Travaux dirigés de Procédure civile
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Travaux dirigés de Procédure civile
Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse L3 Droit Année 2016-2017 Travaux dirigés de Procédure civile Équipe pédagogique : Chargé de cours : Jean-Yves Borel Chargés de travaux dirigés : Marie Suzy Pascal Pons Jean Christophe Tixador SÉANCE 9 – LES CONDITIONS DE L’APPEL Analyse et discussion : Cass. Civ. 3e, 24 février 1999 Cass. Civ. 2e, 12 juillet 2001 Cass. Civ. 2e, 10 juillet 2003 FRICERO Natalie. L’appel nouveau est arrivé ! Procédures n° 5, Mai 2010, étude 3 Commentaire : Cass. Civ 2e, 20 novembre 2003 Cass. Civ. 3e, 24 février 1999 Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Vu les articles 563 et 565 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que, pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux ; que les prétentions ne sont pas nouvelles, dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 janvier 1997), que Mme X..., bailleresse d'un local à usage commercial, ayant donné congé avec refus de renouvellement à la société Chocolats et confiseries de luxe, locataire, a exercé son droit de repentir et offert de renouveler le bail moyennant un loyer majoré ; qu'assignée en fixation du nouveau prix devant le tribunal de grande instance, elle a conclu au déplafonnement, soutenant que l'ancien bail n'avait pris fin que par l'effet du repentir, de sorte qu'il avait reçu exécution pendant plus de douze ans ; qu'elle a, en cause d'appel, ajouté que les facteurs locaux de commercialité avaient subi une modification notable dans le cours de l'ancien bail ; Attendu que, pour déclarer Mme X... irrecevable à invoquer pour la première fois le moyen de déplafonnement tiré d'une modification notable des facteurs locaux de commercialité, l'arrêt retient que ce moyen est nouveau pour n'avoir pas été invoqué devant les premiers juges ; Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche : Vu l'article 29 du décret du 30 septembre 1953 ; Attendu que les contestations relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé sont portées, quel que soit le montant du loyer, devant le président du tribunal de grande instance ou le juge qui le remplace ; que les autres contestations sont portées devant le tribunal de grande instance qui peut, accessoirement, se prononcer sur les demandes mentionnées à l'alinéa précédent ; Attendu que l'arrêt retient que le moyen tiré du déplafonnement, à supposer qu'il eût été invoqué en première instance, n'aurait pu être examiné par le tribunal de grande instance, en dehors de la procédure habituelle de fixation de loyer prévue par les articles 29 et suivants du décret du 30 septembre 1953, laquelle relève de la compétence exclusive du juge des baux commerciaux ; Qu'en statuant ainsi, tout en relevant qu'elle était saisie d'une contestation sur la date du renouvellement du bail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare Mme X... irrecevable à invoquer le moyen de déplafonnement tiré d'une modification notable des facteurs locaux de commercialité, l'arrêt rendu le 31 janvier 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles. Cass. Civ. 2e, 12 juillet 2001 Sur le moyen unique : Vu les articles 114 et 117 du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article 901 du même Code ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur déféré d'une ordonnance d'un conseiller de la mise en état, qu'un jugement d'un tribunal de grande instance a débouté la société Garage du Lac de la demande de dommages-intérêts qu'elle avait formée contre la société Sonauto en suite de la résiliation d'un contrat de concession ; qu'un appel de ce jugement a été interjeté au nom de la " société Garage du Lac ayant son siège... agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège " ; que la société Sonauto a soulevé l'irrecevabilité de l'appel en soutenant que la déclaration d'appel ne mentionnait ni la forme sociale de la société appelante ni l'organe habilité à la représenter en justice ; Attendu que, pour déclarer l'appel irrecevable, l'arrêt retient que l'omission, dans la déclaration d'appel, de la forme de la personne morale appelante et celle de l'organe habilité à la représenter en justice constituent des irrégularités de fond entraînant la nullité de l'acte, indépendamment de tout grief ; Qu'en statuant ainsi, alors que les irrégularités qui affectent les mentions de la déclaration d'appel constituent des vices de forme dont la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver l'existence d'un grief, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 septembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée. Cass. Civ. 2e, 10 juillet 2003 Sur le moyen unique : Vu les articles 550 et 562 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que l'appel ne défère à la cour d'appel que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent ; Attendu que M. X... a engagé contre les époux Y... une action en responsabilité ; qu'un jugement a déclaré les époux Y... fautifs et les a condamnés in solidum à payer à M. X... une somme de 1 franc à titre de dommages-intérêts ; que M. X... a interjeté un appel limité au montant de la somme qui lui avait été attribuée en réparation de son préjudice et que les époux Y... ont conclu à la confirmation du jugement de première instance ; Attendu que la cour d'appel a réformé le jugement en toutes ses dispositions et a condamné M. X... à verser aux époux Y..., sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, une somme de 762,25 euros ; Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle ne pouvait statuer que sur le montant des dommages-intérêts et des indemnités, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juin 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ; Condamne les époux Y... aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes respectives de M. X... et des époux Y... ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; L'appel nouveau est arrivé ! Étude par Natalie FRICERO Professeure à la faculté de droit de Nice Sophia Antipolis Directrice de l'Institut d'études judiciaires Sommaire À partir du 1er janvier 2011, la procédure d'appel avec représentation obligatoire se modernise. Les professionnels du droit devront assumer d'importantes charges processuelles pour le compte des parties : notamment, ils devront recourir à la communication électronique, respecter des délais stricts sévèrement sanctionnés, et rédiger des écritures modélisées. La conduite de l'instance reposera sur de nouvelles pratiques professionnelles, et la mise en état se déroulera selon un calendrier accepté par tous. 1. - Dans le prolongement du rapport Magendie « Célérité et qualité de la justice devant la cour d'appel » du 24 mai 2008Note 1, le décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009 réforme la procédure d'appel avec représentation obligatoire. Les nouvelles dispositions sont prévues pour entrer en vigueur le 1er janvier 2011Note 2. Initialement, la fusion des avoués avec les avocats devait entrer en application au même moment, mais la dernière rédaction du projet de loi prévoit la mise en oeuvre de la fusion au 1er janvier 2012. Le projet de loi n° 2206, portant réforme de la représentation devant les cours d'appel, adopté par le Sénat le 22 décembre 2009 prévoit en effet dans son article 34 que le chapitre 1er, modifiant la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, entrera en application le 1er janvier 2012. Ce sont donc les avoués qui mettront en application la nouvelle procédure et, notamment, la déclaration d'appel et la constitution sous la forme électronique (CPC, art. 930-1)Note 3. Pour les autres actes de la procédure, l'entrée en vigueur des nouvelles technologies est reportée au plus tard, au 1er janvier 2013Note 4. L'article 748-7 nouveau du Code de procédure civile est déjà applicable, y compris aux instances en cours au 9 décembre 2009 : lorsque, pour une cause étrangère, la transmission électronique n'a pu en être faite le dernier jour du délai, ce délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant. 2. - La réforme modernise la procédure d'appel tout en maintenant les caractéristiques substantielles de l'appel : voie de réformation et d'annulation, l'appel doit rester une voie d'achèvement du litige, offrant au justiciable succombant en première instance une possibilité concrète et effective de critiquer la solution, en fait et en droit, mais aussi de soumettre au juge d'appel tous les éléments accessoires et complémentaires aux prétentions originaires. Dans ce cadre, et conformément aux exigences européennes, la cour d'appel doit être en mesure de donner au litige une solution définitive, dans un délai raisonnable : certes, le droit même d'exercer un appel n'est pas un droit de l'homme, mais, dès que l'État organise un tel recours, il est alors contraint de respecter le procès équitable. La modernisation a conduit à deux séries de réformes : l'intégration de la communication électronique et l'encadrement des comportements procéduraux, qui repose sur de nouveaux délais, de nouvelles diligences procédurales et de nouvelles sanctions. 1. Une procédure modernisée grâce aux nouvelles technologies 3. - Dans l'arrêt Lawyer Partner SA c/ Slovaquie du 16 juin 2009Note 5, la Cour européenne a jugé que l'État peut être condamné pour entrave substantielle à l'accès au juge et violation du procès équitable, si le Code de procédure civile ouvre la possibilité de recourir aux nouvelles technologies, notamment pour la formation des demandes, et que les juridictions ne sont pas suffisamment équipées pour traiter les demandes (en l'espèce, la société avait l'intention d'introduire plus de 70 000 demandes, et les déposer sous une forme électronique était la seule possibilité praticable !). Il est donc nécessaire que les cours d'appel puissent communiquer avec les professionnels du droit, et les professionnels entre eux, d'ici le 1er janvier 2011... 4. - Contrairement au principe posé par l'article 748-2 du Code de procédure civile, qui impose l'acceptation du destinataire des envois par voie électronique, le décret impose le recours aux nouvelles technologies : les actes de procédure devront être remis à la juridiction sous cette forme à peine d'irrecevabilité relevée d'office Note 6. Si une cause étrangère à celui qui accomplit l'acte, survient le dernier jour du délai, l'article 748-7 précise que le délai sera prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant (par ex. une panne du serveur, une coupure généralisée de courant...). Si la transmission s'avère impossible, pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, l'acte peut alors être établi sur support papier et remis en cette forme au greffe, selon l' article 930-1, alinéa 2, du Code de procédure civile. En ce cas, la déclaration d'appel est remise au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué. Attention : Lorsque l'acte ne peut pas être transmis, il faut se ménager des preuves de la cause étrangère à celui qui doit accomplir l'envoi, et prévoir de l'établir sous forme papier dans le respect des exigences légales. De plus, même après l'entrée en vigueur du décret, la notification de la déclaration d'appel à l'intimé sera toujours effectuée sur support papier, par lettre simple à la diligence du greffe de la cour et par voie de signification par les soins de l'appelant en cas de retour de la lettre de notification ou de défaut de constitution d'avoué par l'intimé dans le mois de l'envoi (CPC, art. 902). Dès que l'avoué de l'intimé est constitué, la communication se fera par voie électronique à son égard (CPC, art. 930-1). 5. - Les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avoués des parties en la forme électronique (CPC, art. 930-1, al. 3), sauf impossibilité pour cause étrangère à l'expéditeur. 6. - Le contenu de la déclaration d'appel par voie électronique n'est pas modifié. L'article 901 du Code de procédure civile reprend les dispositions anciennes (le 2° mentionne « l'indication de la décision attaquée », à la place de « l'indication du jugement », ce qui est plus explicite), et renvoie toujours aux mentions prescrites par l'article 58, le tout « à peine de nullité ». Le recours à la communication électronique pose la question du sort d'une déclaration incomplète : le greffe en accusera-t-il néanmoins réception, afin que l'appel soit enregistré, et que son éventuelle nullité soit jugée par le conseiller de la mise en état ultérieurement ? Ou bien le système informatique bloquera-t-il la déclaration, ce qui équivaudrait à une irrecevabilité ? En tout état de cause, le recours à la voie électronique conduit nécessairement à une professionnalisation de la procédure d'appel : il ne peut être imposé qu'aux auxiliaires de justice, qui sont présumés équipés (observons que l'arrêté du 14 décembre 2009 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures sans représentation obligatoire ne vise que les communications entre avocats et services de la cour d'appel). 2. De nouvelles pratiques professionnelles dans la conduite de l'instance A. - Le renforcement des charges processuelles 7. - Le décret de 2009 définit différemment les diverses phases de l'instance d'appel : l'idée générale est d'imposer aux parties une obligation de concentrer dans le temps les moyens et prétentions d'appel. L'assemblée plénière de la Cour de cassation a déjà exigé des parties qu'elles concentrent en première instance la totalité des moyens pertinentsNote 7, tant en demande qu'en défense, sous peine de se voir opposer l'autorité de la chose jugée si une seconde demande est présentée à l'occasion des mêmes faits. En appel, la problématique est différente : les nouvelles dispositions imposeront aux parties de préciser rapidement leurs prétentions et moyens d'appel, et sanctionneront sévèrement leur inaction. Néanmoins, la possibilité de soulever des demandes complémentaires ou accessoires aux prétentions initiales reste ouverte : les articles 564 et suivants du Code de procédure civile ne sont pas modifiés, sauf pour prévoir que la Cour peut relever d'office l'irrecevabilité d'une demande nouvelle Note 8. Le maintien d'un appel conçu comme une voie d'achèvement du litige s'imposait dans le contexte procédural actuel : comme les juges de première instance ne sont pas tenus de faire application d'une règle de droit autre que celle invoquée par les parties sur le fondement de l'article 12 du Code de procédure civile Note 9, en cas d'erreur de qualification, ou d'oubli de la part des parties et, dans la mesure où une seconde demande en première instance se heurte à l'autorité de la chose jugée, il est impératif d'offrir aux parties le droit de présenter au juge d'appel une nouvelle qualification juridique et, le cas échéant, des prétentions accessoires et complémentaires. Le principe de concentration est donc abordé sous un autre aspect, plus temporel, en appel : les parties ont l'obligation de présenter toutes leurs prétentions et moyens, même nouveaux, dans un temps limité. 8. - Nouveau schéma procédural : quatre problématiques sont ici envisagées • À compter de la déclaration d'appel, l'appelant disposera d'un délai de trois mois pour conclure, à peine de caducité de l'appel. Cette sanction automatique, qui éteint l'instance (CPC, art. 385) et prive la déclaration d'appel de son effet interruptif de la prescription et de la forclusion, pourra être relevée d'office par ordonnance du conseiller de la mise en état (CPC, art. 908). Cette ordonnance aura autorité de la chose jugée au principal (CPC, art. 914) et pourra être déférée à la cour dans les quinze jours de sa date (CPC, art. 916). Attention : La sanction actuelle de la radiation, avec privation de l'effet suspensif, prévue à l'article 915 du Code de procédure civile disparaît. De plus, le délai accordé à l'appelant pour conclure est ramené de quatre à trois mois. La caducité de l'appel n'interdit pas la formation d'une nouvelle déclaration d'appel, mais uniquement sous réserve que le délai ne soit pas expiré. Comme le délai d'appel est, en principe, d'un mois à compter de la signification du jugement, la déclaration de caducité provoquera le plus souvent l'application de la forclusion... En cas de pluralité d'appelants principaux, des difficultés apparaîtront si l'un conclut dans le délai, et non l'autre ! En cas de solidarité ou d'indivisibilité, l'article 552 du Code de procédure civile imposera de laisser l'appelant indivisible dont l'appel est caduc de se joindre à l'appel non caduc. En l'absence d'indivisibilité, on pourrait suggérer que le délai de trois mois pour conclure soit repoussé jusqu'à l'expiration du dernier délai dont bénéficie le dernier des appelantsNote 10, pour éviter que l'appel principal de l'un soit déclaré caduc, alors que celui d'un autre appelant se poursuit... • À peine d'irrecevabilité relevée d'office, l'intimé disposera de deux mois, à compter de la notification des conclusions de l'appelant, pour conclure et former, le cas échéant, un appel incident (CPC, art. 909). L'article 550 du Code de procédure civile, non modifié, précise que l'appel incident n'est pas reçu si l'appel principal n'est pas lui-même « recevable », dès lors que l'appelant incident n'a pas formé son appel dans le délai de l'appel principal : pourra-t-on étendre cette solution à la caducité de l'appel relevée en raison de l'absence de dépôt de ses conclusions par l'appelant (CPC, art. 908) ? • À peine d'irrecevabilité relevée d'office, l'intimé à un appel incident ou à un appel provoqué disposera de deux mois pour conclure, à compter de la notification qui lui en sera faite (CPC, art. 910). • À peine d'irrecevabilité relevée d'office, l'intervenant forcé à l'instance d'appel disposera, pour conclure, d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la demande d'intervention forcée à son encontre lui aura été notifiée (CPC, art. 910, al. 2). Attention : Quand une demande d'aide juridictionnelle aura été formée, les délais courront à compter, soit de la notification de la décision constatant la caducité de la demande, soit de la date à laquelle la décision d'admission ou de rejet de la demande sera devenue définitive, ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle l'auxiliaire de justice aura été désigné Note 11. 9. - Le conseiller de la mise en état pourra impartir, même d'office, des délais plus courts pour conclure, en raison de la nature de l'affaire (l'article 911-1 du Code de procédure civile renverra aux articles 908, 909 et 910). 10. - Sous peine des sanctions prévues aux nouveaux articles 908 à 910 (caducité et irrecevabilité), les conclusions seront « notifiées aux avoués des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour » ou seront « signifiées dans le mois suivant l'expiration de ce délai à celles qui n'ont pas constitué avoué » (CPC, art. 911). Attention : Pour éviter la caducité de son appel, l'appelant devra porter une grande attention au comportement de l'intimé. Si ce dernier ne constitue pas avoué, il devra lui notifier ses conclusions dans le mois qui suivra l'expiration du délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel. Cette obligation de notifier à l'intéressé dans le mois, concernera toutes les parties (intimée, appelante incidente, ou provoquée, et même intervenante forcée), puisque l'article 911 du Code de procédure civile renverra aux articles 908 à 910. 11. - Dans les quinze jours suivant l'expiration des délais pour conclure et communiquer les pièces, le conseiller de la mise en état devra examiner l'affaire. En principe, il fixera la date de la clôture et celle des plaidoiries (CPC, art. 912). Si l'affaire devait nécessiter de nouveaux échanges de conclusions, il en fixera le calendrier, après avoir recueilli l'avis des avoués. Logiquement, ce calendrier devra permettre aux parties de développer des prétentions et moyens qu'elles n'auront pas encore présentés dans leurs conclusions antérieures, dans la mesure où ils entreront dans le cadre des articles 564 et suivants du Code de procédure civile. 12. - En cas de non-respect de ce calendrier par l'une des parties, le conseiller de la mise en état pourra, comme c'est le cas actuellement, prononcer la clôture partielle Note 12. Il rétractera l'ordonnance de clôture partielle, d'office ou lorsqu'il sera saisi de conclusions à cette fin, pour permettre de répliquer à des demandes ou à des moyens nouveaux présentés par une partie postérieurement à cette ordonnance ou en cas de « cause grave et légitime » (CPC, art. 913 ; l'article 780 actuel du Code de procédure civile se réfère à la « cause grave et dûment justifiée »). 13. - Les dossiers, comprenant les copies des pièces visées dans les conclusions et numérotées dans l'ordre du bordereau récapitulatif, devront être déposés à la Cour quinze jours avant la date fixée pour l'audience des plaidoiries (CPC, art. 912, al. 3). Attention : Le dépôt du dossier quinze jours avant la date de l'audience deviendra systématique. Il permettra au juge de prendre connaissance des éléments avant l'audience, notamment pour établir le rapport prévu à l'article 785 du Code de procédure civile. En effet, le dossier doit comprendre les copies des pièces visées dans les conclusions et numérotées dans l'ordre du bordereau récapitulatif. B. - La modélisation des écritures 14. - Le décret du 28 décembre 1998 avait ouvert la voie à une modélisation des écritures, en imposant, à la fois, la rédaction de conclusions qualificatives (exposant les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondées) et de conclusions récapitulatives (devant la cour d'appel, les dernières écritures doivent reprendre les prétentions et moyens précédemment invoqués). Mais la pratique a démontré que des améliorations devaient être apportées, et l'article 954 du Code de procédure civile est doublement modifié. 15. - La première réforme concerne l'indication des pièces, avec l'objectif d'une meilleure lisibilité, pour une transparence accrue et un niveau élevé de respect du contradictoire. En effet, les conclusions d'appel devront formuler expressément les prétentions des parties, et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions sera fondée, « avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées » (CPC, art. 954, al. 1er). Un bordereau récapitulatif des pièces sera annexé. Cette précision contribuera à la loyauté des débats : la partie devra indiquer spécifiquement les pièces qui sont invoquées à l'appui de chacune des prétentions. Néanmoins, le non-respect de cette exigence ne sera pas expressément sanctionné par la nullité. Attention : L'article 132, alinéa 3, du Code de procédure civile sera abrogé. La communication de toutes les pièces versées aux débats en appel deviendra automatique, ce qui garantira les droits de la défense. 16. - La seconde réforme vise la structuration des écritures. La liberté accordée actuellement aux parties ne facilite pas la tâche du juge : en effet, selon la Cour de cassation, le juge doit répondre aux différents moyens et prétentions contenus dans les écritures, quelle que soit la place qu'ils occupent et la partie des conclusions dans laquelle ils figurentNote 13. Il est possible de glisser dans les motifs des conclusions un appel incident, qui ne serait pas repris dans le dispositif des écritures, et obliger le juge d'appel à statuer. Le décret de 2009 mettra fin à cette pratique. En effet, l'article 954 du Code de procédure civile précisera que « les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ». Les parties auront donc l'obligation de procéder dans leurs dernières écritures à une double récapitulation. D'abord, elles devront, comme c'est le cas actuellement, reprendre les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. La sanction restera identique : une prétention non reprise sera réputée avoir été abandonnée, et la cour ne statuera que sur les conclusions déposées. Ensuite, les parties devront récapituler dans le dispositif de leurs dernières écritures, les différentes prétentions qu'elles soutiennent en appel : la sanction sera rigoureuse, puisque la cour ne statuera que sur les prétentions énoncées au dispositif. Il ne sera donc plus possible d'obliger le juge à statuer sur un appel incident non repris dans le dispositif. Les auxiliaires de justice devront être rigoureux dans l'indication des prétentions : il ne s'agit pas, dans le dispositif, de reprendre les moyens de fait et de droit sur lesquels les prétentions sont fondées, exposés dans les motifs, mais uniquement d'indiquer leur contenu. La portée de cette seconde récapitulation sera certainement précisée par la Cour de cassation. Notamment, la question se posera de savoir s'il convient de récapituler dans le dispositif les incidents de procédure, ou si seules les conclusions qui détermineront l'objet du litige ou soulèveront un incident de procédure seront visées (comme c'est le cas actuellement pour la présomption d'abandon d'une prétention non récapitulée). C. - L'accroissement des pouvoirs du juge 17. - La nouvelle procédure d'appel s'insère parfaitement dans la tendance législative actuelle qui consiste à revaloriser la mise en état des affaires. Les juges du fond doivent pouvoir statuer sur un litige apuré de tous les incidents de procédure, et sur des faits prouvés et établis à l'issue d'échanges contradictoires et loyaux. Le conseiller de la mise en état a donc reçu des attributions de plus en plus importantes, pour administrer la mise en état, et pour trancher les différents incidents procéduraux. La procédure d'appel n'échappe pas à ce courant. 18. - Le conseiller de la mise en état reçoit des pouvoirs nouveaux. Il dispose déjà d'une compétence exclusive, depuis sa désignation et jusqu'à son dessaisissement, comme le juge de la mise en état devant le tribunal de grande instance (l'article 910 du Code de procédure civile renvoie aux articles 763 à 787). Comme l'article 907 du Code de procédure civile renverra exactement aux mêmes textes, le conseiller de la mise en état conservera ces pouvoirs. Avec la réforme, l'article 914 du Code de procédure civile précisera qu'il aura une compétence exclusive pour « prononcer la caducité de l'appel » et pour « déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel ». Attention : Les parties ne seront plus recevables à invoquer l'irrecevabilité de l'appel ou sa caducité après le dessaisissement du conseiller de la mise en état, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement. Mais le juge d'appel conservera son pouvoir de relever d'office l'irrecevabilité de l'appel, par application de l'article 125 du Code de procédure civile non modifié, même après le dessaisissement du conseiller de la mise en état. 19. - Les ordonnances du conseiller de la mise en état seront soumises à un régime procédural modifié. Elles auront autorité de chose jugée au principal lorsqu'elles statueront sur la caducité ou l'irrecevabilité de l'appel (CPC, art. 914, al. 3). En conséquence, elles pourront « être déférées par simple requête à la cour dans les quinze jours de leur date, lorsqu'elles statuent sur une exception de procédure, un incident mettant fin à l'instance, la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ou la caducité de celui-ci » (CPC, art. 916). 20. - Le conseiller de la mise en état veillera au respect par les parties de la modélisation des écritures : il aura le pouvoir d'enjoindre aux avoués (puis aux avocats à partir de 2012), de mettre leurs conclusions en conformité avec les dispositions de l'article 954 du Code de procédure civile (CPC, art. 913-1). 21. - La cour d'appel disposera d'un nouveau pouvoir d'office. Actuellement, la Cour de cassation considère que l'irrecevabilité d'une prétention nouvelle en appel est d'intérêt privé et ne peut être soulevée que par la partie intéressée. Le rapport CoulonNote 14 avait déjà suggéré en 1997 que la cour d'appel de renvoi après cassation puisse relever d'office l'irrecevabilité d'une demande nouvelle. La réforme de 2009 va plus loin puisqu'elle accordera à la cour, dans toutes les instances d'appel, le pouvoir de relever d'office le caractère irrecevable d'une prétention nouvelle. ▪ Note 1 Dit rapport Magendie II, Célérité et qualité de la justice devant la cour d'appel : La Documentation française 2008.Note 2 D. n° 2009-1524, 9 déc. 2009, art. 15, al. 1er.Note 3 D. n° 2009-1524, 9 déc. 2009, art. 15, al. 3.Note 4 D. n° 2009-1524, 9 déc. 2009, art. 15, al. 4.Note 5 CEDH, 16 juin 2009, n° 54252/07 et a. : Procédures 2009, comm. 358, note N. Fricero.Note 6 CPC, art. 930-1 : à partir du 1er janvier 2011, seule la déclaration d'appel et la constitution d'avoué seront concernées, pour les autres actes, le décret envisage une entrée en vigueur, au plus tard, à la date du 1er janvier 2013.Note 7 Cass. ass. plén., 7 juill. 2006, n° 04-10.672 : JurisData n° 2006-034519.Note 8 L'article 10 du décret de 2009 prévoit qu'au début de l'article 564, il est ajouté : « À peine d'irrecevabilité relevée d'office ».Note 9 Cass. ass. plén., 21 déc. 2007 : Bull. civ. ass. plén. 2007, n° 10 ; BICC 15 avr. 2008, p. 18, rapp. Loriferne, avis De Gouttes.Note 10 Ph. Gerbay, La réforme de la procédure d'appel avec représentation obligatoire en matière civile : Gaz. Pal. 12 janv. 2010, n° 12, p. 12.Note 11 D. n° 91-1266, 19 déc. 1991, art. 38-1.Note 12 Le nouvel article 913 du Code de procédure civile reprend l'article 780 du même code auquel renvoie à l'article 910.Note 13 Cass. 2e civ., 10 juill. 2003 : Bull. civ. 2003, II, n° 243 ; JCP G 2003, IV, 2571.Note 14 Réflexions et propositions sur la procédure civile : La Documentation française 1997, p. 96 et s. Cass. Civ 2e, 20 novembre 2003 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les époux X... ont demandé à un tribunal de grande instance de prononcer la résolution de la vente d'un appartement, en l'état futur d'achèvement, que leur avait consentie la SCI du 60, avenue du Bas Meudon (la SCI) ; que ce Tribunal a prononcé la résolution et a condamné la SCI à leur rembourser le prix et les frais d'acquisition et à leur verser différentes sommes ; que les époux X... ayant interjeté appel de ce jugement, l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Burban Philippe (l'EURL), elle-même créancière de la SCI, a demandé, par la voie oblique, la confirmation du jugement ; Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de les avoir déclarés irrecevables en leurs demandes présentées pour la première fois en cause d'appel, alors, selon le moyen, que l'action en exécution et l'action en résolution d'une convention fondées toutes les deux sur l'article 1184 du Code civil constituent sous deux formes différentes l'exercice du même droit et tendent aux mêmes fins ; qu'en conséquence, est recevable l'action en exécution de la vente sur le fondement de l'article 1184 du Code civil formée en instance d'appel, peu important qu'en première instance, le demandeur ait choisi l'alternative proposée par ce texte ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 565 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que, pour déclarer irrecevable comme nouvelle la demande des époux X..., l'arrêt retient exactement que la demande, en appel, de la délivrance des lots de copropriété ne tend pas aux mêmes fins que la demande de résolution demandée et obtenue en première instance ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ; Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche : Vu l'article 564 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que les parties peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; Attendu que, pour déclarer les époux X... irrecevables à demander, en cause d'appel, après infirmation du jugement, la délivrance de l'immeuble dont ils avaient fait l'acquisition, la cour d'appel retient que le tribunal de grande instance avait prononcé à leur demande la résolution de la vente et les condamnations pécuniaires en découlant et que ceux-ci, qui avaient obtenu gain de cause devant les premiers juges, cherchent ainsi à réparer l'erreur commise en formant leurs demandes initiales ; Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme ils le soutenaient, si les époux X... n'avaient pas eu connaissance de l'insolvabilité de la SCI que postérieurement au jugement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 novembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ; Condamne la société civile immobilière (SCI) du 60, avenue du Bas Meudon et l'entreprise Burban Philippe aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'entreprise Burban Philippe ; Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;