Les lois de la nature

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Les lois de la nature
Les lois de la nature
Forme élémentaire d'une loi de la
nature
Si des conditions d'un genre F sont réunies,
alors, indépendamment du contexte, G est
invariablement le cas.
F et G : la possession d'une propriété par un
objet, l'existence d'un fait ou la survenue
d'un événement.
Exemples
•  Loi de Galilée (1564-1642):
un corps en chute libre près de la surface
de la Terre subit une accélération
uniforme indépendante de sa masse.
•  1ère loi de Kepler (1571-1630):
les orbites des planètes sont des ellipses
dont le Soleil occupe l'un des foyers.
Loi de réfraction de Snell (1580-1626)
θ1 : angle d’incidence du rayon (par rapport à la
verticale)
θ2: angle du rayon après réfraction
n1/n2: indice de réfraction du premier/second
milieu
« Un énoncé exprime une loi si et seulement
s'il est de forme universelle et vrai ».
(Hempel et Oppenheim 1948, p. 266)
Deux problèmes
1.  De nombreux énoncés de lois ne sont
pas strictement vrais.
L'accélération de la chute libre n’est pas
strictement constante.
L'orbite des planètes n’a pas exactement la
forme d’une ellipse.
2. Les critères d'universalité et de
vérité ne sont pas suffisants.
Deux raisons:
A.  Un énoncé universel conditionnel (∀x)
(Fx→Gx) est trivialement vrai si tous les
objets sont G ou si aucun n'est F.
B.  Description de coïncidences fortuites
peut avoir la même forme universelle.
Exemple de Goodman (1955) :
« Toutes les pièces que j'ai dans la
poche à l'instant t sont en argent. »
Quelle différence entre les généralisations
accidentelles et nomologiques ?
Les premières, mais non les secondes, font explicitement
référence à certains endroits, instants temporels, ou
personnes particulières.
Deux problèmes.
A.  Pas suffisant : on peut reformuler les énoncés
incompatibles avec cette exigence sans modifier leur
contenu, en remplaçant les expressions qui font
référence à des entités individuelles (objets,
personnes, lieux, instants) par des descriptions
définies.
B.  Pas nécessaire : il existe des généralisations qui sont
acceptées comme désignant des lois, mais qui
mentionnent explicitement une entité individuelle.
Exemple : première loi de Kepler.
Enoncé nomologique: pas équivalent à une
conjonction finie d'énoncés singuliers
Problème:
Ce n’est pas un critère qui permet de
reconnaître ces énoncés.
A.  Tous les corps en uranium pur ont un
volume de moins d'un km³.
B.  Tous les corps en or massif ont un
volume de moins d'un km³.
(exemple de Hans Reichenbach 1891-1953)
Confirmation
Seules les lois peuvent être confirmées par
des instances positives.
Notre confiance en la vérité de (A)
augmente plus vite que le rapport du
nombre des cas positifs examinés à
l'extension totale de son domaine de
validité.
Explication
Une loi, mais non une coïncidence universelle, peut
contribuer à expliquer ses instances.
v : une vis dans la voiture de M. Dupont.
Pourquoi v est-elle rouillée ?
La généralisation accidentelle
« Toutes les vis de la voiture de M. Dupont sont rouillées »
permet bien de déduire l'explanandum.
mais elle n'en fournit pas un explanans satisfaisant.
Nécessité
Les lois de la nature confèrent un statut de nécessité à leurs instances.
Les lois déterminent ainsi les conditions de vérité des conditionnels
contrefactuels et peuvent donc servir à les justifier.
Comparez:
1.  une pièce de métal.
« Si cette pièce de métal avait été chauffée, elle se serait dilatée. »
2.  une pièce de cuivre c qui n’est pas dans ma poche.
« si la pièce c était dans ma poche, elle serait en argent. »
Et les généralisations:
« Toutes les pièces que j'ai dans la poche à l'instant t sont en argent. »
« Tous les objets métalliques qui sont chauffés se dilatent. »
Nécessité - problèmes
1.  Intuitions sur d’autres mondes
possibles ?
2.  Quelle nécessité ?
Nécessité « naturelle » plus faible que la
nécessité logique/métaphysique ?
Si oui, les lois sont contingentes; si non,
elles sont nécessaires.
Propositions empiristes – « antiréalistes »
Les lois sont celles parmi les généralisations
universelles vraies qui sont considérées
comme nomologiques par le consensus
scientifique.
Les lois sont les généralisations universelles vraies
que la communauté scientifique considère
comme confirmées,
ou celles dont elle considère qu'elles ont une
valeur explicative,
ou celles qui sont utilisées pour faire des
prédictions.
Proposition de Braithwaite
•  R.B. Braithwaite (1900-1990) : une hypothèse
exprime une loi si et seulement si cette
hypothèse peut être « déduite d'une hypothèse
d'ordre supérieur, dans un système déductif vrai
et bien établi ».
•  Par conséquent, l'attribution du titre de loi de la
nature à une généralisation donnée est
« épistémologiquement relative » à la conviction
selon laquelle un système scientifique est, à un
moment donné, vrai et bien établi.
•  Problème: statut des axiomes.
Mill, Ramsey, Lewis
•  J. St. Mill (1806-1873)
•  F.P. Ramsey (1903-1930)
•  David Lewis (1941-2001)
« Une généralisation contingente est une loi de la
nature si et seulement si elle apparaît comme
théorème (ou axiome) dans chacun des
systèmes déductifs vrais qui accomplissent la
meilleure combinaison de simplicité et de
force. »
Problèmes:
1.  Il n’y a peut-être pas de « meilleure »
combinaison de simplicité et de force.
A.  Chacun de ces critères est vague.
B.  Ils s’opposent.
2.  Problème de l’induction.
3.  Exclut des axiomes qui ont peu
d’instances.
Approche réaliste
•  Lois : relations de dépendance entre
propriétés.
Substitution salva veritate d’un prédicat à
un prédicat coextensionnel
(1) Toutes les particules ayant une masse de 511 keV sont
attirées par les charges électriques positives.
(1) conserve sa valeur de vérité si l'on y substitue au
prédicat
« particules ayant une masse de 511 keV »
le prédicat
« électron »
qui se trouve avoir la même extension que le premier, ce
qui donne :
(2) Tous les électrons sont attirés par les charges
électriques positives.
•  Ex de Dretske (Laws of Nature, 1977):
•  Loi : les diamants ont un indice de
réfraction de 2.419.
•  « est un diamant » coextensif avec « est
extrait du kimberlite ».
Contexte nomologique: substitution
n’est pas salva veritate
En revanche, lorsque l'on part de l'affirmation
explicite selon laquelle (2) est nomologique, la
substitution réciproque ne préserve pas la
vérité.
(3) C'est une loi que les électrons sont attirés par
les charges électriques positives.
est vrai, alors que :
(4) C'est une loi les particules ayant une masse de
511 keV sont attirées par les charges
électriques positives.
est faux.
Proposition de Dretske
Fred Dretske (1932-2013)
Utilise une distinction introduite par Gottlob
Frege (1848-1925): contexte opaque /
transparent.
Selon Frege, les généralisations
universelles expriment des relations de
subordination d’un concept sous un autre.
Dretske
L'expression "c'est une loi que", lorsqu'elle
précède une généralisation universelle,
crée un contexte opaque à l'intérieur
duquel les prédicats n'ont pas leur
référents habituels.
Dans un énoncé explicitement nomologique,
les prédicats portent non pas sur leurs
extensions, mais sur les propriétés qu'ils
désignent.
Version aristotélicienne et
platoniste
Thèse réaliste: les lois sont des relations de
dépendance entre universaux (propriétés
universelles)
•  David Armstrong (1926-2014) : version
aristotélicienne.
•  Michael Tooley (*1941) : version platoniste
Problème
Expliquer la contrainte qu’exerce un état de
chose « de second ordre » (relation entre
propriétés) sur les états de chose de
premier ordre.

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