PRÉSENTATION D`UN LOGICIEL DE MÉTROLOGIE
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PRÉSENTATION D`UN LOGICIEL DE MÉTROLOGIE
PRÉSENTATION D’UN LOGICIEL DE MÉTROLOGIE TRIDIMENSIONNELLE PAR CALIBRE VIRTUEL Eric PAIREL Enseignant-chercheur Lméca (Laboratoire de Mécanique Appliquée) ESIA (École Supérieure d’Ingénieurs d’Annecy) - Université de Savoie BP 806, 74016 ANNECY Cedex - FRANCE [email protected] Résumé Grâce à un modèle conceptuel de «calibres Ajustants», toute tolérance géométrique peut s’interpréter sous la forme d’un calibre de contrôle virtuel tridimensionnel devant pouvoir s’assembler avec la pièce à contrôler. A partir d’un fichier ASCII contenant les nuages de points palpés à la surface de la pièce, le logiciel présenté ici, permet de construire le calibre de contrôle virtuel défini par la tolérance géométrique et de vérifier qu’il peut être assemblé et ajusté, suivant un ordre précis, aux nuages de points. Le contrôle des tolérances géométriques est donc strictement conforme à leur sens normalisé et il est extrêmement simplifié. Mots clés : Tolérance géométrique, GPS, MMT, Calibre virtuel Abstract Thanks to the «Fitting gauges» conceptual model, any geometric tolerance can be interpreted in the form of a virtual three-dimensional gauge being able to be assembled with the part to be inspected. From a file containing the sampled points of the part to inspect, the software presented here, makes it possible to build the virtual gauge defined by the geometric tolerance and to check that it can be assembled and adjusted, according to a precise order, with clouds of points representing the part. The check of the geometric tolerances is thus strictly in conformity with their standardized meaning and it is extremely simplified. Key words. Geometric tolerance, GPS, CMM, Virtual gauge. Introduction Les logiciels de métrologie tridimensionnelle ont peu évolué depuis leur création lors de l’avènement des machines à mesurer tridimensionnelles dans les années 80. Leur principe est permettre aux utilisateurs de pouvoir mesurer des distances ou des angles entre des éléments géométriques théoriques construits à partir de points palpés sur la pièce. Le défaut de cette approche est qu’elle ne concorde pas avec la définition normalisée des tolérances géométriques des produits. En effet, les tolérances géométriques, telles qu’elles sont définies par les normes de Spécification Géométrique des Produits (GPS), s’apparentent davantage à des calibres de contrôle virtuels qu’à des tolérances sur des distances ou des angles à mesurer sur la pièce, comme nous le montrerons au premier paragraphe de cette présentation. Les logiciels existant ne permettent pas de construire ou d’utiliser de tels calibres. L’utilisateur, ou parfois le logiciel lui même, doit convertir ces contrôles en mesurage de distances ou d’angles entre éléments géométriques qui sont eux même à construire. Outre le risque important d’erreur, cette façon d’opérer a pour effet de dégrader plus ou moins fortement le contrôle, c’est à dire qu’elle peut conduire à refuser des pièces qui en tout rigueur respectent la tolérance géométrique à contrôler. Ceci est dû aux degrés de liberté qu’a naturellement un calibre lors de son assemblage avec la pièce à contrôler et qui ne peuvent pas être reproduits par les opérations de constructions d’éléments géométriques et de mesurage de distances ou d’angles entre eux. Des travaux de recherche, menés au milieu des années 90, nous ont permis de d’élaborer un modèle conceptuel de calibres virtuels ainsi que les algorithmes nécessaires à l’assemblage, de ces calibres avec les nuages de points palpés sur la pièce [1], [2]. Depuis le modèle a été complété pour permettre en particulier d’utiliser des zones de tolérances dans les calibres virtuels et étendre ainsi les possibilités de contrôle à l’ensemble des tolérances géométriques normalisées [3]. Nous développons actuellement un nouveau logiciel de contrôle par calibre virtuel avec une visualisation tridimensionnelle des nuages de points palpés sur la pièce et des calibres virtuels assemblés sur ces nuages. C’est ce nouveau logiciel qui est présenté ici au travers de son utilisation pour le contrôle d’une tolérance géométrique de localisation d’un groupe de trous. Interprétation des tolérances géométriques Les tolérances géométriques, qui apparaissent sous forme de cadre de tolérance sur les dessins technique (voir figure 1), définissent des domaines de l’espace, appelés zones de tolérance, que ne doivent pas franchir les éléments géométriques tolérancés de la pièce réelle. Ces zones sont souvent en position théorique par rapport à des surfaces parfaites ajustées aux surfaces de la pièce et qui servent de référence. Pour illuster cette présentation générale, nous allons préciser le sens de la tolérance de localisation indiqué sur le dessin partiel ci-dessous. Cet exemple servira également à la présentation de l’utilisation du logiciel de contrôle par calibre virtuel. Figure 1 : Exemple de tolérance géométrique Cette tolérance limite le défaut de localisation des deux trous tolérancés entre eux et par rapport aux surfaces de mise en position principale de la pièce : Le plan d’appui A et le centrage court B. Le contrôle théorique de cette tolérance est illustré sur la figure 2. 77 ∅0,6 X ∅ 0,6 77 ∅maxi Z Figure 2 : Illustration de la signification de la tolérance géométrique indiquée sur le dessin La référence primaire A est un plan parfait ajusté à la face du dessous de la pièce (plan d’appui prépondérant). La référence secondaire B est l’axe du plus grand cylindre, perpendiculaire au plan A, inscrit dans le centrage court. Les zones de tolérances sont des «tubes» de diamètre 0,6 mm dont les axes sont dans un plan passant par l’axe B et à 77 mm de cet axe. Les éléments tolérancés sont les axes «réels» des deux trous. Bien sûr, ces axes n’existe pas réellement sur la pièce et il faudra les construire. La pièce respecte la tolérance si et seulement si ces axes peuvent être contenus à l’intérieur des deux zones. Les «axes réels» des trous de la pièce peuvent être construits suivant deux méthodes différentes : • Soit on considère, pour chacun des trous, l’axe d’un cylindre parfait ajusté au trou et limité à la hauteur du trou, • soit on considère l’ensemble des centres de plusieurs sections palpés à l’intérieur du trou. La première méthode est plus simple mais c’est la seconde qui est normalisée. Notons que si le défaut de cylindricité est faible au regard du défaut de localisation (ce qui est normalement le cas), ces deux méthodes sont équivalentes. Il est à noter que le système des deux références laisse à la pièce la possibilité de pivoter autour de l’axe B pour permettre à ces axes d’entrer dans les zones. Principe du contrôle par calibre virtuel Vis-à-vis de la pièce, la géométrie constituée des surfaces de référence et des zones de tolérance illustrée sur la figure 2 est comparable à un calibre de contrôle virtuel qu’il faudrait assembler, suivant un certain ordre, sur les surfaces et les axes de la pièce. Le principe du contrôle par calibre virtuel est le suivant : • Les surfaces de la pièce sont numérisées en plusieurs points grâce à un équipement de mesure de coordonnées tridimensionnelles. Si les éléments géométriques à vérifier sont des axes ou d’autres éléments non palpables, ils pourront être soit construits par l’équipement de mesure tridimensionnel et utilisé directement par le logiciel présenté, soit construits grâce à un menu spécifique du logiciel de contrôle par calibre. • L’utilisateur construit, grâce aux menus du logiciel et par ajouts successifs de calibres élémentaires aux formes simples, le calibre de contrôle qui correspond à la tolérance à vérifier, • Le logiciel calcule alors s’il est possible d’assembler, suivant l’ordre défini par l’utilisateur, le calibre virtuel aux nuages de points numérisés sur la pièce contrôlée. Présentation du logiciel Le logiciel, et le modèle des «calibres ajustants» sous-jacent, sont présentés au travers de leur utilisation pour le contrôle de la tolérance choisie en exemple au paragraphe précédent. Les données d’entrée du logiciel sont les nuages de points représentant la pièce et issus d’un équipement de mesure tridimensionnel tel qu’une MMT (Machine à Mesurer Tridimensionnel) et stocké dans un fichier ASCII. Première opération : Ouverture et chargement des nuages de points palpés sur la pièce A l’ouverture du fichier ASCII contenant les nuages de points palpés, le logiciel place automatique les surfaces palpées les unes après les autres dans une liste qui constituera la gamme de contrôle de la pièce. Le type de surface palpée (plan cylindre, etc.) étant codifié dans le fichier, le logiciel ajuste automatiquement un calibre élémentaire de même forme sur le nuage de points et le place à la suite de la surface palpée dans la gamme. Pour les quatre surfaces, utiles au contrôle de la tolérance présentée plus haut, on obtient l’affichage sous forme d’arbre des huit objets créés automatiquement par le logiciel : Ce calibre sera constitué d’un plan et trois cylindre comme l’illustre la figure 2. La position de chaque calibre élémentaire est donnée par l’utilisateur du logiciel par rapport à un repère de construction unique qui constituera le repère du calibre composé. Les calibres élémentaires sont eux-mêmes munis d’un repère permettant de les situer. Pour le plan le repère est tel que son origine est sur le plan et son axe Z est normal au plan et orienté vers l’extérieur de la matière de la pièce. L’item «Composé» du menu «Calibre de contrôle» ouvre la boite de dialogue ci-dessous qui permet de construire le calibre composé : Figure 3 : Affichage des objets créés lors de l’ouverture d’un fichier de nuages de points Le détail concernant chaque objet peut être affiché en cliquant sur l’icone + . On obtient ainsi : • pour une surface palpée, les coordonnées de ses points, sa position (centre des points) et son orientation approximative. • pour le calibre élémentaire ajusté, sa position, son diamètre si c’est un cylindre, et l’ensemble ordonné des écarts entre les points palpés et la surface du calibre. Dans la partie droite de l’écran, les points palpés et les calibres ajustés sont représentés en trois dimensions ce qui permet d’avoir un retour visuel de la forme de la pièce et de pouvoir apprécier les écarts entre les points palpés et les surfaces ajustées des calibres. Deuxième opération : Création des axes des trous Les axes auraient pu être contenu dans le fichier ASCII de points palpés. Ils auraient alors été placé dans la gamme au moment de la lecture du fichier. Comme ce n’est pas le cas ici, nous allons les construire à partir des cylindres qui ont été associés aux trous palpés. L’item «Axe» du menu «Construire» ouvre une boite de dialogue qui demande le numéro dans la gamme du calibre ajusté dont on veut construire l’axe. La validation de la boite ajoute dans la gamme un nouvel objet de type «Axe par points». L’axe est créé sous la forme de deux points représentant les extrémités de l’axe. Deux champs de saisie de la boite de dialogue permettent de redéfinir la position des extrémités de l’axe. Ces points sont affichés dans la fenêtre graphique. Troisième opération : Construction du calibre de contrôle Il faut à présent construire le calibre de contrôle qui correspond à la tolérance géométrique à vérifier. Figure 4 : Boite de dialogue de construction d’un calibre composé Cette fenêtre affiche la liste, pour le moment vide, des tous les calibres composants. Pour ajouter un nouveau composant, il suffit de cliquer sur le bouton «Nouveau». Une nouvelle boite de dialogue s’ouvre pour définir un composant : Figure 5 : Boite de dialogue de définition d’un calibre composant Bien que l’on puisse entrer les calibres composants dans n’importe quel ordre, il est plus logique de suivre l’ordre dans lequel les calibres devront s’ajuster aux surfaces palpées de la pièce. On commence donc par le plan en indiquant dans le premier champs de la boite de dialogue que le calibre s’ajustera à la surface palpée n°1 dans la gamme, c’est à dire le plan palpé. On choisit ensuite le comportement AjustantPrimaire pour indiquer que ce calibre doit s’ajuster à sa surface palpée avant tous les autres calibres. Dans le repère de construction choisi sur la figure 2, l’axe Z du plan est confondu avec l’axe Z du repère général de construction : On laisse donc tous les champs de «Position» et de «Orientation» aux valeurs nulles proposées par défaut (voir figure 5). Les autres champs sont eux aussi laissés aux valeurs proposées par la boite de dialogue. Le bouton «OK» permet d’ajouter ce premier calibre dans la liste des calibres composant. Le type du calibre qui apparaît dans la liste des composants, ici un plan, est déterminé automatiquement par le type de la surface palpée. On répète cette opération pour chacun des autres composants : Pour le cylindre réalisant le centrage court, on indique la surface palpée sur laquelle il doit s’ajuster : n°3 dans la gamme. Son comportement est AjustantSecondaire, ce qui signifie qu’il s’ajustera après le plan. Son origine est placée à l’origine du repère de construction (X0, Y0, Z0) et son orientation correspond à celle de l’axe Z du repère de construction (Rx0; Ry0, Rz0) : Tous les champs sont donc laissés aux valeurs proposées par défaut par la boite de dialogue. Le troisième et le quatrième calibre, qui représenteront des zones de tolérances, devront s’assembler avec, les «Axes par points», n°9 et n°10 dans la gamme. Dans le repère de construction et en choisissant d’orienter son axe X vers l’un des axes, le premier cylindre est à X77, Y0 et Z0 et le second à X-77, Y0, Z0. Leur orientation correspond à celle de Z : On laisse les champs «Orientation» à zéro. Pour leur «Comportement», on peut soit leur donner le comportement «Frontière» soit leur donner le comportement «Ajustant». Avec le comportement «Ajustant», ils adapteront leurs diamètres pour être le mieux ajustés aux axes, ce qui permettra, par comparaison à la valeur de la tolérance (0,6 mm), de connaître la marge ou au contraire le manque de précision de la pièce. Avec le comportement «Frontière», les zones cylindriques se comporteront comme de véritables calibres de contrôle, de diamètre figés, qui pourront ou non s’assembler avec les axes. Avec ce comportement, il faut entrer la valeur du diamètre de la zone de tolérance dans le champs «Diamètre» (ici 0,6 mm). Le calibre composé ainsi construit est assemblé aux nuages de points en cliquant sur le bouton «Assemble» de la boite de dialogue représentée figure 4. Le calibre composé est ajouté à la fin de la gamme et est affiché dans la fenêtre graphique. On peut alors lire la valeur des diamètres ajustés et conclure sur la conformité de la pièce vis-à-vis de la tolérance contrôlée. Conclusion Les tolérances géométriques, notamment de localisation, sont de plus en plus courantes sur les dessins techniques industriels et correspondent à une amélioration de la cotation fonctionnelle des produits. Néanmoins leur inspection sur les produits est plus difficile à réaliser car elles correspondent à un contrôle par calibre virtuel. En l’absence d’un logiciel capable de simuler ces calibres virtuels, il faut «convertir» le contrôle en mesure de distances ou d’angles en acceptant de dégrader plus ou moins le contrôle théorique. Le logiciel de métrologie tridimensionnelle que nous développons permet d’effectuer ces contrôles en stricte conformité avec la définition normalisée des tolérances géométriques. Il est extrêmement simple à utiliser car tout contrôle se fait par calibre virtuel. Ainsi il devrait permettre aux fabricants de prouver la conformité de leurs produits de façon beaucoup plus certaine que ce qu’ils peuvent faire aujourd’hui. Références bibliographiques [1] E. Pairel, «Métrologie fonctionnelle par calibre virtuel sur machine à mesurer tridimensionnelle», Thèse de doctorat de l’Université de Savoie, LMéca, Déc. 1995. [2] E. Pairel, «Métrologie par calibre virtuel sur machine à mesurer tridimensionnelle», Actes du colloque national PRIMECA 1997. [3] E. Pairel, P. Hernandez, M. Giordano, «Virtual Gauges Representation for Geometrical Tolerances in CADCAM Systems», Proceedings of the 9th International CIRP Seminar on Computer-Aided Tolerancing, Arozona State University, USA, June 2005.