9 mars 2014 à Metz
Transcription
9 mars 2014 à Metz
MÉMORIAL DES FRANÇAIS RAPATRIÉS D’AFN ET D’OUTRE-MER CIMETIÈRE DE L’EST À METZ (MOSELLE) CÉRÉMONIE DE DEUIL ET DE RECUEILLEMENT DU 9 MARS 2014 À 10H00 Allocution de Madame Danielle Pister-Lopez, Vice-présidente du Cercle algérianiste, section de Champagne-Grand Est, membre de l’Amicale, Maître de Conférences honoraire à l’Université de Lorraine. Mesdames et Messieurs les Autorités Civiles et Militaires, Mesdames et Messieurs les Présidents des Associations Patriotiques et du Souvenir Français, Mesdames et Messieurs les Porte-drapeaux, Mesdames, Messieurs, Chers amis, Chers Compatriotes, Le Président, les Membres et les sympathisants de l’Amicale des Pieds-Noirs et l'association des harkis de Moselle, représentée par M. Amanzougarenne, vous souhaitent la bienvenue et vous remercient de bien vouloir vous associer à cette cérémonie qui les réunit chaque année, chaque mois de mars, devant ce monument érigé à la mémoire des victimes civiles et militaires tombées sur les territoires et départements d’outre-mer, afin de commémorer les 19 et 26 mars 1962 qui ont marqué le basculement tragique de leur destin : - le 19 mars 1962, en signant les pseudos Accords d’Evian avec une organisation terroriste, la France abandonnait les habitants de l’Algérie au FLN qui, depuis plus de 7 ans, s’en prenait indifféremment aux communautés musulmane et européenne, pour imposer partout sa loi par les pires violences. La France accéléra le retrait de ses troupes, laissant l’A. L. N. intensifier ses exactions : les historiens les plus sérieux reconnaissent aujourd’hui qu’il y a eu plus de victimes civiles, en Algérie, entre le 19 mars et la célébration officielle de l’indépendance, le 5 juillet 1962, que depuis le 1 er novembre 1954 et la prétendue fin des combats, le 19 mars 1962. Les scènes d’horreur se multiplièrent : ceux qui tombèrent sous les coups des terroristes, furent enlevés, saignés, violés, mutilés, massacrés de mille manière, parfois juste pour s’emparer d’un bien quelconque, comme une voiture, souvent pour de sordides règlement de compte, mais avant tout pour précipiter la fuite des Européens et mettre le pays en coupe réglée. La journée la plus terrible, à cet 1 égard, fut le 5 juillet 1962 où s’organisa, dans les rues d’Oran, une chasse à l’homme au cours de laquelle environ 700 personnes, dont le seul crime était d’être européens, disparurent. - le 26 mars 1962, rue d’Isly à Alger, c’est l’armée française qui tira délibérément sur une foule pacifique et désarmée d’hommes, de femmes et d’enfants venus manifester leur attachement à la France et exprimer leur crainte d’être abandonnés par elle. Après plus d’un demi-siècle, leurs proches attendent toujours de savoir pourquoi ces Français sont morts, doublement victimes d’une lâche capitulation française et de la traîtrise des nouvelles autorités algériennes qui, au contraire de la France, n’ont jamais respecté les prétendus Accords d’Evian. Aucun gouvernement, de droite ou de gauche, n’a jamais exprimé officiellement le moindre mot de compassion à l’égard des Rapatriés, ou reconnu la responsabilité de la France dans leur drame. Longtemps les Harkis ont été traités, par les Algériens, mais aussi par les Français, en parias traîtres à leur patrie. Depuis quelques années, les gouvernements français ont rendu leur dignité à ces soldats fidèles. Mais ils restent toujours privés, par l’Algérie, du droit élémentaire de revoir leur terre natale. Comme si cela ne suffisait pas au désespoir des exilés que nous sommes dans notre propre pays, le Président Hollande a cédé aux pressions de partis et d’associations de Gauche pour reconnaître officiellement, en 2013, la date du 19 mars 1962 comme celle de la fin de la guerre d’Algérie, confirmant le même déni des réalités que les municipalités qui ont débaptisé places et rues de leurs cités pour immortaliser une défaite, non pas militaire, mais morale et politique, dont on mesure aujourd’hui combien elle fut destructrice de l’âme de la France. Chaque année qui passe alourdit l’incompréhension et l’amertume des Pieds-Noirs. En février, les médias français ont salué le recours à la justice internationale du Parlement ukrainien, contre le Président Ianoukovitch, pour avoir fait tirer sur son peuple et provoqué la mort de 80 manifestants sur la place Maïdan à Kiev. Il y a eu plus de 80 morts rue d’Isly, le 26 mars 1962. Dans les jours précédents, Bab-el-Oued, quartier des Européens les plus pauvres d’Alger, avait subi un bombardement de l’aviation militaire française. Sur l’ordre de qui ? Toute enquête est impossible. Les archives sont fermées jusqu’en 2062 ! Les martyrs de Kiev ont eu droit à un hommage national, sur le lieu même du drame, tandis que les Algérois furent enterrés clandestinement, à l’aube, sans témoins. Un chœur unanime a approuvé les interventions de la France au Mali, puis en Centre-Afrique, pour mettre fin aux exactions terroristes et empêcher les massacres intercommunautaires. Le 5 juillet 1962, l’armée française était sur place à Oran : elle n’a porté aucun secours aux Français tués sous ses yeux, avec la consigne de ne pas ouvrir aux malheureux agrippés aux grilles des casernes. Qui a pris une telle décision criminelle ? 52 ans de silence opposé à nos légitimes questions. Alors que les Pieds-Noirs se sont intégrés remarquablement en métropole, qu’ils ont été d’une loyauté absolue à l’égard d’une patrie qui s’est comportée à leur égard comme la pire des marâtres. Ils n’imaginaient pas devenir, aujourd’hui, la cible d’intellectuels et d’associations prétendument antiracistes. Le 8 juillet 2013, un universitaire, Thomas Guénolé, professeur à Sciences-Po, déclarait, sur FranceInter, que si les municipalités du Midi se montraient plus actives pour démanteler les camps de Roms sur leur communes, c’était en raison de la présence, dans cette partie du pays, d’un grand nombre de Pieds-Noirs « dont on connaissait le racisme ». Cette accusation ne reposait sur aucun fait précis, mais sur un préjugé essentialiste, stigmatisant l’ensemble d’une communauté, sans distinguer entre les individus. C’est la définition même du racisme. Le Cercle algérianiste, première association nationale représentative des Pieds-Noirs, a déposé en leur nom une plainte contre cet individu, déclarée irrecevable par le Parquet sous prétexte que les Pieds-Noirs n’appartiennent pas à une communauté « protégée par la loi ». Seraient-ils exclus du droit commun ? 2 Désormais les attaques se multiplient. Une étude du Conseil Représentatif des Associations Noires (C. R. A. N.), sur l’efficacité de la lutte contre le racisme dans les 50 plus grandes villes de France constate que les dix villes les plus mal notées appartiennent à la région PACA. Le président du CRAN en déduit que la forte présence des Français d’Algérie explique cette situation, ainsi que la montée du vote FN. Négligeant au passage l’analyse des derniers scrutins prouvant que l’électorat ouvrier s’est détourné massivement de la Gauche pour voter FN, toutes régions confondues, et qu’une des communes qui a voté récemment presque en totalité pour le FN, et dont aucun habitant n’est immigré ou Pied-Noir, se situe en Alsace. Les Pieds-Noirs seraient donc les principaux empêcheurs du « vivre-ensemble », si cher à certaines organisations qui ne cessent pourtant d’ostraciser et d’exclure de la communauté nationale, sans autre forme de procès, une partie de leurs concitoyens. En fait, on revient 52 ans en arrière, quand certains hauts responsables comme Louis Joxe, ministre des Affaires algériennes et Gaston Deferre, députémaire de Marseille, considéraient les Pieds-Noirs comme de dangereux fascistes qu’il fallait rejeter à la mer. Faute de pouvoir célébrer la réussite d’une décolonisation qui s’est faite au profit exclusif d’une nomenklatura qui a ruiné l’Algérie et poussé ses enfants à émigrer, il faut encore et toujours trouver des boucs émissaires chez les Pieds-Noirs. Les charger de toutes les erreurs commises par la France pendant 132 ans n’a pas suffi à épuiser leur vindicte. Que feront ces bien-pensants, quand le temps faisant son œuvre, cette communauté aura disparu ? Faute de « coupables naturels » à ostraciser, ces groupuscules haineux, et les intellectuels qui les soutiennent, finiront par s’entredévorer dans un monde devenu, sûrement, le meilleur possible, puisque débarrassé des empêcheurs de penser en rond que nous sommes. Aussi, Mesdames et Messieurs, tant que nous en aurons la force, nous continuerons à nous adresser aux forces vives du pays que vous représentez, espérant qu’un jour vous nous entendiez, avant qu’il ne soit trop tard, et que la France cesse de renier sa devise : -Liberté : où est sa liberté de pensée, elle qui se couche devant les groupes de pression de toute sorte ? -Egalité : où est la justice due à chacun quand on refuse de la rendre aux Pieds-Noirs et aux Harkis, depuis plus d’un demi-siècle ? -Fraternité : où la trouver quand on est victime, sans raison, de discours de rejet, depuis 1962 ? Nous espérons pourtant avoir encore des motifs de dire : vive la France, une France qui redonnerait à tous ses enfants l’envie de l’aimer et d’habiter son territoire. C’est dans cet espoir, et en toute convivialité, seule qualité qu’on nous concède parfois, que nous vous invitons tous, après la cérémonie, au pot de l’Amitié à la Maison du Rapatrié, 18, Place de l’Hôtel de Ville à Woippy. Metz le 9 mars 2014 Danielle PISTER-LOPEZ, Emile JUAN, Président d’honneur, Daniel BOLUFER, Président de l’Amicale des Pieds-Noirs de Moselle 3 4