16-09-27-discours-fete-de-la-fwb - Gouvernement de la Fédération

Transcription

16-09-27-discours-fete-de-la-fwb - Gouvernement de la Fédération
FÉDÉRATION WALLONIE-BRUXELLES
PRÉSIDENCE DU GOUVERNEMENT
RUDY DEMOTTE
Discours de la fête
de la Fédération Wallonie-Bruxelles
Bruxelles, le 27 septembre 2016
Mesdames et Messieurs, en vos titres et qualités,
Pierre Mendès France disait : « La République doit
se construire sans cesse car nous la concevons
éternellement révolutionnaire, à l’encontre de
l’inégalité, de l’oppression, de la misère, de la
routine des préjugés, éternellement inachevée
tant qu’il reste un progrès à accomplir ».
Je vous rassure, je ne suis pas venu prêcher la
révolution.
En revanche, je suis venu plaider pour que nous
relancions la marche du progrès !
Lutter contre « l’inégalité, l’oppression, la misère et la
routine des préjugés »… Qui oserait affirmer que cette
mission que Mendès France assignait à la chose
publique relève d’un autre âge ?
1
Inégalité, oppression, misère, préjugés… que l’on porte
nos regards au loin ou qu’on les pose au coin de la rue,
partout nous avons sous les yeux le rappel douloureux
des maux qui nous assaillent.
Voilà pourquoi, j’estime que le temps est venu de
réhabiliter l’égalité et d’en refaire la valeur phare
de notre action.
L’égalité, c’est d’abord celle qui, par nature, existe
entre les êtres humains, par-delà toutes leurs
différences…
Une réalité niée avec une barbarie sans nom ces
dernières années ; mais aussi une réalité malmenée à
tous les niveaux, à travers les mille et une formes que
peut revêtir le racisme.
« Si ça ne te plaît pas, retourne au Maroc » déclare-ton au cœur même du Parlement fédéral, sur des bancs
qui ne sont pas ceux de l’infamie…
Ne polémiquons pas, l’indignation fut large et l’incident
est clos aux dires de l’intéressée.
Mais l’écho de ces propos est douloureux, très
douloureux aux oreilles des démocrates que nous
sommes.
Douloureux et inquiétant car il s’inscrit dans la voie de
la banalisation du propos raciste et de la libération de la
parole haineuse… Nous pensions que cette pensée
réactionnaire appartenait à des temps révolus : la voilà
en pleine résurgence.
2
Dans une France où la noirceur du Front se cache dans
le bleu Marine ;
En Allemagne, où, pour la première fois, le vaccin de
l’Histoire semble ne plus garantir l’immunité ;
Dans les plaines d’Europe centrale et jusque dans la
campagne électorale américaine ;
la régression des valeurs est générale et nous devons
être les premiers à frémir de ce relativisme avec lequel
nous abordons des propos naguère inacceptables.
Oh certes, il convient de rappeler que le racisme est un
délit ; que des outils légaux existent pour nous
préserver de cette dérive et que nous pouvons être
fiers d’avoir été à l’avant-garde de ce progrès.
Mais la victoire contre ce fléau ne sera jamais le
résultat de la seule peur du gendarme.
La lutte contre le racisme et toutes les formes de
discrimination est un combat quotidien.
Un combat aux avant-postes desquels se trouve la
Fédération Wallonie-Bruxelles.
Les temps actuels réveillant les fanatismes nous
imposent cependant d’éviter de tomber dans le piège
de la division, du rejet de l'autre, de la stigmatisation et
de la discrimination de communautés présentées
comme l’incarnation de tous les dangers et de tous les
maux de la société.
3
Nous devons agir en profondeur en prenant des
mesures de sorte que l’ensemble de nos citoyens - et
les jeunes en particulier - puissent croire en l’avenir et
en leur avenir.
Mon gouvernement soutient quantité de projets
citoyens comme
le dispositif de Promotion de la
Citoyenneté et l’Interculturalité qui encourage la
rencontre de différentes cultures, générations et
milieux pour s’attaquer à la méconnaissance de l’autre,
source de bien des craintes et comportements
menaçants ;
Nous venons de lancer un outil numérique à destination
des jeunes. Son but : susciter le débat, interpeller sur
des questions de citoyenneté. Cela sera un bel adjuvant
pour nos cours de citoyenneté;
Nous lancerons très prochainement une vaste
campagne grand public de lutte contre le racisme et de
déconstruction des préjugés.
Ou encore la campagne « No Hate » en partenariat
avec le Conseil de l’Europe.
Mesdames, Messieurs,
La culture et la création sont également un rempart
contre la négation de l’autre et une arme pour celles et
ceux qui, face à l’inacceptable, ont choisi de se lever
pour résister.
4
Je veux donc saisir l’occasion de cette fête pour me
réjouir du formidable atout que constituent les artistes
et créateurs de Wallonie et de Bruxelles, à bien des
égards, mais aussi dans cette approche positive de la
société que nous devons soutenir ensemble.
Une autre arme sur laquelle notre Communauté peut
compter est celle de l’enseignement qui est à la base de
tout. Il permet de combattre l’ignorance, mère de tous
les simplismes. Et nous sommes pleinement conscients
du rôle primordial qu’endosse le corps enseignant dans
ce combat.
Je plaçais ce discours du 27 septembre sous le signe de
l’égalité.
Et cette égalité, force est de reconnaître qu’elle a
déserté ce monde, si mal globalisé.
En son temps - pas si lointain -, Pierre Desproges
disait que « les aspirations des pauvres ne sont
pas éloignées de la réalité des riches ».
Mais que dirait aujourd’hui ce féroce humoriste devant
le spectacle d’un monde où nul pauvre, voire nul
homme « ordinaire », n’aurait la folie de simplement
aspirer à la réalité des super-riches, tant celle-ci se
trouve désormais au-delà de toute mesure.
L’Histoire l’a montré – et de funeste manière l’injustice, combinée à l’absence de perspectives, est à
l’origine des plus vives tensions de notre société.
5
Et pour y faire face, la meilleure stratégie, la seule
peut-être, a toujours été de renforcer les moyens
d’émancipation matérielle et intellectuelle des individus,
de chaque femme et chaque homme, par l’éducation,
condition de toute insertion.
L’éducation, l’enseignement, pour la Fédération
Wallonie-Bruxelles, c’est avant tout le défi de la qualité
et de la cohésion.
C’est refaire de notre système éducatif un vecteur
d’insertion, d’égalité et de progrès.
Voilà pourquoi le principal chantier des mois à venir est
le Pacte d’excellence.
Ce Pacte est notre Plan Marshall. Ce Pacte est une
nécessité impérieuse. Une réforme concertée avec
l’ensemble des acteurs de l’école que j’entends mener
jusqu’au bout avec l’ensemble de mon Gouvernement!
Il doit bénéficier des moyens humains et financiers à
hauteur de cet enjeu.
Un chantier vital pour tous, qui doit mobiliser chacun
d’entre nous et l’ensemble des niveaux de pouvoir.
Je me réjouis de l’intention du Premier ministre de
soutenir un Pacte d’investissement dans lequel
l’école a toute sa place.
Mais je me dois de dire que notre attachement à la
loyauté
fédérale
est
parfois
heurté
par
des
comportements interpellants.
6
Je songe plus précisément au respect
ensemble entre communautés de Belgique.
du
vivre
Comment interpréter le refus de répondre positivement
aux besoins objectifs des francophones en matière
d’attestations INAMI ?
Comment croire en la sincérité de d’aucuns, membres
de la majorité fédérale, qui préconisent « Wij moeten
de Franstaligen in de positie van vragende partij
krijgen. Wij moeten de Franstaligen uit hun kot
lokken » c’est à dire de mettre les francophones en
position de demandeurs en les contraignant à
sortir de leur « trou ».
Veut-on nous faire sortir du cadre institutionnel au prix
du délitement de l’Etat ?
Le piège est grossier et j’espère que tous les
francophones - où qu’ils siègent – le mesurent
bien !
Ma conviction est que l’ampleur des défis nous impose plus que jamais - une action conjuguée à tous les
niveaux.
Je m’inscris à contre-courant de la pensée facile. Ca ne
va pas ? La Belgique ? On la gomme ! L’Europe ? On la
gomme ! La Fédération Wallonie-Bruxelles ? On la
gomme. On ne construit pas des projets avec du Tipex.
Je pense au contraire qu’il faut agir en utilisant tous les
niveaux. A cet égard,
je ne peux taire ma
préoccupation européenne.
7
Cette Europe - qui célébrera en 2017 le soixantième
anniversaire du Traité de Rome.
L’Europe, une des plus belles réalisations du siècle
passé, offre aujourd’hui au monde et à ses citoyens le
visage de la désunion.
Désunion sur la question des dettes souveraines,
désunion avec le Royaume-Uni ; désunion sur la
politique à l’égard des réfugiés ; désunion sur la
politique économique…
Reconnaissons que les Institutions européennes, dans
leur ensemble, n’ont pas suffisamment porté l’espoir.
Si les citoyens se détournent de l’Europe, c’est en
partie du fait de la faiblesse de la croissance
économique, c’est aussi parce que les inégalités se
renforcent et parce que la foi dans le progrès a fait
place au fatalisme de la régression.
Ce n’était pas cela le projet européen !
Ce n’était pas cela la promesse de l’Europe !
Si elle veut ré-enchanter ses peuples ou, plus
modestement, retrouver la confiance de ses citoyens,
l’Union doit démontrer sa capacité à soutenir une
croissance durable de l’économie et de l’emploi, sa
capacité de protéger les citoyens des effets négatifs du
commerce mondial et sa capacité à répartir les fruits de
la croissance avec plus d’équité.
8
Concrètement, cela signifie que nous plaidons pour une
harmonisation fiscale et sociale vers le haut,
l’achèvement de l’union bancaire, un contrôle renforcé
aux frontières externes, l’assouplissement des règles
comptables qui jugulent les investissements et une
meilleure régulation du commerce international. Et
permettez-moi de rappeler l’opposition de la Fédération
aux projets d’accords CETA et TTIP.
Sur le plan européen, la Fédération Wallonie-Bruxelles
plaide aussi pour l’amplification du principe de
coopération renforcée. Ce mécanisme existe mais de
manière insatisfaisante dans sa forme actuelle, comme
le montre, d’ailleurs, l’incapacité à mettre en œuvre
une taxation des transactions financières.
La zone euro constituerait le noyau idéal pour porter
ces projets politiquement ambitieux.
Il est aujourd’hui vital de pouvoir traduire en actes
notre ambition pour le projet européen, même si nul ne
souhaite transformer l’Union en un super-État
bureaucratique se mêlant de tout.
Voilà pourquoi, à mon tour, j’en appelle à une réforme
en profondeur de l’Union européenne qui doit cesser
d’être un projet comptable pour redevenir un projet
politique global au service des citoyens.
Là aussi, il s’agit de servir notre quête de l’égalité ;
L’égalité qui se trouve au cœur des valeurs
européennes ; l’égalité pour ne pas opposer les peuples
entre eux, ni les travailleurs les uns aux autres.
9
L’égalité…Voilà la valeur, fondamentale
et
fondatrice, capable de redonner espoir, confiance
et détermination aux citoyens et à tous les
acteurs soucieux de rendre notre société à la fois
plus efficace et plus fraternelle.
Mesdames, Messieurs,
Jacques Attali écrivait dans sa Nouvelle utopie :
« L'Égalité et la Liberté sont des droits, la
Fraternité est une obligation morale ».
Rétablissons l’équilibre indispensable entre ces droits
fondamentaux que sont la liberté et l’égalité et, n’en
doutez pas, la fraternité fleurira, plus belle que jamais,
entre des individus à nouveau convaincus que l’avenir
appartient à tous, dans le respect de chacun.
Travaillons-y ensemble ; travaillons-y chaque jour, et
cet espoir ne tardera pas à devenir réalité.
Merci pour votre présence et bonne fête à toutes et
tous !
10