La place et le rôle de l`assistant social

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La place et le rôle de l`assistant social
Ministère de la Justice
SERVICE DE DOCUMENTATION
ET D’ETUDES
par MPUTU ILUA
Juge /Tribunal de Paix
MONUC/SECTION PROTECTION DE
L’ENFANT
INTRODUCTION
De tous les temps, la notion de distribution de la justice et de la catégorisation des individus ont toujours été une préoccupation majeure
dans tous les systèmes juridiques.
En effet, l’immaturité physique et psychologique qui fait de l’enfant
un être vulnérable exige l’intervention des plusieurs acteurs parmi lesquels les Juges des enfants, les Officiers du ministère public, les Officiers
de police judiciaire, les Assistants sociaux, les éducateurs, les psychologues, les médecins, etc.
Le recours à une approche pluridisciplinaire est consacré aussi bien
par les instruments internationaux que nationaux.
Dans ce module, l’accent sera mis sur l’un des intervenants de la
justice pour mineurs, en l’occurrence « l’Assistant social ».
Il sera question de définir dans un premier temps ce qu’un Assistant Social, ensuite d’aborder dans une approche historique et comparative la place et le rôle de celui-ci dans la législation congolaise, et enfin de
démontrer l’étendue de sa collaboration avec les autres opérateurs judiciaires et sociaux.
2
I.
DE LA DEFINITION DU CONCEPT ASSISTANT SOCIAL
La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant,
en son article 2 point 8, définit l’Assistant social comme étant « un agent
de l’Etat ou d’un organisme agréé, spécialisé dans la résolution des problèmes liés aux relations humaines afin d’améliorer le bien-être général. Il
œuvre à la promotion de bonnes mœurs »
Selon Gérard CORNU, l’Assistant Social « est une personne qualifiée,
chargée d’une mission de caractère social (aide, assistance, conseil, information, enquête) »1.
Il ressort de ces définitions légale et doctrinale que la mission dévolue à l’Assistant Social concerne toutes les catégories de personnes et
s’étend dans plusieurs domaines, dont celui de la protection sociale et judiciaire de l’enfant.
Sur plan pratique, l’Assistant social est considéré comme étant une
personne qualifiée qui a légalement reçu mission de mener les investigations, de proposer des orientations éducatives et d’assurer le suivi des
mesures prises par le juge des enfants en ce qui concerne le cas des enfants en conflit avec la loi, des enfants victimes d’abus et enfin de ceux en
situation difficile.
En effet, il importe de noter que, dans le cas d’espèce, l’Assistant
social est avant tout membre d’un des organes de protection sociale de
l’enfant, à savoir le corps des Assistants sociaux qui est une structure
technique du ministère ayant les affaires sociales dans ses attributions
(Article 74 de la LPPE).
Aux termes de l’article 76 de la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009,
cette structure est chargée des enquêtes sociales sur les enfants, de la
guidance psychosociale et de la réunification familiale de ces derniers.
1
Vocabulaire juridique, 8ème édition mise à jour, avril 2007, PUF 1987, p .82
3
II.
DE LA PLACE DE L’ASSISTANT
L’ASSISTANT SOCIAL DANS LA PROTECPROTECTION SOCIALE
CIALE ET JUDICIAIRE DE L’ENFANT
La place de l’Assistant social doit être comprise comme étant
l’environnement dans lequel il intervient en matière de protection sociale
et judiciaire de l’enfant.
Pour mieux appréhender cette place, il convient de l’examiner dans
un contexte historique et comparatif par rapport au Décret du 6 décembre
1950 et de la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de
l’enfant.
C’est ainsi que dans le cadre de ce module, nous allons examiner le
Décret du 6 décembre 1950 sur l’enfance délinquante et le confronter à la
loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant.
II.1.
Sous le Décret du 6 Décembre 1950
Il convient de rappeler que le Décret du 6 décembre 1950 sur
l’enfance délinquante ne reprenait pas expressément les termes « Assistant social », mais celui de « Délégué à la Protection de
l’Enfance (DPE)».
En effet, cette loi en son article 13 voulait que les mineurs qui n’ont
pas été mis à la disposition du gouvernement ou dont l’internement a été
levé soient placés sous le régime de la liberté surveillée assurée par deux
personnes de deux sexes désignées par le juge et choisies de préférence
parmi les missionnaires ou les institutions de charité, d’enseignement ou
d’assistance sociale publiques ou privées, lesquelles personnes prenaient
le nom des ‘‘Délègues à la Protection de l’Enfance’’ et pouvaient être rémunérés.
Comme il peut être constaté, ces personnes tiraient cette qualité
d’intervenant dans la justice pour mineurs de la seule désignation du juge.
Il faut aussi relever que cette tache de suivi des mineurs en liberté
surveillée et de faire rapport au juge sur leur évolution devait, selon
l’esprit de cette loi, s’effectuer en aval, c’est-à-dire, après la prise des mesures définitives.
4
Toutefois dans la pratique, pour aider le juge à prendre la décision
la mieux adaptée à la situation du mineur, une catégorie de personnes
provenant du ministère de la justice et celui des affaires sociales ainsi que
es institutions agréées à caractère social  le cas du Bureau International
Catholique de l’Enfance dénommées « assistants sociaux »  ont été affectées à ses côtés pour mener des enquêtes sociales en amont, en matière des enfants en conflit avec la loi, des autres types d’enfants n’ayant
pas été pris en compte.
C’est dans cette dernière catégorie de personnes citées ci-avant que
le juge, sous l’empire du Décret, choisissait les Délégués à la Protection de
l’Enfance.
La présence des Assistants Sociaux à côté du juge comme acteurs,
bien que n’ayant pas eu une base légale sur le plan interne, se justifiait par
le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant consacré par les instruments
internationaux ratifiés par notre pays.2
En effet, le Conseil Colonial dans son rapport avait proposé que les
Assistants sociaux assument les attributions des Délégués à la Protections
de l’Enfant3.
II.2. Sous la loi n° 09 /OO1 du 10 Janvier 2009
Contrairement au décret du 06 décembre 1950, la nouvelle loi portant protection de l’enfant a consacré une place importante à l’Assistant
social.
Cette loi nouvelle a défini cette profession en étendant le champ
d’application de celle-ci dans une optique plus globale de protection sociale et judiciaire de l’enfant.
En effet, la loi dote le tribunal pour enfants d’au moins un Assistant
Social affecté par les services provinciaux ayant les affaires sociales dans
leurs attributions (Article 92 de la LPPE).
Comme il peut être constaté, les assistants sociaux sont des personnes légalement affectées auprès des tribunaux pour enfants au même titre que les greffiers et les huissiers.
2
Voir l’article 3 de la « Convention des Nations Unies relative aux Droits de l’Enfants » et l’article 4 de la
« Charte Africaine sur les droits et bien-être de l’Enfant »
3
Voir Bulletin Administratif du Congo-Belge, n°
, année, page…
5
Ils sont par conséquent des auxiliaires de la justice pour mineurs et
collaborateurs directs du juge dans l’aboutissement des procédures judiciaires mettant en cause les enfants en situation difficile et les enfants victimes.
En définitive, sous l’empire de la nouvelle loi, l’intervention de
l’Assistant Social n’est plus de fait mais de droit.
Son action s’étend en amont comme en aval et peut être déclenchée dans certains cas notamment le placement social sans l’intervention
préalable du juge pour enfants.
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III. DU ROLE DE L’ASSISTANT
L’ASSISTANT SOCIAL EN MATIERE DE PROPROTECTION SOCIALE
SOCIALE ET JUDICIAIRE DE L’ENFANT.
Le rôle de l’Assistant Social doit être compris comme étant les attributions à lui dévolues par la loi portant protection de l’enfant.
Comme il y a été précédé au sujet de la place de l’Assistant social, le
rôle de ce dernier fera aussi l’objet d’une analyse historique et comparative.
III.1. Sous l’empire de l’ancienne législation.
La loi ancienne, bien que n’ayant pas prévu les termes « Assistant
social », a néanmoins prévu les enquêtes sociales. C’est ainsi que le juge
qui avait la compétence de prendre les mesures de garde, d’éducation et
de préservation, chargeait les Assistants sociaux, affectés par l’Etat près le
Tribunal de paix, d’effectuer lesdites enquêtes. Ce qui confirmait la pratique souhaitée par les membres du Conseil Colonial de l’époque.
Conformément à l’économie des articles 13, 14 et 18 du Décret précité, les tâches du Délégué à la Protection de l’Enfance consistait :
 à assurer le suivi des mineurs ;
 à effectuer des enquêtes ;
 à observer le milieu, la tendance, et la conduite du mineur ;
 à faire rapport au juge sur la situation morale et matérielle du mineur chaque fois que son intérêt l’exigeait, et au moins une fois par
trimestre ;
 à proposer au juge des mesures avantageuses pour le mineur ;
En outre, l’article 15 du Décret du 6 décembre 1950 disposait que le
juge devait faire une enquête sur des conditions sociales et morales dans
lesquelles vivait l’enfant. Ainsi, dans la pratique le juge faisait faire ce travail en recourant à l’expertise des travailleurs sociaux dont l’Assistant social.
Telles que présentés, les tâches qui étaient confiées a cet acteur social étaient limitées en ce qu’elles ne concernaient que les enfants en conflit avec la loi placés sous le régime de la liberté surveillée.
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III.2. Sous la loi du 10 Janvier 2009
La nouvelle loi portant protection de l’enfant étend le rôle de
l’Assistant social à la protection sociale et judiciaire.
Pour bien appréhender ce rôle de l’Assistant social, il convient dans
les lignes qui suivent de l’aborder sous ces trois aspects protecteurs.
A.
La protection sociale
sociale
Le rôle de l’Assistant Social en matière de protection sociale est plus
détaillé au titre II.de la loi du 10 janvier 2009.
Il s’articule autour de trois aspects ci-après : la protection ordinaire
(a.1), la protection spéciale (a.2) et la protection exceptionnelle (a.3)
a.1. Protection ordinaire
La protection ordinaire est organisée par les articles 46 à 61 de la loi
nouvelle n° 09/001 du 10 Janvier 2009 portant protection de l’enfant.
Le législateur sous l’empire de la nouvelle législation n’a pas déterminé le rôle spécifique que devra jouer l’Assistant Social dans le cadre de
la protection ordinaire.
Celui-ci comme toute personne, reste limité à dénoncer les différentes violations faites contre l’enfant en famille, au travail et à l’école.
a.2. Protection spéciale
L’Assistant social a pour rôle :
 d’effectuer le placement social pour les enfants en rupture familiale,
sous réserve de l’homologation par le juge pour enfants (article 63 alinéa 2 de la LPPE) et ;
 de proposer, sur requête, au juge le placement pour les enfants se
trouvant entre les mains de leurs parents ou tuteurs (Article 63, alinéas 3 de la LPPE).
Le placement est l’un des mécanismes à travers lequel se réalise la
protection spéciale. La loi autorise à l’assistant social se trouvant devant un cas d’enfant en situation difficile (abandonné, rejeté, débauché, prostitué, dit sorcier, non scolarisé, etc.) de le placer dans une
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structure d’accueil (famille élargie, famille d’accueil, institution publique ou privée, foyer autonome).
A l’issue du placement, l’Assistant social fait rapport immédiatement
au juge pour que ce dernier prenne une ordonnance régularisant le
placement de l’enfant dans cette institution d’hébergement. C’est ce
que la loi appelle « l’homologation ». Cette protection spéciale se réalise aussi par la prise en charge et la mise sous tutelle de l’Etat, qui
sont l’apanage du juge des enfants.
a.3 Protection exceptionnelle
Suivant l’esprit de la loi n° 09/001 sus évoquée, la protection exceptionnelle est assurée aux enfants affectés par les conflits armés, les tensions ou troubles civils, ceux affectés par une catastrophe naturelle ou une
dégradation des conditions socio-économiques, spécialement à ceux trouvés et non identifiés par rapport à leur milieu familial.
Il se dégage de l’interprétation des articles 36, 67, 71 à 73 de la loi
ci-haut évoquée que la protection sociale exceptionnelle relève de la mission intrinsèque de l’Etat, qui emploie les Assistants sociaux comme
« agents d’exécution » en vue d’assurer la réinsertion de ces enfants en
famille ou en communauté.
B.
La protection judiciaire
Il s’agit de la protection assurée à l’enfant en conflit avec la loi.
Cette protection contrairement à la protection sociale ne s’exerce
que par l’intermédiaire du Tribunal pour enfants.
La procédure diffère selon qu’il s’agit d’un enfant âgé de moins de
14 ans ou de celui qui âgé de 14 ans au moins.
b.1. A l’ égard de l’enfant de moins de 14 ans d’âge
L’article 96 de la loi nouvelle dispose que « lorsque l’enfant déféré
devant le Juge a moins de 14 ans, celui-ci le relaxe comme ayant agi sans
discernement […] Dans ce cas le juge le confie à un Assistant social qui
prend des mesures d’accompagnement visant la sauvegarde de l’ordre public et la sécurité de l’enfant, et tenant compte de la réparation du préjudice causé ».
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b.2. A l’ égard de l’enfant de 14 ans au moins
L’Assistant Social constitue à ce niveau un acteur permanent auprès
du juge des enfants et dans ce cadre, il joue les rôles qui se situent à cinq
niveaux :
 au niveau de la saisine du Tribunal pour enfants ;
 au niveau des mesures provisoires à prendre par le juge pour enfants ;
 au niveau de l’instruction devant le Juge pour enfants ;
 au niveau de la révision des mesures prises par le Juge pour enfants
 au niveau de l’exécution de la décision prise par le Juge pour enfants
(a)
Au niveau de la saisine
L’article 102 point 5 de la loi du 10 Janvier 2009 portant protection
de l’enfant octroie aussi à l’Assistant social le pouvoir d’initier la procédure judiciaire.
Ainsi, tout Assistant social qui a connaissance des manquements
qualifiés d’infractions commis par un enfant peut, par voie de requête,
saisir le Tribunal pour enfants territorialement compétent. Cette requête
opère la saisine du tribunal.
Il est à relever que la loi soumet cette requête à aucune formalité. Il
est donc fondé de dire qu’elle peut être orale ou écrite.
Lorsqu’elle est orale, elle devrait se faire par voie de déclaration actée au greffe du Tribunal pour enfants.
Lorsqu’elle est écrite, elle peut être une simple lettre missive.
En outre, la loi du 10 Janvier 2009 n’indique pas si la faculté de saisir
le Tribunal pour enfants est accordée à tout Assistant social ou uniquement à celui affecté au Tribunal territorialement compétent.
Il nous semble, pour l’intérêt supérieur de l’enfant que cette prérogative appartient à tout Assistant social.
(b)
Au niveau des mesures provisoires
Avant de statuer sur le fond, l’article 106 de la loi du 10 janvier 2009
permet au Juge pour enfants de prendre par voie d’ordonnance l’une de
trois mesures provisoires suivantes :
 le placement en famille (point 1) ;
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 l’assignation à résidence (point 2) ;
 le placement chez un couple ou en institution (point 3) ;
Le Juge peut aussi, aux termes de l’article 108 alinéa 1er, ordonner
préventivement le placement dans un établissement de garde et
d’éducation de l’Etat pour une durée ne dépassant pas deux mois lorsque
les mesures prévues à l’article 106 ne peuvent être prises parce que
l’enfant est présumé dangereux et qu’aucun couple ou aucune institution
n’est en mesure de l’accueillir.
C’est dans ce cadre que la même disposition, en son article 106 alinéa 5, investit l’Assistant social du pouvoir d’assurer le suivi de ces mesures.
Ce suivi consiste à un contact permanent entre l’Assistant social,
l’enfant et les personnes entre les mains de qui l’enfant a été confié ainsi
qu’à veiller à l’observation stricte desdites mesures.
L’article 109 de son côté le charge aussi de la collecte, à la demande
du Juge, des informations concernant la conduite et le comportement de
l'enfant pendant l’exécution des mesures provisoires.
Il peut ainsi mener les investigations sur l’ensemble de la situation
de l’enfant ou sur un point précis donné. Dans ce cas, il recueille toutes les
informations utiles relatives à la vie de l’enfant, son comportement, son
passé proche ou lointain, etc.
(c)
Au niveau de l’instruction
Pour rassurer l’enfant et le mettre en confiance, le législateur a voulu que l’enfant soit entendu aussi en présence de l’Assistant social. Cette
possibilité lui est offerte en principe et souvent lorsque les enfants qui
sont entendus à tous les stades de la procédure sont en rupture familiale
(article 111 de la LPPE).
Ce dispositif constitue une des garanties procédurales reconnues à
l’enfant en conflit avec la loi dont la violation expose à la nullité toute la
procédure menée (article 104 point 8 de la LPPE).
(d)
Au niveau de la révision
Lorsque le juge pour enfants a déjà statué sur le fond, l’Assistant social peut l’amener, par son rapport, à réviser les mesures qu’il avait prises
à l’égard de l’enfant (article 125 de la LPPE).
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En outre, lorsque l’enfant placé dans un établissement de garde et
d’éducation de l’Etat a atteint l’âge de 18 ans en placement, l’Assistant
social, qui constate dans le chef de celui-ci le caractère pervers persistant,
peut faire un rapport au Juge de le transférer dans un établissement de
rééducation (Article 130 de la LPPE).
A titre d’exemple, dans le cas d’un enfant qui avait commis un acte
qualifié de viol punissable de plus de 5 ans d’emprisonnement pour les
adultes, et qu’à l’issue de la procédure judiciaire suivie, le juge, qui avait
ordonné son placement dans un établissement de garde et de l’éducation
de l’Etat (Mbenseke-Futi ou Madimba), pourra, sur rapport lui soumis par
l’Assistant social sur son comportement de perversité consistant à sodomiser les autres enfants moins âgés que lui, réviser cette mesure en ordonnant son placement dans un établissement de rééducation où les dispositifs éducatifs sont beaucoup plus contraignants pour un terme ne dépassant pas sa vingt deuxième année d’âge.
(e)
Au niveau de l’exécution de la décision
Autant les greffiers et les huissiers constituent la pièce maitresse
dans l’exécution des décisions du Juge ordinaire, autant l’Assistant social
l’est dans la procédure pour mineurs en conflit avec la loi.
En effet, si le Juge est appelé à veiller à l’exécution de toutes les
mesures qu’il a prises à l’égard de l’enfant, il est aidé dans ce ministère
par l’Assistant social territorialement compétent (article 125 de la LPPE).
Celui-ci conduit notamment les enfants vers les structures dans lesquelles ils sont placés « en portant la mesure à la connaissance de l’enfant
ou de ses parents, en leur expliquant la teneur et le bien fondé, en organisant des activités éducatives dans le cadre de la resocialisation desdits enfants »4.
Il importe de souligner que tout déferrement de l’enfant devant le
Tribunal pour enfants n’entraîne pas nécessairement une décision judiciaire à l’issue d’une procédure d’instruction formelle. Aussi existe-t-il, par
la volonté même du législateur, la possibilité d’entrevoir un compromis
entre parties devant un « Comité de Médiation » dans une procédure
extrajudiciaire à l’issue de laquelle l’Assistant social est chargé d’assurer la
supervision de l’une des mesures sur base desquelles la médiation pourrait se conclure.
4
Alain Th. NZAU MAVAMBU, « Elaboration d’un Programme Scout pour l’Enfance délinquante : approche systématique de développement des mesures de sureté applicables en Droit congolais », Mémoire de
Licence en Droit, Option droit Privé et Judiciaire, U.L.K., décembre 1998, page 26, inédit.
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D’où l’intérêt de l’aborder dans le présent point titré B relatif à la
protection judiciaire.
(f)
De la procédure extrajudiciaire
Aux termes de l’article 134 alinéa 1er de la loi portant de l’enfant, le
compromis qui peut être trouvé entre l’enfant en conflit avec la loi ou son
représentant légal et la victime ou son représentant légal, dans le cadre de
la médiation, peut être conclu sur base d’une ou plusieurs meures.
Lorsque le compromis porte sur une mesure de travail d’intérêt général (l’accomplissement d’un travail non rémunéré au profit de la communauté, par exemple le sarclage d’une école publique, l’assainissement
d’un quartier ou d’un site public, les activités de reboisement, etc.),
l’Assistant social, ajoute l’alinéa 2 du même article, est chargé de le superviser, c’est-à-dire, de vérifier si cette prestation de l’enfant est effectivement exécutée comme arrêtée par les parties concernées dans le strict
respect de la dignité humaine.
C.
La protection pénale (articles 192 et 193 de la LPPE)
Le rôle de l’Assistant Social dans le cadre de la protection pénale est
celui assigné à toute personne et qui consiste à dénoncer les auteurs des
actes pénaux commis sur l’enfant.
L’Assistant Social peut le constater lui-même ou être contacté par
l’enfant victime, les parents ou encore par un membre de la société
l’ayant constaté sur l’enfant.
Et aussi en tant que membre d’un corps d’un organe de protection
de l’enfant, il est tenu de porter à la connaissance des autorités compétentes des actes infractionnels commis sur les enfants par les adultes.
Il s’agit là des cas réprimés par les dispositions spéciales sus évoquées et non contenus dans le Code Pénal Ordinaire, à savoir :
 les atteintes volontaires à la vie et à l’intégrité physique ou mentale de
l’enfant avant et après sa naissance (articles 143 à 159 de la LPPE) ;
 les atteintes à l’honneur et à la liberté individuelle de l’enfant (Articles
160 à 162 de la LPPE) ;
 les atteintes à la propriété ou au patrimoine de l’enfant (Articles 163 à
168 de la LPPE) ;
 les agressions sexuelles envers un enfant (Articles 169 à 184 de la
LPPE) ;
13
 la mise en danger d’un enfant (Articles 185 à 194 de la LPPE) ;
 les atteintes aux droits à la santé et à l’enseignement (Articles 195 à
198 de la LPPE).
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IV. DE LA COLLABORATION ENTRE L’ASSISTANT SOCIAL ET
LES AUTRES OPERATEURS JUDICIAIRES ET SOCIAUX
L’Assistant Social constitue un maillon fort et incontournable dans la
chaîne de la justice pour mineurs. Sa collaboration avec les autres professionnels de la justice pour mineurs est le fait de la consécration de la loi
par rapport à son rôle.
Ce rôle est transversal de toute la procédure judiciaire en matière
d’enfants en conflit avec la loi. Cette transversalité lui permet de collaborer avec tous les intervenants de la justice pour mineurs en commençant
par les Officiers de police judiciaire et du ministère public jusqu’aux structures d’accueil de l’enfant, en passant par ses père et mère ou les personnes qui en avaient la garde et le juge.
IV.1. L’assistant social et les Officiers de police judiciaire et du ministère public.
La loi ne spécifie pas clairement les termes de collaboration qui doivent caractériser les relations entre l’Assistant social et ces Officiers publics à qui elle enjoint de saisir le Tribunal pour enfants territorialement
compétents dès qu’ils ont connaissance des faits portés contre l’enfant.
Cette collaboration peut s’entendre par le fait pour l’Assistant social
d’assister l’enfant devant ces officiers lorsqu’ils l’identifient, surtout pour
celui qui n’est pas accompagné de ses père et mère ou de la personne qui
en avaient la garde.
L’Assistant social à ce stade aide à ce que ces officiers se conforment à la procédure adaptée au statut de l’enfant au moment de
l’audition sommaire et de son déferrement devant son juge naturel.
Le rôle de l’Assistant social consiste également à dénoncer les auteurs des actes pénaux commis sur l’enfant en les portant devant ces officiers publics (article 143 et 194 de la LPPE).
IV.2. L’assistant social et les père et mère de l’enfant ou la personne
qui en avait la garde.
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Aux termes de l’article 106 alinéa 5 et 109 de la loi, l’Assistant social
d’une part assure le suivi des mesures provisoires arrêtées par le Juge
pour enfants et, d’autre part collecte à la demande du juge les informations concernant la conduite et le comportement de l’enfant.
A ce titre, ces devoirs ne peuvent se concevoir que par le contact
qu’il est tenu d’avoir avec les père et mère de l’enfant, ou encore la personne qui en avait la garde pour la simple raison qu’ils connaissent mieux
ledit enfant, surtout lorsque la garde leur a été confié en cours de procédure.
Cette relation entre ces acteurs éducatifs est d’autant plus bénéfique pour l’enfant en conflit avec la loi de sorte qu’il sera plus loisible à
l’Assistant social de présenter au juge un rapport bien fourni et de suivre
l’enfant avec connaissance de cause.
Il faut en outre noter que les père et mère du mineur collaborent
étroitement avec l’Assistant social dans le cas où leur enfant est victime
d’abus et nécessite par conséquent l’appui psychosocial et d’autres entretiens.
IV.3 L’Assistant social et le Juge pour mineurs
La loi nouvelle portant protection de l’enfant poursuit parmi tant
d’autres l’objectif de garantir à l’enfant le droit de bénéficier des différentes mesures à caractère notamment social et judiciaire.
Il faut noter que plusieurs dispositions de cette loi font ressortir de
manière expresse et explicite l’action de l’Assistant social en tant que collaborateur direct et permanent du Juge pour mineurs.
Ces dispositions couvrent les attributions suivantes dans le cadre de
cette collaboration vécue à deux niveaux :
Sur le plan de la protection sociale :
 il sollicite auprès du Juge pour enfants l’homologation de tout placement social des enfants en rupture familiale effectué par lui dans le
cadre de la protection spéciale (Article 63, alinéa 2 de la LPPE) ;
 il propose au Juge pour enfants, sur requête, et dans le même cadre cidessus, le placement des enfants se trouvant entre les mains de leurs
pères et mères ou tuteurs Article 63, alinéa 3 de la LPPE).
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






Sur le plan de la protection judiciaire :
il a le pouvoir d’initier la procédure judiciaire (Article 102 point 5 de la
LPPE) ;
il assure sur le terrain le suivi de toutes les mesures prises par le Juge
pour mineurs ;
il garde un contact permanent avec l’enfant et fait office de pont entre
ce dernier, ses parents ou tuteurs et le juge (Article 106 de la LPPE) ;
il collecte, à la demande du Juge, les informations concernant la
conduite et le comportement de l'enfant pendant l’exécution de toutes mesures arrêtées par le juge (Article 109 de la LPPE) ;
Il assiste l’enfant entendu à tous les niveaux de la procédure (article
111 de la LPPE) ;
il aide le juge à veiller à l’exécution de toutes les mesures qu’il a prises
à l’égard de l’enfant (Article 129 de la LPPE) ;
il peut amener le juge, par son rapport, à réviser les mesures qu’il avait
précédemment prises à l’égard de l’enfant (article 125 et 130 de la
LPPE).
Ceci nous conduit à dire que la place et le rôle de l’Assistant social
renforcent l’action préventive et éducative de la fonction du Juge dans le
cadre de la prophylaxie criminelle et de la protection de l’enfant telle que
lui assignée par la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009.
Aussi, pour l’aboutissement heureux de sa mission, le Juge pour enfants ne peut se passer de ses services.
IV.4. L’Assistant social et les structures d’accueil
Cette collaboration s’inscrit dans le cadre de la protection sociale et
judiciaire.
S’agissant de la protection sociale, la collaboration de l’Assistant social d’avec les structures d’accueil s’entend dans le cas des différents placements qu’il effectue soit dans une famille élargie, soit dans une famille
d’accueil, soit au sein d’une institution publique ou privée agréée à caractère social ou encore en foyer autonome (Article 64 de la LPPE).
S’agissant de la protection judiciaire, cette collaboration se conçoit
dans le suivi des mesures de placement prises par le Juge pour mineurs
ainsi que dans la collecte des informations concernant la conduite et le
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comportement de l'enfant pendant l’exécution desdites mesures dans ces
différentes structures (Articles 106 alinéa 4 et 109 de la LPPE).
Sous cet angle, la loi vise l’hébergement de l’enfant, sa rééducation
ainsi que sa réinsertion sociale. C’est ici qu’intervient la nécessité de
l’action d’un Assistant social sensé entrer en contact avec ces structures
d’accueil et de suivre en synergie l’évolution éducationnelle de l’enfant
mis en placement.
Raison de plus pour ces différentes structures de connaître la place
et le rôle de l’Assistant social afin de mieux l’utiliser, le pari de la protection de l’enfant étant un plan d’action qui nécessite la contribution de
tous et de chacun.
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