La recherche, le développement et l`innovation dans les grandes

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La recherche, le développement et l`innovation dans les grandes
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La recherche,
le développement et
l’innovation dans les
grandes entreprises
françaises : dynamiques
et partenariats
Recherche et innovation
è Pendant cinq ans, deux grandes
revues ont organisé une enquête sur
la recherche-développement (R&D) et
l’innovation dans les grandes firmes
françaises. Cet article rend compte des
évolutions très fortes vécues sur cette
période. Parmi les grandes tendances
qui se dégagent, les principales
concernent les coopérations avec les
partenaires verticaux, les collaborations
de recherche (associées à une
externalisation grandissante), la prise
en charge, au niveau de la direction
générale, des enjeux liés à l’innovation,
enfin une internationalisation massive
des activités de R&D et d’innovation.
Ce travail souligne ainsi la pénétration
très forte du modèle en réseau de
l’innovation, une pénétration qui
concerne la moitié de l’échantillon
enquêté et tous les secteurs
économiques. Il montre enfin la
difficulté qu’ont les indicateurs
traditionnels utilisés (intensité de la
R&D et brevets pris) à rendre compte
de ces mouvements.
Philippe LARÉDO et Philippe MUSTAR
Centre de sociologie de l’innovation
École des mines de Paris1
endant cinq années consécutives, de 1995 à 1999,
le Centre de sociologie de l’innovation, en
association avec La Recherche et La Tribune,
puis avec La Recherche et l’Expansion, a mené une
enquête sur l’innovation dans les grandes entreprises
françaises. L’objectif de ce que les articles ayant rendu
compte des principaux résultats de cette enquête allaient qualifier de « Palmarès de l’innovation » était
de sortir de la tyrannie des deux chiffres, qui organisent, et auxquels se résument, la plupart des enquêtes
de ce type : les dépenses de recherche et développement (R&D) et le nombre de brevets déposés
(cf. « Références »).
Les enquêtes sur la recherche industrielle ont
pris une ampleur grandissante ces dernières années.
En témoigne, pour la France, l’enquête annuelle du
quotidien Le Monde, dont la dernière édition est parue
en octobre 2000 (KAHN, 2000). De plus en plus souvent,
elles donnent lieu à des analyses qui intègrent les plus
grandes firmes des pays industrialisés. L’enquête
publiée dans Research & Technology Management
(BOWONDER and al., 2000) est une des plus récentes.
Elle prend en compte 300 firmes internationales
(dont plus de 30 entreprises françaises2). Ses résultats
illustrent l’intérêt mais également les limites de cette
approche uniquement quantitative :
– primo, elle souligne la croissance généralisée
des investissements financiers en R&D. Utilisant
une enquête (moins exhaustive) conduite en 1977,
les auteurs montrent que rares sont les secteurs
P
N OTES
1. Correspondance : [email protected]
2. Elles sont toutes présentes dans l’enquête
dont nous allons rendre compte, à l’exception
d’un cas.
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THÈME
qui ont vu leurs dépenses de R&D diminuer ou rester
stables3 ;
– secundo, cette enquête met en exergue l’accroissement du nombre de brevets déposés, mais aussi le renforcement du leadership des firmes qui brevetaient
déjà beaucoup en 1990 ;
– tertio, les auteurs ont beaucoup de mal à relier l’effort de R&D des firmes et les brevets qu’elles prennent.
Le résultat le plus significatif à nos yeux est de mettre
en lumière l’extrême dispersion du ratio des dépenses
de R&D par brevet, dispersion bien plus forte au sein
des secteurs qu’entre les secteurs ;
– quarto, hormis dans une conclusion qui reste très
générale, les auteurs de ces enquêtes se gardent de
mettre en relation ces deux données (dépenses de
R&D et brevets) avec les évolutions économiques,
même à moyen terme, des entreprises.
Ces deux derniers points sont à nos yeux symboliques des limites que rencontrent de telles approches.
Même si elles ont le mérite de mettre en lumière deux
tendances lourdes – l’augmentation de l’investissement
dans la R&D d’une part, et l’engagement de plus en
plus marqué dans la protection légale des compétences
acquises d’autre part – elles ont du mal à expliquer les
dynamiques à l’œuvre.
C’est pourquoi un des principaux objectifs de notre
propre enquête annuelle est de montrer que les dynamiques de la recherche, développement et innovation
(RD&I) résultent de choix d’entreprises. Choix qui
concernent les formes de leur engagement dans l’innovation, et qui sont en grande partie indépendants des
secteurs auxquels ces entreprises appartiennent.
La première partie de cet article présente les choix
conceptuels et opérationnels que nous avons effectués
pour conduire notre enquête. Nous présenterons ensuite
les principaux résultats obtenus. L’engagement des firmes dans trois dimensions de ce que nous appellerons
le modèle en réseau de l’innovation seront abordées
successivement. Les deuxième, troisième et quatrième
parties porteront ainsi sur : i, la montée des coopérations
industrielles dans le développement de nouveaux produits et services, ii, l’importance grandissante des partenariats avec la recherche publique pour le développement et l’approfondissement des compétences des
firmes, et iii, les transformations que la multiplication
N OTE
3. Les firmes sont regroupées en secteurs avec toutes les limites inhérentes à ce genre de délimitations. Cela permet toutefois des comparaisons
instructives. Ainsi cela illustre le comportement atypique des firmes françaises du secteur aérospatial
avec un effort financier consacré à la R&D nettement supérieur à tous leurs principaux concurrents
ou partenaires.
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de ces relations entraîne dans l’organisation même
des entreprises qui doivent être à la fois proches de la
recherche « de base », proches des fournisseurs (de plus
en plus étroitement impliqués dans les développements)
et proches des besoins des clients. La cinquième partie
portera sur une dimension abordée plus récemment
dans l’enquête, l’internationalisation de la RD&I des
firmes. Compte tenu des règles de confidentialité adoptées, nos résultats font l’objet de regroupements sans
mention directe des firmes appartenant à chacun des
groupes. Ils sont néanmoins suffisants pour mettre en
exergue à la fois l’importance des changements vécus
par le monde de la recherche industrielle en quelques
années, mais également la difficulté que rencontrent les
entreprises pour avancer de front sur tous les domaines
(sixième partie). Cela permettra de mettre en lumière les
relations limitées que ces trajectoires entretiennent avec
les descriptions quantitatives classiques illustrées par
l’enquête ci-dessus mentionnée (septième partie).
r LA CONSTRUCTION
DE L’ENQUÊTE : CADRE THÉORIQUE
ET CHOIX MÉTHODOLOGIQUES
Le modèle de l’innovation
en réseau
Les travaux des économistes du changement technique ont longtemps été dominés par un modèle de
la diffusion des innovations (aussi qualifié de « modèle
linéaire de l'innovation »), où les relations entre la
science et le monde de l'économie sont décrites comme
une course de relais : l'invention passe de la recherche au
service d'étude et de développement, puis à la production, puis au marché ; là, devenue l'innovation, elle peut
se diffuser grâce aux qualités qui lui sont propres. Cette
conception donne le rôle premier à l'idée initiale. Le
montant des dépenses de recherche-développement, le
nombre de chercheurs employés, le nombre de brevets
déposés sont alors des indicateurs cruciaux pour comprendre comment une entreprise est engagée dans la
production de ces idées nouvelles.
Depuis une vingtaine d'année, cette vision idéalisée
a été sévèrement mise à mal par les sciences sociales.
Elles ont substitué au modèle de la diffusion linéaire un
modèle tourbillonnaire (aussi appelé modèle en réseau)
où l'innovation est le fruit d'un ensemble d'interactions
entre des acteurs nombreux et variés : les entreprises, les
laboratoires académiques, les pouvoirs publics, les financiers, les clients et les utilisateurs (CALLON, 1991).
Dans le modèle en réseau, outre le fait que les clients participent à la conception des produits et des services nouveaux (Von HIPPEL, 1988 ; GADREY 1992), trois éléments
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Proposer un « volet innovation »
complétant le bilan annuel des firmes
Pour conduire l’enquête, nous avons fait, après
l’adoption d’un questionnaire court, un deuxième
choix très important, celui d’éviter tout recours au
contenu même des activités de recherche. Nous ne cherchons pas à connaître – et encore moins à évaluer – les
travaux et leurs résultats. Notre approche peut être résumée par l’image suivante. Le bilan d’une entreprise
permet à travers les chiffres qu’il produit, d’apprécier
l’activité de l’entreprise, de la comparer à d’autres (sans
avoir obligatoirement à se limiter aux concurrents ou
autres entreprises des secteurs sur lesquels elle se positionne). Il aide l’investisseur externe à se faire une idée
sur les « fondamentaux » financiers de l’entreprise.
Chacun sait que, si cela constitue une condition nécessaire, cela ne suffit pas à comprendre le potentiel de l’entreprise. Ainsi l’analyse des positions de marché a fait
l’objet de nombreux travaux de recherche et est devenue
une activité économique à part entière. Plus récemment,
on a demandé aux entreprises de ne plus simplement
rendre compte de leur richesse matérielle, mais également de leur « capital humain ». Le bilan social est une
traduction de cette démarche. Nous savons également
l’importance que prennent, pour les investisseurs et les
analystes, les anticipations des entreprises et la préparation du futur. Il suffit par exemple de suivre la multiplication des travaux sur l’investissement immatériel. Cependant les approches financières ont du mal à rendre
compte de la manière dont les activités de recherche-développement et d’innovation s’intègrent dans la vie de
l’entreprise, accompagnent et enrichissent sa stratégie.
Il nous semble de plus en plus nécessaire de fournir aux
parties prenantes de l’entreprise, à ses actionnaires
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comme à ses salariés, une description plus claire de cet
engagement et donc de proposer des moyens renouvelés
d’appréciation des perspectives à terme qu’elles sont susceptibles de générer. Notre enquête esquisse ce que pourrait être un « bilan innovation » qui accompagne les bilans financier et social. Nos questions ont donc été
formulées de manière à ce que toute entreprise qui s’est
dotée d’un tableau de bord pour suivre cet engagement4,
puisse y répondre.
La population enquêtée
L’enquête s’est volontairement centrée sur les principaux groupes industriels français. La sélection a été
opérée en prenant comme point de départ les classements annuels effectués par le magazine L’Expansion.
Nous avons cherché à couvrir au moins cinq groupes industriels français par grand secteur d’activité, soit une
centaine de groupes au total. Année après année, les
deux revues avec lesquelles nous avons coopéré, ont envoyé un questionnaire à ces entreprises. Malgré les relances, les retours se sont limités à en moyenne 45 questionnaires exploitables lors de chaque enquête (on ne
compte pas ici les questionnaires non remplis retournés
accompagnés du rapport annuel ou de toute autre information générale sur l’entreprise et sa recherche). Sur
cinq ans, la population totale touchée représente plus de
80 entreprises dont la moitié (39) constitue le « cœur de
l’échantillon » avec trois réponses et plus en cinq ans.
Quel regard porter sur cet échantillon, et donc sur les
enseignements que nous pouvons en tirer ? Il faut
d’abord tenir compte d’une limite inhérente au champ
couvert : cette enquête ne prend pas en compte la majeure partie des services (grande distribution, hôtellerie
et restauration, etc.), qui représentent le quart des cent
premières entreprises françaises. Ensuite le taux de
THÈME
essentiels sont pris en compte (le lecteur intéressé trouvera une description détaillée de ces éléments dans
LARÉDO Et MUSTAR, 1999). Le premier est le fait que les firmes coopèrent pour développer des compétences et les
savoir-faire qu'elles ne pourraient produire isolément
(HAGEDORN et al., 1990 ; MYTELKA, 1991). Le deuxième est
lié aux partenariats entre les firmes et la recherche publique, partenariats qui frappent aujourd'hui par leur
diversité (MUSTAR, 1998). Le troisième tient à la gestion
de l'innovation (KLINE et ROSENBERG, 1986) ; en effet, si
l'on accepte la vision tourbillonnaire, dynamique, hétérogène du processus d'innovation (AKRICH et al., 1988),
ce qui compte, c'est l'organisation de ce processus. Cette
perspective « en réseau » du processus d'innovation et
les trois principales caractéristiques qui lui sont liées
– l'engagement des firmes dans la coopération, leurs
partenariats avec la recherche publique et leurs modalités de gestion de la RD&I – ont guidé la construction de
notre enquête.
N OTE
4. Étant expérimentale, cette approche a été
confrontée à de nombreux problèmes d’interprétation. Pour nous assurer de la compréhension par
les entreprises des questions posées, nous
avons systématiquement conclu chaque partie du
questionnaire par une question ouverte permettant
de préciser les réponses. Cela nous a souvent aidé
dans l’interprétation et le codage des données. Un
des points délicats concerne les définitions de base
et notamment la différence entre activités de recherche, activités de développement et accompagnement innovation des activités industrielles et
commerciales. Le point est généralement bien compris, mais il est intéressant de voir combien les terminologies diffèrent d’une entreprise à l’autre,
soulignant à quel point un effort collectif est à mener par les entreprises et leurs associations représentatives comme l’ANRT ou l’EIRMA.
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réponse des filiales françaises de grands groupes étrangers est resté très faible (cf. encadré « L’analyse des nonréponses par La Tribune ») alors même qu’elles représentent près du sixième des cent premières firmes
françaises5.
Une fois ces deux limites prises en compte, les répondants couvrent relativement bien les cent premières entreprises françaises à l’exception de deux secteurs très
peu représentés : le BTP et surtout l’agroalimentaire
(cf. encadré « Les entreprises de l’échantillon »). Nous
L’analyse des non-réponses par La Tribune
THÈME
C. DAVID, de La Tribune, identifie quatre sources de non-réponses :
– viennent au premier rang des non-réponses les filiales de groupes étrangers « qui ne sont pas maîtres de la divulgation de ce type d’informations... Caractéristique, IBM qui renvoie un questionnaire vierge de tout chiffre mais joint le rapport d’activité d’IBM Corp. ». Heureusement, noteront-ils les années suivantes, l’attitude n’est pas généralisée comme
le soulignent des répondants réguliers comme Jouveinal-Parke Davis, Mobil Oil Française ou plus récemment Lipha,
Philips ou Siemens ;
– les « adeptes du secret » qui s’affichent comme tels sont de moins en moins nombreux. « Michelin en est l’exemple
type » de même que Sommer-Allibert, « qui ne communique pas sur ces questions » ;
– ils sont de plus en plus remplacés par les « retardataires », qui « ont manifesté jusqu’au bout leur intention de répondre, mais ne sont pas passés à l’acte » sans doute parce que « l’entreprise ne veut pas mettre sur la place publique,
sans le dire clairement, certains aspects de sa recherche (organisation, données chiffrées) ». On rejoint la position clairement exprimée par le président du groupe Legrand, « Il ne s’agit pas de secret, mais de discrétion sur des questions
stratégiques » ;
– enfin, et c’est particulièrement vrai des SSII ou des entreprises d’ingénierie, il y a ceux qui s’en tenant à une définition
étroite de la R&D considèrent ne pas en faire, comme Cap Gemini.
SOURCE : La Tribune, 08/01/97 et 12/10/97 (les citations tirées de ces deux articles sont entre guillemets).
Les entreprises de l’échantillon
Le positionnement des répondants
100 premiers groupes
Au-delà
Total
Participation
40 + 10 (1)
32
82
données retenues sont celles de la dernière enquête
dont nous disposons.
Aérospatiale-Matra*, Air Liquide*, Alcatel*, Alstom*,
Atos (Sligos), Biomérieux, Bouygues*, Bull*, Compagnie des
SOURCE : les 1 000, classement 1998 L'Expansion, n° 608,
Signaux, Cegelec, Compagnie Générale de Géophysique,
novembre 1999.
Danone*, EDF*, Elf Aquitaine*, Elf Atochem*, Elyo*,
Essilor, Faurecia*, Fournier, FraParticiptation et non-réponses
matome*, France Télécom*,
pour les 100 premiers groupes industriels
Gaz de France*, Générale Sucrière, GIAT*, GTM, Hermes,
Filiales de
AgroAutres
Hispano-Suiza, HMR, Hutchingroupes alimentaire,
groupes
Services
Holdings étrangers
textile, industriels
son*, Innothera, Entreprises
Répondants
(NQ)
(NQ)
(NR) BTP (NR)
(NR)
Jean Lefebvre, Jouveinal
Les 10 premiers
10
Parke-Davis*, L’Oréal*, Lafarge,
De 11 à 20
8
1
0
0
0
1
Legris, Limagrain, Lipha, LVMH,
De 21 à 50
10 + 4 (1)
7
3
4
4
2
Matra-Hachette,
Messier
De 51 à 100
12 + 6 (1)
15
1
7
9
6
Bugatti,
Mobil
Oil
Française*,
Total
40 + 10 (1)
23
4
11
13
9
Péchiney*, Philips France,
(1) Les chiffres ajoutés concernent des filiales de grands groupes classés en parallèle dans
Pierre Fabre Medicaments*,
ce groupe par L'Expansion et qui ont participé à l'enquête.
NQ : non questionné. NR : non réponse.
Plastic Omnium, PSA PeugeotCitroën*, Radiall, RATP*,
La liste des entreprises
Renault*, Rhône-Poulenc*, Rossignol, Routière Colas,
Les entreprises marquées d’une astérisque sont celles
RP Rorer, SAGEM, Saint-Gobain*, Sanofi*, Schlumberger,
nous ayant répondu trois fois et plus. Elle forment le
Schneider Electric*, SEB, SEITA*, Siemens, SMK, SNCF*,
« cœur » de l’échantillon sur lequel seront conduites les
SNR Roulement, Soletanche, STERIA, STMicroelectronics*,
analyses ayant trait aux évolutions observées (39 entreSuez Lyonnaise des eaux*, Synthelabo*, TDF, Thomson
prises). Il n’est pas tenu compte des entreprises ayant
CSF, Total Fina*, Total Raffinage Distribution, Usinor*,
fusionné depuis la dernière enquête (octobre 1999). Les
Valeo*, Vallourec, Verilog, Vivendi (environnement)*.
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r LES LIENS AVEC LA RECHERCHE
PUBLIQUE
L’enquête a cherché à prendre la mesure de la multiplicité des modalités de coopération entre les firmes et le
monde public de la formation et de la recherche. Quatre
modalités principales se dégagent des travaux effectués
en la matière.
La première concerne le nombre de laboratoires avec
lesquels les firmes collaborent et le montant des contrats
qu’elles leur passent. On sait par exemple que les coopérations entre les entreprises et les laboratoires liés au
CNRS ont été multipliées par dix en moins d’une décennie (MUSTAR, 1998).
La deuxième passe par l’engagement dans la formation par la recherche avec l’accueil et/ou le soutien
des doctorants. Il se traduit généralement, troisième modalité, par le recrutement de jeunes formés par la recherche. Ces deux derniers points ont longtemps
fait l’objet d’un consensus politique en France pour
stigmatiser le faible engagement des firmes dans la
R&D. Les conventions industrielles de formation par la
recherche (CIFRE) furent créées au début des années 80
par les pouvoirs publics pour inciter les firmes à faire
plus. C’est encore aujourd’hui une priorité marquée de
la politique nationale avec un soutien accordé à plus de
800 nouvelles CIFRE annuelles (annexe au projet de Loi
de finance pour 2000). De même, les bilans effectués
soulignent périodiquement la part relativement faible de
l’industrie dans le recrutement des docteurs même si
l’association Bernard-GRÉGORY Montre qu’aujourd’hui
plus de la moitié des docteurs qui s’adressent à elles
trouvent un emploi dans l’industrie (Formation par la
recherche, n° 66, mars 2000).
Enfin, l’accès à la science en train de se faire comme
la capacité d’absorption des firmes tiennent en bonne
part à leur implication directe dans les travaux en cours
ainsi qu’à la visibilité et à l’attractivité de leurs chercheurs. Les publications académiques sont pour cela un
moyen de plus en plus utilisé (HICKS, 1997), y compris
par les firmes françaises (CRANCE, 1999).
L’analyse de l’engagement des firmes sur chacune
de ces quatre modalités nous permet de qualifier l’engagement global de chaque firme dans les coopérations
avec la recherche publique. L’encadré ci-après décrit la
procédure adoptée pour positionner les firmes.
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Les principes adoptés
pour l’analyse de l’engagement
des firmes dans chacune
des dimensions du modèle
en réseau de l’innovation
Pour suivre l’engagement des firmes dans une dimension, un indicateur est construit pour chaque modalité
de coopération ou de gestion identifiée (par exemple
quatre modalités pour les coopérations avec la recherche publique). La graduation d’un indicateur est
relative (en regard de l’engagement moyen observé).
Elle est de 0 quand la firme ne répond pas ou n’est pas
engagée et varie généralement de 1 à 4. Dans la plupart des cas, elle tient compte de l’importance relative
de l’engagement (plus l’engagement est fort, plus la
« note » est élevée), mais pour quelques autres (cf. la
gestion de projets, quatrième partie), la graduation privilégie l’équilibre des engagements. Pour passer de
l’engagement dans chaque modalité à l’engagement
dans une dimension, nous avons choisi de construire
des indices qui permettent de mesurer un engagement cumulé tout en reconnaissant la variété des
voies possibles. L’indice permet de donner une pondération différente selon l’importance relative des engagements (ainsi nous avons doublé le poids des
relations avec les laboratoires dans l’indice de coopération avec la recherche publique). De même, des
seuils peuvent être introduits pour qualifier
l’engagement dans une dimension (cf. la transformation de la gestion, cinquième partie). Une analyse comparative de l’engagement des firmes dans une
dimension peut alors être conduite. Les firmes sont regroupées en deux ensembles : celles qui peuvent être
considérées comme engagées, pour cette dimension,
dans le modèle en réseau de l’innovation, et celles qui
ne le sont pas ou seulement de façon « modérée »
(groupe G4 dans les tableaux). Parmi les firmes engagées dans le modèle en réseau de l’innovation, trois
groupes (respectivement G1, G2 et G3 dans les tableaux) sont constitués pour distinguer le degré
d’engagement des firmes : elles sont alors « très fortement », « fortement » ou « significativement » engagées
dans le modèle en réseau de l’innovation.
THÈME
considérons donc qu’on peut à partir de cet échantillon
conduire des analyses de tendances, pour identifier et caractériser les principaux choix et mouvements à
l’œuvre. Ceci est l’objet des sections suivantes.
N OTE
5. Le faible nombre de filiales de grands groupes
étrangers (qui plus est rarement parties prenantes
du « cœur » de l‘enquête) a interdit toute analyse
comparative. La question d’une spécialisation relative ou d’un changement de périmètre des activités
de RD&I suite à un rachat n’ont donc pas pu être
abordées.
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THÈME
Dès 1995, la première enquête soulignait combien
ces liens étaient importants. Elle montrait que l’entreprise moyenne de l’échantillon entretenait des relations
avec plus d’une cinquantaine de laboratoires (le
chiffre est de 70 en 1999), qu’elle consacrait environ
35 millions de francs à ces relations (chiffre non disponible en 1999, mais équivalent en 1998), qu’elle accueillait ou soutenait environ 40 doctorants (ce nombre était
identique en 1999), et qu’elle participait à 25 articles
académiques publiés dans les revues indexées par le
Science Citation Index (ce nombre passe à plus de 30
en 1999). Cette stabilité des données moyennes contraste
avec le fort mouvement observé sur deux autres indicateurs. D’une part, on note un renforcement continu du
recrutement pour les activités de RD&I de jeunes docteurs : le taux est passé de moins de un sur cinq en 1995 à
plus de un sur trois en 1999, alors même que le nombre
des recrutements a fortement augmenté. D’autre part,
on assiste à une internationalisation grandissante des
coopérations. En 1998, un tiers des laboratoires publics
avec lesquels les firmes coopéraient se situaient hors de
France. Et plus de deux firmes sur trois (données 1999)
avaient des liens avec des laboratoires publics américains qui représentaient quasiment le dixième des laboratoires avec lesquels ces firmes coopéraient.
La première enquête avait mis en avant le faible
taux de réponse à ces questions, près d’une entreprise
sur trois ne répondant pas ou seulement à quelques
aspects lacunaires. La situation a fortement évolué
puisqu’en 1999, quasiment toutes les entreprises ont
répondu. Les données moyennes sensiblement égales
correspondent donc à un nombre accru de firmes entretenant des liens avec la recherche publique. Cette
première enquête avait également souligné l’engagement contrasté des entreprises qui se répartissaient
alors en trois groupes très différents quant à leur niveau d’implication : quel que soit l’indicateur, le multiplicateur de passage d’un groupe à l’autre était au
moins de deux. Le même contraste se retrouve en 1999
entre les quatre groupes d’engagements identifiés
(cf. encadré « L’engagement des entreprises françaises
dans les coopérations avec la recherche publique »).
D’un groupe à l’autre, les niveaux d’engagements doublent en ce qui concerne les laboratoires publics avec lesquels les firmes collaborent, d’environ 15 laboratoires
publics pour le groupe 4 à plus de 150 pour le groupe 1.
On retrouve un écart encore plus grand en ce qui
concerne les publications : de quelques rares publications dans le groupe 4 à 15 dans le groupe 3, 25 dans le
groupe 2 et près de 100 dans le groupe 1. Même mouvement pour les doctorants accueillis (moyennes respectives : 7, 17, 32 et 88). Par contre, les écarts sont moindres en ce qui concerne les doctorants recrutés : les
groupes 2 et 3 partageant le même nombre – environ 15 – soit deux fois plus que le groupe 4 (7) mais
également deux fois moins que le groupe 1 (37).
L’engagement des entreprises françaises
dans les coopérations avec la recherche publique
EntreEntre- prises
prises
hors
cœur
cœur
Total
G1
Liens très forts
15
4
19
G2
Liens forts et variés
8
4
12
G3
Liens conséquents
et variés
7
5
12
G4
Liens conséquents
4
12
16
5
18
23
39
43
82
Non-classés Liens faibles
Total
Liens très forts (G1). Caractéristiques : au dessus de
50 millions de francs de contrats (la moyenne est autour de 100 millions de francs), plus de 100 laboratoires dont un tiers maintenant hors de France, une
centaine de doctorants accueillis ou soutenus, en
moyenne près d’une centaine de publications dans les
revues suivies par le SCI (Science Citation Index).
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Liens forts et variés (G2). Caractéristiques : pour la plupart
entre 10 et 20 millions de francs de contrats (moyenne autour de 15 millions de francs), plus de 50 laboratoires (en
moyenne 1/6 hors de France), 25 doctorants, 30 publications, un taux de recrutement de titulaires de thèse souvent
au dessus de la moyenne.
Liens conséquents et variés (G3). Caractéristiques : une
trentaine de laboratoires, entre 5 et 10 millions de francs de
contrats, une quinzaine de doctorants et une quinzaine
d’articles académiques.
Liens conséquents (G4). Caractéristiques : souvent moins
de 5 millions de francs de contrats, la plupart du temps
moins de 10 doctorants accueillis et la plupart du temps
pas d’articles académiques. Pour près de la moitié, ces entreprises ont développé ces relations depuis longtemps,
sans les avoir ni renforcées ni élargies pendant la période.
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6. Avertissement méthodologique : compte tenu
des petits nombres en cause, l’analyse qui suit
cherche simplement à identifier des tendances en
s’appuyant sur les différences fortes notées.
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r LES COOPÉRATIONS
INDUSTRIELLES
Le modèle en réseau de l’innovation fait l’hypothèse
que les firmes ne peuvent maîtriser en interne toutes les
compétences dont elles ont besoin pour développer de
nouveaux produits. La plupart des travaux souligne
l’importance pour les firmes de se concentrer sur leur
cœur de compétences et de s’engager dans des coopérations pour accéder aux autres compétences nécessaires
(cf. le bilan effectué par WEIL ET DURIEUX, 2000). De fait,
ces collaborations se sont très largement développées sur
la période, la part des projets menés en collaboration
doublant quasiment (d’un quart à la moitié) alors
même qu’une partie grandissante de la RD&I était déjà
conduite en projet.
Ces coopérations concernent d’abord les fournisseurs dont le statut change progressivement et qui deviennent des « codéveloppeurs » (MIDLER, 2000). La
montée des équipementiers de l’automobile en est
une illustration forte et visible dans notre échantillon.
Elles concernent tout autant les clients et particulièrement ces « utilisateurs-pilotes » qui s’engagent avec les
industriels pour les aider à mieux spécifier et tester leur
nouveaux produits (Von HIPPEL, 1988). Leur place est
devenue suffisamment importante pour que des entreprises repensent la localisation de leurs laboratoires de
division pour se rapprocher d’eux. Ces partenaires verticaux occupent une place prépondérante dans les
collaborations. Ils représentent plus des trois quarts
de l’ensemble des collaborations identifiées. Les deux
tiers des firmes de l’échantillon sont fortement ou
moyennement engagées dans ces collaborations ; elles se
partagent en trois groupes égaux selon qu’elles mêlent
clients et fournisseurs ou qu’elles focalisent les relations
sur les uns ou les autres.
De nombreux débats ont eu lieu sur la montée des alliances, c’est-à-dire les coopérations avec des concurrents. Les problèmes de taille critique (notamment face
au montant des investissements réclamés) ont souvent
été mentionnés. Les travaux menés sur les programmes
communautaires (auxquels 95 % des firmes de l’échantillon ont participé) ont également mis en exergue l’importance des collaborations horizontales dans les technologies (LARÉDO, 1998). Face à l’explosion des options
et des voies émergentes, le danger pour les firmes n’est
pas de partager ces compétences technologiques, mais
de ne pas y avoir accès, faute d’avoir été impliquées dans
leur développement. Les firmes des technologies de l’information en sont une illustration forte. L’enquête
confirme ce mouvement. Une entreprise sur deux développe des collaborations avec des concurrents. Ces dernières sont nettement moins nombreuses que les coopérations verticales – elles concernent un projet sur dix –
THÈME
On assiste entre 1995 et 1999 à trois évolutions majeures dans la composition des groupes6.
Le groupe des entreprises « très fortement engagées »
(G1) a plus que doublé. Il passe, pour le « cœur de l’enquête » de six firmes en 1995 à quinze (un tiers de
l’échantillon) en 1999. Les caractéristiques qui définissent le très fort engagement évoluent peu entre 1995 et
1999. Cela signifie que les groupes fortement engagés en
1995 n’ont pas continué à accroître leur effort. La dynamique se définit avant tout comme une « mise à niveau » de grands groupes moins impliqués qui rejoignent le noyau initial. Cette mise à niveau doit tenir
compte des nouveaux répondants. Mais cela ne suffit
pas à expliquer cet accroissement puisque 15 des
19 groupes font partie du « cœur de l’enquête »,
c’est-à-dire des firmes qui ont régulièrement répondu.
On est donc conduit à considérer (et cela est particulièrement visible dans les publications) que cet élargissement
tient à un effort accru de groupes qui, accroissant le
spectre de leurs relations, rejoignent le noyau limité des
entreprises déjà très fortement engagées en 1995.
Le groupe des entreprises avec des liens conséquents
(G3 en 1995) s’est considérablement accru au point de
dépasser la vingtaine d’unités. Cela a conduit à distinguer en son sein deux sous-ensembles, de taille à peu
près équivalente, le premier se distinguant du second à
la fois par ses niveaux d’engagement plus marqués et
surtout par un spectre plus large des types de relations
(cf. groupes G3 et G4 de l’encadré).
Enfin, le groupe des entreprises « fortement engagées » (G2), c’est-à-dire ayant développé des liens
forts et variés, a deux caractéristiques très spécifiques.
C’est le seul groupe où l’on trouve un effet sectoriel
marqué car y sont positionnées toutes les entreprises
pharmaceutiques françaises de « taille moyenne ».
Ces firmes pharmaceutiques tirent l’image moyenne de
ce groupe vers le haut tant en ce qui concerne les publications académiques que le taux de recrutement des docteurs. Cela n’empêche pas les autres entreprises de ce
groupe d’avoir, sur la période, sensiblement accru leur
engagement dans ces deux dimensions. Ces autres entreprises, c’est la deuxième caractéristique spécifique à ce
groupe, sont toutes fortement internationalisées et
occupent des positions mondiales dans leur secteur.
Cependant, elles se positionnent sur des secteurs où l’intensité de R&D, même si elle a crû (BOWONDER, 2000),
reste limitée, ce qui se traduit sur le niveau des liens avec
la recherche publique.
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Composite Trame par dØfaut
THÈME
et elles portent plus souvent sur des « programmes technologiques » que sur des « projets industriels ». Dans
certaines entreprises, notamment dans les secteurs de
l’aéronautique, de la pharmacie ou de l’automobile, ces
deux types coexistent, soulignant l’importance pour les
firmes d’une stratégie d’innovation qui permette de décider dans quels cas la firme s'engage dans l'un ou l'autre
de ces partenariats.
Se concentrer sur son cœur de compétences suppose
aussi de se désengager au moins partiellement de compétences qui soit ne sont plus jugées critiques, soit
sont suffisamment réparties pour qu’on puisse faire
appel à des « professionnels de la recherche et de la
technologie ». L’enquête a donc progressivement cherché à prendre la mesure de ce mouvement d’externalisation. Depuis 1997, l’enquête suit la participation des
« professionnels de la recherche et de la technologie »
dans les projets. Dès la première année, quasiment toutes les entreprises mentionnaient de telles coopérations.
Les années suivantes, nous avons pu estimer leur poids :
il y en avait dans le tiers des projets industriels et les deux
tiers des programmes technologiques. Et si les laboratoires publics dominent (70 % des mentions), il n’en demeure pas moins que la place des entreprises technologiques (et des sociétés de recherche sur contrat) ne doit pas
être occultée : elles sont mentionnées par deux entreprises sur trois et jouent un rôle au moins aussi important
que les laboratoires publics de recherche pour plus d’une
entreprise sur quatre.
En 1999, nous avons cherché à compléter nos indicateurs en introduisant une question sur la place de
l’externalisation dans l’effort de RD&I des firmes. Nous
ne disposons donc que d’un instantané : en moyenne,
les firmes y consacreraient 17 % de leur effort total de
RD&I. Les motivations classiques (sous-traitance,
prestations notamment fondées sur des grands instruments) sont nettement moins fréquentes que celles qui
concernent la complémentarité des expertises et
l’échange de compétences qui, grâce aux coopérations
mises en place, permettent le recentrage de l’entreprise
sur ses compétences cœur. Les firmes et les technologies
évoluant, il n’y a pas de raison que la seule évolution
consiste à externaliser, on assiste également à un
TABLEAU 1 – Les motifs des acquisitions
externes
Oui
Acquérir des compétences complémentaires
Atteindre une taille critique
13
11
Élargir la base de marché
Autres
19
6
Note – 23 entreprises sur 45 ont effectué des acquisitions
externes. Elles mentionnent en moyenne deux motifs.
SOURCE : enquête 1999.
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mouvement inverse d’internalisation qui conduit des
firmes à préférer absorber des compétences existantes
plutôt qu’à les constituer ex nihilo. L’enquête 1999 a
pris une première mesure de l’importance des acquisitions de nouvelles compétences (tableau 1) : plus
d’une entreprise sur deux a eu recours à des acquisitions
externes qui ont modifié ses activités de RD&I. Pour
un quart, ces acquisitions étaient directement motivées
par la volonté d’augmenter, d’élargir et d’adapter les
compétences internes de l’entreprise. Ce mouvement
est particulièrement fort pour les firmes des nouvelles
technologies de l’information et de la communication
(NTIC).
Comment se positionnent les firmes françaises
vis-à-vis des coopérations ? L’analyse des cinq modalités
de coopération présentées ci-dessus montre l’importance de l’engagement des firmes dans les coopérations
industrielles : les trois quarts des firmes sont au moins
« significativement » engagées dans de telles coopérations (cf. encadré « Le positionnement des entreprises
en matière de coopérations industrielles »). Ce pourcentage, déjà très important, sous-estime probablement
l’engagement des firmes, car, parmi celles qui sont
non classées, la part des firmes qui ne répondent pas est
dominante. Même si le taux de non-réponses a progressivement baissé (il était d’un tiers en 1995), il restait encore lors de l’enquête 1999, parmi les entreprises volontaires pour faire connaître leur effort de recherche et
d’innovation, une entreprise sur six qui considérait ces
dimensions comme confidentielles (c’est-à-dire à penser qu’il n’est pas bon de faire savoir à ses actionnaires
avec qui elle innove).
Parmi les firmes engagées dans les coopérations industrielles, les variations sont très fortes. Cela a conduit,
comme pour la dimension précédente, à constituer trois
groupes en fonction du niveau relatif d’engagement
(cf. encadré « Le positionnement des entreprises en matière de coopérations industrielles »). Ce qui différencie
ces trois groupes tient avant tout à l’engagement dans les
coopérations avec les clients et/ou les fournisseurs : on
passe du quart aux trois quarts des projets. En revanche,
l’implication des professionnels de la recherche et de la
technologie dans les projets est partagée par l’ensemble
des groupes dont le comportement est proche en la matière. Il faut donc probablement chercher ailleurs, et notamment dans les codéveloppements avec les fournisseurs, la source de la très forte différence notée dans le
volume de la RD&I externalisée. Il oppose le premier
groupe très fortement engagé dans les coopérations
(G1), qui consacre le quart de ses moyens à financer le
travail de ses partenaires externes, aux deux autres groupes dont la moyenne est voisine de 10 %. Les rachats
de nouvelles compétences sont une troisième source
d’opposition entre les groupes : ils sont quasi systématiques dans le premier groupe, concernent une entreprise
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Le positionnement des entreprises
en matière de coopérations industrielles
Positionnement de l'ensemble
des entreprises de l'échantillon
Entreprises Entreprises
cœur hors cœur
13
10
9
10
11
8
6
15
39
43
Total
23
19
19
21
82
%
28
23
23
26
100
Intensité forte des coopérations. Caractéristiques : des
clients ou fournisseurs dans les trois quarts des projets,
RD&I externalisée supérieure à 20 % (moyenne 26 %,
donnée 1999), des professionnels de la recherche dans
un tiers des projets. Pour les trois quarts des firmes, des
rachats externes (donnée 1999). Des concurrents dans
moins d’un projet sur dix : pour la très grande majorité
présents dans des programmes technologiques, mais
sur deux dans le deuxième, alors qu’on ne note que
quelques cas dans le troisième.
Comment ont évolué ces firmes sur la période ?
L’analyse des entreprises du « cœur » de l’échantillon,
dont 85 % sont au moins significativement engagées
dans les coopérations industrielles, met en exergue deux
trajectoires différentes. On observe pour les entreprises
« très fortement » engagées dans les coopérations (G1)
le même mouvement que pour les coopérations académiques : pour moitié ces entreprises avaient déjà développé d’importantes coopérations lors de la première enquête (1995), ce qui signifie que l’autre moitié a
progressivement renforcé ses coopérations sur la période. Ce mouvement est d’autant plus significatif qu’on
ne l’observe pas pour les entreprises cœur des deux autres groupes. Pour la plupart des entreprises de ces deux
groupes, ce positionnement est choisi très tôt et n’évolue
plus. On peut donc considérer qu’il correspond à un
équilibre des activités d’innovation dans les secteurs qui
les concernent. Ces données soulignent à quel point les
coopérations interentreprises font maintenant partie du
paysage ordinaire des activités de recherche et d’innovation. Les réseaux de coopération sont maintenant largement établis, la question qui devient centrale concerne
leur efficacité et leur productivité. Elle renvoie aux importantes transformations, observées dans la gestion
stratégique de la RD&I.
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Intensité moyenne des coopérations. Caractéristiques :
des clients ou fournisseurs dans la moitié des projets,
une RD&I externalisée autour de 10 %, des professionnels de la recherche dans un tiers des projets, peu de
concurrents dans les projets pour les trois quarts des entreprises (mais un poids conséquent ou important des alliances avec des concurrents pour quelques entreprises),
pas de recours à la croissance externe pour la moitié des
firmes.
Intensité conséquente des coopérations. Caractéristiques : des clients ou fournisseurs dans le tiers des projets, RD&I externalisée autour de 10 %, très forte
présence des professionnels de la recherche, plusieurs
cas de rachats externes importants, faible présence de
concurrents pour la plupart des entreprises (mais quelques alliances significatives).
THÈME
Intensité des
coopérations
Très forte (G1)
Forte (G2)
Significative (G3)
Non-classées
Total
également des alliances industrielles en nombre conséquent pour quelques firmes.
r LA GESTION STRATÉGIQUE
DE LA RD&I
Dès lors que l’innovation devient une composante
centrale de la dynamique des entreprises, plusieurs
conditions doivent être remplies pour que cet acte stratégique soit pris en charge à tous les niveaux de
l’entreprise.
Une première condition est que la direction générale ne se désintéresse pas de ces questions, trop longtemps renvoyées, en France, au seul niveau opérationnel de directions techniques ou industrielles. Nous en
avons cherché la preuve dans deux indicateurs centraux : d’abord, l’affirmation d’une prise en charge au
niveau de la direction générale. C’est chose faite pour
95 % des entreprises en 1999 (contre un peu plus de
50 % en 1995). Mais cela ne passe par l’existence d’une
direction fonctionnelle spécifique au sein de la direction générale qu’une fois sur deux encore aujourd’hui.
Le deuxième indicateur concerne la présence dans le
comité exécutif de l’entreprise (ou dans l’organe qui en
tient lieu) de responsables formés ou passés par la recherche. Cela était le cas de moins d’une entreprise sur
deux en 1995, alors qu’en 1999, quatre comités exécutifs sur cinq comportent de tels membres. Enfin, la
moitié des entreprises disposait en 1999 d’un conseil
scientifique pour accompagner la direction générale
dans ses réflexions stratégiques. On mesure donc sur
ce point, souvent stigmatisé par les analystes de la
situation française, le chemin parcouru durant les
années 90.
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THÈME
La deuxième condition concerne la diffusion des activités de recherche et d’innovation dans toute l’entreprise. Pendant longtemps, les analystes se sont opposés
pour savoir s’il valait mieux rassembler les compétences
dans un laboratoire central ou s’il était plus efficace de
les rapprocher des business units dans des centres de division. Ce débat est clairement dépassé aujourd’hui,
même si une entreprise sur trois considère encore qu’elle
peut tout faire dans un seul type de structures. Les deux
autres tiers estiment qu’il faut à la fois des unités proches
des marchés et des unités proches de la « science en train
de se faire ». Les premières permettent de mieux se lier
aux clients ainsi que de mieux prendre en compte leurs
besoins dans le développement de nouveaux produits et,
voire surtout, dans l’amélioration permanente de la
gamme existante. Les secondes sont plus tournées vers
les technologies, de façon à mieux se lier à la science en
train de se faire et aux laboratoires publics qui en sont les
moteurs. Une entreprise sur quatre considère même
qu’il est nécessaire de « répandre » la recherche et l’innovation dans toutes les business units, ajoutant ainsi
un troisième niveau pour assurer que cet impératif
circule dans toute l’entreprise. En 1998, pour les
groupes enquêtés et à l’échelle internationale, les
moyens humains se répartissent à raison de 30 % dans
des laboratoires centraux, de 50 % dans des laboratoires
de division et de 20 % dans d’autres unités.
Les mouvements observés depuis 1995 sont importants, mais ils portent plus sur une intensification que
sur un élargissement. Intensification, parce que l’on
note une capacité forte des entreprises déjà organisées en
réseau en 1995 à faire évoluer régulièrement leur dispositif. Et faible élargissement, parce que les structures de
recherche et de développement sont probablement l’aspect organisationnel pour lequel l’histoire compte le
plus. Il est alors difficile de les faire évoluer rapidement.
Cela concerne aussi bien les entreprises dotées de longue
date de laboratoires centraux puissants que les entreprises qui, ayant plus récemment organisé leur fonction
RD&I, ont largement privilégié les seules activités proches du marché.
N OTE
7. Tant pour 1998 que 1999, la moyenne des entreprises enquêtées est d’environ 30 % pour la recherche, 55 % pour les développements et 15 %
pour l’innovation en continu. Nous avons considéré
(en première approche) qu’un équilibre était atteint
quand la recherche oscillait entre 5 et 30 %, le développement entre 45 et 75 % et l’innovation en
continu entre 5 et 35 %, des marges on le voit
conséquentes et qui mériteraient des travaux plus
approfondis sur leur signification et leur variation en
fonction des entreprises.
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En 1998 et 1999, nous avons cherché à approfondir
l’analyse en nous intéressant à la manière dont les
moyens financiers étaient répartis en fonction des différents types d’activités (recherche, développement et innovation en continu), en nous donnant des bornes larges quant à la définition d’une situation équilibrée7.
Malgré cela, seule une entreprise sur deux a équilibré
ses moyens entre les différentes fonctions, soulignant à
quel point la pénétration de l’innovation dans toute
l’entreprise est une affaire de longue haleine.
Cela explique probablement l’accent mis, par la
quasi-totalité des firmes, sur l’évolution des procédures
de gestion. Dès 1995, les trois quarts des entreprises
avaient adopté la gestion par projets mise en avant par
MIDLER (1993) dans son analyse des transformations de
la gestion des grandes entreprises. Cette situation s’est
généralisée puisqu’on ne compte plus en 1999 que 5 %
des entreprises à avoir moins de 40 % de leur effort de
RD&I géré en projet. Pour autant, peut-on considérer la
situation comme satisfaisante, surtout lorsque plus du
tiers des firmes affirme gérer tout ou quasiment tout
(95 % et plus) leur effort de RD&I en projets ? Cela nous
a conduits à mieux apprécier la manière dont les firmes
abordent les tensions concrètes qui animent les activités
de RD&I. Quelles sont celles qui doivent être menées
en continu dans les structures existantes, quelles sont
celles qui doivent être conduites dans le cadre de projets
ou programmes, sujets à des décisions individualisées ?
Parmi ces activités individualisées, quel équilibre avoir
entre les projets industriels et commerciaux (visant directement de nouveaux produits, procédés ou services) et
les programmes technologiques destinés à renforcer les
compétences cœur de l’entreprise ? Et à quel niveau doivent alors être prises ces décisions ? Cette triple tension
demeure toujours difficile à tenir simultanément. Un
équilibre est à chaque fois trouvé par une entreprise sur
deux environ. Ainsi en 1999, 58 % des entreprises mobilisent entre 50 et 90 % de leurs moyens consacrés à la
RD&I sur des projets, un peu moins de la moitié partage
les décisions de lancement des projets entre structures
centrales et structures de terrain, enfin une sur deux associe aux projets industriels des projets dédiés à l’amélioration des compétences technologiques en nombre
« raisonnable » (entre 5 et 30 % du nombre total de
projets).
La place déterminante prise par les projets imposait
de mieux saisir la manière dont les firmes les suivent,
c’est-à-dire les procédures utilisées pour rendre compte
des travaux, les critères dont elles se sont dotées pour apprécier leur avancement et les effets de cet investissement. Nous avons été frappés par l’aspect convenu des
résultats obtenus par cette question ouverte : beaucoup
de reporting et un peu d’audit, le triptyque « coûtsdélais-performance » et en moyenne un projet sur
vingt arrêté au terme de ce suivi. Enfin, la « gestion de
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Mais toutes les modalités de prise en charge de la
RD&I ne sont pas équivalentes. Nous avons considéré
que les firmes, pour pouvoir gérer stratégiquement leur
effort de RD&I, devaient impérativement remplir deux
caractéristiques qui correspondent aux deux premières
conditions présentées ci-dessus : une prise en charge effective au niveau de la direction générale d’une part, un
déploiement des activités de RD&I dans l’entreprise
d’autre part. Combinés, ces deux seuils pénalisent la
moitié des entreprises à fort indice. Le premier groupe
des entreprises dont la prise en charge stratégique est très
affirmée (groupe G1, encadré « Le positionnement des
firmes vis-à-vis de la gestion de la RD&I ») représente
donc le cinquième de l’échantillon. Le deuxième groupe
rassemble les firmes à fort indice qui n’ont rempli
qu’une de ces deux caractéristiques, complétées par des
firmes moins engagées (indice compris entre 10 et 15)
mais qui s’étaient organisées sur ces deux points
(groupe G2 de l’encadré). 45 % des firmes nous ayant répondu (37 sur 82) se sont donc organisées pour pleinement tirer parti de leurs investissements immatériels
dans la RD&I. C’est un résultat d’autant plus significatif
que le constat était particulièrement sévère en 1995
puisque nous considérions alors que seul le premier
groupe (composé de 11 entreprises) était dans une position similaire. Ce large doublement permet de mesurer
le chemin parcouru en quelques années. Même s’il ne
faut pas sous-estimer l’importance des firmes pas ou peu
engagées dans ce mouvement de transformation (un
tiers de l’échantillon et plus de la moitié des répondants
« ponctuels »), les changements n’en demeurent pas
moins rapides. Si les comportements observés dans le
troisième groupe des firmes partiellement engagées se
vérifie (groupe G3 de l’encadré), ce pourcentage devrait
en 2001 être bien supérieur. En effet la plupart des firmes
de ce groupe qui appartiennent au « cœur de l’échantillon » ont fait évoluer leur prise en charge depuis 1995
mais de façon moins marquée. Nous faisons donc l’hypothèse qu’on est là face à un décalage temporel dans
des entreprises qui ont d’abord privilégié leur internationalisation ou/et l’acquisition d’une taille critique via
une croissance externe.
THÈME
portefeuille » est mise en avant par une partie de
l’échantillon. L’aspect très stéréotypé de ces descriptions
illustre le décalage qui nous semble exister entre l’adoption quasi systématique de la gestion en projets de la
RD&I et sa mise en œuvre. Cette impression est renforcée
par un autre indicateur : seulement 60 % des firmes déclaraient avoir mis en place en 1999 une structure spécifique d’évaluation des projets. Nous faisons l’hypothèse
qu’il s’agit plus d’un effet d’affichage que d’une évolution effective des pratiques. Les données sur la gestion des
ressources humaines nous renforcent dans cette opinion. En effet, les débats se faisant de plus en plus importants sur la gestion des compétences (cf. le numéro spécial de la REI sur l’économie de la connaissance,
DIBIAGGIO, 1999), nous en avons cherché une trace à
travers un indicateur certes réducteur mais déjà révélateur : la manière dont les ressources humaines consacrées à la RD&I sont gérées. Le questionnaire s’est donc
étoffé sur ces points. En 1999, moins d’une entreprise
sur deux (20 sur 45) déclarait avoir une gestion spécifique de son potentiel de recherche et d’innovation, et
seulement six avaient adopté une « double échelle »
(managériale et technique) pour la gestion des carrières
de cadres. Ce chiffre correspond exactement aux entreprises déclarant que la recherche et l’innovation constituent un espace de carrière pour leurs cadres (dans 11 de
ces 20 entreprises, la durée moyenne de séjour dans ces
fonctions est comprise entre 5 et 10 ans et pour les 9 autres, elle dépasse la décennie). Elles sont également une
sur deux à intéresser leurs ingénieurs et chercheurs aux
résultats des travaux. Il s’agit alors avant tout d’un intéressement individuel associé la plupart du temps à des
prises de brevets ou à la réalisation des objectifs fixés.
Dans une firme sur quatre, cet intéressement individuel
se double d’un intéressement collectif.
Comment se positionnent les entreprises françaises
en matière de prise en charge organisationnelle de l’innovation ? L’entreprise « d’école » (celle qui aurait parfaitement rempli tous les critères) n’existe bien évidemment pas. Existerait-elle qu’elle ne serait probablement
pas performante, car ces éléments ne tiennent aucun
compte de l’histoire même des entreprises, de la situation spécifique de leurs marchés, des formes de la
concurrence, des modalités d’intervention dans différents secteurs de la puissance publique, etc. Nous avons
considéré qu’il fallait tenir compte de cette variété
et donc centrer l’analyse sur l’engagement global des firmes quant à la gestion de la RD&I. La même approche
que pour les autres dimensions a été utilisée. L’indice
construit manifeste l’importance accordée par les firmes à ces questions : la moyenne en 1999 est juste inférieure à 15 points alors que le maximum théorique est de
28 points, et la moitié de l’échantillon atteint ou dépasse
cette moyenne.
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Le positionnement des firmes vis-à-vis de la gestion de la RD&I
Prise en charge
stratégique de la RD&I
G1 (très affirmée)
G2 (affirmée
G3 (partielle)
Non classées
Total
Entreprises
cœur
11
13
10
5
39
Entreprises
hors cœur
6
7
7
23
43
Dont
répondants
récents
4
3
4
Total
17
20
17
28
82
%
21
24
21
34
100
THÈME
Prise en charge stratégique très affirmée (G1). Toutes les firmes de ce groupe ont à la fois une présence affirmée de la
RD&I au sein de la direction générale (et pour les trois quarts d’entres elles un comité scientifique actif). Les activités
de RD&I sont réparties dans au moins deux des trois types de structures (laboratoire central, laboratoires de division et
autres unités). Les tensions liées aux projets (part dans le total de la RD&I, équilibre dans la prise de décision, équilibre
entre types de projets, suivi) sont prises en charge complètement par les trois quarts des firmes. Parmi les 11 entreprises du cœur de l’échantillon, la moitié est présente depuis le début, l’autre moitié a rejoint ce groupe à la suite d’une
évolution forte des structures (très récente pour plusieurs).
Prise en charge stratégique affirmée (G2). Ce deuxième groupe est constitué pour un tiers de firmes qui passent les
deux seuils, mais sont nettement moins engagées dans les autres dimensions (index compris entre 10 et 15), et pour
deux tiers de firmes qui ont un index élevé (supérieur à 15) mais un seuil défaillant. Ces dernières sont parmi celles les
plus engagées dans une gestion active de leur potentiel de RD&I (double échelle, intéressement collectif, etc.). Seules
quelques entreprises maîtrisent complètement les tensions liées aux projets.
Prise en charge stratégique partielle (G3). Ce troisième groupe où les engagements ne sont que partiels et au maximum un seuil présent rassemble deux comportements distincts. Une petite partie reste figée sur ses positions du milieu des années 90, alors que la plupart des entreprises présentes suit le mouvement « de loin », c’est-à-dire qu’elles
participent du mouvement grandissant de prise en charge organisationnelle de la RD&I, mais avec un décalage temporel significatif.
r L’INTERNATIONALISATION
DE LA RD&I
À un moment où l’on ne parle que de marchés globaux et de mondialisation, lorsque Renault s’allie à
Nissan, que Rhône-Poulenc et Hoechst-MarionRoussel se fondent dans Aventis, qu’AérospatialeMatra, à peine fusionné, fonde avec DASA, EADS, et
après la création de ST Microelectronics, un lauréat récurrent du « palmarès de l’innovation », il devenait indispensable d’ajouter une quatrième dimension à l’analyse pour suivre transversalement ce mouvement
d’internationalisation de la RD&I. Or ce mouvement ne
va pas de soi. Il ne suffit pas de posséder des activités et
des laboratoires dans différents pays (ce que favorisent
les rachats et alliances), encore faut-il qu’ils collaborent
et que des synergies s’établissent entre ces différentes
unités (PEARCE, 1999). Au début des années 90, différents
travaux sur la recherche dans les firmes multinationales
mettaient en avant la spécialisation géographique des
efforts de R&D et la faiblesse des coopérations entre filiales, souvent limitées aux recherches de base. Même
cette dernière dimension semble poser problème quand
on voit le faible nombre de copublications de chercheurs industriels français avec des collègues de filiales
étrangères (CRANCE, 1999).
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Le questionnaire a donc été affiné en 1999 pour
prendre la mesure du phénomène d’internationalisation. Cela a permis de construire six indicateurs qui
concernent les moyens de RD&I et les trois dimensions
du modèle en réseau de l’innovation.
Les moyens d’abord. La part de la RD&I effectuée
hors de France est de 30 %, que l’on s’intéresse aux dépenses ou aux moyens humains. Ce pourcentage est supérieur à 40 % pour 15 % des entreprises de l’échantillon
de 1999, il est nul ou inférieur à 10 % pour 45 % des entreprises. Le second indicateur retenu concerne la couverture mondiale de la protection industrielle. Les entreprises de l’échantillon ont déclaré avoir pris quelque
190 brevets originaux au plan européen en 1997-98.
Plus de la moitié de ces brevets fait également l’objet
d’un dépôt américain, ce qui traduit l’ampleur grandissante de la couverture mondiale. Ce taux est voisin de
100 % pour la moitié des entreprises, alors qu’il est nul
pour une sur cinq.
Quatre indicateurs permettent de suivre l’engagement dans des réseaux internationaux. Le premier
concerne la part internationale de l’externalisation. Elle
est en moyenne d’un tiers pour les entreprises de
l’échantillon. Mais ce pourcentage portant sur des degrés très différents d’externalisation, nous avons pondéré ce chiffre par le taux d’externalisation. On s’aperçoit
alors que l’effort reste modeste. Il est voisin de 11 % de
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l’effort total de RD&I pour une entreprise sur sept, voisin n’avoir pas ou seulement marginalement entamé un
de 5 % pour une autre entreprise sur sept, et positif tout en processus d’internationalisation de leur R&D.
restant inférieur à 3 % pour une entreprise sur trois. Il est
nul ou non déclaré pour le dernier tiers des entreprises.
L’internationalisation de l’organisation est obLE POSITIONNEMENT
servée à travers le nombre de sites RD&I (laboratoires
GLOBAL
DES ENTREPRISES
de division ou autres unités effectuant de la RD&I) de
l’entreprise situés hors de France. La moyenne est de
six sites, soit un tiers des sites déclarés. Seulement une
Nous avons analysé la manière dont les firmes
grande entreprise française sur six de notre échantillon s’impliquent dans chacune des trois dimensions qui
ne compte aucun site hors de France. En revanche, le caractérisent ce que nous avons qualifié de modèle de
degré d’internationalisation de la RD&I diffère forte- l’innovation en réseau. Nous avons souligné la variément pour les autres entreprises. Près d’une entreprise té des engagements dans chaque dimension en idensur deux cumule un nombre de sites supérieur à cinq et tifiant des firmes non impliquées et des firmes engaun pourcentage de sites non français au moins égal à la gées. Parmi ces dernières nous avons distingué les
moyenne (c’est-à-dire un tiers). La composition du co- firmes selon le niveau de leur engagement qui peut
mité scientifique et la part des membres non français être très fort (G1), fort (G2) ou significatif (G3). Nous
complète cette analyse. Les trois quarts comportent des avons également pris en compte l’existence d’engageétrangers et, dans la moitié des cas, ils représentent plus ments modérés pour une seule dimension, les relations
du quart des membres.
avec la recherche publique (G4). Le tableau 2 résume les
Enfin, le degré d’internationalisation dans les colla- résultats auxquels nous sommes arrivés.
borations académiques est analysé à travers un indicaComment les firmes allient-elles ces différents
teur « dur », l’existence de laboratoires publics améri- engagements ? L’analyse met en avant un phénomène
cains dans les laboratoires avec lesquels l’entreprise massif. Il oppose clairement deux groupes équivacoopère. Le phénomène est important puisqu’il lents de firmes (tableau 3) : 43 firmes cumulent les enconcerne les deux tiers des entreprises de l’échantillon, gagements au moins significatifs alors que les 43 autres
avec en moyenne un laboratoire sur dix. La moitié des ont au minimum un engagement « faible » (traduit
entreprises déclarant des coopérations américaines, par leur appartenance au groupe des non-classés). Nous
atteignent ce taux.
allons examiner successivement ces deux groupes.
Comme pour les autres dimensions, nous avons
construit un indice global d’internationalisation de la RD&I. C’est la seule fois où une entreTABLEAU 3 – Le positionnement d'ensemble
prise atteint le maximum théorique de l’index.
des firmes vis-à-vis de l'innovation en réseau
L’index moyen est proche de la moyenne (8,5
Entreprises
sur 18) : suivant les points de vue on peut donc Caractéristiques
Total
%
considérer le verre comme à moitié plein ou à
Les
entreprises
ayant
adopté
le
modèle
en
réseau
moitié vide. Mais il est manifeste qu’un quart de
16
20
l’échantillon est déjà très largement internatio- P1 fort engagement dans les 3 dimensions
P2
2
engagements
forts
et
un
significatif
9
11
nalisé, qu’un autre quart est très avancé dans
P3
1
engagement
fort
et
2
significatifs
18
22
cette voie, alors même qu’un troisième quart
(dont des entreprises connues pour l’impor- Les entreprises à l'engagement déséquilibré
17
21
tance de leurs implantations internationales) P4 1 engagement faible
P5
2
engagements
faibles
10
12
avait choisi en 1999 de ne pas répondre aux
P6
3
engagements
faibles
12
15
questions concernant cet aspect. Il ne reste donc
Total
82
100
qu’un quart des grandes entreprises françaises à
THÈME
r
TABLEAU 2 – Les engagements des entreprises françaises
dans les trois dimensions du modèle en réseau de l'innovation
G1
G2
G3
G4
Total
NC/NR
Total
Relations avec la recherche publique
Coopérations industrielles
19
23
12
19
12
19
16
0
59
61
23
21
82
82
Gestion stratégique
17
20
17
0
54
28
82
Total des engagements
59
51
48
16
174
72
246
NC : non classé. NR : non réponse.
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Les entreprises ayant adopté
le modèle en réseau de l’innovation
THÈME
Ces 43 firmes se répartissent en trois niveaux différents d’engagements.
Un premier groupe est constitué de 16 firmes (20 %
de l’échantillon total, groupe P1, tableau 3) qui sont systématiquement « fortement » ou « très fortement » engagées dans chacune des dimensions. Quasiment toutes
(13 sur 16) ont fortement internationalisé leur RD&I. Ce
positionnement est le résultat d’importantes évolutions.
On ne peut pas préjuger du cheminement des 3 firmes
parmi les 16 qui sont des répondants récents. Les 13 autres firmes font partie du cœur de l’enquête, ce qui permet de suivre leur évolution. Seulement 4 étaient déjà
dans cette situation lors de la première enquête. Ce
n’était pas le cas des 9 autres qui ont fait évoluer leur positionnement relatif dans une dimension (6 firmes),
voire dans deux (3 firmes). Ces évolutions concernent les
trois dimensions de façon égale (4 cas d’évolution pour
chaque dimension), une donnée qui, plus que toute
autre, rend compte de la spécificité des trajectoires,
chaque firme définissant, en regard de ses choix passés,
les transformations qu’elle privilégie.
Le deuxième groupe est constitué de firmes qui associent deux engagements forts ou très forts avec un engagement significatif (groupe P2, tableau 3). Dans ce
groupe plus petit (9 firmes, 11 % de l’échantillon total),
l’internationalisation de la RD&I est également très
avancée (7 firmes sur 9). Quasiment toutes ces firmes
font partie du cœur de l’échantillon (8 sur 9). Ce
deuxième groupe compte très peu d’entreprises qui
ont conservé le même positionnement sur la période.
Il est marqué par des mouvements simultanés de
moindre et de plus forte évolutions que l’ensemble des
firmes. Contrairement aux firmes précédentes, les firmes
de ce deuxième groupe partagent en grande part la
même trajectoire : l’engagement plus marqué au fil
du temps dans les relations avec la recherche publique va de pair avec une évolution moins rapide des
modalités organisationnelles de la prise en charge de
la RD&I, alors que l’engagement dans les coopérations
industrielles (souvent simplement significatif) demeure
stable sur la période.
Les autres entreprises qui manifestent au moins trois
engagements significatifs sont au nombre de 11. Nous
avons choisi de leur associer 7 entreprises qui associent à
deux engagements forts un troisième engagement modéré qui concerne les relations avec la recherche publique (ce qui correspond au groupe 4 du tableau 3). La
plupart des entreprises de ce troisième groupe (P3, tableau 3) manifeste au moins un engagement fort. Ces
19 engagements forts illustrent les choix opérés par les
entreprises pour s’engager dans le modèle en réseau de
l’innovation. La moitié des firmes a favorisé les coopérations industrielles, pendant que l’autre moitié a mis l’accent sur la gestion stratégique de la RD&I. Il est à noter
qu’il n’y a quasiment pas d’engagement fort dans les relations avec la recherche publique (3 firmes seulement).
La part des entreprises du cœur dans ce groupe est nettement moins importante (8 sur 18). L’analyse des trajectoires est donc limitée à une partie seulement des firmes
de ce groupe. Malgré cette limite, il nous semble important d’en mentionner les conclusions car, contrairement
aux deux autres groupes, l’évolution de ces entreprises
cœur est plus contrastée : la moitié est là parce qu’elles
n’ont pas fait évoluer au même rythme que les autres entreprises de ces trois groupes leurs coopérations industrielles ou leur gestion stratégique de la RD&I.
Le tableau 4 fournit une vision d’ensemble de ces
trois groupes. Ils représentent la moitié de l’échantillon
et les trois quarts des engagements identifiés dans les
trois dimensions du modèle en réseau de l’innovation.
Ce tableau met en exergue le glissement qui s’opère
entre les groupes : le premier (P1), avec 20 % des entreprises, canalise 56 % des engagements « très forts » sur
l’ensemble des dimensions, avec seulement quelques
engagements seulement « significatifs », alors que c’est
l’inverse pour le troisième (groupe P3) qui, avec 22 % des
entreprises, canalise 53 % des engagements « significatifs » ou « modérés ». Le groupe médian (P2) a comme
caractéristique de peser approximativement son poids
dans toutes les dimensions.
TABLEAU 4 – Positionnement global des firmes
et engagements forts par dimension
Les autres entreprises
de l’échantillon
Positionnement global
des entreprises
P1
G1
56 %
G2
25 %
G3 + G4
3%
Total
27 %
P2
12 %
18 %
16 %
15 %
P3
8%
29 %
53 %
31 %
22 %
27 %
28 %
26 %
100 %
100 %
100 %
100 %
P4 et P5
Total
LECTURE – Pour chaque groupe de positionnement des firmes (groupes P1 à P5) est mentionné
en colonnes le pourcentage d'engagements très forts (G1), forts (G2), significatifs ou modérés
(G3 + G4) des firmes qui le composent. Le groupe P1 rassemble ainsi 56% des engagements
très forts notés dans les trois dimensions, alors qu'il ne représente que 27% du total des
engagements des 82 firmes de l'échantillon.
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Ces autres entreprises se caractérisent par un engagement déséquilibré
(33 %) ou par des engagements systématiquement faibles (15 %). La part
des entreprises « ponctuelles »
(c’est-à-dire n’ayant répondu qu’une
ou deux fois) est dominante (les trois
quarts de ces autres entreprises). Il faut
y voir un effet massif du « mauvais
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THÈME
classement » qui n’incite pas
TABLEAU 5 – Les engagements des « autres » entreprises
les entreprises à répondre
Avec
Dans
Dans
l’année suivante.
Engagements identifiés (1)
recherche
coopération
la gestion
Le tableau 4 souligne deux
Firmes
publique
industrielle
en réseau
phénomènes complémentai- Groupe 4
17
12 (5)
12 (10)
10 (5)
res : ces entreprises qui repré- Groupe 5
10
2 (1)
7 (6)
1 (1)
sentent le tiers de l’échantillon Total
27
14 (6)
19 (16)
11 (6)
total, canalisent le quart des % dans le total des
24 % (19 %)
31 % (38 %)
20 % (16 %)
engagements marqués. Ce engagements de ce type
(1)
Entre
parenthèses,
engagements
forts
ou
très
forts.
chiffre bouge peu, qu’il s’agisse
des engagements très forts,
forts ou significatifs. Il n’y a donc pas un moindre enga- des trois quarts des firmes à simultanément s’engager
gement (qui serait par exemple concentré sur les enga- dans ces trois dimensions. L’analyse des firmes nous
gements significatifs ou modérés), mais bel et bien des ayant répondu régulièrement (le « cœur » de l’échantilengagements déséquilibrés, l’accent étant exclusive- lon : 39 firmes dont 29 font partie de ce premier enment mis sur l’une ou l’autre dimension de l’innovation semble), montre que ceci est le résultat d’une transforen réseau. Visiblement (tableau 5), ces firmes ont avant mation de leur engagement. Environ le quart d’entre
tout mis l’accent sur les coopérations industrielles avec elles n’a pas vu évoluer sa position relative entre 1995 et
les clients et les fournisseurs, alors que la gestion en ré- 20008. Une firme sur cinq du cœur de l’échantillon a
seau constitue une barrière difficile à surmonter. L’ana- vu son positionnement relatif s’altérer dans une dimenlyse des quelques firmes du cœur de l’échantillon tend à sion parce qu’elle n’a pas fait évoluer au même rythme
confirmer cette analyse, les engagements forts, souvent que les autres firmes son engagement dans ce domaine
obtenus tôt dans la période étudiée, restant dans la plu- (il s’agit alors soit de la prise en charge stratégique de la
part des cas, ensuite stables.
RD&I, soit des coopérations industrielles), mais parmi
ces firmes, la moitié a contrebalancé cet engagement
La prise en charge de la RD&I
moindre par un engagement plus fortement marqué
dans les grandes entreprises :
dans une, voire les deux autres dimensions. Cela sourécapitulatif
ligne un deuxième fait massif : plus de la moitié des firmes du cœur de l’échantillon (16 sur 29) ont accru leur
Trois premiers enseignements se dégagent de cette engagement dans les dimensions historiquement moins
analyse.
marquées de leur prise en charge de la RD&I. L’analyse
Le modèle en réseau de l’innovation met en avant la de leurs engagements plus marqués (19) se répartit égacapacité de l’entreprise à s’engager dans des coopéra- lement entre les trois dimensions (respectivement 9, 5 et
tions industrielles (d’abord avec ses clients et ses fournis- 6 cas), montrant à quel point il serait erroné de mettre en
seurs), à participer à la science en train de se faire (pour avant des processus types, et donc, combien la dynase garantir l’accès à temps aux nouvelles technologies mique est propre à chaque firme, ancrée à la fois dans ses
qui s’avèreront cruciales pour ses produits ou processus choix historiques et dans ses arbitrages stratégiques
de production de demain) et à introduire l’innovation récents.
dans toute l’entreprise (et plus la réserver à un groupe
Ces changements ne doivent pas occulter le fait que
spécialisé et isolé de concepteurs). Il conduit donc à pri- le modèle en réseau de l’innovation n’est pas considéré
vilégier l’équilibre des engagements sur l’excellence comme pertinent pour une firme sur deux. Même lorsdans une ou deux dimensions. Pour le dire autrement, qu’on tient compte des firmes aux réponses trop partieldes firmes très engagées dans les coopérations avec la re- les pour qu’on puisse en inférer une quelconque conclucherche publique et les industriels, mais pas organisées sion, il reste plus d’une firme sur trois à être dans cette
pour gérer stratégiquement leurs investissements de situation. L’analyse tend à montrer qu’elles sont ainsi
RD&I, ne seront pas considérées comme cohérentes dans positionnées non pas parce qu’elles ne se sont pas engaleurs choix. Mais dès lors qu’on accepte cette approche, gées dans un tel mouvement, mais plutôt parce qu’elles
et si on fait l’hypothèse d’une certaine représentativité de
N OTE
l’échantillon, on est conduit à souligner un premier résultat massif : en 1999, une grande entreprise française
sur deux avait adopté le modèle en réseau de l’innova8. Cela ne signifie pas qu’elles sont restées immobiles, elles ont suivi le mouvement général des ention pour conduire son effort de recherche, de développegagements qui a conduit à un renforcement
ment et d’innovation.
progressif des critères qui marquent le « fort » ou
Ce résultat est le fruit d’une évolution rapide, puis« très fort » engagement dans chaque dimension.
qu’en 1995 la première enquête soulignait les difficultés
35
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engagements forts (P2) et à près de 5 pour les firmes à
très fort engagement (P1). Ces moyennes masquent partiellement la dispersion observée des situations. Lorsqu’on répartit la population des firmes selon l’importance des investissements consacrés (plus de 3 milliards
de francs, entre 1 et 3 milliards, 500 millions à 1 milliard, moins de 500 millions), la population des firmes
ayant adopté le modèle en réseau de l’innovation se répartit également entre ces quatre situations (respectiveMODÈLE EN RÉSEAU
ment 26 %, 22 %, 26 % et 26 %, tableau 7). Il n’y a pas non
DE L’INNOVATION
plus de différence marquée dans le nombre relatif de firmes organisées en réseau dès lors que l’effort de RD&I
La question est alors de savoir si l’adoption ou non dépasse 500 millions de francs (on trouve toujours, pour
du modèle en réseau de l’innovation est lié à certaines chacun des groupes de taille, plus des deux tiers des fircaractéristiques des firmes. Cela dépend-il des secteurs mes organisées en réseau). La seule différence forte tient
d’activité ? Y a t-il un lien avec l’intensité en RD&I des dans la part des firmes dont l’investissement en RD&I est
activités ou la propension à breveter, comme le suppo- inférieur à 500 millions et qui ne sont qu’un tiers à s’être
sent les études quantitatives mentionnées en introduc- organisées en réseau (qui plus est, rares sont celles qui
tion ? Pour apporter des éléments de réponse à ces ques- sont « fortement » ou « très fortement » engagées).
La même analyse peut être faite pour l’intensité en
tions nous avons croisé le positionnement des firmes
avec les données quantitatives traditionnelles. L’analyse RD&I des firmes (tableau 6) : la part du chiffre d’affaire
porte sur 75 des 82 firmes de l’échantillon (tableau 6). qui est consacrée à la recherche, au développement et à
Premier élément, il semble indéniablement y avoir l’innovation est proche de 8 % pour le groupe des firmes
une relation entre positionnement des firmes vis-à-vis très fortement engagées, voisine de 6 % pour celui des firdu modèle en réseau de l’innovation et importance de mes fortement engagées et inférieur à 4 % pour celui des
l’effort de RD&I : on passe ainsi de 500 millions de firmes significativement engagées. On retrouve exactefrancs pour le groupe des engagements significatifs (P3) ment la même hiérarchie pour les trois groupes des autres firmes (P4 à P6), montrant par là même qu’il n’y a
à 1,5 milliards de francs pour le groupe des
pas de relation directe entre intensité en
RD&I de la firme et positionnement de
TABLEAU 6 – Données quantitatives sur les firmes de l'échantillon
la firme vis-à-vis du modèle en réseau
Coût
de l’innovation en réseau. Pour le vériGroupe
Nombre
RD&I
Nombre
d'un brevet
fier, nous avons réparti la population en
d'innovation
de firmes (millions de F) RD&I/CA (%)
de brevets (millions de F)
quatre niveaux d’intensité (plus de
P1
16
4 670
7,7
261
42
10 % du chiffre d’affaire, entre 5 et 10 %,
P2
9
1 460
6,3
222
42
entre 2 et 5 % et moins de 2 %). Pour les
P3
17
600
3,8
36
41
trois groupes de firmes dont le ratio est
P4
16
1 530
8,3
61
46
supérieur à 2 %, les firmes organisées en
P5
10
790
5,3
107
12
réseau représentent autour de 60 % du
P6
7
170
2,8
42
15
total. Seul le groupe des intensités faibles
Total
75
1 870
6,0
122
33
(moins de 2 % du chiffre d’affaire consacré à la RD&I) se situe à un niveau signiTABLEAU 7 – Firmes ayant adopté le modèle en réseau
ficativement inférieur (moins de 45 %).
de l'innovation et volume de RD&I
Cela vient confirmer la première concluVentilation
sion : en deçà d’un certain seuil (absolu
% des « firmes
ou relatif), la RD&I a plus de mal à être
organisées
de « firmes
Nombre
organisées en réseau »
considérée comme stratégique pour
(%)
RD&I
de firmes
% en réseau »
l’avenir de l’entreprise.
> 3 milliards de F
15
20
73
26
Si les volumes de RD&I ou l’intenEntre 1 et 3 milliards de F
13
17
69
22
sité en RD&I ne traduisent que très parEntre 500 millions et 1 milliard de F
13
17
85
26
tiellement le choix stratégiques opérés,
< 500 millions de F
34
45
32
26
qu’en est-il alors de la propension à breTotal
75
100
56
100
veter ? Pour ce faire nous avons repris de
LECTURE – Pour simplifier la présentation, on dénommera « firmes organisées en réseau »
BOWONDER and al., le coût moyen de la
les firmes ayant adopté le modèle en réseau de l'innovation (et donc parties prenantes
des groupes P1, P2 et P3 de notre classification, cf. tableau 3).
prise d’un brevet (dépenses de RD&I
ont volontairement focalisé leur attention sur une seule
des dimensions du modèle en réseau de l’innovation.
C’est pourquoi il nous a semblé, dernier élément de cette
analyse, indispensable de nous interroger sur les raisons
qui favorisent ou limitent l’adoption du modèle en réseau de l’innovation par les firmes.
THÈME
r
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mardi 18 septembre 2001 15:41:17
Éducation & formations – n° 59 – avril-juin 2001
divisée par le nombre de brevets ramené à l’année ; matériaux : les entreprises françaises de la « vieille » économie se sont largement adaptées aux conditions noumoyenne : 33 millions de F).
On observe comme pour l’enquête des 300 firmes velles ! Il est également clair que l’adoption du modèle
globales de BOWONDER, la même dispersion (répartis en en réseau de l’innovation est d’autant plus rapide à faire
quatre catégories de taille égale, les coûts moyens des fir- que les entreprises se situent dans des secteurs où l’une
mes prenant des brevets varient de 7 à 83 millions de des deux incertitudes majeures de l’innovation est relatifrancs pour les deux groupes extrêmes, tableau 8). Cette vement moins présente : moins d’incertitudes sur les
dispersion est avant tout intrasectorielle puisque, hormis marchés pour la pharmacie et la santé, moins d’incertiles matériaux, les coûts moyens sectoriels oscillent entre tudes sur la technique pour les entreprises de matériaux,
27 et 42 millions de francs (tableau 9). Le même phéno- la construction, les services d’environnement ou de
mène est observé pour les trois groupes de firmes organi- transport. Mais ces données manifestent avant tout la
sées en réseaux (P1 à P3, tableau 6). Ces trois groupes transversalité des engagements dans le modèle en réseau
partagent le même coût moyen (41-42 millions de de l’innovation : on trouve des firmes « fortement » ou
francs) avec une très forte dispersion interne. Qui plus « très fortement » positionnées en nombre significatif
est, la ventilation des firmes organisées en réseau dans (au moins 30 % du total) dans tous les secteurs.
Les conclusions s’imposent donc d’elles mêmes. Le
les quatre catégories de coûts reproduit quasiment
celle de l’ensemble des firmes qui brevètent (tableau 8). seul effet notable des moyens financiers, qu’il s’agisse
Il n’y a donc aucune relation entre la manière dont les des volumes ou de l’intensité de la RD&I, sur l’adoption
firmes s’organisent et le coût moyen des brevets comme du modèle en réseau de l’innovation est celui de l’existence d’un seuil en deçà duquel cette adoption semble
le suggère BOWONDER.
Dernier élément, nous avons positionné les firmes plus difficile à mener. Les brevets apparaissent comme
selon leurs activités principales. Le petit nombre de un support de plus en plus nécessaire dans la construcfirmes (75) nous a conduit à regrouper les firmes en tion de la spécificité des actifs d’une firme, quelle que soit
sept secteurs principaux qui partagent, lorsqu’on uti- la manière dont celle-ci conduit son effort de RD&I sur
lise les données de BOWONDER, des caTABLEAU 8 – Firmes ayant adopté le modèle en réseau
ractéristiques communes (notamment
de l'innovation et propension à breveter
en terme de taille et d’intensité en
R&D). Alors que pour l’ensemble de la
Ventilation
Ventilation
des « firmes
population la part des firmes organi- Coût des brevets
Coût moyen
des firmes
organisées
sées en réseau est juste supérieure à
(millions de F)
qui brevètent
en réseau »
83
29 %
31 %
50 %, elle est plus proche d’un tiers > 50 millions de F
37
21 %
28 %
pour deux secteurs représentant le Entre 25 et 50 millions de F
De 15 à 25 millions de F
20
24 %
24 %
quart de l’échantillon, elle est voisine < 15 millions de F
7
26 %
17 %
de 50 % pour les firmes productrices de Total
33
100 %
100 %
matériels de transport, et celles de
l’électronique, de l’informatique et des téléTABLEAU 9 – Firmes ayant adopté le modèle
communications,
en réseau de l'innovation et secteurs d'activité
alors qu’elle dépasse
Part des
les deux tiers pour la
Nombre
Coût
« firmes
Secteurs d'activité
de
RD&I/CA
d'un brevet
organisées
chimie, la pharmacie,
firmes
(%)
(millions de F)
en réseau »
les matériaux, l’énergie
Pharmacie/chimie
17
10,4
39
70 %
et les services liés aux
Équipements et services industriels
8
4,9
27
37 %
transports et à l’enviÉnergie, services de transport
ronnement (tableau 9). et d'environnement
11
0,9
32
73 %
Ces données souli- Matériels de transport
8
7,1
42
50 %
gnent d’abord qu’un Produits « grand public » (y compris IAA) (1)
10
3,4
27
30 %
domaine comme celui Matériaux et construction
9
1,1
18
66 %
des technologies de Secteur des TIC
12
10,3
42
42 %
l’information et de la Total
75
6,0
33
56 %
communication ne se (1) IAA : industries agroalimentaires.
distingue en rien de Note sur la composition sectorielle – On a regroupé : – les producteurs de biens d'équipement et ceux qui
domaines plus tradi- fournissent aux industriels des services intensifs en technologie (comme le logging pétrolier) ; – les pétroliers,
opérateurs de transport et fournisseurs de services collectifs (eau, déchets, etc.) ; – l'automobile
tionnels comme l’au- grands
et le secteur aérospatial ; – l'ensemble des produits grand public (cosmétique, lunettes, matériels de loisirs)
tomobile ou les et les IAA ; – les producteurs de matériaux (aciers, aluminium, ...) et les entreprises de BTP.
Éducation & formations – n° 59 – avril-juin 2001
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laquelle ils ne disent rien. Enfin, s’il y a des différences
sectorielles, elles n’apparaissent pas liées, du moins pour
les grandes entreprises françaises, à la plus ou moins
grande « nouveauté » des secteurs, pas plus qu’à l’intensité de leur recours à la science et à la technologie en
train de se faire. Ces résultats donnent d’autant plus de
poids aux aspects soulignés précédemment, à savoir la
spécificité des trajectoires des entreprises.
nnn
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Nous retirons de l’enquête conduite pendant cinq
ans sur un échantillon de grandes entreprises trois conclusions principales.
La première est méthodologique. En se dotant d’un
questionnaire simple, bâti à l’image de ce que pourrait
être un « volet innovation » du bilan annuel des firmes,
on obtient une vision de l’innovation très différente de
celle que nous fournissent les travaux focalisés sur ce qui
devient une véritable tyrannie des deux chiffres supposés
« clés » de l’innovation (volume ou pourcentage du
chiffre d’affaires et brevets).
La deuxième tient à l’importance des mouvements
qui ont eu lieu au cours de ces cinq dernières années
dans la prise en charge de la recherche, du développement et de l’innovation par les grandes firmes françaises. Parmi les grandes tendances qui se dégagent, les
plus marquées concernent les coopérations avec les partenaires verticaux (clients ou fournisseurs et souvent les
deux), les coopérations de recherche (associée à une externalisation grandissante), la prise en charge au niveau
de la direction générale des enjeux liés à la recherche et à
l’innovation, enfin une internationalisation massive des
activités de RD&I des grandes firmes françaises. Le modèle en réseau de l’innovation, appuyé sur une généralisation des coopérations tant avec d’autres firmes qu’avec
la recherche publique, et rendu possible par la pénétration de ces activités à tous les niveaux de l’entreprise (de
la direction générale aux unités proches du terrain), est
maintenant adopté par la moitié des grandes firmes
françaises.
Troisièmement, ces mouvements apparaissent très
largement liés aux dynamiques propres des firmes plus
qu’aux secteurs ou marchés sur lesquels elles se positionnent (même si ces marchés favorisent plus ou moins
les partenariats). Dans ces transformations, l’histoire
des firmes joue un rôle central (tel le poids des laboratoires centraux ou la jeunesse de l’organisation de la
RD&I), tout comme les choix stratégiques qu’elles opèrent. Ces deux dimensions, l’histoire et la stratégie, renforcent l’aspect spécifique des trajectoires et rendent difficile la mise en évidence de dynamiques typiques
d’évolution.
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Enfin, nous avons un regret, celui de n’avoir pu mener d’analyse systématique des performances des firmes
en regard des choix opérés de conduite de leur RD&I,
même si La Tribune puis L’Expansion ont plusieurs fois
souligné que les « palmarès » effectués par les revues
avaient anticipé des performances boursières ou économiques reconnues. n
Remerciements
Nous tenons à remercier vivement notre collègue
Michel CALLON avec qui ce travail a été entrepris, et
le Centre de sociologie de l’innovation grâce auquel ce
travail a pu être réalisé. L’enquête n’aurait pas été possible sans la volonté et l’implication de Christian DAVID
(La Tribune puis L’Expansion), Olivier POSTEL-VINAY
et Sophia MALEK (La Recherche). Nous les remercions
vivement de la confiance qu’ils nous ont accordée.
Michèle CRANCE (UNIPS-CNRS), Martine LECŒUR
(GMV-Conseil), Rémi BARRÉ (OST) et Olivier RHODES
(ORC Consultants) ont activement participé à sa réalisation. Nous tenons à les remercier, ainsi que tous
ceux qui, dans les entreprises, se sont impliqués dans
cette opération.
Les publications de l’enquête
M. CALLON et P. LARÉDO, « Le palmarès des
entreprises qui innovent », La Recherche, n° 282,
1995, pp. 78-82.
M. CALLON et P. LARÉDO, « Le palmarès des
entreprises qui innovent », La Recherche, n° 294,
1997, pp. 22-27.
M. CALLON, P. LARÉDO et P. MUSTAR,
« Le palmarès des entreprises qui innovent »,
La Recherche, n° 315, 1998, pp. 104-107.
C. DAVID (coordonné par), « Le palmarès
des entreprises qui innovent », La Tribune,
28 novembre 1995, 8 janvier 1997,
10 décembre 1997 et 9 décembre 1998.
C. DAVID (coordonné par), « Les champions
français de l’innovation », L’Expansion, n° 610,
1999, pp. 44-57.
O. POSTEL-VINAY, « Le palmarès des entreprises
qui innovent », La Recherche, n° 304, 1997,
pp. 102-104.
P. LARÉDO ET P. MUSTAR, « Le palmarès des
entreprises qui innovent », La Recherche, n° 326,
1999, pp. 82-84.
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À LIRE
M. AKRICH, M. CALLON, et B. LATOUR, « À quoi tient le succès des innovations » Gérer et comprendre, 12, 1988.
B. BOWONDER, S. YADAV and B. SUNIL KUMAR, “R&D Spending Patterns of Global Firms”, Research Technology
Management, 43, issue 5, 2000, pp. 40-56.
M. CALLON, « Réseaux technico-économiques et irréversibilité » in R. BOYER (dir.), Figures de l’irréversibilité en
économie, Paris, Ed. EHESS, 1991.
M. CRANCE, « Publications : les onze ténors », La Recherche, n° 326, 1999, p. 85.
L. DIBIAGGIO, (sous la direction de), « Économie de la connaissance », Revue d’Économie Industrielle, n° 88,
1999.
J. HAGEDOORN and J. SCHAKENRAAD, “Interfirm Partnerships and Co-operative Strategies in Core Technologies”,
in C. FREEMAN and L. SOETE (ed.), New Explorations in the Economics of Technical Change, London, Pinter
Publishers, 1990.
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