SEM8850 Métapop_ SArchibald

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SEM8850 Métapop_ SArchibald
UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL
DÉPARTEMENT D’ÉTUDES LITTÉRAIRES
SIGLE : À déterminer
TRIMESTRE : automne 2013
TITRE : MÉTAPOP : réflexivité du populaire
PROFESSEURS : Samuel Archibald et Antonio Dominguez Leiva
HEURES ET LIEU DU COURS
Heure et local à déterminer.
DESCRIPTIF
La théorie de la culture populaire a régulièrement tendu à considérer ses objets à l’aune
surtout de leur réception (Jenkins, Fiske, etc.) ou en les analysant à travers le prisme de
catégorie héritée du XIXe siècle (illusion référentielle, réalisme) ou comme un néoclassicisme
générateur de formules conventionnalisées (Boyer, 1992). Pourtant, en marge de recettes
éprouvées et d’une tendance à la transparence sémantique, la culture populaire a développé,
dès les années 60, en marge des productions pour très grands publics, sa propre veine
expérimentaliste qui s’est tantôt abreuvée ou distancée des avant-gardes et pratiques
autoréférentielles en culture savante, avant de développer sa propre constellation baroque
(Calabrese, 1992).
Deux cas précurseurs, en exemple :
Sur le plan littéraire, les auteurs avant-gardistes de la science-fiction d’après 1950, aux
Etats-Unis (Dick, Haldeman, Farmer, Zelazny, Delany, Le Guin, Spinrad) et en Angleterre
(Ballard, Moorcock, Aldiss) qui ont réalisé des expérimentations textuelles inspirées du hautmodernisme et de la beat generation, et ont ainsi produit pour toute une branche de la fiction
populaire une veine radicalement ouverte sur le plan formel, dont les préoccupations se sont
répercutées très tôt sur la fiction télévisuelles — on pense aux épisodes de The Twilight Zone
« A World of His Own » (écrit par Richard Matheson en 1960) ou « Five Characters in Search
of an Exit » (écrit par Lamont Johnson en 1961, en hommage à Pirandello), à la série The
Prisoner (crée par Patrick McGoohan, 1967-68) ou aux les épisodes de Star Trek « City on the
Edge of Forever » (1967, écrit par Harlan Ellison) et « Mirror, Mirror » (1967, écrit par
Jerome Bixby).
Sur le plan cinématographique, l’esthétique déviante et oppositionnelle (Jancovich et
al. 2003) du cinéma culte et de l’exploitation, avec ses explorations narratives et formelles à
mille lieux du cinéma grand public, a été un lieu réel de contestation de l’idéologie de
consolation d’Eco (1995) dans le cinéma d’exploitation en marge du cinéma expérimental et
un espace de métissage primordial du cinéma documentaire et de fiction : cinéma mondo,
sexploitation, film camp, psychotronie, etc.
À partir de là, on peut remonter la piste d’une culture populaire de plus en plus
consciente d’elle-même et qui n’a de cesse d’exposer ses propres mécanismes et ses propres
codes, avec ou sans arrière-plan critique. On tâchera de recueillir les efforts théoriques
effectués à la suite de cette mouvance afin de la replacer dans des cadres conceptuels et
historiques plus vastes.
L’analyse d’objets devant ici se tenter selon trois axes.
On tentera dans un premier temps de mesurer les effets pragmatiques et sociaux de la
métapop (Dunne, 2010), qui agit souvent comme un révélateur du degré d’implication des
spectateurs dans l’interprétation des textes et de leur volonté d’affronter et d’analyser le
caractère potentiellement aliénant de la fiction de masse. On peut penser ici à « Normal
Again » (2002), un épisode de la série Buffy the Vampire Slayer où toute la vie de l’héroïne
(une Van Helsing d’école secondaire), et donc tout l’argument de la série, est montré comme
étant peut-être les constructions mentales de la patiente catatonique d’un asile psychiatrique —
métaphore assez brutale des risques des risques l’escapism extrême dans l’imaginaire tel que
posé par le récit fantaisiste et tel que vécu par certains fans.
On tentera, dans un deuxième temps, de comprendre la spécificité des fictions
réflexives populaires, qui ne procèdent pas de simples transferts ou adaptations des régies
empruntés à leurs précurseurs savants. La métapop travaille souvent selon ses propres règles.
On peut penser à un objet étrange, Les Régulateurs (1996), roman attribué à jusque dans son
paratexte à feu Richard Bachman (l’alter ego de Stephen King). Selon une modalité
autoréférentielle inédite, le roman utilise la même galerie de personnages que Désolation
(1996), un roman de King paru la même année chez un autre éditeur. Les personnages
partagent prénoms et patronymes, sans pour autant avoir le même âge, le même statut familial
ou la même fonction au sein de deux histoires à la fois semblables et opposées (sur le plan
idéologique, surtout). Comme si, véritablement, King et Bachman étaient des individus
différents qui auraient produit à leur insu deux variations sur un même thème. Le roman opère
une improbable fusion de la littérature d’horreur et de l’art conceptuel. Que Les Régulateurs
fassent écho à certains classiques de la littérature autoréflexive est une chose, mais le fait est
que la métafiction n’a jamais, à proprement parler, produit rien de tel.
On interrogera finalement, en accord avec une réactivation d’une perspective de théorie
critique en études culturelles (Hills, 2002), l’avènement d’une métafiction de grande
consommation en tant que mise en crise du caractère subversif de la réflexivité, non seulement
dans la fiction populaire, mais dans la littérature et le cinéma de production restreinte.
Constater l’instrumentalisation parfois totale de la réflexivité par l’industrie culturelle, c’est se
demander quelles stratégies alternatives, hybrides ou nouvelles peut mettre en œuvre
aujourd’hui l’artiste afin de réactiver la fonction critique du récit, qui fut longtemps, dans
certains cercles à tout le moins, entièrement déléguée à la métafiction.
Pour les étudiants, ce séminaire se voudra un lieu d’échange entre la théorie littéraire et
les études culturelles, notre constat d’une réflexivité du populaire fournissant le prétexte afin
d’aller à la rencontre de développements récents des études médiatiques et culturelles.
Le séminaire se déroulera à l’automne 2013.
MODALITES ET TRAVAUX
Ce séminaire est pensé comme un groupe de travail où le partage actif des points de vue,
par le biais de présentations et de discussions, constituera le point focal de chaque séance. La
formulation de propositions et d’hypothèses de même que la présentation (sous forme de
comptes rendus) de diverses théories entourant la notion de populaire mèneront à la
confrontation des points de vue.
Le séminaire exige une participation active des étudiant(e)s inscrit(e)s ; la présence aux
séances est conséquemment requise. Nous définirons au début du trimestre la nature exacte
des travaux à réaliser, mais comme il s’agit de mettre l’accent sur les échanges, nous
prévoyons privilégier une formule d’évaluation qui insistera davantage sur les exposés et les
interventions orales.
Les professeurs présenteront des hypothèses théoriques et critiques dans les premières
séances, qui prendront la forme de cours magistraux. Les séances suivantes, aménagées selon
la forme d’un séminaire, permettront aux participant(e)s de partager leurs points de vue par le
biais d’exposés critiques et analytiques, variant selon les intérêts des participant(e)s. Les
étudiant(e)s sont encouragé(e)s à faire porter leur exposé sur le corpus qu’ils/elles projettent
de retenir dans le cadre de leur mémoire ou de leur thèse (cela bien sûr si le corpus se prête à
une telle étude).
***
Conformément à l’énoncé de principes adopté par le Département d’études littéraires,
l’évaluation des travaux et de l’examen tiendra compte de la qualité de la langue : maîtrise des
règles de syntaxe et de composition (organisation générale du texte), justesse et étendue du
lexique, respect de l’orthographe.
Les notes seront attribuées selon le barème départemental habituel.
Calendrier et travaux
Calendrier provisoire des séances
Semaine
Semaine 1 –
Semaine 2 –
Semaine 3 –
Semaine 4 –
Semaine 5 –
Semaine 6 –
Semaine 7 –
Semaine 8 –
Semaine 9 –
Semaine 10 –
Semaine 11 –
Semaine 12 –
Semaine 13 –
Semaine 14 –
Semaine 15 –
Sujet de la séance
• Prolégomènes et hypothèses
• Prolégomènes et hypothèses
• Prolégomènes et hypothèses
• Comptes-rendus théoriques
• Comptes-rendus théoriques
• Comptes-rendus théoriques
• Comptes-rendus théoriques
• Semaine de lecture
• Présentations étudiantes
• Présentations étudiantes
• Présentations étudiantes
• Présentations étudiantes
• Présentations étudiantes
• Présentations étudiantes
• Synthèse
Travaux et pondération
1. Un compte-rendu théorique (25%)
2. Un exposé critique (25%)
3. Un exposé-réponse de 5 minutes (10%)
4. Un travail écrit de 20 pages (30%)
5. Participation globale (10%)
Le caractère dynamique du séminaire dépendant essentiellement de la
participation des étudiants inscrits, la note finale prendra en considération la
participation de chacun aux discussions qui suivront les exposés.
BIBLIOGRAPHIE PRÉLIMINAIRE
[Une bibliographie pertinente sera présentée à la première séance]
Bevill, Maria, Gothic-Postmodernism: Voicing the Terrors of Postmodernity, Amsterdam :
Rodopi, 2009.
Boyer, A.-M., La paralittérature, Que-sais-je ? 1992.
Calabrese, Omar, Neo-Baroque: A Sign of the Times, Princeton : Princeton University Press,
1992.
Couégnas, Daniel, Introduction à la paralittérature, Paris : Éditions du Seuil, 1992.
Dassanowsky, Robert von, Quentin Tarantino's Inglourious Basterds: A Manipulation of
Metacinema, New York : Continuum, 2012.
Dubois, Jacques, Le roman policier ou la modernité, Paris : Armand Colin, coll. « Le texte à
l’œuvre », 2006, 235 p.
Dunne, Michael, Intertextual Encounters in American Fiction, Film, and Popular Culture,
Madison, Wisconsin : Popular Press, 2001
Dunne, Michael, Metapop: Self-referentiality in Contemporary American Popular Culture,
Jackson : University Press of Mississippi, 2010.
Eco, Umberto, De superman au surhomme. Paris : Le livre de poche, coll. « Biblio essais »,
1995.
Fiske, John, 1989. Understanding Popular Culture. London : Routledge, 1994.
______, « The Cultural Economy of Fandom ». Lisa A. Lewis, dir. The Adoring Audience.
Fan Culture and Popular Media. London & New York : Routledge, 1992 : 30-49.
Gordon, Andrew, « Star Wars: A Myth for Our Time ». Screening the Sacred: Religion, Myth,
and Ideology in Popular American Film. Joel W. Martin and Conrad E. Ostwalt Jr.
Boulder (dirs). Colorado : Westview Press, 1995 : 73-82.
Hills, Matt, Fan Cultures, London & New York : Routledge, 2002.
Jancovich, Mark, Antonio Lazaro Reboll, Julian Stringer, and Andrew Willis (dirs.), Defining
Cult Movies. The Cultural Politics of Oppositional Taste. Manchester & New York :
Manchester University Press, 2003.
Konrath, Lisa, Metafilm: Forms and Functions of Self-Reflexivity in Postmodern Film, Berlin :
VDM Verlag, 2010.
Le Guern, Philippe, dir., Les cultes médiatiques, culture fan et œuvres cultes. Rennes : Presses
Universitaires de Rennes, 2002.
McRobbie, Angela. Postmodernism and Popular Culture, New York, Routledge, 1994.
Mayne, Judith S., The Ideologies of Metacinema, Buffalo, University of New York Press,
1975.
Mendik, Xavier and Graeme Harper, (dirs.), Unruly Pleasures : The Cult Film and its Critics.
Guildford : FAB Press, 2000.
Matuella, Marion, Films about Filmmaking: Illusion and Anti-Illusion in Meta-Film, Berlin :
VDM Verlag, 2008.
Seabrook, John, NoBrow : The Culture of Marketing the Marketing of Culture, New York:
A.A. Knopf, 2000.
Swirski, Peter, From Lowbrow to Nobrow. Montreal, London: McGill-Queen's University
Press, 2005.
Wolf, Werner, Katharina Bantleon et Jeff Thoss (dirs.), Metareference across Media: Theory
and Case Studies, Amsterdam : Rodopi, 2009.