Réseaux de capteurs sans fil : fiabilité, sobriété et longue distance
Transcription
Réseaux de capteurs sans fil : fiabilité, sobriété et longue distance
A P P L I C A T I O N Communication Réseaux de capteurs sans fil : fiabilité, sobriété et longue distance peuvent faire bon ménage Avec l’émergence de l’Internet des objets, mesurer et instrumenter ce qui n’a jamais été mesuré auparavant est désormais à portée de main. Encore faut-il disposer de technologies de réseaux de capteurs sans fil adaptées. Explications de Linear Technology, pionnier des réseaux maillés à saut de canal avec synchronisation temporelle TSCH grâce à sa division spécialisée Dust Networks. AUTEUR Jonathan Simon, directeur Ingénierie des systèmes, Dust Networks Product Group, Linear Technology. Q u’il s’agisse de surveiller une infrastructure vieilliss ante, comm e par exemple un pont, un tunnel ou une ligne à haute tension, ou de fournir des informations en temps réel sur le stationnement et la circulation automobiles, les applications de l’Internet des objets nécessitent des réseaux de capteurs sans fil (WSN) capables d’offrir des performances similaires à celles d’un réseau câblé, tout en étant faciles à installer. Ces WSN doivent pouvoir être mis à l’échelle afin d’y ajouter un grand nombre de nœuds sans fil ou « motes », afin notamment de couvrir de longues distances. Les clés d’une utilisation à grande échelle Pour permettre leur déploiement à grande échelle, les WSN doivent être faciles à installer et capables de fonctionner de façon fiable pendant de nombreuses années, et souvent pendant plus de dix ans. Cela n’est toutefois possible que si les WSN répondent à un certain nombre de critères clés. ● Capacité à installer un capteur n’importe où : les points de mesure doivent être situés là où la détection est optimale, ce qui n’est pas nécessairement là où la communication est optimale. Aussi les nœuds de capteurs sont-ils souvent placés dans des endroits où l’accès aux infrastructures de communication ou d’alimentation électrique n’est pas toujours aisé et se trouvent-ils souvent dans des environnements difficiles pour les communications RF (par exemple, près du sol, dans des tun- 24 / L’EMBARQUÉ / N°8 / 2014 nels, sous des voitures ou profondément enfouis au sein des équipements). ● Entretien minime : le réseau doit être pratiquement autosuffisant en matière d’entretien et toute intervention de maintenance (comme le remplacement d’une pile) ne doit pas nécessiter qu’un technicien se déplace spécialement. Pour les applications de stationnement intelligent par exemple, là où les capteurs sont insérés sous le goudron d’une rue, l’utilisation de modèles à piles n’est permise que si celles-ci peuvent être remplacées à la fréquence des travaux d’entretien de la voirie, qui n’ont lieu que tous les 5-7 ans. Dans d’autres applications, les WSN peuvent être déployés pour une durée de plus de dix ans. ● Fiabilité des communications : les communications avec les capteurs doivent être fiables, même lorsqu’ils sont situés dans un environnement difficile pour les communications RF. ● Echelonnabilité : un réseau doit s’adapter à une variété de déploiements similaires mais tous différents, qui couvrent un éventail relativement large de tailles de réseau (nombre de « motes » et couverture), de « profondeur » (nombre de sauts radio séparant un nœud d’un point de sortie des données), de volume de trafic de données, etc. Construire un réseau prédictible sur un support prédictible Le critère de basse consommation est difficile à satisfaire sans compromis : plusieurs approches sont possibles pour réaliser des réseaux de capteurs sans fil à basse consommation. Certains réseaux sans fil tels que ZigBee ne garantissent une basse consommation qu’au niveau des dispositifs de détection à la périphérie du réseau, mais ils nécessitent une alimentation câblée pour les nœuds de routage. D’autres réseaux introduisent une forme de rapport cyclique dénommé « balisage » (beaconing), pendant lequel le réseau complet est mis en veille pendant des périodes de temps prolongées, mais ils sacrifient la disponibilité et la capacité totale du réseau. Cependant, le type d’applications envisagées par l’Internet des objets nécessitent de grands réseaux de capteurs sans fil, capables de publier les données à intervalles réguliers. Le défi est donc d’assurer la basse consommation sans sacrifier la fiabilité ou la disponibilité du réseau. Par ailleurs, les ondes radio (RF) sont un support de communication imprédictible. Contrairement aux communications câblées, où le signal est protégé du monde extérieur par le câblage, les ondes RF se propagent dans l’air qui nous entoure et interagissent avec l’environnement extérieur. D’autres sources de transmissions RF peuvent causer des interférences actives. Encore plus fréquemment, sous l’effet des évanouissements (fading) multichemins, le message RF peut être atténué par son propre signal qui revient déphasé après réflexion sur les surfaces alentour. Les utilisateurs de téléphones portables en font l’expérience tous les jours, quand la qualité de la réception, médiocre à l’endroit où ils se tiennent, s’améliore quelques cen- Communication A P P L I C A T I O N timètres plus loin. De plus, les d’émetteurs-récepteurs pour la 1 DIVERSITÉ DE CHEMIN ET DE FRÉQUENCE diversité de fréquence. Avec un effets du fading multichemin réseau TSCH, chaque échange changent au cours du temps, Si la communication échoue le long du chemin fléché en vert, le nœud D effectue une nouvelle tentative sur le chemin fléché de paquet effectue des sauts de au fur et à mesure que les sur- en violet, sur un autre canal radio.. canal pour échapper aux inévifaces réfléchissantes alentour tables interférences RF et au (par exemple les gens, les voifading. De plus, des transmistures, les portes) bougent. Il en sions multiples entre des paires résulte, finalement, que chaque de dispositifs peuvent se procanal RF voit la qualité du duire simultanément sur diffésignal transporté varier de rents canaux, ce qui accroît la façon importante au cours du bande passante globale du temps. Néanmoins, comme les réseau. effets se font sentir différem● Diversité totale de chemin et ment pour chaque canal, ils peuvent être minimisés par des de fréquence : chaque disposisauts de canal permettant la tif a accès à des chemins de diversité de fréquence. La diffitransmission redondants pour culté réside alors dans le fait pallier aux interruptions de que les WSN doivent permettre communications dues aux les sauts de fréquence dans des interférences, aux obstacles réseaux de grande taille où une physiques ou au fading multitransmission peut effectuer des sauts tif voisin. Mais surtout, puisque chemin. Si la transmission d’un multiples entre nœuds. paquet échoue sur un chemin, un chaque nœud connaît le moment où «mote» va automatiquement réesson réveil a été planifié, il est toujours Les réseaux maillés sayer sur le chemin disponible suidisponible pour pouvoir relayer l’inà saut de canal avec vant et sur un canal RF différent (voir formation provenant de ses voisins. synchronisation temporelle figure 1). Contrairement à d’autres Ainsi, les réseaux TSCH se caractétechnologies avec maillage, un Les réseaux de capteurs sans fil basse risent souvent par des rapports cycliréseau TSCH ne nécessite pas de rouconsommation fiables sont devenus ques inférieurs à 1 % tout en mainteteurs alimentés sur le secteur et de une réalité avec Dust Networks/Linear nant le réseau complètement mécanisme de redécouverte de cheTechnology, le pionnier des réseaux disponible. De plus, puisque chaque min, souvent chronophage. maillés à saut de canal avec synchro- transaction de paquet est planifiée, il Les réseaux basés sur la technologie nisation temporelle (Time Synchro- n’y a pas de collisions entre paquets TSCH sont maintenant déployés nized Channel Hopping ou TSCH) et le long du réseau dans un réseau avec succès dans des applications ils ont fait leurs preuves dans les envi- TSCH. Les réseaux peuvent être pour le stationnement intelligent, la ronnements les plus difficiles. TSCH denses et à échelle modulable sans surveillance énergétique des centres est déjà considéré comme un élément être entravés par la production d’aude données ou les usines. De nomde base des normes industrielles sans to-interférences RF. breuses applications telles que la fil existantes, tels que WirelessHART ● Saut de canaux par paires : la synsurveillance de pipelines, la surveil(CEI 62591), et se présente comme chronisation temporelle permet le lance structurelle de ponts et de tunune contribution précieuse aux saut de canal sur chaque paire normes émergentes basées sur le protocole IP régissant les réseaux de cap 2 UN RÉSEAU À GRANDE PROFONDEUR DE SAUTS teurs sans fil. Les « motes » en vert se trouvent à la portée d’émission du « mote » 50. Dans un réseau TSCH, tous les nœuds ont une perception com1 mune du temps, exacte à quelques dizaines de microsecondes près dans 2 tout le réseau. La communication dans le réseau est organisée en créneaux temporels pour permettre un 3 8 11 47 50 53 99 échange de paquets à basse consommation, des sauts entre canaux et Manager 4 9 12 48 51 54 100 une diversité de trajectoire totale. ● Echange de paquets à basse consommation : l’utilisation du TSCH 5 10 13 49 52 55 101 permet aux «motes» d’être mis en veille à ultrabasse consommation entre deux communications plani6 fiées. Chaque dispositif est actif uniquement s’il est en train d’envoyer un 7 paquet ou s’il est en mode réception d’un paquet provenant d’un disposiL’EMBARQUÉ / N°8 / 2014 / 25 A P P L I C A T I O N Communication FIABILITÉ DES DONNÉES D’UN RÉSEAU DE 100 NŒUDS AVEC UNE PROFONDEUR DE 32 SAUTS NOMBRES DE NŒUDS 100 ~1 paquet de données / 30 secondes pour chaque nœud DÉBIT D'ÉMISSION DES PAQUETS PROFONDEUR DE SAUTS 32 sauts NOMBRE DE PAQUET DE DONNÉES ENVOYÉS NOMBRE DE TRANSMISSIONS INDIVIDUELLES BRUTES (Y COMPRIS LES TENTATIVES MANQUÉES) PAQUETS PERDUS nels, de même que la surveillance de lignes à haute tension, mettent également à profit des WSN sur de longues distances. Pourtant la possibilité de déployer et d'entretenir un réseau sans fil basse consommation et fiable sur de telles distances implique des topologies réseau particulièrement exigeantes. Par définition, un réseau à « grande profondeur de sauts » signifie que les messages provenant des nœuds les plus éloignés doivent effectuer un grand nombre de sauts pour atteindre leur destination. Tout en permettant à un unique réseau de couvrir des zones géographiques étendues avec des émetteurs-récepteurs à relativement basse consommation, cette topologie soulève parfois un problème. Un réseau très étendu est-il capable de supporter un trafic régulier de données à partir de tous ses « motes », et d’y parvenir avec des délais de transit et une consommation d’électricité satisfaisants ? Etude de cas : un réseau maillé à grande profondeur de sauts Pour caractériser un tel réseau, un réseau de 100 « motes » avec une profondeur de 32 sauts a été construit et testé en utilisant un réseau IP SmartMesh de Dust Networks (voir figure 2). Chacun des 100 « motes » émet et envoie un paquet de données toutes les 30 secondes et s’attend à ce que chaque paquet soit reçu dans un délai de transit de 30 secondes (c’est-à-dire avant que le paquet suivant provenant du même nœud ne soit émis). Le réseau étendu est construit avec des dispositifs sans fil réels dans lesquels sept dispositifs (numérotés de 1 à 7) communiquent directement avec le gestionnaire de réseau. Les dispositifs 8 à 10 communiquent au travers des sept premiers « motes », et 26 / L’EMBARQUÉ / N°8 / 2014 17 millions sur 52 jours Plus de 400 millions. 0 (100% de fiabilité des données) tous les dispositifs restants (numérotés de 11 à 101) sont à portée des dispositifs identifiés par les trois numéros en-dessous et au-dessus de leur propre numéro d’identification. Par exemple, le dispositif 50 est à portée des dispositifs 47, 48, 49, 51, 52 et 53. Dans cette topologie, le nombre minimum de transmissions (ou sauts) nécessaires pour atteindre le dispositif 101 est de 32, bien qu’en pratique la plupart des paquets effectuent plus de 32 sauts. Au moment de la rédaction de cet article, ce réseau fonctionnait en continu depuis 52 jours. Au total, les 17 millions de paquets de données collectés ont nécessité plus de 400 millions de transmissions individuelles, à cause de la profondeur des sauts et des tentatives manquées (voir tableau). Aucun des 17 millions de paquets envoyés n’a été perdu, ce qui donne une fiabilité des données de 100 %. Environ 25 000 de ces paquets sont des « rapports de santé », des informations de diagnostic envoyées régulièrement par les nœuds en l’occurrence. Analyse des délais de transit et de la consommation Afin de surveiller les délais de transit, chaque paquet est horodaté au moment où il est émis par le « mote » capteur et une nouvelle fois au moment de sa réception par le gestionnaire. La distribution des mesures effectuées sur le réseau sur une période de 90 minutes est représentée figure 3. Comme on pouvait s’y attendre, les « motes » identifiés par les plus grands numéros et se trouvant les plus en profondeur dans le réseau affichent les délais de transit les plus longs avec une plus grande variabilité par paquet, le nombre de chemins possibles augmentant exponentiellement avec la profondeur. Malgré cela, les paquets de données provenant du « mote » le plus éloigné (ID 101) sont tous arrivés à leur destination en moins des 30 secondes visées comme délai de transit maximal. 3 DÉLAI DE TRANSIT DES PAQUETS PAR NŒUD SUR UNE PÉRIODE DE 90 MINUTES Dans un réseau étendu à grande profondeur de sauts, les paquets sont livrés de façon fiable dans un délai de transit maximal de 30 secondes. A P P L I C A T I O N Communication Tous les « motes » conservent en interne le niveau de charge de batterie consommée et envoient régulièrement cette information dans des rapports destinés au gestionnaire. Grâce à cette information, il est possible de tracer un graphe (voir figure 4) représentant l’intensité du courant moyen consommé dans tout le réseau. Les « motes » identifiés par les plus petits numéros présentent la plus grande consommation électrique, car ils transportent le trafic depuis les « motes » les plus éloignés. Mais, comme le montre ce graphe, même les routeurs les plus chargés de ce réseau de 32 sauts de profondeur présentent des consommations de seulement quelques centaines de microampères. Avec une consommation de courant aussi basse, les nœuds de routage peuvent être alimentés avec deux simples piles au lithium et présenter plus de 15 ans d’autonomie. Basés sur la technologie à saut de canal avec synchronisation temporelle, les réseaux IP SmartMesh présentent donc une fiabilité dans le routage des données couramment 4 COURANT CONSOMMÉ EN MOYENNE PAR NŒUD SUR UNE PÉRIODE DE 90 MINUTES Même les routeurs les plus chargés de ce réseau à grande profondeur de sauts ne consomment que quelques centaines de microampères. supérieure à 99,999 % et une très basse consommation d’énergie, même dans des environnements difficiles. Des capteurs sans fil alimentés par des piles au lithium, relativement peu encombrantes, peuvent alors afficher une autonomie de 10-15 ans. Offrant ainsi la possibilité de les installer n’importe où et de déployer des applications de l’Internet des objets à l’échelle de toute une ville ! n Logiciels & systèmes La force d’un média numérique intégré Site Internet + Newsletter + e Magazine ACCÈS ILLIMITÉ 6 mois e 1 an 120 Abonnez-vous ! e 60 HT* HT* *TVA applicable : 20% ! BULLETIN D’ABONNEMENT Bulletin d’abonnement à compléter et à adresser accompagné de votre règlement à SAS Promedianum - 50, rue Arago - 59000 LILLE Je m’abonne pour un an à L’Embarqué au prix de 120 € HT (soit 144 € TTC) Je m’abonne pour 6 mois à L’Embarqué au prix de 60 € HT (soit 72 € TTC) et bénéficie d’un accès illimité à l’eMagazine numérique et à tous les contenus web réservés aux abonnés sur le site www.lembarque.com pendant la durée de mon abonnement Mr Mme Mlle Nom*........................................................ Prénom* ....................................... Société ......................................................................................................... Adresse ........................................................................................................ CP ........................ Ville ................................................................................ Je règle mon abonnement (prix TTC) par chèque ci-joint à l’ordre de Promedianum Je règle mon abonnement (prix TTC) par carte bancaire n° cryptogramme expire le Date et signature obligatoires e-mail* ......................................................................................................... Fonction................................................... Secteur ......................................... * Les champs marqués d’un astérisque sont obligatoires pour la prise en compte de votre abonnement Je souhaite recevoir une facture acquittée Après confirmation de votre règlement, un mot de passe vous sera communiqué afin d’accéder aux contenus réservés aux abonnés sur le site www.lembarque.com Loi Informatique et Libertés du 06/01/78 : les informations demandées sont indispensables au traitement de votre demande. Vous pouvez accéder aux informations vous concernant, les rectifier et vous opposer à leur transmission éventuelle en écrivant à Promedianum. Pour consulter nos CGV : http://www.lembarque.com/cgu/index/lang/fr. Promedianum, SASU au capital de 15 000 € - RCS Lille 790 606 933 00014 - TVA FR 91 790 606 933 L’EMBARQUÉ / N°8 / 2014 / 27