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Chroniques bleues
21 août 1985 : France-Uruguay
samedi 21 août 2010, par Bruno Colombari
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Un an après l’Euro 84, les Bleus de Platini et Giresse accueillent l’Uruguay de Francescoli, champions d’Amérique du
sud. Un match éblouissant ponctué par deux buts de Rocheteau et Touré et une demi-douzaine d’occasions franches.
Le contexte historique
Deux ans après le décès du président de l’UEFA Artemio Franchi, la coupe intercontinentale des nations est créée en sa mémoire. Sa
première édition oppose l’Uruguay, vainqueur de la Copa America en 1983 et du Mundialito [1], à la France, championne d’Europe
l’année précédente. C’est donc un match officiel qui prend la place de la traditionnelle rencontre amicale jouée en août par les Bleus
contre un club européen [2]. L’année 1985 est décisive pour l’équipe de France qui n’a pas encore assuré son billet pour le Mexique,
à cause de deux sorties printanières mal négociées en Yougoslavie (0-0) et en Bulgarie (0-2).
Le match
Les Bleus s’alignent sans trois titulaires dans le secteur défensif : l’arrière gauche Amoros, le défenseur central Battiston et le
relayeur Tigana. Bibard, Le Roux et Tusseau les remplacent. Par ailleurs, Platini n’a pas repris la compétition avec la Juventus et
reste sur le cauchemar du Heysel trois mois plus tôt [3]
D’entrée pourtant (3e), il sert parfaitement Rocheteau dans la course qui efface le gardien Rodriguez et marque dans le but vide. La
première demi-heure est largement dominée par les Bleus, malgré le jeu très dur des Uruguayens qui, débordés, découpent tout ce
qui passe. L’attaquant José Touré prend un maximum de coups et l’arbitre argentin M.Gnecco semble décidé à ne rien siffler.
Après un quart d’heure de répit, les Bleus remettent le couvert en début de deuxième mi-temps et marquent une nouvelle fois par
Touré (56e). C’est le début de la noyade uruguayenne et du festival français, marqué par un coup-franc de Platini sur le poteau
(59e), une faute suspecte sur Giresse dans la surface (71e), une offrande de Giresse pour Touré seul devant le gardien qui glisse à
Rocheteau signalé hors-jeu à tort (76e), une percée Giresse-Platini plein axe, qui sert Touré qui ne parvient pas à lober le gardien
(85e), une volée du gauche de Platini après un retourné de Fernandez (87e) et une tête décroisée de Rocheteau (89e). Fermez le
ban !
La séquence souvenir
Le deuxième but français est une parfaite combinaison d’intelligence tactique et de maîtrise technique. Suite à un coup-franc
défensif, Bossis sert Bats qui lui rend le ballon. Bossis donne à Ayache, lequel glisse à Tusseau qui passe à Touré, en position d’ailier
gauche. Le Nantais évite un tacle assassin et se replie vers la ligne centrale. Ayache lui remet le ballon, Touré élimine un Uruguayen
sur un amorti orienté de la poitrine, puis un deuxième sur un déhanchement, rentre dans l’axe, sert Platini qui glisse à Fernandez,
lequel ne touche pas le ballon et le laisse à Giresse. A 40 mètres des buts, le Bordelais lève la tête et sert Touré d’une merveille de
passe lobée. Ce dernier emmène la balle d’un nouvel amorti orienté de la poitrine et dans l’enchaînement bat le gardien aux six
mètres d’un tir piqué du droit. L’action a duré 34 secondes, dix passes, huit joueurs et vingt-quatre touches de balle.
L’adversaire à surveiller
Enzo Francescoli n’a que 23 ans quand il joue contre la France, mais déjà une certaine réputation acquise avec le club argentin de
River Plate, où il a été désigné meilleur joueur sud-américain en 1984. Contre les Bleus, il a peu l’occasion de faire admirer sa
technique très pure tant les Uruguayens sont occupés à faire du petit bois. De fait, hormis un beau coup-franc en première période,
qu’il brosse au-dessus de la cage de Bats, on le voit moins que le Lensois Venancio Ramos ou que Miguel Bossio. Dommage, car en
fin de match, la Celeste montre que son jeu à une touche de balle aux abords de la surface n’a rien à envier au toque argentin.
Francescoli rejoindra la France un an plus tard, à Paris (Racing Matra de 86 à 89) et à Marseille (de 89 à 90) où il enflammera
l’imagination du jeune Zinedine Zidane.
Le Bleu du match
José Touré ne compte que six sélections en deux ans lorsque Henri Michel lui fait à nouveau confiance contre l’Uruguay, après deux
matches sans but contre la Yougoslavie et la Bulgarie. Bonne pioche : à 24 ans, il éclate enfin dans un match très offensif où Platini,
à court de forme, n’a pas les jambes pour jouer devant le but. En position d’attaquant gauche, celle qu’occupera plus tard Thierry
Henry à qui son style fait penser, Touré réussit une partie magnifique, provoque, élimine, construit, et aurait pu réussir un triplé s’il
avait tenté sa chance seul devant le gardien à la 76e et s’il avait mieux ajusté son lob dix minutes plus tard. Blessé en mars 1986
contre l’Inter avec Nantes, il manque la coupe du monde au Mexique où il aurait certainement apporté quelque chose devant. Sa
chance passée, il ne confirmera jamais les promesses entrevues et ne comptera au total que 16 sélections et 4 buts chez les Bleus.
La petite phrase
A la mi-temps du match, Olivier Rey (celui de But, mais avec un quart de siècle de moins) tend le micro à Jacques Georges, alors
président de l’UEFA (le Platini de l’époque, genre notaire de sous-préfecture). Après le drame du Heysel, des mesures sont prises
pour renforcer la sécurité dans les stades. « Nous n’avons pas la prétention de penser qu’après cette réunion il ne se passera plus
rien, mais nous pensons qu’en faisant ainsi des réunions, les gens se connaîtront mieux et s’aimeront mieux et se respecteront
mieux. » Amen.
La fin alternative
Après son triplé, José Touré est sollicité par le Milan AC où il sera rejoint par Ruud Gullit et Marco van Basten deux ans plus tard.
Avec les Bleus, il remporte la coupe du monde 1986, est sacré ballon d’or et se lance dans la chanson à partir de 1995. En 2010, il
est toujours la personnalité préférée des Français. Yannick Noah, un ancien tennisman, arrondit quant à lui ses fins de mois dans des
émissions débiles sur des radios périphériques. Cruel destin.
Le match entier
Notes
[1] Tournoi regroupant les champions du monde, moins l’Angleterre et plus les Pays-Bas, joué à Montevideo début janvier 1981.
[2] Et de ce fait non recensée dans les statistiques de l’équipe de France.
[3] La Juventus avait battu Liverpool en finale de la coupe d’Europe des clubs champions, mais la rencontre avait été éclipsée par la mort de 39
supporters italiens piétinés lors d’une charge des hooligans anglais. Platini avait marqué le seul but de la rencontre.

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