LA BOITE DE CIRAGE

Transcription

LA BOITE DE CIRAGE
1 - La boîte de cirage
LA BOITE DE CIRAGE
ONE MAN SHOW
1 H ou 1 F
Gustave le 2 février 2010
SYNOPSIS
Et si on disait tout haut ce que les autres pensent tout bas
Cette pièce est soumise à autorisation de son auteur pour être montée
et doit être déclarée à la SACD de votre région !
Merci.
Jean-Luc Pecqueur (Gustave) - 30, avenue du Perche, 61340 Berd'huis - 06.77.94.21.64.
[email protected]
2 - La boîte de cirage
LES PERSONNAGES :
1 homme ou 1 femme indifféremment - Dans un monde devenu très inhumain où chacun s'accroche à son
siège pour ne par perdre sa place... Délire de vérités pas toujours bonnes à dire...
3 - La boîte de cirage
ACTE UNIQUE
Nous sommes en février 2010. L'acteur arrive sur scène en se grattant derrière la tête et en grimaçant
car il va vouloir annoncer quelque chose de pas très facile.
(Faisant le silence dans la salle) Laissez-moi parler. Chut s'il vous plaît ! Si vous voulez bien que j'en
place une ? (Se fâcher et s'énerver) C'est comme vous voulez. Après tout, moi, je m'en fous. Si
vous voulez pas que j'en place une. Je me tire. C'est pas compliqué ! De toutes façons, au prix
où je suis payé... (Prendre au hasard une personne et s'adresser à elle) Ben oui mon bon
monsieur. Faut respecter les artistes, sinon y'en aura bientôt plus. Oui. Oui, c'est bien à vous
que je parle. (S'adresser à la salle et viser toujours le monsieur en question) Depuis tout à
l'heure, ce monsieur continue de parler alors que je réclame le silence. (Enervé) Tu parles,
Mossieu est assis à côté d'une belle gonzesse... Et vas-y que je te drague et vas-y que je note
ton numéro de portable... (Ecoeuré) Non mais. Encore un qui a dû réussir à venir sans Bobonne. Parce que je te le dis mon bonhomme, si Bobonne était là, tu ferais peut-être moins le
malin... (Détaché) Non mais !
(Changer de sujet pour réorienter le public) Ca commence bien ce soir tiens ! Moi j'étais venu pour vous
faire un petit sketche. D'habitude, c'est vrai, les spectateurs se taisent dès l'entrée de l'artiste.
Y'a plus aucun respect. (Détourner la conversation) Ca me fait penser au boulot ! C'est
pareil ! (Rester étonné) Ah oui, vous pouvez pas savoir. Artiste c'est pas mon métier ! Non !
Moi je fais ça comme ça, pour le plaisir. (Expliquer) Pour me payer à manger tous les jours, je
travaille. Comme tout le monde. Je fais mes huit heures. Ben ouais. Je travaille dans un bureau... (Se moquer) Troisième tiroir gauche, juste à côté de la poubelle... (Se remoquer) Mais
non, je déconne. Enfin, quand je dis que je travaille comme tout le monde, là aussi je déconne. Parce que je peux te dire que y'en a qui n'en foutent pas une ramée. (Décidé à expliquer) Déjà le matin, ils arrivent à 8 heures 42 discrètement. Et là, si tu leur fais remarquer
l'heure, ils répondent à leur chef : "oui, c'est vrai, j'arrive aux alentours de 8 h 30, mais c'est
parce que j'ai un feu rouge tous les matins !" (Prendre le public à témoin) Hé con, d'abord,
c'est pas "aux alentours" mais à 42 que t'arrive. Et puis t'as qu'a partir 12 minutes plus tôt,
t'arriveras à l'heure ducon. (Questionner le public) Ca vous épate hein : pourquoi 42 et pas 30
? Grand mystère ? Ben non ! Si t'es rusé, t'as qu'à compter : 5 jours à huit heures, ça fait 40
heures. 5 jours à 12 minutes, ça fait 60 minutes. 40 heures moins 60 minutes, ça fait bien 39
heures... mine de rien, c'est pile poil. Mais il empoche le salaire de 40 heures quand même...
Ben ouais, faut pas déconner non plus...
(Faire semblant de repartir sur un autre thème, objet de la soirée) Bon, c'est pas tout ça, mais je suis pas
venu pour vous raconter mes histoire perso. (S'excuser) Je suis désolé de vous ennuyer avec
ça. Allez bon. On va parler de la politique spectacle, comme prévu. (Dodeliner de la tête et exprimer un vrai mécontentement) J'aurais dû démarrer par ça aussitôt, mais c'est l'autre con
là, au boulot ce matin. Il m'a énervé. Avec sa tronche de cake. Toujours en train de passer de
la pommade au patron ou mielleux à mort avec la patronne.... Vous savez que mielleux ça
veut dire "avec une douceur hypocrite" (S'énerver) Ah ! Je sais pas si c'est pareil dans votre
usine, mais je supporte pas ce genre d'individus. Il a toujours la gueule enfarinée. Toujours
prêt à aider le chef pour mieux le contrer à la première occasion. La vieille ruse : toujours
faire croire au chef que c'est lui qui décide mais bien s'arranger pour l'enpapahouter discrètement : c'est de la grande virtuosité, mais ça marche. D'abord t'as l'autre qu'en pige pas une
tellement qu'il est pris par la technicité de sa tache et ensuite, t'as le petit malin qui insiste
bien fort pour faire comprendre que sans lui, ça n'irait pas aussi bien... Ca donne le sourire au
chef... (Marteler pour bien insister) Et un chef content, c'est un chef qui... qui... qui... ben qui
est content quoi ! Faut pas leur demander d'être humain non plus. Ils ne savent même pas
comment ça s'écrit !
(Faire semblant de vouloir se ressaisir encore et se mettre à parler du vrai thème de la soirée) Bon,
blague à part. Qu'est-ce que c'est la différence entre un homme politique et un homme politi-
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cien ? Ah ! (Rediriger son regard vers le prétendu monsieur qui ne voulait pas se taire tout
à l'heure) Dites monsieur, pendant que j'y pense, vous ne seriez pas chef par hasard ? Non je
dis ça, parce que quand je repense à votre attitude de tout à l'heure, jai l'impression de revoir
la tronche de mon collègue. Vous savez ! Celui qui n'en branle pas une de la journée ! Vous y
êtes pour rien mon pauv' monsieur ! Non. Je sais ! Mais en plus, j'ai pas de bol. Je trouve que
vous lui ressemblez étrangement. C'est pas vrai ! Faut qu'il vienne me chercher des poux
jusque sur scène. C'est incroyable quand même. Quel con ce mec. (Eberlué) Et puis c'est pas
tout ! Ben non ! Ce serait trop facile. Je vous ai pas encore tout dit... Ah ben oui, c'est plus
compliqué que ça en a l'air. C'est que ces gens-là, ils s'adaptent. Ils se mettent en quatre pour
faire plaisir au chef. (Explicatif) Tiens par exemple, si tu as un chef qui aime le foot, et bien
lui, il visionne tous les matches de foot du week end comme ça le lundi il peut dire à son chef :
"Vous avez vu le match Lourdes-Le Mans ?" Et l'autre qui lui répond bêtement : "y'a pas eu de
miracle, c'est vous qui êtes lourd..." Ben tu le crois ou pas, mais au lieu d'être vexé, le petit
con il répond au chef : "Ah ah ah, vous avez de l'humour chef !" (Faire semblant de vouloir
regarder de plus près l'homme incriminé en posant sa main sur son front comme une visière) Vous êtes sûr de pas être de sa famille ? D'abord c'est qui la jolie jeune femme qui est
assise à côté de vous ? Hein ! Vous avez pas honte vous ? Comment ça ! (S'adresser au public
en général) Je rêve. L'autre, il me fait des grands signes pour me dire de me la fermer. Attends mon bonhomme, c'est moi qui suis sur scène, c'est pas toi. Et encore, je trouve que tu
t'en tires bien... J'ai pas mon appareil photo sur moi !
(Faire à nouveau semblant de vouloir revenir à ses moutons) Bon, avec tout ça, on avance pas. J'espère
que vous n'êtes pas pressés ? Avec toutes ces idioties, j'ai pas encore commencé mon sketche.
Parce que j'en ai préparé de très bonnes sur les hommes et la politique. Vous allez voir, quand
je vais démarrer, vous n'allez pas pouvoir me suivre... (Faire semblant de chercher quelque
chose dans sa poche). Excusez-moi, mais je croyais avoir mon téléphone portable dans ma
poche ! J'ai dû l'oublier dans ma loge. (S'adresser à une dame qui serait plutôt devant) Mais
non madame ! Non ! Je ne vais quand même pas avoir le culot de téléphoner devant vous en
plein spectacle. (Etonnement) Quoique ! Ca pourrait peut-être être rigolo. (Narrtif) Hé, imagine : "Allô, chérie, c'est toi ? - Ben oui, c'est moi. Pourquoi je te téléphone à cette heure là ?
Ben si, je suis sur scène. Mais j'ai affaire à une bande de nazes. Ils rigolent jamais ! De toutes
façons, j'ai pas encore commencé. Pourquoi ? Parce que y'a un mec dans la salle, il ressemble
tellement à Jean-Claude, tu sais le mec du boulot qui ne fout rien que ça me perturbe...."
(S'adresser à nouveau à la dame) Hein madame que ça pourrait être drôle comme ça. Mais
je suis pas certain que le public apprécierait vraiment... Non. Pas vraiment. En réalité, je
cherchais mon téléphone portable par ce que je disais tout à l'heure que j'avais pas d'appareil
photo sur moi... (Rigolo) mais mon téléphone portable, lui, il fait appareil photo.... ha ha ha !
C'est moins marrant ça. Bon, de toutes façons, je l'ai oublié dans ma loge... Alors tant pis pour
moi et tant mieux pour vous ! J'imagine la tronche du mec qui sait qu'il est pris en défaut
avec sa maîtresse... (S'étonner) Comment ça c'est vache ce que je fais... Parce que vous croyez
que l'autre il se gêne pour me piquer tous les bons boulots et me laisser toutes les merdes à
faire... Non mais... Je rêve... Faut pas déconner non plus. Qui c'est qui s'emmerde à faire les
plus sales boulots le soir à partir de cinq heures et demi juste au moment où on doit pointer
alors que l'autre il vient de passer deux heures au téléphone à raconter les dernières blagues
qu'il a reçues sur sa boîte mail... (S'étonner encore plus) Ah parce que je vous ai pas dit non
plus ! Il a internet ce con...
(Se ressaisir une ultime fois en s'excusant platement) Je ne sais pas pour qui vous allez me prendre, mais
vraiment ce soir, je suis nul de chez nul. On vous annonce un mec rigolo qui doit vous faire
rire avec la politique et vous voilà face à un gugusse qui pète les plombs. Mais je m'en rends
compte. Surtout depuis quelques instants... (Désigner vaguement du doigt) Je viens d'en voir
un qui ronflait. Tu parles si c'est gai pour un artiste du spectacle d'entendre quelqu'un ronfler. Comme dirait Aznavour : "Je m'voyais déjà, en haut de l'affiche" et patatras, me voilà en
train de dire des conneries. Enfin ! Bref ! Pendant que je vous dis ça, je ne dis pas de mal des
autres non plus. C'est toujours ça de pris. Demain, je remets ça dans une autre salle, dans une
autre ville. Ouais, c''est un week-end chargé. Ma femme fait un peu la tête. Mais bon. C'est
pas grave, j'ai pris ma journée de lundi. Je ne travaille pas lundi. Comme ça, ça me fera du repos (S'énerver) et en plus je ne verrai pas la sale tronche de l'autre cake. J'en rigole d'avance.
Il va être obligé de bosser un peu. J'imagine le tableau d'ici : il va encore passer sa matinée au
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téléphone pour appeler ses potes et leur dire qu'il ne va pas y arriver parce qu'il va être débordé... (S'énerver méchamment) "T'as qu'a arrêter de téléphoner Duchnok, ça te laissera du
temps pour travailler". Non mais ! Sans blague ! Je te couperais le téléphone à des mecs
comme ça moi, ça ne ferait ni une ni deux. Quand je pense qu'il y a des patrons racistes prétendument parce que certains immigrés sont des fainéants... Y'a parfois pas besoin d'aller
loin pour les trouver les fainéants... Seulement ceux-là, comme ils ont une grande gueule, on
a l'impression qu'ils sont toujours débordés. (Explicatif) T'as jamais remarqué leur bureau ?
Ben tiens... Il est toujours plein de dossiers qui traînent, comme ça, le bureau est plein... ...
mais plein de dossiers qui sont vieux et qui devraient être rangés depuis une éternité... Enfin !
Bref ! Tu sais quoi ? Hé ben je vais acheter une boîte de cirage noir et une brosse à reluire et
discrètement les poser sur son bureau un de ces jours... Mais il est tellement idiot qu'il serait
capable de croire que c'est pour ses propres pompes... Tiens, c'est mieux si je ferme ma
gueule...
(Une dernière fois, se ressaisir et on doit avoir l'impression que ça va vraiment commencer car l'artiste
se concentre visiblement) - Alors, savez-vous quelle est la différence entre le Politique et le
Politicien ? Subtile non ? (Montre ostensiblement qu'on est dérangé par quelqu'un qui parle
sur le côté intérieur de la scène et donc faire des gestes d'incompréhension) Hein ! Je ne
comprends pas ce que tu me dis. (S'excuser vers le public) Excusez-moi deux secondes, mais
j'ai un interlocuteur sur le côté scène qui me fait des grands signes et je ne comprends pas...
(Se diriger sur côté scène puis revenir tout dépité) J'ai le régisseur de scène qui vient de
m'annoncer que je n'avais plus le temps de vous faire mon sketche parce que mon temps était
largement dépassé. Il paraît que d'autres attendent après moi. C'est dingue. J'ai même pas eu
le temps de vous dire le début de mon sketche. (S'énerver) Alors ça, c'est encore la faute à
l'autre qui dort là-bas. C'et vrai quoi. S'il n'avait pas ressemblé à mon collègue de boulot, j'en
serai pas arrivé là... Il va me le payer mardi au boulot cet andouille. Nom d'un chien...
RIDEAU
Jean-Luc Pecqueur (Gustave)
le 5 février 2010