain chef d’Etat en visite
diplomatique dans un pays
pas si loin du sien, peut
aisément se concevoir par le
simple rapport à la faim. En
somme, si les citoyens d’un
pays mangent à leur faim,
selon M. Chirac, on peut dire
alors que la démocratie se
porte plutôt bien.
Cela nous rappelle le temps,
que l’on croyait pourtant
révolu, où le débat opposait
les tenants des libertés réelles
(avoir de la nourriture, des
soins et un emploi) à ceux qui
favorisaient
les
libertés
formelles
(liberté
d’expression,
pluralisme
démocratique
…..).
Le
contexte géopolitique de
l’époque était marqué par
l’inamovible puissance du
bloc de l’est et ses effets, dont
on n’a pas encore fini de
mesurer
les
dérives
dangereuses, sur les états dits
en voie de développement,
étranglés de l’autre par les
diktats économiques des
puissances du capital.
Au nom d’un progressisme de
façade, les uns voulaient faire
admettre que le bien –être de
la panse était autrement plus
important que le bien-être de
la pensée. Les autres, par
idéalisme ou par conviction
profonde, estimaient que les
libertés en général étaient
compatibles par nature.
C’est le ventre d’abord et
avant tout !
Au-delà de l’insulte même
que constitue une telle
déclaration « Le premier des
droits de l’homme, c’est
manger, être soigné, recevoir
une éducation et avoir un
habitat »
c’est
l’appui
cynique aux dirigeants en
place qui est révoltant. De
tels propos compromettent
largement leur auteur dès lors
que celui-ci est fort bien
informé de la nature du
régime de son hôte et de celui
d’ailleurs de ses voisins. Si
l’on veut poursuivre dans le
cynisme, cela revient à inviter
les citoyens de ces pays à
rendre grâce à leurs dirigeants
qui leur procurent autant de
satiété
physiologique.
D’autres statues sont à
ériger !!
Pourtant un certain 21 avril
2002, ce même chef d’Etat,
s’adressant
d’une
place
hautement symbolique de la
capitale de son pays, à ses
concitoyens venus nombreux
(parmi lesquels certains sont
originaires du pays auquel il
rendit visite et qu’il a béni pour
ses avancées économiques), a
trouvé de vibrants mots pour
célébrer les valeurs de la
république, bannissant ainsi la
haine et le racisme qui ont
failli prendre d’assaut cette
même
république.
La
communion autour de cette
grande place parisienne, dans
un élan de soulagement, a
gommé un temps les aspérités
du candidat et fait oublié
momentanément les ambiguïtés
de ce président -réélu grâce
aussi aux voix des français
originaires
de
Tunisie,
d’Algérie, du Maroc et
d’ailleurs.
Cette leçon du 21 avril aurait
dû inspirer M. Chirac pour ne
pas (ne plus) servir de caution
à tous ces féodaux d’un autre
temps qui sévissent encore de
l’autre côté de la Méditerranée.
Nous ne sommes même pas
d’humeur à partager cet
humour
corrosif
d’un
quotidien qui titrait, à propos
de la visite tunisienne :
« Quand M. 82% rend visite à
M. 99% ».
La démocratie ne se monnaye
pas selon la latitude, elle est un
bien pour l’humanité toute
entière, de la plus affamée à la
plus rassasiée. Elle traversera
sûrement la Méditerranée,
cette longue mer commune,
berceau de tant d’histoires et
de tragédies, théâtre d’une
civilisation aux traces antiques.
L’avenir des pays de cette
autre rive sera démocratique,
n’en déplaise aux apprentis
tyrans en place. !
Pour nous, c’est toujours et la
démocratie et le ventre !
K. Drider
(déc. 2003)
Sortie : Lounès Matoub : « Mon nom est combat » par Yalla SEDDIKI.
Ce livre propose pour la première fois, en édition bilingue, une anthologie de
la poésie chantée de Lounès Matoub. Elle a été conçue et traduite par Yalla
Seddiki, né en 1969 en Kabylie, il a travaillé avec Lounès Matoub pour les
livrets de plusieurs de ses disques.
Editions La Découverte Cahors, sept 2003, 253 p.
ISBN : 2-7071-4093-7
Prix : 18 €
Amenzu 16– Janvier 2004 – page 5
Témoignage :
Mon parcours d'instituteur en Kabylie
par Ernest JOUZEL
C'était en Septembre 1970. Sortant du centre de
formation pédagogique de Rennes, j'arrivai à l'école des
Pères Blancs des Ouadhias (Grande Kabylie) pour y
accomplir mes deux années d'enseignement au titre de
la coopération comme l'avaient fait beaucoup d'autres
avant moi.
Commençait alors une inoubliable aventure qui devait
durer trois ans au lieu de deux. Inoubliable parce que
ma première année en tant qu'instituteur allait se
dérouler en territoire inconnu, bien différent de ma
Bretagne natale. Pas de relief plat, ni de cultures
comme chez moi mais des vallées verdoyantes, des
collines couvertes d'oliviers et de figuiers et dominées
par une montagne majestueuse : le Djurdjura. Peu à
peu, mon regard dut s'habituer aussi à ces chapelets de
villages dont les maisons tassées les unes contre les
autres et séparées par d'étroites ruelles empierrées
étaient couvertes de tuiles (chez moi ce sont des
ardoises) ; à ces hommes portant le burnous ou parfois
un saroual et qui allaient travailler aux champs,
accompagnés de leur âne ; à ces femmes vêtues de
robes multicolores et qui se rendaient souvent pieds
nus à la fontaine pour y puiser l'eau nécessaire aux
besoins quotidiens (pas d'eau courante, ni d'électricité) ;
à ces garçons pauvrement habillés mais avides de
connaître la langue de Voltaire qui représentait pour
eux, comme pour leur père auparavant, une bouée de
sauvetage pour sortir de la misère en s'expatriant plus
tard si besoin.
Leur soif d'apprendre le français et les maths que je leur
.
A L’OCCASION DE
L’ ASSOCIATION
enseignais me forçait au respect et m'invitait, tout en me
procurant beaucoup de satisfaction, à donner tout ce
que je pouvais. Ces petites frimousses malicieuses,
intelligentes, un peu rustres mais tellement affectueuses
me le rendaient bien. Et c'est ainsi que je prolongeai
volontairement mon contrat pour les emmener jusqu'à la
6ème.
Cette troisième année me permit aussi de découvrir,
grâce à des jeunes des Ouadhias étudiant à Alger, la
nouvelle musique kabyle empreinte de mélodies
modernes, avec l'arrivée de jeunes chanteurs comme
Nouara, Idir, Nourredine... A l'issue de cette année
1973, mes supérieurs donnèrent l'ordre au directeur que
j'étais de fermer l'école au grand dam des habitants.
Ce récit veut être un témoignage de mon admiration et
de mon affection pour ce peuple fier et solidaire qui a
lutté et lutte encore pour sa survie, pour cette
population accueillante et généreuse qui sait recevoir le
roumi (étranger), pour ces gens aux abois qui se battent
pour leur identité.
Pour les remercier de la sympathie qu’ils m’ont vouée,
j'ai créé à leur intention et spécialement à celle de mes
anciens élèves un site internet qui retrace mon parcours
d'instituteur en Kabylie. Je leur devais bien cela.
Vous trouverez ce site et l'interview qui l'accompagne
sur Kabyle.com ou sur Google.
(E.J)
.
YENNAYER 2954 ,
CULTURELLE
des
LE NOUVEL AN BERBERE
BERBERES
DE
BRETAGNE
organise une soirée culturelle
le Samedi 17
janvier 2004
à la MJC
du Grand Cordel
rue des Plantes, Rennes
Au programme
programme
•
18h30 : Accueil
•
19h00 : Apéro.
•
•
20h00 : Pièce de théâtre de la compagnie Pacibès "Ecoute les femmes,
elles arrivent parcourant de grandes distances à pieds dansant"
21h30 : Dîner (Couscous traditionnel, suivi d’un thé et des gâteaux)
La soirée sera animée par Arezki et son groupe (musique et chants berbères).
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