des leçons d`australie? - Revue militaire canadienne
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des leçons d`australie? - Revue militaire canadienne
C O M M E N TA I R E par Martin Shadwick DES LEÇONS D’AUSTRALIE? L es amis et les alliés du Canada ont publié des livres blancs sur la défense à un rythme frénétique. Celui de l’Australie, paru à la fin de l’année et intitulé Defence 2000: Our Future Defence Force est particulièrement intéressant. Bien que les Forces canadiennes et la Force de défense australienne (ADF) soient aux prises avec des réalités géostratégiques et nationales différentes (l’ADF, par exemple, est profondément axée sur une région particulière [Asie-Pacifique], fait davantage partie de l’édifice social australien et opère dans un environnement où la politique de défense insiste sur l’indépendance), elles font essentiellement face à plusieurs problèmes communs. Ce sont toutes deux des établissements de défense de taille relativement modeste qui se débattent contre une nouvelle répartition des dépenses d’immobilisation, la révolution dans les affaires militaires, le recrutement et la rétention, la réforme financière et administrative, l’avenir des forces de réserve et bien d’autres problèmes. Dans une langue très familière aux Canadiens, le livre blanc parle d’une disparité « entre les objectifs stratégiques, les capacités de défense et les niveaux de financement de la défense » et conclut que « la défense avait atteint le point où les niveaux de dépense n’auraient pas permis de maintenir l’éventail actuel de capacités. Il fallait choisir de dépenser davantage pour la défense ou s’attendre à ce qu’elle en fasse moins ». Après avoir examiné « l’environnement régional de l’Australie ainsi que les intérêts et les objectifs stratégiques, il était clair que le gouvernement ne pouvait pas raisonnablement envisager de réduire les capacités militaires. Mais nous étions aussi conscients que la simple promesse de plus d’argent ne résoudrait pas le problème. Il nous fallait aborder la planification de défense différemment. » L’élément principal de cette nouvelle approche est le plan de capacité de défense (DCP), un programme détaillé et chiffré s’étendant sur dix ans qui « donnera à l’ADF des buts précis à long terme pour son développement et les fonds nécessaires pour les atteindre ». Un observateur mentionne que le DCP « permettra finalement aux directeurs de projets de défense et aux participants de l’industrie de planifier avec davantage de précision l’acquisition de biens d’équipement, depuis l’achat d’un système jusqu’à la fin de son cycle de vie ». Il prévoit une augmentation budgétaire annuelle d’environ 3 p. 100 en termes réels au cours des dix prochaines années et une augmentation du nombre des membres de la force régulière, qui passera de 51 500 à 54 000. Le programme d’acquisitions de la force navale prévoit au moins trois vaisseaux de lutte antiaérienne, de nouveaux navires patrouilleurs, des bâtiments de soutien, des navires d’assaut amphibie et l’amélioration des frégates de classe ANZAC et des sous-marins de classe Collins; celui de la force aérienne prévoit plus de 100 nouveaux aéronefs de combat pour remplacer les F/A-18 et les F-111, quatre aéronefs de détection lointaine et de contrôle, des avions ravitailleurs de la nouvelle génération, la remise à neuf des C-130H et le remplacement ou la remise à neuf des P-3C. Le programme d’immobilisations de l’armée prévoit de 20 à 24 hélicoptères de reconnaissance blindés, plus d’hélicoptères de transport de troupes, l’amélioration des M113, un successeur pour le missile surface-air Rapier, 20 systèmes de mortier de 120 mm Printemps 2001 ● Revue militaire canadienne montés sur VBL, des véhicules aériens tactiques sans pilote et de nouveaux camions, de l’équipement de vision de nuit et des systèmes de communications. Organisée autour de trois brigades et d’un groupe d’opérations spéciales, l’Armée « sera capable de maintenir une brigade en opération pendant de longues périodes tout en ayant au moins un groupe-bataillon disponible pour être déployé ailleurs ». Le rôle de la Réserve sera changé, « passant de la mobilisation aux fins de réponse à des menaces lointaines au soutien et à l’exécution de types d’opérations militaires contemporaines auxquelles l’ADF pourrait participer. La Réserve fournira de plus en plus les capacités que les forces permanentes ne possèdent pas ou qui sont l’apanage d’un petit nombre de militaires. » Le livre blanc est un soulagement pour de nombreux membres de l’ADF, mais il ne fait pas l’unanimité. Le correspondant australien du Jane’s Defence Weekly, par exemple, a critiqué son ambiguïté en matière d’équipement et l’insuffisance des fonds proposés. Certains ont aussi fait part de leurs inquiétudes au sujet de la réduction apparente des capacités de l’armée de mener la guerre. « Grosso modo, dit le livre blanc, si l’Australie était appelée à contribuer à une coalition pour des opérations majeures, il est plus probable qu’elle ferait appel aux forces aériennes ou navales plutôt qu’aux forces terrestres. Les forces aériennes et navales que nous entraînons pour défendre l’Australie offriront au gouvernement diverses manières de contribuer aux coalitions au cours d’opérations majeures contre des adversaires bien armés. Nos forces terrestres seraient idéales pour contribuer à des opérations mineures, y compris l’imposition de la paix, le maintien de la paix et de nombreux types d’opérations humanitaires. De telles opérations sont bien plus probables que des opérations majeures; elles mettraient l’accent sur des niveaux de protection et de puissance de tir correspondant à notre propre environnement, plutôt que sur les capacités de blindés lourds nécessaires pour une guerre continentale majeure. » Il est évident que toutes les initiatives du livre blanc ne sont pas applicables ni souhaitables dans le contexte canadien, mais la candeur avec laquelle le livre blanc reconnaît qu’il y a un écart entre les engagements et les ressources et son désir d’améliorer les capacités de défense clés méritent des éloges. Il est également réconfortant de voir qu’il ne réduit pas la profession des armes à une équation commerciale. Les « énoncés de vision » et les « énoncés de mission » y brillent par leur absence. Certes, il précise un rôle pour l’ADF, mais avertit que « les réformes qui sont [...] appropriées dans le civil [...] conviennent peut-être beaucoup moins dans le contexte militaire. Nous sommes très conscients de la nature unique du service militaire et de la nécessité de garantir que les mesures de réforme ne nous la fassent pas perdre de vue. » Le livre blanc reconnaît aussi le besoin en « initiatives de perfectionnement des officiers supérieurs », mais il insiste sur le fait que « l’objectif est de veiller à ce qu’il règne une “culture de leadership” efficace, et non une “culture bureaucratique” ». Voilà certes une vision! Martin Shadwick enseigne la politique canadienne de défense à l’université York. Il a été rédacteur de la Revue canadienne de défense. 53