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AUDIOVISUEL
Par Jean-Marie Lafon-Delpit
CONNAISSANCE D'UN AUTEUR
Corentin Le Gall
dence, ma passion actuelle pour le
diaporama remonte à ces bricolages de
jeunesse. En 1975, je découvre enfin le
diaporama et tout le matériel adéquat,
au Photo-Club de Saint-Pierre-du-Mont,
dans les Landes. Je pense bien à eux et
je les salue, car ils m'ont beaucoup appris.
Lors des galas de ce Club, j'ai eu
l'occasion de passer « au casque » les
montages de quelques grands noms,
parmi lesquels Jacques Ramadier,
André Parmentier, Roger Coste, et j'en
oublie. J'ai ainsi fait mes universités avec
« Liberté », « L'indien », « Mr Winter » ou
encore « La place à 2 francs ». Leurredécouverte sur le site du DCCN m'a
beaucoup ému.
Notre
interview
est
consacrée
à
Corentin Le Gall, qui a obtenu le
quatrième prix du Concours National
Audiovisuel 2007 avec « JFK ».
Jean-Marie Lafon-Delpit :
Bonjour Corentin, je te félicite pour ce
succès qui doit te faire très plaisir.
Corentin Le Gall: Effectivement, je suis
l'heureux papa de JFK, ef je profite de l'occasion qui m'est offerte ici pour remercier
l'ensemble des spectateurs (Clubs, organisateurs de galas, jurys...) qui lui ont réservé
un accueil chaleureux. Je le reconnais, c'est
très flatteur et très encourageant.
Jean-Marie Lafon-Delpit : Avant de
parler plus en détail de JFK, j'aimerais
que tu te présentes.
Corentin Le Gall : Originaire de Douarnenez,
dans le Finistère, ma vie professionnelle
m'a amené, après maints tours et détours, à
poser mes sacs dans la banlieue toulousaine
où j'ai rejoint le Photo-Club Airbus.
Jean-Marie Lafon-Delpit : Tu es
l'auteur de nombreux montages.
Corentin Le Gall : En 1977, je réalise
mon premier diaporama, le récit d'une
traversée du Sahara en 4L. Suivront,
jusqu'à aujourd'hui, une trentaine
d'autres réalisations parmi lesquelles
des reportages qui me tiennent à cœur : «
Camel Race », réalisé pendant mon
expatriation au Koweït et au Qatar (19881992) avec une entreprise française, et
plus près de nous « L'archipel de la mer
blanche ». // en existe d'autres, notamment les chapitres Russie et Mongolie
de « La route au long cours » (une longue
virée à moto), mais leur durée dépassant
12 minutes, leur visibilité est moindre
dans le petit monde du diaporama. Les
diaporamas « Toulous'âneries », «
Instants d'années » ef « Au-delà de cette
limite votre ticket n'est plus valable »,
réalisés en équipe avec mes deux
complices de Club, Daniel Devoldere et
Bernard Carayon, demeureront de grands
moments.
Jean-Marie Lafon-Delpit : JFK est
un montage fait uniquement à
base de dessins.
Corentin Le Gall: Le dessin présente
un avantage, il offre la possibilité de
mettre en images tout ce qui vous
passe par la tête. Mon premier
diaporama dessiné, « Le temps qui
m'était imparti est écoulé », esf né en
1998. Il a été réalisé en argentique,
soit un dessin complet pour chaque
diapositive à l'écran. À cette même
époque, j'ai découvert Photoshop et
les immenses possibilités offertes par
les calques pour la réalisation de
diaporamas dessinés. Concernant
JFK., je vais parler ici de la technique,
tant il me paraît hasardeux d'évoquer
le contenu de l'histoire. JFK esf né
d'un texte que j'avais écrit sans
intention de le mettre en images. Ce
texte avait même participé à un
concours d'écriture. Quelques mots
en vrac (mère, mer, merci) ont démarré
une phrase. En tirant ensuite sur le
bout de la ficelle, le récit s'est
construit et, petit à petit, l'histoire a
pris forme. Aucun scénario n'existait
au départ, surtout pas là fin. Mais à
un moment, il est apparu raisonnable
de mettre un terme à la dérive de
JFK, sinon il revenait à son point
géographique de départ.
La deuxième étape a été la
réalisation des dessins, je devrais dire
les éléments de dessins, car aucun
d'entre eux n'existe dans sa totalité.
En effet, les éléments de chaque
image ont été dessinés séparément,
détourés et assemblés grâce à la
technique
Jean-Marie Lafon-Delpit : Comment estu arrivé au diaporama ?
Corentin Le Gall : Mon premier appareil
photo a été, en 1968, un Instamatic avec
lequel j'ai découvert la diapositive. Pendant
les projections, je passais des morceaux
musicaux préalablement enregistrés sur un
magnétophone. Je me souviens même avoir
dessiné, à cette époque, des portraits en
négatif sur des morceaux de papier transparent, taillés au format 6x6, que je glissais
ensuite dans le porte-film de l'agrandisseur
du club du lycée.
Je passe rapidement sur mes essais, guère
convaincants, de jeune électronicien pour
construire des synchronisateurs de projecteurs et des tables de mixage. De toute évi-
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PHOTOGRAPHIE - AVRIL 2008
« Entreprise »
dans la réalisation d'un diaporama,
quels seraient-ils ?
Corentin Le Gall : Réaliser son premier
diaporama sans se poser de questions,
à l'instinct. Et le montrer, surtout le
montrer. Les critiques des spectateurs
sont riches d'enseignement pour qui
sait écouter. La capacité d'écoute est
une source de progression.
Jean-Marie Lafon-Delpit : Comment
vois-tu l'avenir de cette discipline ?
Corentin Le Gall : Le monde du
diaporama est en pleine mutation : va-til
continuer
avec
ses
logiciels
spécifiques ou utilisera-t-il bientôt les
logiciels vidéo ? Je n'ai pas la réponse,
dont je relativise l'importance car elle
est purement technique. Mais ce dont
je suis sûr, c'est que dans l'un et l'autre
cas, des passionnés continueront à
manipuler et à marier des images fixes
et des sons pour offrir au public des
spectacles
que
nous
appelons
aujourd'hui diaporamas. Je serai de
ceux-là.
« Pyramide »
des calques. J'ai ainsi peint à l'aquarelle
des ciels, des sols, des éléments de paysages ou de personnages. Cette technique
de l'assemblage permet de modifier un élément d'une image, sans refaire à
l'identique l'ensemble du dessin. Ce qui est
techniquement impossible, surtout avec
l'aquarelle. Chaque image vue à l'écran
existe donc par la superposition d'une série
de calques. Par exemple, la dernière
séquence a nécessité 91 calques
différents, qui ont permis de construire,
sur un fond (le cimetière), 119 images qui
se succèdent pendant les deux dernières
minutes. Est-ce toujours du diaporama ?
Techniquement parlant, la vitesse de
défilement des images sur l'écran n'atteint
pas celle de la vidéo. La réponse à la
question est donc clairement : oui.
que. Soyons honnêtes, ce n'était pas le cas
en argentique.
• La diffusion des diaporamas numériques
est très facile et de ce fait leur confère une
visibilité inconnue en argentique.
Jean-Marie Lafon-Delpit : Qu'est-ce qui
te motive, qui te donne envie de réaliser
un diaporama ?
Corentin Le Gall: Ma motivation est de
raconter une histoire. L'écrit est ma
matière première. Je pourrais me passer
du son et de l'image, pas de l'écrit.
Jean-Marie Lafon-Delpit : Si tu avais des
conseils à donner aux personnes qui
aimeraient bien, mais n'osent pas se
lancer
Jean-Marie Lafon-Delpit : Merci
Corentin de t'être prêté à ce petit
exercice, je te laisse conclure.
Corentin Le Gall: Le diaporama est un
moyen d'expression. Les auteurs ont à
leur disposition un écran vierge et des
enceintes acoustiques muettes. À eux
de combler ce vide avec leur créativité
et d'attirer l'attention du spectateur.
Sans retenue quant au choix du sujet
ou à l'utilisation des outils à leur
disposition.
Bon vent à tous.
Propos recueillis par
Jean-Marie Lafon-Delpit,
Commissaire audiovisuel UR17
Jean-Marie Lafon-Delpit : et les bruitages...
Corentin Le Gall: Le bruit de la dune qui
entre en vibration sous la 2CV est un enregistrement réalisé au Qatar en 1991. Les
chanteurs qui se cachent pour chanter sous
un pont, par mesure de sécurité, est un
fait réel, enregistré à Ispahan en 2001, et le
bruit de la circulation a également été
enregistré dans cette ville. Le camion de
vodka est un camion russe de marque
Kamaz enregistré à Kansk, en Sibérie, en
2005, et le feu d'artifice du final (sans
accompagnement musical, ce qui devient
rare) a été enregistré, en 2004, dans la
mine à ciel ouvert de Decazeville, effet
sonore garanti.
Jean-Marie Lafon-Delpit : L'arrivée du
numérique t'a réellement permis de réaliser ce type de montage, en argentique,
c'était chose impossible.
Corentin Le Gall: Le numérique a bouleversé le monde du diaporama argentique.
Je relève dans ce changement deux
points extrêmement positifs qui contribuent
largement à son développement actuel : •
Le diaporama numérique est accessible
au plus grand nombre pour un coût modi-
« Sumer »
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