Thème 2 Les crises du couple : une souffrance et une possible

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Thème 2 Les crises du couple : une souffrance et une possible
Familles Nouvelles (Focolari)
WE « en couple »
Les Naudières 17-18 novembre 2012
Thème 2
Les crises du couple : une souffrance et une possible rencontre
Intro : LUI / ELLE
(Dialogue dos à dos)
Lui, c’était Michel, elle c’était Marie-Noël, c’est ce qu’on a vécu à peu de choses
près, on avait 4 ans de mariage, 2 enfants tout petits, la vie à 100 à l’heure…
1 – Les crises du couple
Notre vie de couple au quotidien, il arrive qu’elle se dégrade gravement. On
accumule des incompréhensions, des désillusions et des rancœurs. On ne veut
pas en parler, ou on essaye, mais l’autre semble ne pas comprendre notre
appel. Alors on évite les sujets qui fâchent, on finit par ne plus se dire grandchose ou à l’inverse on se jette les reproches à la figure. Le conflit latent
s’installe, ou bien l’indifférence (on se rend indifférent pour moins souffrir/ on
se renferme dans une carapace). Nous traversons une crise et nous voilà non
plus un couple, mais 2 personnes juxtaposées. Chacun souffre de son côté. On
pourrait dire que notre couple est malade. Et une maladie, il faut la prendre au
sérieux, la soigner.
Plusieurs facteurs peuvent favoriser la crise : conditions de travail, stress,
maladie, oubli d’entretenir l’amour, attentes de l’un ou de l’autre non
reconnues… mais la cause est toujours un manque de dialogue dans le couple.
La communication entre nous fonctionne mal ou est en panne. C’est la relation
qui est malade. Comment la guérir ?
La crise est ressentie comme un échec. On pense en général qu’on est seul
dans ce cas et on a honte. On ne se sent plus aimé par son conjoint… et on n’a
peut-être plus envie de l’aimer. Et on pense parfois que c’est à la fin de notre
histoire à deux. Les médias nous suggèrent de bien des façons que si on ne
s’entend plus, c’est normal de se séparer.
Pourquoi on en est arrivé là ? Pourquoi nous ? Pourquoi on a si mal ? Est-ce que
c’est fini pour nous deux ? Comment en sortir ?
Michel et Marie-Noël Chilaud
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2 – La rencontre avec Jésus abandonné
Ce tunnel que l’on traverse, cette souffrance, c’est toujours pour nous une
interrogation : « pourquoi ? », parce que plus rien n’a de sens.
Dans le récit de la passion de Jésus, on lit dans l’évangile que Jésus sur la croix a
crié : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ». Il a souffert la
douleur physique, la peur, l’humiliation, la trahison, un procès injuste, la
torture, et voilà le moment de sa plus grande souffrance : il se sent abandonné
même de Dieu son Père.
Chiara Lubich en 1999 (lors d’un congrès international pour la famille, en
Suisse) :
« Celui qui avait affirmé : “ Le Père et moi, nous sommes un ” fait
l’expérience tragique de la perte de l’unité, de la séparation d’avec Dieu,
ayant pris sur lui, par amour pour l’homme, tout le négatif, tout le péché
de l’humanité. Dans son abandon, manifestation ultime et maximale de
son amour, le Christ s’anéantit complètement et peut ouvrir aux
hommes la voie de l’unité avec Dieu et entre eux. Son interrogation :
“ Pourquoi ? ”, restée sans réponse, devient pour chaque homme la
réponse à ce qui l’angoisse… Toute division familiale, ou entre groupes et
peuples ne reproduit-elle pas ce qu’il a lui-même vécu ? Celui qui … ne
croit plus à l’amour … ne lui ressemble-t-il pas ?
Il n’y a pas au monde… d’échecs familiaux qui ne trouvent un écho dans
la nuit vécue par l’homme-Dieu. Par sa mort il a tout payé. Il a signé un
chèque en blanc, qui représentait toute la douleur et le péché de
l’humanité passée, présente et à venir. Dans cette terrible expérience où
il apparaît comme le grain de blé qui pourrit et meurt pour nous
redonner la vie, il nous révèle aussi le secret du plus grand amour : être
capables de tout donner de soi, de se faire “ rien ” pour les autres ».
(Chiara Lubich)
Dans le ‘pourquoi’ de Jésus sur la croix qui se sent abandonné du Père, – nous
l’appellerons par ce raccourci : « Jésus abandonné » – il y a la réponse à chacun
de nos ‘pourquoi’. Par amour pour nous, dans sa vie humaine, Jésus a accepté
d’être dépouillé même de son union au Père. Est-ce que ce n’est pas ce que
nous vivons, dans un couple, quand nous nous sentons dépouillés de la
communion qui nous unissait, de cet amour qui circulait entre nous ?
Michel et Marie-Noël Chilaud
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Et qu’est-ce que Jésus a fait ? Il nous a dévoilé la vérité de l’amour le plus
grand, celui qui rend capable du don total de soi, de se faire rien pour les
autres. On se rappelle qu’il nous a donné ce commandement nouveau :
« Aimez-vous comme je vous ai aimés ». Il nous propose d’aimer à notre tour
« comme » ça.
Cette force puisée en Jésus abandonné est le fruit d’une sorte d’alchimie
divine, elle peut faire renaître même un amour qui semble éteint. Il suffit que
nous y croyions. Elle fait des hommes nouveaux et donc aussi des familles
nouvelles.
Donc que faire ? Reconnaître Jésus abandonné dans la souffrance que nous
vivons et le nommer, accueillir Jésus dans notre cœur, puis unir notre
souffrance à la sienne, alors nous pourrons nous remettre à aimer « comme »
Lui nous a aimés, même si nous n’avions plus envie d’aimer. Nous pouvons
devenir capables de nous effacer par amour pour notre conjoint, de perdre nos
idées, d’être vide pour l’accueillir. C’est Jésus en nous qui aime.
Rappelons-nous qu’après cet anéantissement, Jésus est ressuscité, entré dans
une nouvelle vie, réuni au Père. Nous aussi, dans notre vie humaine, nous
vivons quelque chose de la résurrection. Comment ? En reconnaissant Jésus
Abandonné dans cette situation de crise dans le couple, et en lui disant que
nous l’aimons, nous éprouvons une nouvelle force qui nous soutient, une
liberté de pouvoir aimer alors qu’on n’y arrivait plus… Je ne dis pas qu’on n’a
plus mal, mais on le vit dans la paix intérieure. Et nous voilà capables de faire
face à la situation en reprenant le goût de vivre, de faire toute notre part pour
regagner notre bonheur, pour que notre couple sorte vainqueur de la crise.
Oui, résurrection !
Expérience personnelle
Nous pouvons rencontrer Jésus abandonné dans beaucoup d’autres situations
douloureuses de notre vie, l’accueillir, le reconnaitre, unir notre souffrance à la
sienne et nous remettre à aimer. Prenons quelques exemples tout en restant
dans la vie de famille :
C’est Jésus qui nous fait garder le cœur ouvert à l’enfant qui a fait une fugue,
aux beaux-parents qui respectent peu l’intimité de notre couple, au conjoint
qui a perdu son travail, qu’il en soit responsable ou non, à l’épouse qui est
tombée amoureuse d’un autre homme, à la belle-sœur qui sème la discorde
dans les relations familiales, au gendre qui est devenu grossier avec nous,
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parents, et qui montre si peu d’affection à notre fille, à la belle-fille qui ne fait
que parler de l’héritage qui reviendra à son mari, notre fils, au propriétaire qui
ne cesse d’augmenter le loyer.
Oui, Jésus abandonné est l’amour par excellence. Avec Lui, nous sommes
capables d’accepter nos limites, les nôtres et celles des autres et de faire
grandir notre amour. Souvent, ce sont nos limites qui nous permettent de
construire l’amour entre nous, en nous plaçant dans une position d’humilité.
Les limites de l’autre sont les miennes, c’est moi qui suis limitée en lui.
3 – Sortir de la crise
Revenons aux crises dans le couple. Que faire pour en sortir ? Situons-nous
maintenant dans cette perspective de se remettre à aimer, de vouloir s’aimer.
C’est notre première chance pour en sortir.
Sûrs que Dieu aime l’autre autant qu’il m’aime moi. Avoir ce regard de Dieu sur
mon conjoint, recommencer à l’aimer.
Pour en sortir, je retiens 5 points :
1- D’abord croire que c’est possible d’en sortir, de réparer la relation malade,
de renouer les fils. Ne pas laisser pourrir la situation.
Expérience
2 - Ne pas vouloir changer l’autre. C’est un désir voué à l’échec, parce que
personne ne peut espérer changer un autre que soi-même : on ne peut agir
que sur soi. Donc accepter l’autre tel qu’il est, (même s’il est fermé et en ce
moment ne semble plus m’aimer) et essayer, moi, de changer mon regard, de
modifier mon jugement ou comportement.
3 – Briser les cercles vicieux du genre : « Je râle parce que tu ne m’écoutes
jamais. » « Je ne t’écoute pas parce que tu râles tout le temps. » On rejette la
faute l’un sur l’autre : il faut cesser de tout considérer en termes de faute et
passer à une stratégie active : voir l’autre avec un regard neuf. Ne pas attendre
que l’autre brise le cercle, le briser en premier (aimer en premier !). Nous n’en
sortirons que par un sursaut d’amour.
4 – Être ouvert à renouer la relation, le dialogue, même si l’autre n’est pas prêt,
se mettre dans l’attitude d’être prêt au moment où lui ou elle le sera. Cela veut
dire désamorcer tous mes griefs, qui sont autant de petites bombes que
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j’aurais envie de lui balancer, pour être capable, le moment venu, d’en parler
calmement, dans une optique positive, c’est-à-dire pour reconstruire.
5 – se pardonner mutuellement. Ce n’est pas un acte de faiblesse, mais de
courage et d’amour. C’est renoncer à ressasser les griefs pour se tourner vers
l’avant. C’est reconnaître avec humilité : « Je suis imparfaite, tu es imparfait ».
C’est se dire : Relève-toi parce que je t’aime ». C’est un don qu’on se fait l’un à
l’autre et qui nous aide à changer nos comportements erronés et à reprendre
la route ensemble. C’est très riche, le pardon !
La démarche est libérante autant pour celui qui le donne que pour celui qui le
reçoit. C’est encore plus beau quand on a l’occasion de se l’échanger
réciproquement. Faisons de temps à autre cette remise des dettes. Il est
important qu’il ne reste pas tacite, mais qu’on se le déclare avec des mots.
Au cours de ce week-end, dans le moment à deux qui va suivre.
Il y a aussi le sacrement du pardon, avec le prêtre, qui est à votre disposition.
4 – L’aspect positif des crises
Les crises sont inévitables, ce sont des étapes dans notre vie de couple, il y en
aura d’autres. Pour les vivre au mieux de la façon la plus enrichissante possible
et sans nous faire la guerre, tirons-en profit en apprenant à déceler les signes
avant-coureurs d’une crise pour ne pas la laisser s’installer. Cette envie de me
recroqueviller dans ma coquille, par exemple pour moi, cette impression
d’avoir un couvercle qui se referme sur ma tête. Les regards qui se fuient, la
panne de communication, etc., à chacun d’apprendre à reconnaître les signaux
propres à son couple. Prendre conscience des réflexes de défense
automatiques que nous avons pour éviter de nous y laisser prendre la fois
suivante.
Deux thérapeutes familiaux écrivent : « La tentation de cesser d’aimer tant que
le conflit n’est pas résolu est très grande, et c’est même une réaction naturelle
si vous vous sentez blessé d’une manière ou d’une autre. » Ils ajoutent :
« Pourtant, faire le choix de ne pas aimer vous appauvrira sur le plan émotif et
vous ôtera la sagesse dont vous avez besoin pour parvenir à une solution. Une
solution non fondée sur l’amour se révélera bien vite être un compromis
provisoire et décevant »i.
Michel et Marie-Noël Chilaud
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Conclusion :
Le couple est comme un enfant qui doit grandir. C’est pourquoi les crises
peuvent survenir à tous les âges de la vie, parce que chaque phase est délicate
et amène des nouveautés par rapport à la précédente. Elle oblige à rebondir et
évite à la relation de couple de rester figée dans l’immobilisme. Rappelonsnous cette définition de la fidélité qui me plaît beaucoup : c’est une attitude
active qui vise à entretenir l’amour. Ce n’est pas s’en tenir passivement à
l’engagement de départ, ni se reposer sur ses acquis. Donc, loin d’être un
échec, la crise est féconde potentiellement, si on a la volonté de rétablir le
dialogue entre nous, de recommencer à s’aimer. Elle ouvre la voie à une
nouvelle évolution de la relation, dans l’harmonie retrouvée.
***
i
J. Ysaguirre et C. Frazier, Thriving Marriages : An Inspirational and Practical Guide to Lasting Happiness,
Bookmanns (des mariages qui marchent bien : guide pratique pour un bonheur durable)
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