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Composition des circonscriptions électorales et l’appui aux partis
Diversité urbaine : la composition des circonscriptions électorales et
l’appui aux partis lors des élections fédérales canadiennes de 20041
Linda M. Gerber
Département de sociologie et d’anthropologie
Université de Guelph
Résumé
L’analyse des résultats des élections générales de 2004 révèle que la composition
ethnique et le nombre d’immigrants des circonscriptions électorales influent sur
les niveaux d’appui apporté aux Partis libéral, conservateur et néodémocrate,
ainsi qu’au Bloc Québécois. Des analyses de régression aux échelons national
et régional dévoilent que des caractéristiques des circonscriptions, comme les
pourcentages d’immigrants et de minorités visibles (qui sont les plus élevés
dans nos grands centres urbains), ont une incidence sur le soutien offert aux
partis, laquelle persiste lorsque l’on prend en compte la composition des classes
sociales, mesurée par le revenu familial moyen et le pourcentage de détenteurs
d’un diplôme universitaire. La relation positive qui existe, surtout en Ontario,
entre la diversité ethnoraciale et l’appui aux Libéraux contribue à expliquer
la forte emprise libérale sur les circonscriptions de la région de Toronto. On
a également examiné les incidences de ces résultats sur l’issue des élections
fédérales de 2006.
Mots-clés: Immigration, diversité, politique, parti politique fédéral
Canadian Journal of Urban Research, Volume 15, Issue 2, Supplement pages 123-138.
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ISSN: 1188-3774
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Nos diverses cités
Il est notoire que les Libéraux dépendent, pour remporter leurs victoires
électorales, des circonscriptions multiculturelles ou diverses des grandes
régions métropolitaines du Canada. Des chroniqueurs de journaux et des
universitaires affirment assez régulièrement que : « les Libéraux dépendent
du vote multiculturel » (Simpson 2005). Dans sa circonscription d’Hamilton,
Sheila Copps « entretenait des relations étroites avec la vaste communauté
d’immigrants qui a toujours appuyé le Parti libéral » (Campbell et Christian
1999, 103); les immigrants récents ont tendance à soutenir les Libéraux
(Pelletier 1991, 145). En 1997, Stasiulis signale toutefois l’existence « au
Canada d’un manque de recherches qui se concentrent surtout sur les expériences
électorales des immigrants et des minorités ethnoculturelles en matière de
politique électorale et au sein du processus politique à divers niveaux » (cité
dans Siemiatycki et Saloojee 2002, 242). Une question importante pour ceux
qui mènent des recherches dans ce domaine consiste à déterminer dans quelle
mesure les communautés ethnoculturelles et composées de minorités visibles
présentent des candidats et remportent des élections aux échelons fédéral,
provincial ou municipal—ou, plus succinctement, accèdent au processus
politique par le biais de la représentation des minorités (Dhillon 2005; Pelletier
1991; Simard 1991; Stasiulis et Abu-Laban 1991; Siemiatycki et Matheson
2005). Pour que des candidats membres de minorités remportent des élections,
il doit exister une mobilisation des suffrages ethnoculturels en leur faveur
(dans les circonscriptions où il existe une concentration résidentielle suffisante
de minorités) et une forte participation de l’électorat2.
Dans une large mesure, la discussion des victoires électorales remportées
par des candidats membres de minorités est exempte de sectarisme, du fait que
ces candidats sont choisis et élus dans tous les principaux partis politiques.
Bird (2005, 82) signale qu’en 2004, les Libéraux ont gagné dans chacune
des dix-neuf circonscriptions les plus diverses de la région métropolitaine de
Toronto, et ce, bien qu’ils n’y aient présenté que quatre candidats appartenant
à des minorités, « alors que le Parti conservateur et le NPD en présentaient
chacun six ».
On étudie moins souvent les préférences en matière de partis ou les
tendances de vote des immigrants ou de membres de minorités visibles
et de leurs communautés. Même si le lien entre le statut d’immigrant ou
de minorité visible et l’appui au Parti libéral est souvent mentionné, il
est rarement choisi comme thème de recherche. L’analyse effectuée par
André Blais (2005, 823-834) constitue toutefois une exception récente et
importante à cette règle. André Blais a regroupé toutes les études sur les
élections canadiennes (depuis 1965) pour examiner la relation entre la
religion ou l’ethnicité et le fait de voter libéral. Il a confirmé que « la religion
et l’ethnicité sont des déterminants importants des tendances de vote, et que
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Composition des circonscriptions électorales et l’appui aux partis
les catholiques et les Canadiens d’origine africaine, asiatique ou latinoaméricaine sont de fervents défenseurs du Parti libéral ». De 1968 à 2004, les
Libéraux ont remporté la plupart des élections « grâce au soutien vigoureux
des catholiques et des Canadiens d’origine non européenne ». De fait, « le
Parti libéral ne prédominerait pas en Ontario sans l’appui solide dont il jouit
chez les catholiques et les minorités visibles ».
Les ouvrages spécialisés définissent bien le lien entre l’ethnicité ou la race
et la classe sociale, en tant que mosaïque verticale (Porter 1965) ou structure
de classe ethnoculturelle (Frideres 2005). En se servant de l’analogie de l’arcen-ciel, Frideres souligne que la différenciation des classes, jadis fondée
sur l’ethnicité, est en voie de se reconstituer sur la base de la race ou de la
couleur à mesure que les immigrants récents (pour la plupart membres de
minorités visibles) sont confrontés à la discrimination, à l’oblitération de leurs
aspirations et à une spirale descendante. La relation entre la classe sociale
et le comportement des électeurs est moins bien définie. On admet depuis
longtemps que le vote de classe est faible au Canada en raison de multiples
clivages sociaux, fondés sur la région, la langue et la religion (Lambert et
Curtis 1993)3.
Gerber (1986, 127-128) montre les effets manifestes de la classe sur les partis
préférés dans une analyse globale—ou au niveau de la circonscription—qui
évite les clivages régionaux en se consacrant uniquement à l’Ontario. Cette
analyse révèle que le NPD est appuyé davantage dans les circonscriptions
comptant de nombreux syndiqués, alors que le Parti libéral bénéficie d’un
soutien plus vigoureux dans celles où vivent des gens plus aisés et instruits.
Au Québec aussi, les riches préfèrent les Libéraux (Bernard 2001, 143).
Deux études portant sur le vote de classe revêtent un intérêt particulier pour
la présente analyse. Fletcher et Forbes (1990) ont examiné les incidences du
niveau de scolarité et de l’emploi sur le vote en faveur du NPD. Comme on s’y
attendait, ils ont découvert que les personnes occupant un poste moins élevé
votent plus pour le NPD que les titulaires de postes d’un niveau supérieur.
Apparemment, le niveau de scolarité a eu peu d’effets. Pourtant, contrairement
aux prévisions, les auteurs ont remarqué que les répondants les plus instruits
étaient ceux qui étaient les plus enclins à voter pour le NPD. Nakhaie et
Arnold (1996) lancent le concept d’une « nouvelle classe » pour expliquer
la tendance des personnes les plus instruites à accorder leurs suffrages au
NPD. Ces personnes possèdent un diplôme universitaire (souvent en sciences
sociales et humaines), travaillent dans les domaines des arts, de la littérature
et des sciences sociales, et « prêtent plus d’intérêt au radicalisme social qu’au
radicalisme économique » (Nakhaie et Arnold 1996, 187).
Carty et Eagles prétendent que « la politique est locale » et que les
caractéristiques de la circonscription électorale (y compris le pourcentage
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Nos diverses cités
d’immigrants) servent à délimiter le champ où se livrent les batailles pour
remporter la circonscription. Leur « perspective ascendante de la politique
canadienne » reconnaît le fait que « la diversité locale crée un milieu très varié
pour la mise en pratique d’une politique démocratique » (2005, 172). Pour
que les immigrants et les minorités visibles puissent influer sur les résultats
des élections et élire des politiciens membres de minorités, ils doivent être
concentrés dans des circonscriptions particulières (Dhillon 2005; Siemiatycki
et Matheson 2005), ce qui est effectivement le cas. En décrivant la situation qui
existait à la fin des années quatre-vingts, Stasiulis et Abu-Laban signalent que
: « la caractéristique marquante de la plupart des circonscriptions ethniques
est leur emplacement dans les centres urbains, la région métropolitaine de
Toronto en comptant le plus grand nombre » (Stasiulis et Abu-Laban 1991,
18). Au Canada, les nouveaux arrivants sont attirés vers certains endroits par
de bonnes conditions économiques et la présence de vastes concentrations
d’immigrants arrivés plus tôt. Par conséquent, ils se retrouvent dans les grandes
régions métropolitaines de Toronto, Vancouver et Montréal (McDonald 2004).
Ils y trouvent des minorités ethniques bien établies, dotées d’institutions très
complètes (Breton 1964), qui peuvent offrir des ressources et un encadrement
social valables aux nouveaux immigrants.
Environ « les trois quarts de nos immigrants les plus récents viennent
d’Asie, d’Afrique, du Moyen-Orient ainsi que d’Amérique centrale et du
Sud et se classent en grande partie dans la catégorie des minorités visibles
». Ce renversement des mouvements migratoires traditionnels a « soulevé la
question du rôle des minorités visibles dans les relations ethniques » et a créé
un « sous-groupe ethnoculturel » qui est confronté à la discrimination et à
d’autres obstacles à l’intégration (Frideres 2005), ainsi qu’à des entraves à la
participation politique. De fait, environ 40 p. 100 des nouveaux immigrants
arrivant au Canada s’établissent dans la région métropolitaine de Toronto. La
tendance à aller là où des communautés ethniques sont déjà implantées est
tellement forte que Scarborough a été reconnue (par l’Organisation mondiale
de la santé) comme la communauté qui présente la plus forte diversité
ethnoraciale du monde (McKenzie 2006)4.
Dans la présente étude, la principale unité d’analyse est la circonscription
électorale plutôt que chaque électeur. Ce type d’analyse globale ou écologique,
dans laquelle les variables sont mesurées au niveau de la circonscription, fait
partie de l’écologie politique (Gerber 1986, 120; Stasiulis et Abu-Laban 1991,
19). La géographie électorale (Carty et Eagles 2005, 5), quoique rarement
utilisée dans les études politiques, fait toutefois partie intégrante de l’approche
adoptée par Carty et Eagles dans Politics is Local (2005). Les attitudes et
résultats politiques sont analysés dans le contexte des caractéristiques des
circonscriptions.
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Composition des circonscriptions électorales et l’appui aux partis
Des données socioéconomiques tirées du Recensement du Canada de 2001
sont disponibles sous forme de profils des circonscriptions électorales dans
la série B2020 de Statistique Canada. Les variables du recensement ont été
établies pour chaque circonscription, converties en pourcentages et taux, et
combinées aux résultats des élections fédérales de 2004—en pourcentage
des suffrages accordés à chaque parti—afin de fournir une base de données
pour les analyses suivantes. L’analyse de régression est utilisée pour mesurer
les effets des variables socioéconomiques (variables indépendantes) sur
l’appui aux Libéraux, Conservateurs, Néodémocrates et Bloquistes (variables
dépendantes).
Les mesures de la diversité ethnique ou raciale pour cette analyse sont
la proportion d’habitants de la circonscription qui se disent immigrants («
pourcentage d’immigrants ») et la proportion de personnes classées dans
la catégorie des minorités visibles selon la définition du recensement («
pourcentage de minorités visibles »). Comme ces deux variables sont en
corrélation très étroite (0,940), elles ne sont pas incluses dans les mêmes
modèles (ou analyses de régression) : des analyses distinctes et parallèles
sont menées en utilisant le pourcentage d’immigrants et le pourcentage de
membres de minorités visibles comme principales mesures de la diversité. Les
deux indicateurs de la situation sociale ou socioéconomique, du revenu et du
niveau de scolarité sont le « revenu familial moyen » pour la circonscription
et la proportion d’habitants de la circonscription détenteurs d’un diplôme
universitaire (« pourcentage de diplômés d’une université »).
On applique deux modèles de régression—incluant les mesures des immigrants
et des minorités visibles respectivement—d’abord à l’échelle nationale, puis
aux échelons régionaux, pour tenir compte des cultures politiques régionales
du Canada (Cooper 2002; Clarke et autres 2002) et du régionalisme accru de la
politique de parti après les élections fédérales cruciales de 1993 (Cross 2002,
117). En effectuant des analyses distinctes pour les régions de l’Atlantique,
du Québec, de l’Ontario et de la Colombie-Britannique, on peut découvrir des
tendances propres à chaque région.
Dans l’analyse de régression, on mesure l’effet de chaque variable incluse
dans le modèle, tout en contrôlant les autres variables. Nos deux variables
socioéconomiques (revenu familial moyen et pourcentage de diplômés d’une
université) figurent ensemble dans les modèles, produisant des effets différents
sur le comportement des électeurs. Le coefficient bêta mesure l’effet du niveau
de scolarité lorsque le revenu est contrôlé (et inversement). Les variables
faiblement corrélées peuvent avoir de fortes répercussions dès que les effets
des autres variables intégrées au modèle sont pris en compte dans les analyses
régionales. (Les effets les plus considérables, avec des coefficients bêta d’au
moins 0,400 environ, figurent en caractères gras, et le pourcentage de variance
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Nos diverses cités
désigne le degré de variation au niveau de l’appui au parti, expliqué par les
trois variables incluses dans chaque modèle.)
Le Tableau 1 présente la fourchette de valeurs pour chacune des variables
indépendantes et dépendantes—pour le Canada, les provinces et les
circonscriptions électorales—qui dénote une variation suffisante pour faciliter
l’analyse. La concentration (ou répartition non aléatoire) des types d’électeurs
entre les 308 circonscriptions est évidente du fait que cinquante-huit d’entre
elles comptent plus de 30 % d’immigrants et quarante-deux plus de 30 % de
minorités visibles, soixante-deux affichent un revenu familial moyen d’au moins
75 000 $ et, dans quarante-huit circonscriptions, plus de 25 % des adultes sont
diplômés d’une université. Scarborough-Rivière Rouge est la circonscription
électorale comptant les plus hauts pourcentages d’immigrants et de minorités
visibles. Don Valley-Est, à Toronto, est celle qui affiche le revenu familial le
plus élevé. Westmount-Ville-Marie (à Montréal) et Vancouver Quadra sont les
circonscriptions où le niveau de scolarité est le plus élevé.
Tableau 1 : Fourchette de valeurs des variables indépendantes et dépendantes*
Variable
% d’ immigrants
% de minorités visibles
Revenu familial moyen
% de diplômés université
% du vote pour le PLC
% du vote pour le PCC
% du vote pour le NPD
% du vote pour le BQ
Canada
18,4 %
13,4 %
66 160 $
16,9 %
36,7 %
29,6 %
15,7 %
12,4 %
Écart entre les provinces
De 1,6 % (TNL) à 26,8 % (Ont.)
De 0,8 % (TNL) à 21,6 % (C.-B.)
De 49 679 $ (TNL) à 73 849 $ (Ont.)
De 10,5% (TNL) à 19,2 % (Ont.)
De 22,0 % (Alb.) à 52,5 % (Prairies)
De 8,8 % (Qué.) à 61,6 % (Alb.)
De 4,6 % (Qué.) à 26,5 % (C.-B.)
48,8 % (Qué.)
Écart entre les
circonscriptions
De 0,4 à 66,8 %
De 0,2 à 84,6 %
De 41 513 $ à 136 032 $
De 6,0 à 49,1 %
De 7,7 à 75,6 %
De 2,5 à 80,1 %
De 1,8 à 56,5 %
De 7,0 à 71,2 %
* Les calculs sont fondés sur des données tirées des élections de 2004 et du Recensement de 2001 (profils des circonscriptions
électorales extraits des fichiers B2020).
Le Tableau 2 dévoile que les pourcentages d’immigrants (colonne de gauche)
et de minorités visibles (colonne de droite) ont des effets considérables sur
le vote en faveur des Libéraux à l’échelle nationale : plus le pourcentage
d’immigrants ou de minorités visibles est important, plus le niveau de soutien
accordé aux Libéraux est élevé. De plus, chaque variable mesurant la diversité
a des effets positifs modérés sur le vote en faveur du NPD. Les analyses
portant sur le Québec et l’Ontario révèlent que les pourcentages d’immigrants
et de minorités visibles ont des effets positifs importants sur l’appui aux
Libéraux ainsi que des effets négatifs considérables sur le soutien apporté aux
Conservateurs; au Québec, on observe d’importants effets négatifs sur l’appui
au Bloc. Dans la région de l’Atlantique, les deux mesures de la diversité ont
des effets négatifs sur le vote en faveur des Libéraux. Notons toutefois que
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Composition des circonscriptions électorales et l’appui aux partis
Tableau 2 : Effets des pourcentages d’immigrants et de minorités visibles sur l’appui accordé aux
partis au Canada et dans les régions (lors des élections de 2004)
Pourcentage d’immigrants
Canada (308)
PLC
PCC
% d’immig./de min. vis.
0,410
Rev. familial moyen
-0,002
Pourcentage de minorités visibles
NPD
PLC
PCC
NPD
-0,008
0,183
0,345
-0,023
0,101
0,581
-0,270
0,053
0,576
-0,259
% de diplômés d’univ.
0,171
-0,547
0,120
0,195
-0,537
0,167
% de variance
27,5
16,7
6,0
24,9
16,7
4,4
Atlantique (32)
PLC
PCC
NPD
PLC
PCC
NPD
% d’immig./de min. vis.
-0,372
0,471
-0,184
-0,258
-0,572
0,777
Rev. familial moyen
-0,178
0,326
-0,348
-0,228
0,446
-0,429
% de diplômés d’univ.
0,297
-0,833
0,746
0,229
-0,066
0,027
% de variance
8,0
11,4
12,2
6,9
17,1
31,9
Québec (75)
PLC
PCC
NPD
PLC
PCC
NPD
BQ
BQ
% d’immig./de min. vis.
0,875
-0,384
0,073
-0,634
0,834
-0,378
0,076
-0,597
Rev. familial moyen
0,364
0,061
-0,370
-0,254
0,409
0,037
-0,364
-0,284
% de diplômés d’univ.
-0,366
0,164
0,949
0,024
-0,344
0,164
0,946
0,000
% de variance
64,6
9,8
59,4
54,8
62,5
9,9
59,5
53,1
Ontario (106)
PLC
PCC
NPD
PLC
PCC
NPD
% d’immig./de min. vis.
0,812
-0,413
-0,300
0,776
-0,340
-0,362
Rev. familial moyen
0,274
0,492
-0,699
0,311
0,503
-0,753
% de diplômés d’univ.
-0,151
-0,469
0,567
-0,101
-0,542
0,613
% de variance
64,2
43,0
20,8
63,2
40,2
23,8
Prairies (56)
PLC
PCC
NPD
PLC
PCC
NPD
% d’immig./de min. vis.
0,118
-0,044
-0,008
0,146
-0,076
0,005
Rev. familial moyen
-0,674
1,104
-0,998
-0,653
1,092
-0,997
% de diplômés d’univ.
0,907
-1,014
0,584
0,896
-0,999
0,578
% de variance
36,4
47,4
41,0
37,2
47,8
41,0
Columbie-Britannique (39)
PLC
PCC
NPD
PLC
PCC
NPD
% d’immig./de min. vis.
0,020
0,084
-0,125
0,149
-0,061
-0,087
Rev. familial moyen
-0,004
0,642
-0,723
0,088
0,544
-0,704
% de diplômés d’univ.
0,670
-0,896
0,495
0,552
-0,754
0,448
% de variance
46,0
32,5
21,8
47,2
32,4
21,5
Nota : Les chiffres figurant dans chaque sous-tableau sont des coefficients bêta. La région de la Colombie-Britannique comprend les trois circonscriptions territoriales. Le
symbole (##) désigne le nombre de circonscriptions dans chaque région.
JCRU 15:2 Supplément 2006
129
Nos diverses cités
le pourcentage d’immigrants accroît sensiblement l’appui aux Conservateurs,
alors que le pourcentage de minorités visibles le réduit5. Dans la région des
Prairies et en Colombie-Britannique, aucune des deux mesures de la diversité
n’influe fortement sur le soutien accordé à n’importe quel parti.
Par conséquent, les effets positifs des pourcentages d’immigrants et de
minorités visibles sur l’appui aux Libéraux, à l’échelle nationale, résultent
dans une large mesure des répercussions profondes observées au Québec et
en Ontario. Les effets négatifs des deux mesures sur le soutien accordé aux
Conservateurs sont également propres à l’Ontario et au Québec. De toute
évidence, les effets marqués des pourcentages d’immigrants et de minorités
visibles expliquent pourquoi les Libéraux ont réussi à écarter la menace que
les Conservateurs faisaient planer sur les régions de Toronto et de Montréal.
À l’échelle nationale, ainsi que dans toutes les régions sauf au Québec, le
revenu familial moyen (notre mesure de la richesse) a des effets positifs, parfois
considérables, sur l’appui accordé aux Conservateurs, et des effets négatifs sur
le vote en faveur du NPD. C’est dans la région des Prairies que l’on observe les
principaux effets positifs sur l’appui aux Conservateurs —conjugués à des effets
très négatifs sur le soutien aux Libéraux et, en particulier, aux Néodémocrates.
Cette tendance, qui apparaît à la fois dans le modèle des immigrants et celui
des minorités visibles, est celle que l’on pourrait prévoir en se fondant sur les
politiques ou les penchants respectifs des Conservateurs et des Néodémocrates
vers la droite ou la gauche. On voit se dessiner un tableau différent au Québec :
le revenu familial moyen n’a pas d’effet sur l’appui accordé aux Conservateurs.
Par contre, il a un effet positif important sur le vote en faveur des Libéraux, et
des effets négatifs sur le soutien apporté au NPD et au Bloc. Les incidences de
la richesse au Québec sont très semblables, tant dans le modèle des immigrants
que dans celui des minorités visibles.
Dans la plupart des régions du pays, les circonscriptions où le revenu est
élevé appuient les Conservateurs, et cela est particulièrement évident dans les
Prairies. Le Québec est la seule région où les riches votent pour les Libéraux.
Les effets du pourcentage de diplômés d’une université sur le comportement
des électeurs sont importants—en particulier du point de vue de leurs
manifestations à l’échelon régional. Sur la scène nationale, ainsi qu’à l’extérieur
de l’Ontario et du Québec, une élévation du niveau de scolarité (lorsque le
revenu est contrôlé) est associée à un accroissement de l’appui aux Libéraux.
En Ontario, et surtout au Québec, cette hausse a l’effet inverse, c’est-à-dire
qu’elle réduit le soutien accordé aux Libéraux. Partout, sauf au Québec, un
niveau de scolarité plus élevé a des effets négatifs sur le vote en faveur des
Conservateurs, les effets les plus marqués se faisant sentir dans les régions
des Prairies et de la Colombie-Britannique. (Au Québec, le niveau de scolarité
a eu un effet positif modéré sur le vote en faveur des Conservateurs.) À une
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JCRU 15:2 Supplément 2006
Composition des circonscriptions électorales et l’appui aux partis
exception près (signalée dans la colonne des minorités visibles sous la rubrique
« Atlantique » du tableau), plus le pourcentage de diplômés d’une université
est élevé, plus l’appui accordé au NPD s’accroît, l’effet le plus spectaculaire
se produisant au Québec.
Nous découvrons ici qu’un revenu plus élevé se traduit le plus souvent par
un appui accru aux Conservateurs, alors qu’il existe une corrélation positive
entre notre autre mesure du rang social, soit le niveau de scolarité, et l’appui
accordé au NPD. Nous sommes confrontés au même paradoxe que celui qui
a incité Nakhaie et Arnold (1996) à définir la nouvelle classe de radicaux
sociaux possédant une formation universitaire. Le fait que la même tendance
se manifeste aux niveaux individuel et global semble indiquer que nous
observons un phénomène « réel ».
Il est à noter que les effets de certaines variables sur le comportement des
électeurs sont plus marqués dans certains des modèles régionaux que dans les
modèles nationaux. En outre, on a expliqué plus d’éléments de la variance
dans la plupart des modèles régionaux que dans les modèles nationaux. En
général, la région de l’Atlantique a accusé les niveaux les plus bas de variance
expliquée, à l’exception notable de l’appui au NPD dans le modèle des
minorités visibles. Les promesses électorales, les politiques de parti (Clarkson
2001, 21) et la fidélité à certains candidats peuvent permettre de comprendre la
variance inexpliquée dans les provinces de l’Atlantique. Il est concevable que
la variation au niveau de la dynamique interne des modèles et les fluctuations
de la variance reflètent les effets des cultures politiques régionales.
L’analyse empirique présentée ici confirme que la composition de la
circonscription, sur les plans de la diversité ethnique, de la richesse et du niveau
de scolarité, ainsi que la région sont des prédicteurs efficaces des tendances de
vote. En général, les circonscriptions multiculturelles appuient effectivement
les Libéraux, celles qui sont riches soutiennent les Conservateurs, mais ces
deux types de circonscriptions rejettent le Bloc (ce qui sous-entend que le
« vote ethnique et des nantis » 6 influe réellement sur le comportement des
électeurs). Les deux variables mesurant la diversité (pourcentage d’immigrants
et pourcentage de minorités visibles) sont en grande partie interchangeables,
sauf dans la région de l’Atlantique. De plus, l’effet de la formation universitaire
sur la façon de voter (lorsque la richesse est contrôlée) consiste à orienter les
tendances de vote vers la gauche, en faveur des Libéraux (sauf en Ontario et
au Québec), et surtout au profit du NPD. Selon les éléments mesurés ici, la
diversité, la classe et la région prédisent ou expliquent vraiment les tendances
de vote au niveau de la circonscription.
Juste avant nos dernières élections fédérales, Cowan (2006) a écrit dans le
National Post un article expliquant « Pourquoi Toronto est un bastion libéral ».
En soulignant que seul « un endroit au Canada semble sûr », il donne à entendre
JCRU 15:2 Supplément 2006
131
Nos diverses cités
que cette situation s’explique surtout par le nombre élevé d’ « immigrants
récents et de minorités culturelles » à Toronto. Le jour des élections, nous
avons appris que Toronto était effectivement à l’abri de la vague bleue, laquelle
avait pourtant déferlé sur la majeure partie du reste de l’Ontario.
Quelques jours plus tard, Howlett (2006) a signalé que les résultats des élections « faisaient apparaître une fissure profonde entre les régions rurales et urbaines de l’Ontario, les Conservateurs ralliant la plupart des suffrages en leur
faveur à l’extérieur de la ville ». Il a ajouté que Toronto et beaucoup d’autres
villes « demeuraient résolument libérales », et qu’on couperait l’herbe sous
le pied des Conservateurs au cas où ils espéreraient lancer à l’avenir un appel
aux électeurs des villes. Le même jour, soit le 28 janvier, l’éditorial en première
page du National Post était intitulé « Le mythe des villes libérales » : « Il n’y a
pas de scission entre les régions urbaines et rurales dans la politique canadienne.
Il pourrait exister une fracture entre une métropole et le reste du pays. Il est
toutefois erroné d’affirmer que les Conservateurs sont surtout populaires dans
les régions rurales, tandis que les Libéraux prédominent dans les villes canadiennes ». Bien que les Conservateurs n’aient remporté aucun siège à Toronto,
Montréal et Vancouver, de nombreuses autres villes canadiennes ont pourtant
élu des Conservateurs. Ottawa en a élu cinq, et « Québec, notre septième région métropolitaine, a élu quatre Conservateurs, deux Bloquistes et un indépendant, mais pas un seul Libéral ».
Une comparaison des résultats des élections de 2004 et de 2006 dans la
région du Grand Toronto (RGT) apporte des éclaircissements sur le fossé
apparent entre les régions rurales et la métropole. En Ontario, l’appui aux
Conservateurs ne s’est accru que de 3,6 points pour s’établir à 35,1 p. 100, de
2004 à 2006, tandis que le soutien accordé aux Libéraux a diminué de 5 points.
Comparativement à l’ensemble de l’Ontario, deux tiers des circonscriptions
de la RGT ont affiché des gains conservateurs supérieurs à la moyenne (de 4
à 11 points). Par contraste, la moitié des circonscriptions de la RGT ont réduit
leur appui aux Libéraux par une marge supérieure à la moyenne ontarienne.
Fait intéressant, dans la circonscription de Mississauga-Erindale, l’appui aux
Libéraux a accusé une baisse de 11 points (pour tomber à 44,8 % des suffrages),
mais cette circonscription a quand même réélu un Libéral à Ottawa. Dans les
circonscriptions d’Eglinton-Lawrence, de Beaches-York-Est et de Saint-Paul,
le soutien aux Libéraux a chuté de 8 points, et même de 9 points à Oakville,
sans toutefois priver les députés libéraux de leur siège. Quant à la thèse du fossé
entre les régions urbaines et rurales, il importe de noter que l’accroissement
de l’appui aux Conservateurs et la baisse du soutien aux Libéraux ont été plus
marqués dans la RGT que dans l’ensemble de la province, et ce, contrairement
aux prévisions.
Comme on pouvait s’y attendre compte tenu des résultats des élections de
132
JCRU 15:2 Supplément 2006
Composition des circonscriptions électorales et l’appui aux partis
2004, les circonscriptions de la RGT dans lesquelles l’appui aux Libéraux a
le plus baissé (de 8 à 11 points) comptent des pourcentages d’immigrants et
de minorités visibles7 faibles à moyens par rapport aux normes de la RGT.
Les cinq circonscriptions mutliculturelles de Scarborough, qui comprennent
la communauté affichant la plus grande diversité ethnoraciale du Canada, et
même du monde, demeurent des forteresses libérales8. Le soutien accordé aux
Libéraux n’a fléchi que de 1 à 4 points dans quatre de ces circonscriptions
—et il a augmenté de 8 points dans la circonscription la plus diverse sur le
plan ethnoracial, Scarborough-Rivière Rouge. Parallèlement, l’accroissement
du soutien apporté aux Conservateurs dans trois des cinq circonscriptions de
Scarborough a dépassé la moyenne ontarienne de 3,6 points, pour s’établir
à 4,6 et 7 points. Étonnamment, dans la circonscription de ScarboroughRivière Rouge, où l’appui aux Libéraux s’est accru de 8 points, le soutien
aux Conservateurs a également progressé de 7 points, passant de 13,8 à 20,4
p. 100. Ce bastion libéral, comme en témoigne l’accroissement de 8 points
—a aussi été réceptif au message des Conservateurs—ainsi que le prouve
la hausse de 7 points. Il est clair que les Conservateurs ont fait des progrès
(supérieurs à la moyenne ontarienne) dans trois de nos cinq circonscriptions
très multiculturelles de Scarborough. Certes, Toronto est un bastion libéral,
surtout dans ses circonscriptions qui présentent la plus grande diversité
ethnique, mais les Conservateurs ont toutefois réussi à gagner du terrain et à
remporter davantage de suffrages dans les circonscriptions les plus diverses et
les plus libérales.
On peut prétendre que le balayage conservateur survenu en 2006 à l’extérieur
de la ville de Toronto proprement dite se limitait aux circonscriptions qui
avaient amorcé leur virage vers le Parti conservateur en 2004. De fait, quatre
circonscriptions de la RGT, soit Burlington, Halton, Oshawa et WhitbyOshawa, ont élu des Conservateurs, bien qu’à partir de niveaux d’appui de 33
à 38 p. 100 en 2004. Compte tenu de l’avance énorme des Libéraux à Toronto,
surtout dans les circonscriptions affichant la plus forte diversité, il n’est pas
étonnant que la ville ait fermé la porte aux Conservateurs en 2006 (du moins
selon le nombre de victoires remportées).
Tout cela laisse supposer que l’on pourrait juger « normaux » les progrès
réalisés par les Conservateurs en Ontario. Au Québec, par contre, les résultats
ont été surprenants. À l’échelon provincial, l’appui populaire en faveur des
Conservateurs est passé de 8,8 à 24,6 p. 100—soit une hausse de 16 points
—reflétant les fortes baisses du soutien accordé aux Libéraux et au Bloc9.
L’ampleur de ce mouvement a surpris tout le monde. Les Conservateurs
de Stephen Harper sont passés de zéro à dix sièges au Québec, et ce, dans
le cadre d’élections où le fait de remporter trois ou quatre sièges aurait été
considéré comme une percée importante. De 2004 à 2006, l’appui accordé
JCRU 15:2 Supplément 2006
133
Nos diverses cités
aux Conservateurs dans la circonscription rurale de la Beauce a affiché une
hausse incroyable de 50 points, passant de 17 à 67 p. 100. Les circonscriptions
urbaines situées dans la ville ou la banlieue de Québec ont fait osciller de 21
à 27 points le soutien aux Conservateurs, envoyé des députés conservateurs à
Ottawa et jeté le doute sur les mythes des villes libérales et du fossé entre les
villes et les zones rurales. Comme neuf des dix circonscriptions qui ont élu des
députés conservateurs se trouvent soit dans la ville ou la banlieue de Québec10,
cette partie de la province témoigne d’un niveau remarquable de consensus
entre les régions urbaines et rurales.
Aucune des circonscriptions urbaines de la région de Québec ne peut être
qualifiée de diverse sur le plan ethnoracial puisque la proportion d’immigrants
pas plus que le pourcentage de minorités visibles ne dépasse 2,7 p. 100.
Québec a peut-être été une forteresse libérale par le passé mais, cette fois-ci, les
Conservateurs de Stephen Harper ont enlevé chacune de ses circonscriptions
urbaines au Bloc Québécois. Stephen Harper a pu gagner la faveur des «
sympathisants conservateurs au Québec », tout en portant « un coup dur au
Bloc Québécois» surtout parce que les gens « désiraient ardemment trouver
une alternative fédéraliste honorable aux Libéraux haïs » (Gagnon 2006). En
revanche, les Conservateurs ont été exclus de Montréal, où les pourcentages
d’immigrants et de minorités visibles frôlent la barre des 50 et 40 p. 100
respectivement dans plusieurs circonscriptions.
Stephen Harper a l’occasion de faire d’autres incursions dans nos grandes
régions métropolitaines, en dépit de leurs pourcentages d’immigrants et de
minorités visibles, et de leurs niveaux de scolarité. Après tout, il est notoire
que les membres de chaque catégorie votent pour tous les principaux partis
politiques. M. Harper a essayé de rallier les suffrages des immigrants sur
les dossiers du mariage des conjoints de même sexe, d’Air India, de la
reconnaissance des compétences et du recrutement de candidats membres de
minorités. Certains pontes des médias prétendent qu’il a échoué parce que
les Conservateurs n’ont pas remporté de sièges dans ces circonscriptions
urbaines multiculturelles, mais ils ignorent les gains importants que le Parti
conservateur a réalisés dans des bastions libéraux, comme Scarborough-Rivière
Rouge. Hyder (2005) reconnaît que la communauté composée de minorités
visibles s’est toujours alignée sur les Libéraux, tout en estimant que « des
occasions s’offrent à d’autres partis de gagner le vote des minorités, lesquelles
constituent la composante démographique affichant l’expansion la plus rapide
dans les villes canadiennes ». Même si les communautés formées de minorités
s’intéressent surtout à la politique d’immigration et à la politique étrangère,
leurs autres intérêts sont identiques à ceux des Canadiens moyens : soins
de santé, éducation, fiscalité, justice, environnement, emplois et économie
vigoureuse. En outre, la deuxième génération tend à adopter une attitude
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Composition des circonscriptions électorales et l’appui aux partis
plus conservatrice à l’égard des politiques économiques. Bird (2005) estime
également que « la stratégie de rapprochement ethnique » des Conservateurs
peut être efficace et qu’il faut rappeler aux immigrants que l’on a atteint les
niveaux les plus élevés d’immigration sous la direction du premier ministre
conservateur Brian Mulroney. En général, M. Harper devrait se souvenir que
les Conservateurs ont réalisé des gains accrus en Ontario (y compris à Toronto)
et énormes au Québec. Il doit rallier plus de suffrages dans les circonscriptions
multiculturelles, mais les progrès récents laissent entrevoir que c’est possible.
Dans les résultats des élections de 2006, rien n’infirme l’analyse fondée
sur les élections de 2004. À l’exception des variations régionales, il est
clair que l’accroissement de la diversité ethnoraciale, au niveau de la
circonscription électorale, est lié à des niveaux plus élevés d’appui aux
Libéraux11. Bien que les régions métropolitaines de Toronto, Montréal et
Vancouver affichant une diversité ethnique n’aient pas élu de Conservateurs,
le comportement des électeurs dans des villes plus petites de l’ensemble du
pays semble indiquer que, faute de diversité, il n’existe pas de fossé entre
les régions rurales et urbaines.
Notes
Une version antérieure de ce document a été présentée en juin 2005 à la réunion
annuelle de la Société canadienne de sociologie et d’anthropologie. Un document
d’accompagnement, qui inclut la variable « pourcentage de bilingues » figure dans
Études ethniques du Canada (en préparation).
2
Siemiatycki et Matheson (2005, 71) soulignent que des politiciens membres de
minorités visibles sont élus plus facilement dans la banlieue de Toronto que dans le
centre-ville en raison de la croissance démographique et de la concentration résidentielle
spectaculaires des minorités visibles, ainsi que des efforts plus vigoureux déployés
par les partis politiques pour attirer des candidats dans la banlieue plutôt que dans le
centre. Compte tenu de l’existence d’une masse critique de partisans éventuels, les
pourcentages plus élevés de propriétaires-occupants dans les faubourgs contribuent à
élever le taux de participation de l’électorat dans ces régions. Lapp (1999) prétend que
le taux de participation à Montréal varie selon le groupe ethnique et dépend des genres
d’arguments que les chefs de groupe utilisent pour rallier les suffrages (devoir, fierté,
exercer une influence) et des types de régimes politiques (démocraties, dictatures),
ainsi que des exigences auxquelles les immigrants devaient satisfaire pour voter avant
de venir au Canada. Tossutti (2005) fait remarquer que le taux de participation est plus
bas parmi les résidents chinois et noirs, qu’ils soient nés au Canada ou à l’étranger,
que chez les immigrants en provenance d’Asie du Sud. Bird (2005, 83) reconnaît que
le militantisme politique varie considérablement selon les communautés composées
de minorités et souligne la performance politique impressionnante de la communauté
d’Asie du Sud qui a élu dix députés en 2004.
3
Lambert et Curtis (1993) abordent sous un nouvel angle la question de la participation
selon la classe et montrent que la participation s’accroît lorsqu’on permet à l’électeur
1
JCRU 15:2 Supplément 2006
135
Nos diverses cités
de définir l’orientation de classe des partis et quand les électeurs perçoivent que les
partis sont différents. Ils constatent également que la classe exerce un effet plus marqué
sur les partis moins aimés que sur les partis préférés.
4
Les cinq circonscriptions de Scarborough comptent des proportions de 51 à 69 p.
100 d’immigrants et de 43 à 85 p. 100 de minorités visibles. La circonscription de
Scarborough-Rivière Rouge se classe au premier rang, avec les deux pourcentages les
plus élevés. Dans la mesure où « la politique est locale », ces circonscriptions offrent
un cadre unique à l’ « ethnopolitique », qui les isole du reste du Canada.
5
Les divergences au niveau des tendances de vote résultent probablement du fait
qu’environ la moitié des membres des minorités visibles de la Nouvelle-Écosse sont
des Noirs descendant des Loyalistes qui étaient arrivés à l’époque de la Révolution
américaine et ne sont donc pas des immigrants (ou leurs descendants en ligne
directe).
6
Dans une analyse des résultats du référendum au Québec, Gerber (1992) constate que
les circonscriptions affichant des niveaux élevés d’appui à la souveraineté tendaient à
voter pour le Parti Québécois lors des élections provinciales. Ultérieurement, l’appui
au Bloc Québécois allait refléter les mêmes tendances. Cela donne à entendre qu’il
existe une corrélation négative entre l’ethnicité et le revenu, et l’appui accordé à la
souveraineté. Il se peut donc que Jacques Parizeau, premier ministre du Québec à
l’époque, ait eu raison, sans être toutefois politiquement correct, en ce qui a trait aux
facteurs qui ont entraîné l’échec du référendum de 1995.
7
Ces pourcentages oscillent entre 27,4 et 10,8 p. 100 à Oakville, et entre 35,6 et 29,4
p. 100 à Beaches- York-Est.
8
L’appui accordé aux Libéraux à Scarborough oscillait entre 49,5 et 64,1 p. 100 en
2004, et entre 47,8 et 65,6 p. 100 en 2006.
9
Au Québec, la vague conservatrice a fait chuter les Libéraux de 13 points et le Bloc
de 7 points.
10
Le territoire de ces circonscriptions s’étend du nord de la ville vers le sud, jusqu’à
la frontière américaine.
11
De prochaines analyses fondées sur les élections de 2006 pourraient signaler des
effets légèrement plus faibles de la diversité sur l’appui accordé aux Libéraux parce
que (dans l’ensemble du pays) les Conservateurs ont érodé cet appui en réalisant des
gains même dans des circonscriptions jugées invulnérables.
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